La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/10/2013 | FRANCE | N°13-82762

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 23 octobre 2013, 13-82762


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Sasa X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 1ère section, en date du 28 mars 2013, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'infraction à la législation sur les stupéfiants en bande organisée en récidive, association de malfaiteurs, a prononcé sur sa demande d'annulation d'actes de la procédure ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 11 septembre 2013 où étaient présents d

ans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Sasa X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 1ère section, en date du 28 mars 2013, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'infraction à la législation sur les stupéfiants en bande organisée en récidive, association de malfaiteurs, a prononcé sur sa demande d'annulation d'actes de la procédure ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 11 septembre 2013 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Caron conseiller rapporteur, M. Pometan, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de Mme le conseiller CARON, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. le premier avocat général BOCCON-GIBOD ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 17 juin 2013, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des procès-verbaux établis par les policiers de l'Office central de répression du trafic de stupéfiants ( OCRTIS), que, disposant d'un renseignement sur des activités de trafic de stupéfiants se déroulant dans un box d'un parking souterrain d'un immeuble d'habitation de Saint-Maurice ( Val-de-Marne), dont la localisation leur avait été communiquée, ceux-ci se sont rendus sur place, en enquête préliminaire, aux fins de vérification ; qu'afin de pénétrer dans le parking équipé d'un portail à ouverture par télécommande, ils se sont livrés vainement à diverses recherches pour identifier le syndic de cet immeuble ne comportant pas de gardien, puis se sont adressés à un résident qui a accepté de leur ouvrir la porte, après avoir été informé de leur qualité professionnelle et de l'objet de leur présence ; qu'ils ont remarqué un véhicule, immatriculé en Allemagne, garé devant un box fermé et en bloquant l'accès; qu'au cours des surveillances exercées à partir de la rue, ils ont constaté l'arrivée de deux véhicules de forte cylindrée, dont l'un immatriculé en Allemagne, circulant en convoi, s'engouffrant dans le parking pour en ressortir quelques instants plus tard; qu'un policier a remarqué la présence de "valises marocaines" sur les sièges à l'arrière du premier d'entre eux qui a emprunté la rue à contresens; que les policiers l'ont intercepté et ont interpellé M. X... ; que l'autre conducteur a tenté d'échapper aux policiers en fonçant sur eux puis est parvenu à fuir à pied; que la fouille des deux véhicules puis la perquisition du box, en présence de M. X..., qui a reconnu en être le locataire, ont permis la découverte de plus d'une tonne de cannabis ; que l'intéressé a été mis en examen pour importation et trafic de stupéfiants en bande organisée ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 17, 75, 76, 171, 173, 174, 206, 802 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué, écartant la nullité des opérations de surveillance et constatations effectuées dans un lieu privé le 27 avril 2012 (D18), a dit n'y avoir lieu à annulation d'acte ou pièce de la procédure ;
"aux motifs que, en ce qui concerne l'entrée des policiers dans le parking de l'immeuble sis 28 rue des Epinettes à Saint Maurice, le code de procédure pénale ne précise pas les actes d'enquête que les policiers peuvent faire mais se limite à réglementer les actes susceptibles d'être attentatoires aux libertés individuelles ; que les dispositions de l'article 126-1 du code de la construction et de l'habitation, qui prévoit la possibilité pour les propriétaires ou exploitants d'immeubles à usage d'habitation ou leur représentant, d'accorder une autorisation permanente de pénétrer dans les parties communes de ces immeubles sont étrangères à l'espèce alors qu'il ressort des procès-verbaux des 21 avril et 27 avril 2012 qu'après avoir vainement cherché à identifier le syndic de cette résidence et en l'absence de gardien, les policiers se sont présentés à un résident, lequel informé de leur qualité et de l'objet de leur demande, les a conduit au parking dont il a ouvert la porte à l'aide de sa télécommande ; que le parking situé en sous-sol de cette petite résidence, élément des parties communes de l'immeuble, constitue un lieu privé mais non un lieu d'habitation ; que le résident a fait simplement usage de son droit d'accès aux parties communes de son immeuble et d'y conduire tout tiers de son choix sous réserve du respect du règlement de copropriété; qu'il ne saurait être reproché à un particulier de s'opposer davantage à l'entrée d'un fonctionnaire de police qu'à celle d'une connaissance, d'un livreur ou d'un réparateur; que les policiers, qui ont pénétré dans cette partie commune de l'immeuble, se sont limités à une observation visuelle des lieux sans effectuer d'actes coercitifs quelconques; qu'ils ont donc agit en conformité avec les dispositions du code de procédure pénale et de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, leur intervention ne concernant pas une atteinte au domicile privé; que les surveillances exercées sur la voie publique afin d'observer les allées et venues dans un parking dans le cadre d'une enquête préliminaire sur un trafic de stupéfiants sont proportionnées aux nécessités de sécurité et de sûreté publique ainsi que de prévention des infractions; qu'aucune violation de la loi ou des conventions n'est constituée ;
"alors que constitue une ingérence dans la vie privée et le domicile, au sens de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, le fait, pour des enquêteurs, de pénétrer dans un parking souterrain d'une propriété privée, clos et non visible de l'extérieur, et d'y effectuer des constatations visuelles, spécialement, d'y relever les plaques d'immatriculation d'un véhicule stationnant devant un box aux fins d'identification du propriétaire dudit véhicule et, par ce biais, du propriétaire du box; qu'une telle ingérence, réalisée en enquête préliminaire, sans base légale suffisante ni autorisation d'un juge, est nécessairement irrégulière; qu'en décidant le contraire, aux motifs inopérants que cette partie commune de l'immeuble ne constituait pas un lieu d'habitation, qu'une simple observation visuelle n'a pas de caractère coercitif et qu'un résident avait ouvert la porte du parking aux policiers à l'aide de sa télécommande, la cour d'appel a violé le texte précité" ;
Attendu que, pour écarter le moyen d'annulation, proposé par M. X... et pris de l'absence d'autorisation d'un magistrat donnée aux policiers pour accéder, en enquête préliminaire, dans le parking souterrain fermé d'une propriété privée et relever le numéro d'immatriculation d'un véhicule, l'arrêt attaqué relève que ce n'est que postérieurement à leurs vaines recherches pour identifier le syndic et en l'absence de gardien que les policiers, après avoir décliné leur qualité et l'objet de leur présence, ont sollicité et obtenu l'autorisation de pénétrer dans le parking de la part d'un résident qui en a ouvert la porte avec sa télécommande, faisant ainsi usage de son droit d'accès aux parties communes et d'y conduire tout tiers de son choix; que les juges ajoutent que les policiers se sont livrés dans ce lieu privé, non assimilable à un domicile, à de simples constatations visuelles, à l'exclusion de tout acte coercitif ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors qu'aucune irrégularité ne saurait résulter de l'introduction, en enquête préliminaire, de policiers dans le parking souterrain d'un immeuble avec l'accord, en connaissance de cause, d'une personne titulaire d'un droit d'accès à cette partie commune et en sa présence, après vaine recherche de l'identité du syndic, afin d'y procéder à de simples constatations visuelles sur les véhicules en stationnement, lesquelles n'entrent pas dans les prévisions de l'article 706-96 du code de procédure pénale, ne sont pas assimilables à une perquisition et n'ont pas été de nature à porter atteinte à l'intimité de la vie privée, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 53, 171, 173, 174 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à annulation d'acte ou pièce de la procédure ;
"aux motifs qu'il est fait grief aux enquêteurs d'avoir procédé aux interpellations des véhicules Audi A3 et Mercedes classe E à leur sortie du parking en l'absence de délit flagrant; que les enquêteurs, qui disposaient d'un renseignement anonyme précis sur l'existence d'un trafic de stupéfiants et avaient constaté la présence d'un véhicule suspect car immatriculé sous une fausse identité en Allemagne, stationné de manière anormale en bloquant la porte d'un box, ont exercé de longues surveillances et ont constaté l'arrivée au petit matin de deux véhicules en convoi, dont l'un immatriculé en Allemagne; que le policier qui s'est alors porté à l'entrée du parking a entendu des bruits correspondant au chargement de véhicules et a pu apercevoir des "valises marocaines" au passage du premier véhicule ralenti par la présence d'un fourgon banalisé, que ce véhicule Audi A3 a emprunté en sortant la rue à contre sens; qu'il existait dès lors des indices apparents d'un comportement délictueux autorisant les fonctionnaires de police à agir en flagrance ; que les seules affirmations du requérant quant à l'impossibilité de voir les valises au motif que les vitres auraient été "au moins légèrement teintées" sont inopérantes alors que le véhicule passait à faible vitesse à la sortie d'un parking où était dissimulé le policier; que la fouille des véhicules et du box (cote D25) réalisée dans le cadre de cette procédure de flagrance est donc régulière ; que la présence des ballots sur la banquette arrière a été constatée; que la fouille approfondie et la saisie des ballots a été régulièrement effectuée ultérieurement en présence du requérant alors en garde à vue à 14h30 ; qu'il convient de constater la régularité de la procédure ;
"alors que l'arrivée de deux véhicules en convoi dans un parking privé, le bruit des opérations de chargement ensuite entendu à l'intérieur du parking, l'observation de « valises marocaines » dans l'un des véhicules, en l'absence de tout lien établi entre lesdits véhicules et le renseignement anonyme parvenu aux enquêteurs ou le véhicule suspect bloquant la prote d'un box à l'intérieur du parking, ne révélaient pas les indices apparents d'un comportement délictueux justifiant l'interpellation, la fouille des véhicules et la perquisition du box en flagrance ; qu'en décidant le contraire et en refusant d'annuler la procédure, l'arrêt attaqué a violé l'article 53 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X..., mis en examen le 3 mai 2012, a déposé, le 5 novembre suivant, sur le fondement de l'article 173 du code de procédure pénale, une requête en annulation d'actes de la procédure, dans laquelle il a invoqué l'irrégularité de l'introduction, en enquête préliminaire, de policiers dans un parking souterrain et celle des constatations auxquelles ils ont procédé; que le 13 février 2013, veille de l'audience, il a présenté devant la chambre de l'instruction, un mémoire soulevant un nouveau moyen de nullité, pris de l'irrégularité de son interpellation et des opérations subséquentes en l'absence de flagrance ;
Attendu que le demandeur, qui ne peut faire état devant la Cour de cassation des moyens qu'il était irrecevable à soulever devant la chambre de l'instruction, après expiration du délai de forclusion prévu par l'article 173-1 du code précité, ne saurait être admis à invoquer devant la Cour de cassation de tels moyens pour faire grief à ladite chambre de l'instruction de les avoir rejetés ;
D'où il suit que le moyen est irrecevable ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-trois octobre deux mille treize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 13-82762
Date de la décision : 23/10/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ENQUETE PRELIMINAIRE - Officier de police judiciaire - Pouvoirs - Constatations ou examens techniques - Constatations visuelles - Introduction dans un parking privé d'immeuble - Recherche vaine du syndic - Accord d'un résident - Régularité - Conditions - Détermination

OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE - Pouvoirs - Enquête préliminaire - Constatations visuelles - Introduction dans un parking privé d'immeuble - Conditions - Détermination

Sont régulières les constatations visuelles sur des véhicules en stationnement, opérées en enquête préliminaire par des policiers dans un parking souterrain d'un immeuble, dans lequel il se sont introduits avec l'accord, donné en connaissance de cause, par un résident, dès lors que le syndic, après recherches, n'a pu être identifié


Références :

articles 76 et 706-96 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 28 mars 2013

Sur les constatations visuelles réalisées par des officiers de police judiciaire en enquête préliminaire dans un parking privé d'immeuble, à rapprocher :Crim., 23 janvier 2013, pourquoi n° 12-85.059, Bull. crim. 2013, n° 29 (1) (irrecevabilité et rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 23 oct. 2013, pourvoi n°13-82762, Bull. crim. criminel 2013, n° 203
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2013, n° 203

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Boccon-Gibod (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Caron
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:13.82762
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award