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16/10/2014 | FRANCE | N°13-17999

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 16 octobre 2014, 13-17999


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Kim Vinh ayant interjété appel d'un jugement d'un tribunal de commerce la condamnant à payer diverses sommes à la société Algest, celle-ci a invoqué la caducité de la déclaration d'appel faute de signification par l'appelant de ses conclusions dans le délai requis, puis déféré à la cour d'appel l'ordonnance du conseiller de la mise en état la déboutant de cette contestation ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article

16 du code de procédure civile ;
Attendu que le juge doit, en toutes circonstances...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Kim Vinh ayant interjété appel d'un jugement d'un tribunal de commerce la condamnant à payer diverses sommes à la société Algest, celle-ci a invoqué la caducité de la déclaration d'appel faute de signification par l'appelant de ses conclusions dans le délai requis, puis déféré à la cour d'appel l'ordonnance du conseiller de la mise en état la déboutant de cette contestation ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;
Attendu que pour déclarer caduque la déclaration d'appel, la cour d'appel, après avoir relevé que le délai de l'article 908 du code de procédure civile augmenté du délai prévu par l'article 911-2, la partie appelante étant domiciliée hors de France, expirait le 23 juillet 2012, retient que le 23 juillet 2012 à 18 heures 11, l'avocat de l'appelant a transmis ses conclusions au greffe de la cour d'appel par voie électronique (RPVA) ; que l'article 930-1 du code de procédure civile dispose qu'à peine d'irrecevabilité, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique selon les modalités prévues par arrêté ; que la cour d'appel de Paris ne faisant pas partie des cours devant lesquelles la notification par RPVA des conclusions a été autorisée par l'arrêté du 18 avril 2012 relatif à la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire, la transmission par cette voie devant cette cour n'a pas valeur de notification ; qu'il s'ensuit que la partie appelante n'a pas remis au greffe ses conclusions dans le délai requis de cinq mois ;
Qu'en statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen, qu'elle relevait d'office, tiré de l'absence de remise au greffe par l'appelant de ses conclusions dans le délai de l'article 908 du code de procédure civile, tel qu'augmenté par l'article 911-2 de ce code, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction et violé le texte susvisé ;
Sur le moyen unique, pris en ses troisième et cinquième branches :
Vu les articles 114 et 911 du code de procédure civile ;
Attendu que pour déclarer caduque la déclaration d'appel, la cour d'appel retient également que le 23 juillet 2012 à 18 heures 02, l'avocat de la société appelante a adressé ses conclusions à l'avocat de la société intimée par télécopie, au visa de l'article 673 du code de procédure civile en sollicitant que la première et la dernière page lui soient retournées, visées et datées du 23 juillet 2012, ce que l'avocat de la partie intimée a refusé, par courrier du 2 août 2012, faisant valoir que la notification n'était pas régulière au regard des exigences de cet article ; que la cour d'appel de Paris ne faisant pas partie des cours devant lesquelles la notification par RPVA des conclusions a été autorisée par l'arrêté du 18 avril 2012, la transmission par cette voie devant cette cour n'a pas valeur de notification, le seul mode de notification régulier étant soit la signification par huissier soit la notification directe entre avocats, que la société Kim Vinh soutient avoir régulièrement réalisée ; qu'au regard des dispositions de l'article 673 du code de procédure civile, la simple transmission des conclusions par télécopie, procédé qui ne figure pas parmi les formes admissibles de notification, au surplus, sans retour de la part de l'avocat destinataire d'un exemplaire visé, ne constitue pas une notification régulière ; que le moyen pris du caractère seulement probatoire du visa et de l'absence de grief du destinataire est inopérant dès lors que la notification irrégulière des conclusions de l'appelant dans le délai susvisé est sanctionnée non par la nullité des conclusions mais par la caducité de la déclaration d'appel ; que selon l'article 911 du même code, les conclusions des avocats sont notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour d'appel ; qu'il s'ensuit que la partie appelante n'a pas notifié régulièrement ses conclusions dans le délai requis de cinq mois ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la caducité de la déclaration d'appel faute de notification par l'appelant de ses conclusions à l'intimé dans le délai imparti par l'article 911 du code de procédure civile ne peut être encourue, en raison d'une irrégularité de forme affectant cette notification, qu'en cas d'annulation de cet acte, sur la démonstration par celui qui l'invoque du grief que lui a causé l'irrégularité, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 avril 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Algest SE aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Algest SE et la condamne à payer à la société Kim Vinh la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize octobre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société Kim Vinh
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la caducité de la déclaration d'appel de la société KIM VINH ;
AUX MOTIFS QU'il est constant que le délai de l'article 908 du Code de procédure civile augmenté du délai prévu par l'article 911-2, la partie appelante étant domiciliée hors de FRANCE, expirait le 23 juillet 2012 ; le 23 juillet 2012 à 18h11, l'avocat de la société KIM VINH a transmis ses conclusions d'appelant à l'avocat de la partie intimée et au greffe de la Cour d'appel par voie électronique (RPVA) ; le même jour, à 18h02, il a adressé les mêmes conclusions à l'avocat de la société intimée par télécopie au visa de l'article 673 du Code de procédure civile en sollicitant que la première et la dernière page lui soient retournées, visées et datées du 23 juillet 2012 ; l'avocat de la partie intimée a refusé par courrier du 2 août 2012 en faisant valoir que la notification n'était pas régulière au regard des exigences de l'article 673 du Code de procédure civile ; que selon l'article 911 du Code de procédure civile, les conclusions des avocats sont notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la Cour ; l'article 930-1 du Code de procédure civile dispose qu'à peine d'irrecevabilité, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique selon les modalités prévues par arrêté ; la Cour d'appel de PARIS ne faisant pas partie des cours devant lesquelles la notification par RPVA des conclusions a été autorisée à titre expérimental par l'arrêté du 18 avril 2002 relatif à la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire, la transmission par cette voie devant cette cour n'a pas valeur de notification ; le seul mode de notification régulier est donc, comme il est prévu par l'article 671 du Code de procédure civile, soit la signification par huissier soit la notification directe entre avocats que la société KIM VINH soutient avoir régulièrement réalisée ; qu'il résulte de l'article 673 du Code de procédure civile que la notification directe s'opère par la remise de l'acte en double exemplaire à l'avocat destinataire lequel restitue aussitôt à son confrère l'un des exemplaires après l'avoir daté et visé ; au regard de ces dispositions, la simple transmission des conclusions par télécopie, procédé qui ne figure pas parmi les formes admissibles de notification, au surplus, sans retour dans la part de l'avocat destinataire d'un exemplaire visé, ne constitue pas une notification régulière ; il s'en suit que la partie appelante n'a pas remis au greffe ni notifié régulièrement ses conclusions dans le délai requis de cinq mois ; le moyen pris du caractère seulement probatoire du visa et de l'absence de grief du destinataire est inopérant dès lors que la notification irrégulière des conclusions de l'appelant dans le délai susvisé est sanctionné non par la nullité des conclusions mais par la caducité de la déclaration d'appel ; il convient, en conséquence, d'infirmer l'ordonnance déférée et de prononcer la caducité de la déclaration d'appel conformément à l'article 911-1 du Code de procédure civile ;
1°) ALORS QUE le juge doit, en toute circonstance, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office, en l'espèce, le moyen de caducité de la déclaration d'appel tiré de l'irrégularité de la remise des conclusions d'appelant au greffe de la Cour d'appel, quand l'intimée se limitait à soutenir le moyen de caducité fondé sur le défaut de notification des conclusions à l'avocat, sans inviter les parties à s'expliquer sur ce moyen relevé d'office, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, l'appelant domicilié à l'étranger dispose, à peine de caducité de la déclaration d'appel, d'un délai de cinq mois pour remettre ses conclusions au greffe de la Cour d'appel ; qu'en retenant, en l'espèce, que la déclaration d'appel était caduque faute pour les conclusions d'appelant d'avoir été déposées au greffe de la Cour d'appel avant le 23 juillet 2012, quand elle constatait elle-même que « le 23 juillet 2012 à 18h11 l'avocat de la société KIM VINH a vait transmis ses conclusions d'appelant ... au greffe de la Cour d'appel par voie électronique (RPVA) » (arrêt, p. 3, § 4), la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 908 du Code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1er, de la Convention européenne des droits de l'homme ;
3°) ALORS QUE l'irrégularité de la notification des conclusions d'appelant à l'avocat de l'intimé dans le délai de cinq mois n'emporte la caducité de la déclaration d'appel que si cette notification est nulle et non avenue ; qu'en écartant, en l'espèce, comme inopérant le moyen tiré de l'absence de nullité de la notification des conclusions au motif que « la notification irrégulière des conclusions de l'appelant dans le délai de cinq mois est sanctionnée non par la nullité des conclusions mais par la caducité de la déclaration d'appel » (arrêt, p. 3, pénultième paragraphe), quand la caducité n'est encourue que si la notification, réalisée dans le délai, est frappée de nullité, la Cour d'appel a violé l'article 911 du Code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE la restitution par l'avocat destinataire d'une copie datée et visée des conclusions notifiées n'est pas prévue à peine de nullité de la notification directe entre avocats ; qu'en retenant, en l'espèce, pour prononcer la caducité de la déclaration d'appel faute de notification des conclusions d'appelant à l'avocat de l'intimé, que cette notification était irrégulière pour avoir été réalisée par télécopie et par voie électronique (RPVA), quand la restitution d'une copie datée et visée de ces conclusions ne valait que pour preuve de cette remise, la Cour d'appel a violé les articles 114, 673 et 911 du Code de procédure civile ;
5°) ALORS QU'en toute hypothèse, la notification directe de conclusions entre avocats par voie électronique et par télécopie ne constitue qu'une irrégularité de forme de la notification dont la nullité est subordonnée à la preuve d'un grief ; qu'en se bornant, en l'espèce, pour prononcer la caducité de la déclaration d'appel faute de notification des conclusions d'appelant à l'avocat de l'intimé, à relever que cette notification était irrégulière, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions, p. 3 et p. 4, trois premiers paragraphes), si l'irrégularité avait causé un grief à la société ALGEST, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 114, 673 et 911 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 13-17999
Date de la décision : 16/10/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

APPEL CIVIL - Procédure avec représentation obligatoire - Déclaration d'appel - Caducité - Cas - Conclusions de l'appelant - Défaut de notification des conclusions à l'intimé - Irrégularité de forme affectant la notification - Conditions - Annulation de l'acte - Portée

La caducité de la déclaration d'appel faute de notification par l'appelant de ses conclusions à l'intimé dans le délai imparti par l'article 911 du code de procédure civile ne peut être encourue, en raison d'une irrégularité de forme affectant cette notification, qu'en cas d'annulation de cet acte, sur la démonstration par celui qui l'invoque du grief que lui a causé l'irrégularité. Encourt dès lors la censure l'arrêt d'une cour d'appel qui constate cette caducité au motif que la simple transmission entre avocats des conclusions par télécopie, procédé qui ne figure pas parmi les formes admissibles de notification, constitue une notification irrégulière qui est sanctionnée, non par la nullité de ces conclusions, mais par la caducité de la déclaration d'appel


Références :

Sur le numéro 1 : articles 16 et 908 du code de procédure civile
Sur le numéro 2 : article 911 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 23 avril 2013

Sur le n° 2 : Sur la nécessité de prouver l'existence d'un grief pour prononcer la nullité d'une déclaration d'appel dont les mentions sont affectées d'irrégularité, à rapprocher : 2e Civ., 12 juillet 2001, pourvois n° 99-19.828, 99-21.242, 00-10.256, Bull. 2001, II, n° 139 (cassation) ;2e Civ., 13 novembre 2008, pourvoi n° 08-10411, Bull. 2008, II, n° 245 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 16 oct. 2014, pourvoi n°13-17999, Bull. civ. 2014, II, n° 213
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, II, n° 213

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : M. Girard
Rapporteur ?: M. de Leiris
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.17999
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