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13/11/2014 | FRANCE | N°13LY01881

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 13 novembre 2014, 13LY01881


Vu la requête, enregistrée le 16 juillet 2013, présentée pour M. A... D..., domicilié ...;

M. D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005020 du tribunal administratif de Grenoble du 14 mai 2013 par lequel le tribunal a rejeté sa demande dirigée contre le permis de construire que le préfet de la Drôme a tacitement délivré à M. B...le 13 novembre 2002, en vue de l'édification de deux éoliennes sur le territoire de la commune de La Répara-Auriples, et des arrêtés des 12 mai 2003, 12 décembre 2007 et 3 janvier 2008 par lesquels le préfet a transfé

ré ce permis tacite ;

2°) à titre principal, de dire et juger que le permis de co...

Vu la requête, enregistrée le 16 juillet 2013, présentée pour M. A... D..., domicilié ...;

M. D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005020 du tribunal administratif de Grenoble du 14 mai 2013 par lequel le tribunal a rejeté sa demande dirigée contre le permis de construire que le préfet de la Drôme a tacitement délivré à M. B...le 13 novembre 2002, en vue de l'édification de deux éoliennes sur le territoire de la commune de La Répara-Auriples, et des arrêtés des 12 mai 2003, 12 décembre 2007 et 3 janvier 2008 par lesquels le préfet a transféré ce permis tacite ;

2°) à titre principal, de dire et juger que le permis de construire tacite du 13 novembre 2002 a été retiré et est devenu caduc puis, en conséquence, de constater l'illégalité des arrêtés de transfert des 12 décembre 2007 et 3 janvier 2008 ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler ce permis de construire tacite et les arrêtés de transfert des 12 mai 2003, 12 décembre 2007 et 3 janvier 2008 ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. D...soutient que :

- contrairement à ce que le tribunal a estimé, les conclusions qu'il a présentées à l'encontre du permis de construire tacite du 13 novembre 2002 ne sont pas tardives ;

- il dispose d'un intérêt à agir à l'encontre des décisions attaquées ;

- à titre principal, le permis de construire tacite litigieux a été retiré en raison de l'obtention par la même personne, sur le même terrain et pour un même projet du permis de construire du 23 octobre 2004, lequel est devenu définitif ;

- subsidiairement, le permis de construire tacite litigieux est illégal, en l'absence de toute consultation de la société qui exploite des pipelines à proximité du terrain d'assiette du projet, du fait des dangers pour la sécurité des personnes et des biens résultant de cette proximité, du non-respect du délai normal d'instruction quand une autorisation de défrichement est nécessaire, de l'absence au dossier de la demande de permis de cette autorisation, de l'absence de mise à disposition du public de l'étude d'impact et, enfin, du caractère insuffisant de cette étude, qui ne mentionne pas sa maison d'habitation, dont l'étude mammalogique est insuffisante et ne comporte pas de véritable volet acoustique ;

- les arrêtés de transfert en litige sont illégaux en raison du retrait du permis de construire tacite du 13 novembre 2002 ou de l'illégalité de ce permis ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 septembre 2013, présenté pour la société Bellane Energie, qui demande à la cour :

- de rejeter la requête ;

- de condamner M. D...à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société Bellane Energie soutient que :

- la requête, qui n'est pas suffisamment motivée, est par suite irrecevable ;

- contrairement à ce que soutient le requérant, c'est à juste titre que le tribunal a estimé que les conclusions dirigées contre le permis de construire tacite du 13 novembre 2002 sont tardives ;

- en tout état de cause, la demande, qui a été enregistrée au tribunal plus d'un an après la date d'achèvement des travaux, est de ce fait irrecevable, en application de l'article R. 600-3 du code de l'urbanisme ;

- M.D..., dont l'intérêt à agir doit être apprécié à la date d'affichage de la demande de permis en mairie, en application de l'article L. 600-1-3 du code de l'urbanisme, ne démontre pas disposer d'un tel intérêt à l'encontre du permis de construire en litige ;

- les moyens invoqués à l'encontre du permis de construire tacite litigieux ne sont pas fondés ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 11 octobre 2013, la clôture de l'instruction a été fixée au 13 novembre 2013 ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 novembre 2013, présenté pour M.D..., tendant aux mêmes fins que précédemment ;

M. D...soutient, en outre, que :

- sa requête est suffisamment motivée ;

- sa demande devant le tribunal n'ayant pas été enregistrée plus d'un an après la date d'achèvement des travaux, l'article R. 600-3 du code de l'urbanisme ne lui est pas opposable ;

- son intérêt à agir ne peut être apprécié au regard des dispositions des articles

L. 600-1-2 et L 600-1-3 du code de l'urbanisme, qui sont entrées en vigueur après l'enregistrement de sa demande devant le tribunal et de sa requête d'appel ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 8 novembre 2013, la clôture de l'instruction a été reportée au 11 décembre 2013 ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 novembre 2013, présenté pour le ministre de l'égalité des territoires et du logement, qui demande à la cour de rejeter la requête ;

La ministre soutient que :

- contrairement à ce que soutient le requérant, c'est à juste titre que le tribunal a estimé que les conclusions dirigées contre le permis de construire tacite du 13 novembre 2002 et l'arrêté de transfert du 8 janvier 2008 sont tardives ;

- en outre, la demande, qui a été enregistrée au tribunal plus d'un an après la date d'achèvement des travaux, est en conséquence irrecevable, en application de l'article R. 600-3 du code de l'urbanisme ;

- M. D...ne justifie d'aucun intérêt à agir ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 décembre 2013, présenté pour la société Bellane Energie, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 décembre 2013, présenté pour M.D..., tendant aux mêmes fins que précédemment ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 10 janvier 2014, la clôture de l'instruction a été reportée au 6 février 2014 ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 février 2014, présenté pour M. D...qui, n'apportant aucun élément nouveau, n'a pas été communiqué ;

Vu le courrier du 17 septembre 2014, par lequel la cour, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, a informé les parties qu'elle envisage de relever d'office le moyen tiré de ce qu'il ne lui appartient pas de " dire et juger " que le permis de construire tacite du 13 novembre 2002 a été retiré et est devenu caduc ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 octobre 2014, par lequel M. D...a répondu à cette communication de la cour ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 27 octobre 2014 , présentée pour M.D... ;

Vu la directive 85/337/CEE du Conseil du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 pris pour l'application de l'article 2 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 2014 :

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de Me Dollet, avocat de M.D..., et celles de Me C...représentant Volta avocats, avocat de la société Bellane Energie ;

1. Considérant que le préfet de la Drôme a tacitement délivré le 13 novembre 2002 à M. B...un permis de construire, en vue de l'édification de deux éoliennes sur le territoire de la commune de La Répara-Auriples ; que, par un arrêté du 12 mai 2003, le préfet a transféré ce permis à la société Albatros Energie ; qu'en juillet 2004, celle-ci a présenté une demande en vue de la construction d'une seule éolienne sur un terrain inclus dans le terrain d'assiette dudit permis tacite ; que le préfet de la Drôme n'ayant pas répondu à cette demande, un nouveau permis de construire tacite est né le 23 octobre 2004 ; qu'après la délivrance de ce second permis, par deux arrêtés des 12 décembre 2007 et 3 janvier 2008, le préfet a transféré le permis du 13 novembre 2002, une première fois par erreur à la société Bellane Industrie, puis à la société Bellane Energie ; que M.D..., qui possède depuis le mois d'avril 2008 un terrain supportant un groupe de constructions situé à environ 600 mètres des deux projets précités, a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler le permis de construire tacite du 13 novembre 2002, ainsi que les arrêtés successifs de transfert de ce permis, pris les 12 mai 2003, 12 décembre 2007 et 3 janvier 2008 ; que, par un jugement du 14 mai 2013, le tribunal a estimé qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre les arrêtés de transfert des 12 mai 2003 et 12 décembre 2007, qui sont devenues sans objet, et que les conclusions dirigées contre le permis tacite et le dernier arrêté de transfert du 3 janvier 2008 sont tardives et, par suite, irrecevables ; que M. D...relève appel de ce jugement ;

Sur la recevabilité de la requête :

2. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, la requête doit, à peine d'irrecevabilité, contenir l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge ; que la requête de M. D...ne constitue pas la réitération pure et simple de ses écritures de première instance ; que, contrairement à ce que soutient la société Bellane Energie, cette requête, qui satisfait ainsi aux prescriptions de cet article, est dès lors suffisamment motivée ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation du permis de construire tacite

du 13 novembre 2002 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 490-7 du code de l'urbanisme, alors applicable : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'un permis de construire court à l'égard des tiers à compter de la plus tardive des deux dates suivantes : / a) Le premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées, selon le cas, au premier ou au deuxième alinéa de l'article R. 421-39 ; / b) Le premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage en mairie des pièces mentionnées au troisième alinéa de l'article R. 421-39. / (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-39 du même code, alors applicable : " Mention du permis de construire doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de la décision d'octroi et pendant toute la durée du chantier. / Il en est de même lorsqu'aucune décision n'a été prise à l'égard de la demande de permis de construire dans le délai imparti, d'une copie de la lettre de notification de délai (...). / En outre, dans les huit jours de la délivrance expresse ou tacite du permis de construire, un extrait du permis ou une copie de la lettre visée à l'alinéa précédent est publié par voie d'affichage à la mairie pendant deux mois (...). / (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que lorsqu'aucune décision n'a été prise à l'égard de la demande de permis de construire dans le délai imparti, une copie de la lettre de notification du délai d'instruction adressée par l'autorité compétente doit, d'une part, être affichée sur le terrain par les soins du bénéficiaire et, d'autre part, être publiée par voie d'affichage à la mairie ; que la formalité de l'affichage, qui constitue le point de départ du délai de recours contentieux, ne peut être réputée accomplie qu'à l'expiration d'un délai de deux mois, lequel commence à courir à compter de la date à laquelle le dernier de ces affichages a été réalisé ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le seul document susceptible d'établir que la lettre de notification du délai d'instruction a été affichée à la mairie de la commune de La Répara-Auriples est un certificat du maire de cette commune, établi le 25 avril 2003 ; qu'aucune des mentions de ce certificat ne peut permettre d'identifier le permis en cause ; que, dans ces conditions, à supposer même que ladite lettre aurait été régulièrement affichée sur le terrain d'assiette du projet, le délai du recours contentieux courant à l'encontre du permis en litige n'a pu commencer à courir ; que, s'il est vrai que la société Bellane Energie soutient que M. D...a manifesté une connaissance acquise de ce permis, en assistant le 22 octobre 2009 aux travaux de construction des éoliennes et en indiquant en outre lui-même avoir constaté la réalisation de ces travaux dès le 15 octobre 2009, ces circonstances ne peuvent être regardées comme valant connaissance acquise du permis, susceptible de déclencher le délai de recours ; qu'ainsi et contrairement à ce que le tribunal administratif de Grenoble a estimé, les conclusions tendant à l'annulation de ce permis ne sont pas tardives ;

6. Considérant toutefois que le ministre de l'égalité des territoires et du logement et la société Bellane Energie soutiennent que doit être opposé à ces conclusions le délai de forclusion d'un an prévu par l'article R. 600-3 du code de l'urbanisme ; qu'aux termes de cet article : " Aucune action en vue de l'annulation d'un permis de construire ou d'aménager ou d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable n'est recevable à l'expiration d'un délai d'un an à compter de l'achèvement de la construction ou de l'aménagement. / Sauf preuve contraire, la date de cet achèvement est celle de la réception de la déclaration d'achèvement mentionnée à l'article R. 462-1. " ; qu'aux termes de ce dernier article : " La déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux est signée par le bénéficiaire du permis de construire (...) ou par l'architecte ou l'agréé en architecture, dans le cas où ils ont dirigé les travaux. / Elle est adressée par pli recommandé avec demande d'avis de réception postal au maire de la commune ou déposée contre décharge à la mairie. (...). / Le maire transmet cette déclaration au préfet lorsque (...) le permis a été pris au nom de l'Etat (...). " ;

7. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsqu'une autorisation de construire relative à des travaux achevés à compter du 1er octobre 2007 est contestée par une action introduite à compter de la même date, celle-ci n'est recevable que si elle a été formée dans un délai d'un an à compter de la réception par le maire de la commune de la déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux ; qu'une telle tardiveté ne peut être opposée à une demande d'annulation que si le bénéficiaire de l'autorisation produit devant le juge l'avis de réception de la déclaration prévue par les dispositions précitées de l'article R. 462-1 du code de l'urbanisme ; que, pour combattre la présomption qui résulte de la production par le bénéficiaire de cet avis de réception, le demandeur peut, par tous moyens, apporter devant le juge la preuve que les travaux ont été achevés à une date postérieure à celle de la réception de la déclaration ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux, qui indique comme date d'achèvement des travaux le 10 novembre 2009, a été reçue en mairie le 24 novembre 2009 ; que, si la société Bellane Energie soutient que les travaux ont en réalité été terminés avant la date ainsi indiquée, le bénéficiaire de l'autorisation ne peut toutefois se prévaloir d'une date antérieure à celle mentionnée dans sa propre déclaration ; que, par suite, la demande devant le tribunal administratif de Grenoble ayant été enregistrée le 8 novembre 2010, soit moins d'un an après ladite date du 24 novembre 2009, la forclusion prévue par l'article R. 600-3 précité du code de l'urbanisme ne peut être opposée à M.D... ;

9. Considérant, enfin, que la société Bellane Energie soutient que M. D...ne dispose d'aucun intérêt à agir à l'encontre du permis de construire du 13 novembre 2002 : que, cependant, d'une part, cette société ne peut utilement invoquer l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, qui subordonne la reconnaissance d'un intérêt à agir à l'encontre d'un permis de construire à la condition que le projet soit de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien du demandeur, et l'article L. 600-1-3 du même code, selon lequel l'intérêt pour agir contre un permis de construire s'apprécie en principe à la date d'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire, dès lors que les dispositions de ces deux articles, qui résultent de l'ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013, ne sont applicables qu'aux seuls recours formés contre des décisions intervenues après leur entrée en vigueur ; que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier que le projet litigieux sera visible depuis la propriété de M.D..., et notamment depuis l'habitation ; que les circonstances selon lesquelles l'éolienne visible ne l'est que partiellement et que cette visibilité ne serait pas constante, mais varierait en fonction de la direction du vent et l'orientation des pales, ce qui au demeurant n'est pas établi, sont sans incidence ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a estimé que les conclusions dirigées contre le permis de construire tacite du 13 novembre 2002 sont irrecevables ; qu'en conséquence, il y a lieu d'annuler ce jugement, en tant qu'il rejette ces conclusions ;

11. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande d'annulation dudit permis de construire présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Grenoble ;

12. Considérant, en premier lieu, qu'en tout état de cause, le permis de construire précité du 23 octobre 2004, qui n'a pas le même objet que le permis du 13 novembre 2002, car ayant en effet pour objet de construire une seule éolienne, ne peut dès lors être regardé comme ayant eu implicitement pour effet de retirer le permis de construire litigieux ; qu'au surplus, il ne ressort pas des pièces du dossier que le retrait ainsi allégué serait devenu définitif, en raison de l'affichage dans des conditions régulières du permis de construire

du 23 octobre 2004 ;

13. Considérant, en deuxième lieu, que si M. D...fait valoir que la Société du pipeline sud-européen (SPSE), qui exploite trois conduites d'hydrocarbures passant à environ 90 mètres du projet, n'a pas été consultée avant la délivrance du permis, il ne précise cependant pas quel texte aurait imposé une telle consultation ;

14. Considérant, en troisième lieu, que si le requérant soutient que le délai d'instruction de la demande de permis n'a pas été respecté, dès lors qu'une autorisation de défrichement était en effet nécessaire à la réalisation du projet, le non-respect de ce délai est, par lui-même, sans incidence sur la légalité du permis litigieux ;

15. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article R. 421-3-1 du code de l'urbanisme, alors applicable : " Lorsque les travaux projetés nécessitent la coupe ou l'abattage d'arbres dans des bois, forêts ou parcs soumis aux dispositions de l'article L. 130-1 du présent code ou des articles L. 311-1 ou L. 312-1 du code forestier, l'autorisation de coupe ou d'abattage et, le cas échéant, l'autorisation de défrichement sont jointes à la demande. " ;

16. Considérant que l'autorisation de défrichement nécessaire à la réalisation du projet a été délivrée par le préfet de la Drôme le 28 mai 2002, et ensuite modifiée le 2 octobre 2002, soit avant l'intervention du permis en litige ; que M. D...soutient que cette autorisation n'a pas été jointe à la demande de permis ; que, cependant, en tout état de cause, alors que la même autorité a accordé cette autorisation et a ensuite délivré le permis, il ne précise pas quelle pourrait être, dans ces conditions, l'incidence du non-respect des dispositions précitées de l'article R. 421-3-1 ;

17. Considérant, en cinquième lieu, que si aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoyait, à la date de délivrance du permis contesté, que celui-ci devait être précédé d'une étude d'impact, une telle étude a été réalisée par le pétitionnaire à la demande de l'administration ; qu'il résulte clairement du point 2 de l'article 6 de la directive susvisé du Conseil du 27 juin 1985 que les Etats devaient prendre les mesures propres à assurer, préalablement à la délivrance d'autorisations de projets ou d'opérations entrant dans le champ d'application de la directive, la mise à la disposition du public de toute évaluation de l'impact de tels projets ou opérations sur l'environnement ; qu'il n'est pas contesté que, comme le soutient M.D..., l'étude d'impact relative au parc éolien projeté n'a pas été mise à la disposition du public avant la délivrance du permis de construire ;

18. Considérant toutefois que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, alors notamment que le projet n'a pas fait l'objet d'une enquête publique, que l'absence de mise à disposition du public de l'étude d'impact, qui n'a privé celui-ci d'aucune garantie, aurait eu une incidence sur le sens de la décision qui a été prise, ou même aurait eu pour effet de nuire à l'information de l'ensemble des personnes intéressées ;

19. Considérant, en sixième lieu, que, si l'étude d'impact ne mentionne pas explicitement la maison de M.D..., située à environ 600 mètres du projet litigieux, elle mentionne toutefois les deux maisons les plus proches de ce projet, implantées à respectivement 420 mètres et 575 mètres, outre une autre construction située à 625 mètres ; qu'en outre, la maison de M. D...est indiquée sur la carte localisant le bâti par rapport au projet ; que l'étude d'impact n'est donc entachée d'aucune insuffisance sur ce point ; qu'en se bornant à renvoyer à une étude réalisée en novembre 2010 par la Ligue de protection des oiseaux de la Drôme en vue d'estimer la mortalité des chiroptères qu'entraînera le projet, dont il produit seulement quelques extraits, sans apporter par ailleurs aucune précision particulière, s'agissant notamment de la sensibilité des espèces qui seraient menacées, et alors que la commission départementale des sites, perspectives et paysages a émis un avis favorable sur le projet, sans évoquer la question d'une éventuelle richesse du site en espèces de chiroptères, M. D...n'établit pas que l'étude d'impact aurait dû consacrer des développements particuliers à cette question ; que, par ailleurs, cette étude comporte un volet acoustique, qui comprend notamment une carte des courbes isophones, réalisée à partir d'un logiciel spécialisé, faisant apparaître que le bruit émergent des aérogénérateurs sera négligeable pour l'ensemble des habitations les plus proches ; que l'insuffisance ou l'inexactitude de ces données n'est pas établie ; qu'enfin, en se bornant à citer quelques passages critiques de l'avis défavorable émis sur le projet par le paysagiste conseil de la direction départementale de l'équipement de la Drôme, le requérant ne démontre pas l'insuffisance du volet paysager de l'étude d'impact ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'étude d'impact qui a été réalisée ne répondrait pas aux dispositions de l'article 2 du décret susvisé du 12 octobre 1977 doit être écarté ;

20. Considérant, en septième lieu, qu'aux termes des dispositions alors applicables de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. Il en est de même si les constructions projetées, par leur implantation à proximité d'autres installations, leurs caractéristiques ou leur situation, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. " ; qu'il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement de ces dispositions, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent ;

21. Considérant qu'en novembre 2001, la Société du pipeline sud-européen (SPSE), qui exploite trois conduites d'hydrocarbures passant à proximité du terrain d'assiette du projet, a déclaré ne pas s'opposer aux travaux à la condition, notamment, que les supports des éoliennes soient situés au moins à 14 mètres de ces conduites ; que l'éolienne la plus proche est située à environ 90 mètres de ces dernières, qui sont enfouies à une profondeur de 1,30 mètre au droit du projet ; que, même si, dans un courrier adressé le 5 février 2008 à la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement de Rhone-Alpes, la SPSE a regretté n'avoir pas été consultée et ne disposer d'aucune étude de dangers en cas d'incident survenant sur une éolienne et a estimé que le projet en litige présente potentiellement un risque pour ses installations, il ne ressort d'aucun élément suffisamment précis du dossier que le projet serait effectivement susceptible d'entraîner un risque pour la sécurité publique ; qu'en particulier, si le requérant fait valoir qu'en cas de chute d'une nacelle, la vitesse particulaire à ne pas dépasser, indiquée dans ledit courrier du 5 février 2008, sera largement atteinte, il apparaît toutefois que, dans l'hypothèse d'une telle chute, la nacelle, située à 65 mètres de hauteur, ne pourra atteindre directement le lieu d'implantation des conduites ; que, dans ces conditions, même si, comme le fait valoir M. D..., la rupture d'une conduite d'hydrocarbure serait susceptible d'emporter de très graves conséquences sur l'environnement, le moyen tiré de ce qu'en ne s'opposant pas à la réalisation du projet, le préfet de la Drôme aurait commis une erreur manifeste dans l'application de l'article R. 111-2 précité du code de l'urbanisme, doit être écarté ;

22. Considérant, en huitième et dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la demande de permis de construire, présentée en août 2002, serait entachée de fraude ; qu'en effet, le pétitionnaire n'a pu, à cette date, chercher à échapper aux dispositions de la loi urbanisme et habitat du 2 juillet 2003, qui a notamment créé l'article L. 553-2 du code de l'environnement, lequel, en particulier, a imposé la réalisation d'une étude d'impact et d'une enquête publique pour tout projet d'une puissance supérieure à 2,5 MW ; que les conditions dans lesquelles, plusieurs années plus tard, le permis litigieux du 13 novembre 2002 et le permis précité du 23 octobre 2004 ont été mis en oeuvre par les deux sociétés différentes qui en sont titulaires, n'établissent pas l'intention frauduleuse alléguée ;

23. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que la permis de construire tacite du 13 novembre 2002 est entaché d'illégalité et doit être annulé ;

Sur les autres conclusions :

24. Considérant que M. D...ne conteste à aucun moment le jugement attaqué en tant que, par celui-ci, le tribunal a estimé, d'une part, qu'il n'y a pas lieu à statuer sur les conclusions dirigées contre les deux premiers arrêtés de transferts des 12 mai 2003 et 12 décembre 2007, d'autre part, que les conclusions tendant à l'annulation du dernier arrêté de transfert du 3 janvier 2008 sont tardives ; que ce jugement ne peut donc qu'être confirmé sur ces points ;

25. Considérant qu'il n'appartient pas à la cour de " dire et juger " que le permis de construire tacite du 13 novembre 2002 a été retiré et est devenu caduc, comme le demande M. D... ; que celui-ci persiste dans ses conclusions, malgré le fait que la société Bellane Energie relève que ces dernières doivent être regardées comme tendant en réalité à ce que la cour prononce un non-lieu à statuer sur les conclusions dirigées contre le permis

du 13 novembre 2002 ; que, dans ces conditions, lesdites conclusions, qui ne peuvent faire l'objet d'aucune requalification, doivent être rejetées comme irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

26. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamné à payer à M. D...la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du requérant le versement d'une somme au bénéfice de la société Bellane Energie sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 14 mai 2013 est annulé en tant que, par ce jugement, le tribunal a rejeté les conclusions de M. D...tendant à l'annulation du permis de construire tacite du 13 novembre 2002.

Article 2 : La demande de M. D...tendant à l'annulation du permis de construire tacite du 13 novembre 2002 est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D...est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de la société Bellane Energie tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D..., à la société Bellane Energie, à M. E...B..., à la société Albatros Energie et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Délibéré après l'audience du 21 octobre 2014, à laquelle siégeaient :

M. Riquin, président de chambre,

M. Picard, président-assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 novembre 2014.

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N° 13LY01881

mg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01881
Date de la décision : 13/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. RIQUIN
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SCP TRANCHAT DOLLET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-11-13;13ly01881 ?
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