Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2012, présentée pour la société RESIDENCES SERVICES GESTION, dont le siège est 42 avenue Georges V à Paris (75008), par Me Caruelle, avocat ;
La société RESIDENCES SERVICES GESTION demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 0906363 du 2 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande en réduction des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2001, 2004 et 2005 dans les rôles de la commune de Nancy pour les montants respectifs de 28 562 euros, 28 327 euros et 29 788 euros ;
2° de prononcer la réduction de ces impositions à concurrence de ces montants ;
3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
4° de condamner l'Etat au versement des dépens ;
La société RESIDENCES SERVICES GESTION soutient :
- en premier lieu, que ses réclamations du 2 septembre 2008 sont recevables ; qu'en application du b de l'article R.*196-2 du livre des procédures fiscales, elles le sont dès lors qu'elles sont présentées au plus tard le 31 décembre de l'année suivant la réalisation de l'évènement qui motive la réclamation ; qu'aux termes de la doctrine D. adm 13-0-2122 n°7 du 30 avril 1996, qui est opposable à l'administration fiscale, certains faits ou circonstances sont susceptibles d'être regardés comme tels ; que c'est le cas des faits ou des circonstances de nature à exercer une influence sur le principe même de l'imposition, son régime ou son mode de calcul ; que tel est le cas, en l'espèce, du jugement du Tribunal administratif de Lille du 10 avril 2008 qui concerne la société RESIDENCES SERVICES GESTION en matière de taxe professionnelle qui a prononcé la décharge des cotisations de taxe professionnelle auxquelles la société appelante a été assujettie, au titre des années 2003 à 2005 ; que ce jugement est conforme à la jurisprudence du Conseil d'Etat, nouvelle en 2008, qui déclare illégale l'imposition à la taxe professionnelle de la société sur la base de la valeur locative des appartements sous-loués aux étudiants et en prononce la décharge ; que cette décision a été rendue dans une espèce comparable au présent litige pour le même contribuable, le même impôt et les mêmes années ; que, dans ces conditions, cette décision constitue, au sens et pour l'application de l'article R*. 196-2 du livre des procédures fiscales, un évènement de nature à rouvrir le délai de réclamation ;
- qu'en second lieu, s'agissant du bien-fondé de l'imposition, la jurisprudence du Conseil d'Etat a prononcé la décharge des impositions dans ses décisions des 26 mars 2008 et 6 mai 2009 concernant la situation de la SA Reside Etudes ; que la société requérante s'est substituée à la société SA Réside Etudes et a poursuivi ses activités dans des conditions strictement identiques ; que, par suite, son cas est identique s'agissant de l'établissement de Nancy ; qu'elle joint un calcul détaillé des cotisations dont elle demande la réduction ;
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juin 2013 :
- le rapport de Mme Belle, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;
1. Considérant que la société RESIDENCES SERVICES GESTION relève régulièrement appel du jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 2 mai 2012 qui rejette sa demande tendant à la réduction des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2001, 2004 et 2005 dans les rôles de la commune de Nancy, à raison de l'exploitation de son établissement de résidences d'étudiants situé rue Saint-Dizier à Nancy ;
Sur la recevabilité des réclamations introduites par la société RESIDENCES SERVICES GESTION :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R*. 196-2 du livre des procédures fiscales : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts directs locaux et aux taxes annexes, doivent être présentées à l'administration des impôts au plus tard le 31 décembre de l'année suivant, selon le cas : / a) L'année de la mise en recouvrement du rôle ; / b) L'année de la réalisation de l'événement qui motive la réclamation ; / (...) " ; que les événements susceptibles de rouvrir le délai de réclamation en application du b) de ces dispositions sont ceux qui sont de nature à exercer une influence sur le bien-fondé de l'imposition, soit dans son principe, soit dans son montant ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société RESIDENCES SERVICES GESTION a demandé à l'administration de corriger les bases d'imposition de la taxe professionnelle à laquelle elle avait été assujettie par des réclamations présentées le 2 septembre 2008 au titre des années 2001, 2004 et 2005, pour des imposition mises en recouvrement les 31 octobre 2004 et 31 octobre 2005, soit après l'expiration du délai prescrit au a) de l'article R.*196-2 du livre des procédures fiscales ; qu'elle soutient, toutefois, que le jugement du Tribunal administratif de Lille du 10 avril 2008 qui lui a été notifié à la suite de la contestation qu'elle a introduite pour la résidence d'étudiant dont elle assure l'exploitation à Lille au titre des cotisations à la taxe professionnelle des années 2003, 2004 et 2005 a constitué, en l'espèce, l'événement qui motivait ses réclamations puisque ce jugement a admis, pour la première fois, que la société RESIDENCES SERVICES GESTION soit déchargée des cotisations de taxe professionnelle pour les locaux dont les étudiants avaient la jouissance effective et qui ne pouvaient entrer dans les bases de sa taxe professionnelle en application de la loi fiscale ;
4. Considérant que le jugement du Tribunal administratif de Lille du 10 avril 2008 qui a jugé qu'aucune disposition du 1° de l'article 1469 du code général des impôts, non plus qu'aucune autre disposition législative, ne permettait d'imposer les biens passibles d'une taxe foncière, lorsqu'ils sont donnés en location au nom d'un autre redevable que le locataire final, même dans le cas où celui-ci n'est pas redevable de la taxe professionnelle, ce qui était le cas en l'espèce des étudiants qui avaient la jouissance effective des locaux de la société RESIDENCES SERVICES GESTION en cause et n'étaient pas redevables de la taxe professionnelle, a constitué un évènement susceptible de rouvrir le délai de réclamation pour la société RESIDENCES SERVICES GESTION s'agissant du même contribuable, au titre d'années similaires, dès lors que tant le bien-fondé du principe de l'imposition, soit celui de son assujettissement pour les locaux en cause, que le montant de ses cotisations à la taxe professionnelle s'en trouvaient remis en cause pour ses autres établissements dans lesquels les locataires sont des étudiants ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal a rejeté comme irrecevable la demande dont il était saisi ; que son jugement en date du
2 mai 2012 doit, dès lors, être annulé ;
5. Considérant qu'il appartient à la cour, statuant par la voie de l'évocation, de se prononcer sur la demande présentée par la société RESIDENCES SERVICES GESTION devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
Sur le bien-fondé des impositions :
6. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : " La taxe professionnelle a pour base : 1°(...) a) La valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le contribuable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle (...) " ; que les immobilisations dont la valeur est ainsi intégrée dans l'assiette de la taxe professionnelle sont les biens placés sous le contrôle du redevable et que celui-ci utilise matériellement pour la réalisation des opérations qu'il effectue ;
7. Considérant, d'autre part, qu'aux termes du dernier alinéa du 1° de l'article 1469 du code général des impôts, qui s'applique aux biens passibles d'une taxe foncière : " Les locaux donnés en location à des redevables de la taxe professionnelle sont imposés au nom du locataire (...) " ; que ces dispositions doivent s'entendre comme visant le locataire qui a la jouissance effective des locaux ;
8. Considérant que les étudiants qui ont la jouissance effective des locaux en cause ne sont pas redevables de la taxe professionnelle ; qu'aucune disposition du 1° de l'article 1469 du code général des impôts, non plus qu'aucune autre disposition législative, ne permet d'imposer les biens passibles d'une taxe foncière, lorsqu'ils sont donnés en location au nom d'un autre redevable que le locataire final, même dans le cas où celui-ci n'est pas redevable de la taxe professionnelle ; qu'il y a lieu, dès lors, d'accorder à la société RESIDENCES SERVICES GESTION la réduction des cotisations de taxe professionnelle sollicitée, à raison de la valeur locative des locaux dont les étudiants ont la jouissance, dès lors que ni le principe ni le montant de cette réduction ne sont contestés par l'administration fiscale dans ses écritures et qu'il ne résulte pas de l'instruction que ce montant serait erroné ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société RESIDENCES SERVICES GESTION est fondée à soutenir que c'est à tort que le ministre de l'économie et des finances a maintenu à sa charge les impositions en litige ;
Sur les conclusions de la société RESIDENCES SERVICES GESTION tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société RESIDENCES SERVICES GESTION et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0906363 du 2 mai 2012 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.
Article 2 : La société RESIDENCES SERVICES GESTION est déchargée du montant des cotisations de 28 562 euros, 28 327 euros et 29 788 euros dont elle demande la réduction au titre respectivement des années 2001, 2004 et 2005, dans les rôles de la commune de Nancy.
Article 3 : L'Etat versera à la société RESIDENCES SERVICES GESTION une somme de 2 000 (deux mille) euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société RESIDENCES SERVICES GESTION est rejeté.
''
''
''
''
N° 12VE02457 2