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18/10/2013 | FRANCE | N°12PA02909

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 18 octobre 2013, 12PA02909


Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 2012, présentée pour la société anonyme Figesbal, dont le siège est 20 rue Jean-Baptiste Dezarnaulds à Nouméa (98848), par Me Le Camus ; la société Figesbal demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10205 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie en date du 2 mars 2012 en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clo

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2°) de prononcer la...

Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 2012, présentée pour la société anonyme Figesbal, dont le siège est 20 rue Jean-Baptiste Dezarnaulds à Nouméa (98848), par Me Le Camus ; la société Figesbal demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10205 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie en date du 2 mars 2012 en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2005, ainsi que des intérêts de retard correspondants ;

2°) de prononcer la réduction de l'imposition litigieuse, ainsi que des intérêts de retard correspondants ;

3°) de condamner la Nouvelle-Calédonie aux dépens de l'instance ;

4°) de mettre à la charge de la Nouvelle-Calédonie la somme de 1 000 000 francs CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le service était tenu de rapporter à leurs exercices d'origine, qui étaient prescrits au cours du contrôle, les provisions constituées avant l'ouverture de l'exercice 2005, premier exercice non prescrit, et de corriger le bilan d'ouverture de cet exercice sans pouvoir se fonder, pour faire obstacle à la correction symétrique des bilans, sur la règle de l'intangibilité, qui n'émane en Nouvelle-Calédonie que d'une loi du pays du 24 janvier 2006, dès lors que cette loi n'était pas entrée en vigueur le 31 décembre 2005, date du fait générateur de l'impôt ;

- la provision pour indemnité de départ à la retraite de ses salariés, constituée conformément aux dispositions de l'article 27 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, était déductible des résultats de l'exercice clos en 2005 ;

- les provisions pour risque de non-recouvrement des créances détenues sur les sociétés " Ballande Asia " et " Ballande Australasia ", constituées conformément aux dispositions de l'article 27 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, étaient déductibles des résultats de l'exercice clos en 2005 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 janvier 2013, présenté pour la

Nouvelle-Calédonie, par MeA..., qui conclut, en premier lieu, au rejet de la requête, en deuxième lieu, par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a, d'une part, exclu de la base imposable au titre de l'exercice clos en 2005 la somme de 230 289 984 francs CFP correspondant à la provision constituée au titre de la dépréciation des titres de participation détenus dans le capital de la société Daméfa, et, d'autre part, exclu de la base imposable au titre de l'exercice clos en 2006 la somme de 36 345 360 francs CFP correspondant à des dividendes prescrits, et, en dernier lieu, à la mise à la charge de la société Figesbal de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par la société Figesbal ne sont pas fondés ;

- s'agissant des provisions pour risque de non-recouvrement des créances détenues par la société Figesbal sur les sociétés " Ballande Asia " et " Ballande Australasia ", elle entend se prévaloir, à titre subsidiaire, des dispositions du III de l'article 18 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, qui instituent la présomption légale de transfert indirect de bénéfices ;

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la provision pour dépréciation des titres de participation détenus dans le capital de la société Daméfa n'était pas déductible ; c'est à tort que le tribunal lui a dévolu la charge de la preuve ; la société Figesbal ne justifie pas de la valeur d'utilité des titres en cause par le prix de cession de dix de ces titres ;

- les dividendes prescrits et non réclamés devaient être pris en compte pour la détermination des résultats imposables au titre de l'exercice clos en 2006, à charge pour la société Figesbal de déduire les charges correspondantes au titre de l'exercice de leur reversement au domaine de la Nouvelle-Calédonie ;

Vu, enregistré au greffe le 5 août 2013, le mémoire en réplique présenté pour la société Figesbal et concluant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Elle soutient, en outre, que :

- en tant qu'il concerne l'exclusion, décidée par les premiers juges, de la base imposable au taux normal à cet impôt au titre de l'exercice clos en 2006 de la somme de 36 345 360 F CFP correspondant à des dividendes non réclamés, l'appel incident porte sur un litige distinct et est irrecevable ;

- s'agissant des provisions pour risque de non-recouvrement des créances détenues par la société Figesbal sur les sociétés " Ballande Asia " et " Ballande Australasia ", la Nouvelle-Calédonie ne saurait se prévaloir, à titre subsidiaire, des dispositions du III de l'article 18 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, qui instituent la présomption légale de transfert indirect de bénéfices, dès lors qu'aucun abandon de créance n'a été réalisé au profit des filiales ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 4 octobre 2013, présentée pour la société Figesbal par Me Le Camus ;

Vu la Constitution ;

Vu la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 modifiée, relative à la

Nouvelle-Calédonie ;

Vu la loi du pays n° 2006-2 du 24 janvier 2006 ;

Vu le code des impôts de la Nouvelle-Calédonie ;

Vu la délibération n° 281 du 24 février 1988 du Congrès du Territoire de la

Nouvelle-Calédonie relative au contrat de travail, modifiée par la délibération n° 212/CP du 15 octobre 1997 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2013 :

- le rapport de M. Lemaire, premier conseiller,

- les conclusions de M. Boissy, rapporteur public,

- et les observations de Me Le Camus, avocat de la société Figesbal ;

1. Considérant que la société Figesbal, société holding du groupe Ballande, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007, à l'issue de laquelle elle a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières au titre des trois exercices vérifiés, majorés des intérêts de retard ; que, par un jugement en date du 2 mars 2012, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a prononcé la réduction des impositions litigieuses et rejeté le surplus des conclusions de la demande de la société Figesbal, qui tendait à la décharge de ces impositions ;

2. Considérant que la société Figesbal relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2005 correspondant, d'une part, à la taxation de provisions constituées antérieurement, au cours d'exercices atteints par la prescription, et, d'autre part, à la réintégration aux résultats imposables de provisions constituées en 2005 au titre des indemnités de départ à la retraite de ses salariés et au titre du risque de non-recouvrement de créances détenues sur les sociétés " Ballande Asia " et " Ballande Australasia " ;

3. Considérant que, par la voie de l'appel incident, la Nouvelle-Calédonie demande à la Cour d'annuler le jugement en tant qu'il a exclu de la base imposable à l'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières, d'une part, la somme de 230 289 984 francs CFP, à concurrence de laquelle les premiers juges ont estimé justifiée une provision comptabilisée en 2005 au titre de la dépréciation des titres de participation détenus par la société Figesbal dans le capital de la société Daméfa, et, d'autre part, s'agissant de l'exercice clos en 2006, la somme de 36 345 360 francs CFP correspondant à des dividendes non réclamés ;

Sur l'appel principal de la société Figesbal :

En ce qui concerne le moyen relatif à l'intangibilité du bilan d'ouverture de l'exercice clos en 2005 :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 18 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, dans sa rédaction issue de la loi du pays du 24 janvier 2006 susvisée : " (...) / VI. Pour l'application des dispositions du II, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément à l'article 985 ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci. / (...) " ;

5. Considérant que les dispositions précitées du VI de l'article 18 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, qui établissent la règle de l'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit, étaient en vigueur à la date de la notification de redressements du 19 août 2008 adressée à la société Figesbal ; que cette société ne saurait dès lors soutenir que le service vérificateur aurait dû rapporter à leurs exercices d'origine, qui étaient prescrits lors de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, les provisions constituées avant l'ouverture de l'exercice 2005, premier exercice non prescrit, et qu'il aurait ainsi dû corriger le bilan d'ouverture de cet exercice ;

En ce qui concerne le redressement relatif à la provision constituée en 2005 par la société Figesbal au titre des indemnités de départ en retraite de ses salariés :

6. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 21 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'imposition en litige : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges (...). / Ces charges comprennent, notamment : / (...) / e) Les provisions si elles répondent aux conditions fixées aux articles 27 et suivants. / (...) " ; qu'aux termes de l'article 27 du même code : " I. Les provisions sont admises en déduction du bénéfice imposable lorsqu'elles remplissent les conditions suivants : / Elles doivent : / a) être destinées à faire face soit à une perte ou à la dépréciation d'un élément d'actif, soit à une charge qui, si elle était intervenue au cours de la période d'imposition, aurait normalement pu venir en déduction des bénéfices imposables de cette période ; / b) être probables et non pas simplement éventuelles ; / (...) " ;

7. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 19-3 de la délibération susvisée n° 281 du 24 février 1988 alors en vigueur : " En cas de rupture du contrat de travail pour départ ou mise à la retraite, le salarié a droit sous réserve de dispositions conventionnelles ou contractuelles plus favorables : - s'il quitte volontairement l'entreprise pour bénéficier du droit à la pension de vieillesse prévue par la réglementation territoriale, à une indemnité de départ en retraite égale à un dixième de mois par année de service chez l'employeur ; - lorsque la mise à la retraite résulte d'une décision de l'employeur, à une indemnité de départ en retraite calculée comme suit (...) " ;

8. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de la délibération n° 281 du 24 février 1988 que ce n'est que lorsqu'il quitte volontairement l'entreprise pour bénéficier d'une pension de vieillesse ou lorsqu'il est mis à la retraite en conséquence d'une décision de son employeur, qu'un salarié a droit à une indemnité de départ en retraite ; que c'est donc seulement à compter de la réalisation de l'un de ces deux événements que l'employeur est tenu de verser au salarié une indemnité de départ en retraite, le salarié n'ayant pas droit à une telle indemnité en cas de rupture de son contrat de travail pour un autre motif que son départ à la retraite ; que, dans ces conditions, les charges correspondant au versement à l'ensemble des salariés de la société Figesbal d'indemnités de départ en retraite ne peuvent être regardées comme probables au sens des dispositions susmentionnées de l'article 27 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, justifiant la constitution de la provision déduite par cette société de son bénéfice imposable au titre de l'exercice clos en 2005 ; que c'est dès lors à bon droit que l'administration a réintégré cette provision dans les bases d'imposition de ladite société à l'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières au titre de cet exercice ;

En ce qui concerne le redressement relatif à la provision constituée en 2005 au titre du risque de non-recouvrement de créances détenues par la société Figesbal sur les sociétés " Ballande Asia " et " Ballande Australasia " :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 21 du code des impôts de la

Nouvelle-Calédonie, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges à condition : - de se rattacher à la gestion normale de l'entreprise ou d'être exposées dans l'intérêt de l'exploitation ; / (...) / Ces charges comprennent, notamment : / (...) / e) Les provisions si elles répondent aux conditions fixées aux articles 27 et suivants. / (...) " ; qu'aux termes de l'article 27 du même code : " I. Les provisions sont admises en déduction du bénéfice imposable lorsqu'elles remplissent les conditions suivantes : / Elles doivent : / a) être destinées à faire face soit à une perte ou à la dépréciation d'un élément d'actif, soit à une charge qui, si elle était intervenue au cours de la période d'imposition, aurait normalement pu venir en déduction des bénéfices imposables de cette période ; / b) être probables et non pas simplement éventuelles ; / c) trouver leur source ou leur origine dans des faits intervenus au cours de la période d'imposition ; / d) être nettement précisées ;/ e) avoir effectivement été constatées dans les écritures de l'exercice et figurer sur un relevé spécial. / (...) " ;

10. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées des articles 21 et 27 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie qu'une provision ne peut être admise en déduction du bénéfice imposable qu'à la condition d'être constituée au titre d'une charge ou d'une perte résultant d'une gestion normale ;

11. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la notification de redressements en date du 19 août 2008 adressée à la société Figesbal, que le service a remis en cause la déduction des résultats imposables de l'exercice clos en 2005 d'une provision constituée au titre du risque de non-recouvrement de créances détenues sur la société " Ballande Asia " ; que ces créances correspondent à la rémunération des services, notamment administratifs et financiers, rendus par la société Figesbal à cette filiale ;

12. Considérant qu'il est constant que la société Figesbal a déduit de ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières au titre de l'exercice clos en 2005 une provision pour dépréciation de la totalité des titres de la société " Ballande Asia " ; que, dans ces conditions, le fait de continuer à lui rendre et à lui facturer des services d'un montant manifestement hors de proportion avec sa solvabilité ne saurait être regardé, ainsi que le fait valoir à bon droit la Nouvelle-Calédonie, comme relevant d'une gestion normale ; que la société Figesbal, qui ne saurait se prévaloir de l'intérêt du groupe Ballande, lequel, au demeurant, n'est pas un groupe fiscalement intégré, ne fait valoir aucun intérêt qui lui serait propre et qui aurait pu justifier le maintien, dans ces conditions, de la fourniture de prestations de services à la société " Ballande Asia " ; que, dans ces circonstances, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de ce que les opérations ayant donné lieu aux créances à l'origine de la provision litigieuse ne correspondent pas à une gestion normale ;

13. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la notification de redressements en date du 19 août 2008, que le service a également remis en cause la déduction des résultats imposables de l'exercice clos en 2005 d'une provision constituée par la société Figesbal au titre du risque de non-recouvrement de créances détenues sur une autre de ses filiales, la société " Ballande Australasia ", et qui correspondent à la rémunération de services, notamment administratifs et financiers ;

14. Considérant, d'une part, que si la société Figesbal a également déduit de ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières au titre de l'exercice clos en 2005 une provision pour dépréciation de la totalité des titres de la société " Ballande Australasia ", qui n'a pas été remise en cause par le service vérificateur, il est constant que, pour garantir le financement de l'activité de cette filiale, la société Figesbal avait souscrit, auprès de la banque Westpac, un engagement de caution à concurrence de 100 000 000 francs CFP ; que cet engagement souscrit en 2003, pour une durée d'un an, a ensuite été renouvelé tous les ans ; que le service ne conteste pas le jugement attaqué du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie en tant qu'il a admis la déduction des résultats de l'exercice clos en 2006 de la provision pour risque constatée à ce titre ; que, dans ces conditions, la poursuite de la fourniture de prestations de services à la société " Ballande Australasia " doit être regardée comme répondant à un intérêt financier propre de la société Figesbal ; qu'ainsi, et sans qu'y fassent obstacle les circonstances que la société Figesbal, dont il est constant qu'elle était chargée de la gestion de la société " Ballande Australasia ", n'aurait pas tenté d'obtenir le recouvrement de ses créances et que la provision ait été constituée au titre de l'ensemble des créances détenues sur cette société, la société requérante est fondée à soutenir que la provision litigieuse, qui ne saurait être regardée comme un abandon de créances, était déductible de ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières au titre de l'exercice clos en 2005 ;

15. Considérant, d'autre part, que l'administration est en droit, à tout moment de la procédure contentieuse, de demander qu'une nouvelle base légale soit substituée à celle qu'elle avait primitivement retenue afin de justifier les impositions en litige, pourvu que cette substitution ne prive le contribuable d'aucune des garanties qui lui sont conférées par la loi ;

16. Considérant qu'aux termes de l'article 18 du code des impôts de la

Nouvelle-Calédonie : " (...) / III - Les bénéfices indirectement transférés hors de la Nouvelle-Calédonie, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par la comptabilité. / (...) " ;

17. Considérant que la Nouvelle-Calédonie invoque, devant la Cour, les dispositions du III de l'article 18 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie et demande que la somme déduite des résultats de l'exercice clos en 2005 au titre de la provision pour risque de non-recouvrement des créances détenues sur la société " Ballande Australasia ", dont le siège social se trouve hors de la Nouvelle-Calédonie, soit imposée sur ce fondement à l'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières ;

18. Considérant, toutefois, que la provision litigieuse, qui ne constitue pas un abandon des créances au titre desquelles elle a été comptabilisée, ne saurait être regardée comme un transfert indirect de bénéfices hors de la Nouvelle-Calédonie ; qu'en tout état de cause, ainsi qu'il a été dit au point 14, la poursuite de la fourniture de prestations de services à la société " Ballande Australasia " doit être regardée comme répondant à un intérêt financier propre de la société Figesbal et n'est ainsi pas dépourvue pour elle de toute contrepartie ;

19. Considérant qu'il résulte de tout ce qui a été dit ci-dessus que la société Figesbal est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le service vérificateur a réintégré à ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières au titre de l'exercice clos en 2005 la somme de 22 021 090 francs CFP, déduite au titre de la provision pour risque de non-recouvrement des créances détenues sur la société " Ballande Australasia " ;

Sur l'appel incident de la Nouvelle-Calédonie :

En ce qui concerne la recevabilité des conclusions de l'appel incident :

20. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 2, l'appel de la société Figesbal n'est dirigé contre le jugement attaqué qu'en tant que celui-ci a rejeté ses conclusions tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2005, en tant qu'elle se rapporte à certains chefs de redressement ; que les conclusions incidentes de la

Nouvelle-Calédonie sont notamment dirigées contre le même jugement en tant qu'il a prononcé la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières à laquelle la société Figesbal a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2006 ; que, dans cette mesure, ces conclusions, présentées dans un mémoire enregistré le 9 janvier 2013, soit après l'expiration du délai dont la Nouvelle-Calédonie disposait pour former un appel principal contre le jugement dont elle avait reçu notification le 5 mars 2012, sont relatives à une année d'imposition différente de celle qui fait l'objet de l'appel de la société Figesbal et ne sont, par suite, pas recevables ; que la fin de non-recevoir opposée par la société Figesbal doit dès lors être accueillie ;

En ce qui concerne le surplus des conclusions de l'appel incident :

21. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la notification de redressements du 19 août 2008 adressée à la société Figesbal, que le service vérificateur a remis en cause la déduction des résultats imposables à l'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières au titre de l'exercice clos en 2005 d'une provision pour dépréciation totale des 30 290 titres de participation détenus dans le capital de la société Daméfa, comptabilisée pour un montant de 235 723 332 francs CFP ;

22. Considérant qu'aux termes du III de l'article 20 du code des impôts de la

Nouvelle-Calédonie : " Les valeurs mobilières composant le portefeuille sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / A la fin de chaque exercice, il est procédé à une estimation des titres de participation et des titres de placement. / En ce qui concerne les titres de placement, les titres cotés sont évalués au cours moyen du dernier mois de l'exercice. Les titres non cotés sont évalués à leur valeur probable de négociation. / Les plus-values ou moins-values résultant de cette estimation sont appréciées, pour chaque catégorie de titres de même nature, par rapport à la valeur d'origine globale de l'ensemble de ces titres. / Les plus-values ne sont pas comptabilisées ; par contre, les moins-values sont inscrites au compte de provisions. / (...) / En ce qui concerne les titres de participation, une telle provision ne peut être constituée que si l'entreprise justifie d'une dépréciation réelle de ces titres par rapport à leur prix de revient. / (...) " ; qu'aux termes du II de l'article 19 du même code : " (...) les inscriptions aux différents postes figurant aux comptes, au bilan et aux tableaux que les entreprises sont tenues de fournir en même temps que la déclaration de leur bénéfice imposable, doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général dans la mesure où ces définitions ne sont pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt " ; qu'aux termes de l'article 332-3 du plan comptable général : " A toute autre date que leur date d'entrée, les titres de participation, cotés ou non, sont évalués à leur valeur d'utilité représentant ce que l'entité accepterait de décaisser pour obtenir cette participation si elle avait à l'acquérir. A condition que leur évolution ne résulte pas de circonstances accidentelles, les éléments suivants peuvent être pris en considération pour cette estimation : rentabilité et perspective de rentabilité, capitaux propres, perspectives de réalisation, conjoncture économique, cours moyens de bourse du dernier mois, ainsi que les motifs d'appréciation sur lesquels repose la transaction d'origine " ;

23. Considérant que la société Figesbal, qui a versé au dossier les bilans et comptes de résultats de la société Daméfa, justifie de la dépréciation des titres de participation qu'elle détenait dans le capital de cette société ; que, par ailleurs, il résulte de l'instruction que le 17 février 2005, la société Figesbal a cédé dix actions de la société Daméfa pour un prix unitaire de 181,9 francs CFP ; que l'administration, qui n'a, au demeurant, pas remis en cause ce prix de vente, au cours de la vérification de comptabilité de la société Figesbal, et la moins-value de cession de 76 003 francs CFP correspondante, retenue pour le calcul de la plus-value nette de cession de l'exercice clos en 2005, se borne à se prévaloir de rapports de gestion établis au titre d'exercices postérieurs à l'exercice au cours duquel a été constituée la provision litigieuse ; que, dans ces conditions, et alors même que la vente de dix actions de la société Daméfa en février 2005 aurait été réalisée pour permettre l'arrivée d'un nouvel associé, qui a souscrit à une augmentation de capital au mois de mars 2006, le prix de vente unitaire de ces actions, déterminé peu de temps avant la constitution de la provision litigieuse, doit être regardé, en l'absence d'éléments contraires, comme la valeur d'utilité des titres de participation en cause ; qu'il s'ensuit que la provision litigieuse doit être regardée comme justifiée à concurrence de la somme de 230 213 581 francs CFP, calculée sur la base d'une valeur d'utilité de 181,9 francs CFP par titre pour 30 290 titres de participation, et non de la somme de 230 289 984 francs CFP, comme l'ont estimé à tort les premiers juges, qui ont omis de tenir compte, pour le calcul de la provision justifiée, de la réduction du nombre de titres détenus par la société Figesbal à la suite de la cession de dix titres en février 2005 et de la reprise correspondante, à la clôture de l'exercice 2005, d'une partie de la provision initialement comptabilisée ;

24. Considérant qu'il s'ensuit que la Nouvelle-Calédonie est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a exclu la somme de 76 403 francs CFP de la base imposable à l'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières de la société Figesbal au titre de l'exercice clos en 2005 ;

25. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Figesbal est seulement fondée à demander la réduction des bases imposables à l'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières dû au titre de l'exercice clos en 2005 à concurrence de la somme de 21 944 687 francs CFP, ainsi que la décharge correspondante de la cotisation supplémentaire à laquelle elle a été assujettie et des intérêts de retard correspondants ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation de la Nouvelle-Calédonie aux dépens de l'instance :

26. Considérant qu'en vertu des dispositions du second alinéa de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les dépens sont mis à la charge de la partie perdante, sous réserve de dispositions ou de circonstances particulières justifiant qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties ;

27. Considérant que la Nouvelle-Calédonie n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel ; que, par suite, en l'absence de dispositions ou de circonstances particulières justifiant que les dépens soient mis partiellement ou totalement à la charge de l'Etat, les conclusions de la société Figesbal tendant à ce que la Nouvelle-Calédonie supporte, au titre des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, la somme qu'elle a exposée au titre de la contribution pour l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

28. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Nouvelle-Calédonie, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel, le versement à la société Figesbal de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la société Figesbal le versement à la Nouvelle-Calédonie de la somme qu'elle demande au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les bases imposables à l'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières dû par la société Figesbal au titre de l'exercice clos en 2005 sont réduites de la somme de 21 944 687 francs CFP.

Article 2 : La société Figesbal est déchargée de la fraction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et activités métallurgiques ou minières à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2005 résultant de la réduction des bases d'imposition définie à l'article 1er, ainsi que des intérêts de retard correspondants.

Article 3 : Le jugement n° 10205 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie en date du 2 mars 2012 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Figesbal et le surplus des conclusions de l'appel incident de la Nouvelle-Calédonie sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme Figesbal et à la Nouvelle-Calédonie.

Copie en sera adressée au ministre des Outre-Mer.

Délibéré après l'audience du 4 octobre 2013, à laquelle siégeaient :

- Mme Driencourt, président,

- M. Couvert-Castéra, président-assesseur,

- M. Lemaire, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 18 octobre 2013.

Le rapporteur,

O. LEMAIRELe président,

L. DRIENCOURT

Le greffier,

J. BOUCLY

La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12PA02909


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA02909
Date de la décision : 18/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

46-01-03-02-02 Outre-mer. Droit applicable. Lois et règlements (hors statuts des collectivités). Collectivités d'outre-mer et Nouvelle-Calédonie. Nouvelle-Calédonie.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: M. Olivier LEMAIRE
Rapporteur public ?: M. BOISSY
Avocat(s) : BIGNON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-10-18;12pa02909 ?
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