LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Mahdi X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 8-2, en date du 15 novembre 2013, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef, notamment, d'infractions à la législation sur les stupéfiants en récidive, a rejeté sa demande de mise en liberté et ordonné son maintien en détention ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 22 janvier 2014 où étaient présents : M. Louvel, président, M. Azema, conseiller rapporteur, Mmes Nocquet, Guirimand, M. Beauvais, Mme Ract-Madoux, MM. Guérin, Straehli, Finidori, Monfort, Buisson, Soulard, Mmes de la Lance, Chaubon, MM. Germain, Sadot, conseillers de la chambre, Mmes Labrousse, Moreau, MM. Maziau, Barbier, Talabardon, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Boccon-Gibod ;
Greffier de chambre : Mme Téplier ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire AZEMA, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. le premier avocat général BOCCON-GIBOD ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article 66 de la Constitution, des articles préliminaire, 179, 388, 569 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que la cour d'appel a confirmé le jugement ordonnant le maintien en détention provisoire de M. X... et prolongeant sa détention provisoire pour une durée de deux mois à compter du 29 octobre 2013 ;
"aux motifs que l'appel d'une ordonnance de renvoi a pour effet d'empêcher la saisine du tribunal correctionnel, qui ne peut se prononcer sur la détention provisoire ; que l'effet suspensif du pourvoi en cassation ne s'attache qu'aux arrêts qui peuvent donner lieu à des actes d'exécution ; que tel n'est pas le cas d'un arrêt déclarant irrecevable l'appel interjeté contre une ordonnance de renvoi ; que les dispositions de l'article 179, alinéa 5, permettent au tribunal correctionnel, si l'audience au fond ne peut se tenir dans le délai de deux mois après renvoi et maintien en détention, à titre exceptionnel, par décision mentionnant les raisons de fait ou de droit faisant obstacle au jugement de l'affaire, d'ordonner la prolongation de la détention pour une nouvelle période de deux mois ; que cette faculté relève de la seule compétence du tribunal correctionnel, l'article 213 du code de procédure pénale ne permettant à la chambre de l'instruction que de faire application des dispositions des alinéas 3 et 4 de cet article ; que le tribunal correctionnel, à la date du 25 octobre 2013, était donc redevenu saisi et compétent pour statuer sur la détention, la chambre de l'instruction ayant rendu sa décision ; que le prévenu en a, d'ailleurs, si peu douté qu'il lui a soumis une demande de mise en liberté ; qu'à cette date, le maintien en détention ordonné par la juridiction d'instruction n'était pas arrivé à expiration ;
"alors que tant qu'il n'a pas été statué sur le pourvoi formé contre l'arrêt de la chambre de l'instruction statuant sur l'appel de l'ordonnance de renvoi devant la juridiction correctionnelle d'une personne mise en examen, le tribunal correctionnel n'est pas valablement saisi à son égard et ne peut statuer sur sa détention provisoire ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de la cour d'appel qu'il n'avait pas été statué sur le pourvoi en cassation formé contre l'arrêt de la chambre de l'instruction déclarant l'appel de l'ordonnance de renvoi irrecevable ; que, dès lors, la juridiction correctionnelle n'était pas valablement saisie à l'égard de M. X... et ne pouvait donc pas statuer en matière de détention provisoire ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
Vu les articles 179 et 388 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il se déduit de ces textes que le tribunal correctionnel ne peut statuer sur une procédure qu'autant que l'ordonnance de renvoi qui l'en saisit est devenue définitive ;
Attendu qu'ont été rendues à l'égard de M. X..., le 29 août 2013, une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel du chef, notamment, d'infractions à la législation sur les stupéfiants en récidive et une ordonnance de maintien en détention provisoire ; que, celui-ci ayant interjeté appel de la première de ces ordonnances, la chambre de l'instruction a, par arrêt du 15 octobre 2013, déclaré irrecevable son recours et ordonné son maintien en détention ; que, le 21 octobre 2013, il a formé un pourvoi en cassation contre cette décision ;
Attendu que, saisi par l'ordonnance de renvoi devenue définitive en ce qui concerne d'autres prévenus, le tribunal correctionnel a, par jugement du 25 octobre 2013, rejeté la demande de mise en liberté de M. X..., ordonné la prolongation de sa détention pour une durée de deux mois à partir du 29 octobre 2013 et fixé la date à laquelle l'affaire serait examinée ; que, sur appel de M. X..., la cour d'appel a confirmé le jugement entrepris ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'en raison du pourvoi formé le 21 octobre 2013, l'ordonnance de renvoi n'était pas devenue définitive, de sorte que, d'une part, le tribunal correctionnel, n'étant pas saisi des poursuites contre M. X..., n'était pas compétent pour prononcer sur sa détention, d'autre part, le délai de deux mois prévu par l'article 179, alinéa 4, du code de procédure pénale n'avait pas commencé à courir, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; que, n'impliquant pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond, elle aura lieu sans renvoi, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 15 novembre 2013 ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq février deux mille quatorze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;