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07/10/2014 | FRANCE | N°13BX00529

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 07 octobre 2014, 13BX00529


Vu la requête, enregistrée le 19 février 2013 par télécopie et confirmée par courrier le 21 février 2013, présentée pour la SCI Les Jardins du Roc, dont le siège est au Grobost à Charras (16430), par Me C... ;

La SCI les Jardins du Roc demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003222 du 20 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé, à la demande de Mme A...B..., l'arrêté du 4 juin 2010 par lequel le maire de la commune de Charras lui a, au nom de l'Etat, délivré un permis de construire quatre gîtes avec annexe, sauna et

piscine, ensemble la décision du 28 septembre 2010 portant rejet du recours grac...

Vu la requête, enregistrée le 19 février 2013 par télécopie et confirmée par courrier le 21 février 2013, présentée pour la SCI Les Jardins du Roc, dont le siège est au Grobost à Charras (16430), par Me C... ;

La SCI les Jardins du Roc demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003222 du 20 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé, à la demande de Mme A...B..., l'arrêté du 4 juin 2010 par lequel le maire de la commune de Charras lui a, au nom de l'Etat, délivré un permis de construire quatre gîtes avec annexe, sauna et piscine, ensemble la décision du 28 septembre 2010 portant rejet du recours gracieux ;

2°) de rejeter la demande d'annulation formulée par Mme B...;

3°) de confirmer la validité de l'arrêté du maire de la commune de Charras pris au nom de l'Etat accordant ledit permis de construire ;

4°) de condamner solidairement Mme B...et l'Etat au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'aux dépens ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code du patrimoine ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 septembre 2014 :

- le rapport de M. Henri Philip de Laborie, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Déborah de Paz, rapporteur public ;

- et les observations de Me Verger, avocat de MmeB... ;

1. Considérant que le 3 octobre 2006, la commune de Charras a délivré à la SCI Les Jardins du Roc un permis de construire quatre gîtes, une piscine et des bâtiments annexes ; que par un jugement du 31 octobre 2007, confirmé par un arrêt du 31 mars 2009 de la cour administrative d'appel de Bordeaux, le tribunal a annulé ce permis de construire ; qu'après que la commune se fût dotée d'une carte communale créant une zone constructible correspondant au périmètre du projet annulé, la SCI Les Jardins du Roc a déposé une nouvelle demande pour la construction sur le même terrain de quatre gîtes avec annexe, sauna et piscine ; que par un arrêté du 4 juin 2010, le maire de la commune de Charras a, au nom de l'Etat, délivré le permis sollicité ; que la SCI Les Jardins du Roc demande à la cour d'annuler le jugement du 20 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé, à la demande de Mme B... ce permis de construire ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de construction de la SCI Les Jardins du Roc se situe à moins de 550 mètres de l'abbaye de Grosbot, inscrite à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, propriété de MmeB... ; qu'il suit de là que l'intéressée a intérêt à agir contre le permis de construire litigieux ;

Sur les conclusions à fin d'annulation du jugement du 20 décembre 2012 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme : "Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d' urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier" ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un permis de construire en retenant plusieurs moyens, de se prononcer sur le bien-fondé de tous les moyens d'annulation retenus au soutien de leur décision par les premiers juges et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation ; que, dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également : / (...) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire déposé par la SCI Les Jardins du Roc que, bien que le document graphique " insertion dans le site " ait été établi à partir de points de vue qui ne sont pas identifiés sur le plan de situation, ce document ainsi que les autres pièces dudit dossier ont suffi à l'autorité administrative pour apprécier le projet envisagé par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages et pour évaluer son insertion dans son environnement immédiat et plus lointain ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges ont retenu que les dispositions précitées de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme avaient été méconnues ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 124-2 du code de l'urbanisme : " Les cartes communales respectent les principes énoncés aux articles L. 110 et L. 121-1. /Elles délimitent les secteurs où les constructions sont autorisées et les secteurs où les constructions ne sont pas admises, à l'exception de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension des constructions existantes ou des constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à l'exploitation agricole ou forestière et à la mise en valeur des ressources naturelles. " ; que l'article L. 121-1 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de la première décision attaquée, dispose que : " Les schémas de cohérence territoriale, les plans locaux d'urbanisme et les cartes communales déterminent les conditions permettant d'assurer : /1° L'équilibre entre le renouvellement urbain, un développement urbain maîtrisé, le développement de l'espace rural, d'une part, et la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des espaces naturels et des paysages, d'autre part, en respectant les objectifs du développement durable (...) " ; qu'il appartient aux auteurs d'une carte communale de déterminer le parti d'aménagement à retenir en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction ; que, cependant, leur appréciation peut être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts ;

6. Considérant, d'une part, que, contrairement à ce que soutient la requérante, Mme B... est en droit, au regard de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme, d'invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la carte communale en tant qu'elle classe en secteur Ua le périmètre du projet ;

7. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que la commune de Charras, petite commune rurale d'environ 360 habitants, comprend cinq " villages " ou hameaux principaux : Le Bourg, Grosbot/Grosse Forge, Les Vergerons, Petignoux/Vignerias et La Plagne/ Seguignac ; que le rapport de présentation de la carte communale, après avoir rappelé que l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme impose aux cartes communales le respect de la diversité des fonctions urbaines, indique que la définition du projet de territoire doit satisfaire les besoins en matière d'habitat, d'activités économiques, activités sportives et culturelles et d'intérêt général ainsi que d'équipements publics ; que parmi les enjeux pris en compte, ledit rapport mentionne, notamment celui d'assurer les conditions de la protection du cadre de vie, essentielles au développement de l'économie touristique et /ou de loisirs ; que, s'agissant du village de Grosbot/Grosse Forge, les auteurs du rapport propose son classement en zone Ua au motif que ce zonage présente trois objectifs : " cerner le bâti existant afin de permettre sa préservation ; intégrer quelques nouveaux terrains faisant l'objet de certificats d'urbanismes positifs (...) intégrer un projet spécifique visant la création d'hébergements touristiques dans un cadre paysagé préservé (voir plan annexé) ; que le rapport précise que ce projet sera limité à cinq constructions en bois (222 mètres carrés de SHON au total) dont quatre hébergements touristiques et une habitation destinée au gestionnaire et que sera maintenue l'organisation générale du site et son caractère bocager ; que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, les orientations concernant le site de Grosbot/Grosse Forge ne présentent pas d'incohérence avec le parti pris général consistant à assurer les conditions de la protection du cadre de vie, essentielles au développement de l'économie touristique et /ou de loisirs ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal a retenu que la carte communale en ce qu'elle a instauré une zone Ua correspondant au terrain d'assiette du projet litigieux est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

8. Considérant, en troisième lieu, que si Mme B...a fait valoir devant le tribunal administratif que le projet était situé dans le périmètre de 500 mètres à compter du mur d'enceinte de sa propriété inscrite à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, la SCI Les Jardins du Roc soutient sans être utilement contredite que cette distance telle que mesurée du mur d'enceinte à la construction projetée la plus proche est de 534 mètres ; que, dès lors, doit être écarté le moyen tiré de ce que ledit projet devait être soumis au visa de l'architecte des bâtiments de France en application des articles R. 421-38-4 du code de l'urbanisme et L. 621-30-1 du code du patrimoine ;

9. Considérant, en quatrième lieu, que Mme B...ne conteste pas qu'ainsi que le mentionne la notice paysagère jointe au dossier de la demande de permis, que le terrain d'assiette du projet est situé au sein d'une zone rurale, entouré de champs boisés aux arbres d'essences diverses, de quelques maisons voisines typiques rurales charentaises et d'exploitations agricoles ; que contrairement à ce qui est soutenu, le plan de situation du projet indique la présence de l'abbaye de Grosbot mentionnée au point 7 ; qu'il ressort également du dossier de la demande de permis sollicité, notamment de la notice paysagère, de la notice d'insertion dans le site et du plan de masse mentionnant les plantations prévues que le projet de la SCI Les Jardins du Roc n'est pas de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinantes ; qu'il s'ensuit que doit être écarté le moyen tiré de ce que le permis de construire litigieux aurait été accordé en méconnaissance de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCI Les Jardins du Roc est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a annulé à la demande de Mme A...B..., l'arrêté en date du 4 juin 2010 par laquelle le maire de la commune de Charras lui a délivré un permis de construire quatre gîtes avec piscine et bâtiments annexes, ensemble la décision en date du 28 septembre 2010 portant rejet du recours gracieux ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que la SCI Les Jardins du Roc et Mme B...demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B...la somme que la SCI Les Jardins du Roc demande au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1003222 du 20 décembre 2012 du tribunal administratif de Poitiers est annulé.

Article 2 : Les demandes de Mme B...et de La SCI Les Jardins du Roc au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 13BX00529


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX00529
Date de la décision : 07/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Règles générales d'utilisation du sol - Règles générales de l'urbanisme - Règlement national d'urbanisme.

Urbanisme et aménagement du territoire - Plans d'aménagement et d'urbanisme - Plans d'urbanisme directeur.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. LALAUZE
Rapporteur ?: M. Henri de LABORIE
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : FAURE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-10-07;13bx00529 ?
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