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13/06/2013 | FRANCE | N°12NT03341

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 13 juin 2013, 12NT03341


Vu, enregistrée sous le n° 12NT03341, la décision du 14 décembre 2012 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, saisi d'un pourvoi présenté pour Mme B..., annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes en date du 29 septembre 2008 en tant qu'il statue sur la responsabilité de l'Etat à raison du fonctionnement du service chargé du recouvrement des créances de l'Etat en ce qui concerne la créance déclarée le 23 novembre 1994 et a renvoyé dans cette mesure l'affaire devant la même cour ;

Vu les conclusions de la requête, enregistrée le 23 f

vrier 2007 sous le n° 07NT00495, présentée pour Mme A... B..., demeurant...

Vu, enregistrée sous le n° 12NT03341, la décision du 14 décembre 2012 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, saisi d'un pourvoi présenté pour Mme B..., annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes en date du 29 septembre 2008 en tant qu'il statue sur la responsabilité de l'Etat à raison du fonctionnement du service chargé du recouvrement des créances de l'Etat en ce qui concerne la créance déclarée le 23 novembre 1994 et a renvoyé dans cette mesure l'affaire devant la même cour ;

Vu les conclusions de la requête, enregistrée le 23 février 2007 sous le n° 07NT00495, présentée pour Mme A... B..., demeurant..., par Me Perreau, avocat au barreau de Quimper tendant à l'annulation du jugement n° 03-4238 du 21 décembre 2006 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la réparation des préjudices subis résultant d'une faute des services chargés du recouvrement lors de la déclaration de créances effectuée le 24 novembre 1994 par le trésorier de Brest pour un montant de 24 772 644 francs et de condamner l'Etat à lui verser en réparation de ces préjudices une somme de 1 322 399,25 euros ;

Elle soutient que :

- cette déclaration de créances était prématurée ; elle a été effectuée avant même qu'elle ne produise avec son époux des observations sur la notification de redressements du 24 novembre 1994 ; le montant des droits et pénalités mis à leur charge à cette date était excessif puisqu'il sera ultérieurement réduit ; cette déclaration de créances est à l'origine de la liquidation judiciaire de M. B... prononcée le 15 décembre 1994 et par suite de la vente forcée de leurs immeubles ;

- elle a subi un préjudice moral pouvant être évalué à 300 000 euros dont elle doit être

indemnisée comme elle doit être indemnisée du préjudice financier subi du fait de cette vente forcée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 juillet 2007, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; il conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- la créance dont se prévaut Mme B... est prescrite dès lors qu'elle se rapporte à des faits antérieurs à 1999 ;

- les services du recouvrement n'ont pas commis de faute en mettant en oeuvre les voies de droit dont l'administration disposait pour préserver les intérêts de l'Etat ; l'ouverture des différentes procédures collectives n'est pas imputable à l'administration fiscale ;

- Mme B... ne justifie pas d'un lien de causalité entre une faute de l'administration et les préjudices qu'elle prétend avoir subis ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 10 janvier 2008, présenté pour Mme B... qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ; elle soutient en outre que sa créance n'est pas prescrite dès lors qu'elle n'a pas eu connaissance d'une réduction des droits et pénalités qui leur ont été initialement réclamés avant 1999 ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 22 mai 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique qui conclut comme précédemment par les mêmes moyens ; il soutient en outre que Mme B... n'ignorait pas avant 1999 que la mise en oeuvre de la procédure de vente par adjudication de leurs biens immobiliers était la conséquence de la mise en liquidation judiciaire de son époux ; qu'elle n'ignorait pas davantage l'existence d'une dette fiscale puisque les impôts et pénalités ont été mis en recouvrement au nom du foyer fiscal et notifiés à leur domicile personnel ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 8 avril 2013, présenté par le ministre délégué chargé du budget ; il conclut comme précédemment au rejet de la requête de Mme B... par les mêmes moyens ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 30 avril 2013, présenté pour Mme B... ; elle conclut par les mêmes moyens aux mêmes fins que la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 13 mai 2013, présenté pour Mme B... ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 17 mai 2013, présenté par le ministre délégué chargé du budget ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 mai 2013 :

- le rapport de M. Etienvre, premier conseiller ;

- les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public ;

- et les observations de Me Le Friant, avocat de Mme B... ;

1. Considérant que des sociétés du groupe Gymnasium, dont M. B... était soit le principal soit l'unique associé, ont fait l'objet en 1994 de contrôles au titre des exercices 1991 et 1992, à l'issue desquels divers redressements ont été notifiés, résultant en particulier, pour la société anonyme Gymnasium Franchise, d'une minoration de recettes que l'administration a regardée comme des bénéfices distribués entre les mains de M. B... ; que le service a notifié le 24 novembre 1994 à M. et Mme B... des redressements au titre de l'impôt sur le revenu pour les années 1991 et 1992 d'un montant en droits et pénalités de 24 772 644 francs, résultant pour l'essentiel de cette distribution de bénéfices ; que, par ailleurs, le tribunal de grande instance de Brest a ouvert, par un jugement du 7 juillet 1994 une procédure de redressement judiciaire à l'égard de M. B... ; que la trésorerie de Brest a déclaré plusieurs créances au passif de cette procédure ; qu'en particulier, par courrier du 23 novembre 1994, reçu le 24, elle a déclaré une créance n° 17 à titre provisionnel de 24 772 644 francs correspondant aux rehaussements d'impôt sur le revenu des épouxB... ; que, par un jugement du 15 décembre 1994, le tribunal de grande instance de Brest a prononcé la mise en liquidation judiciaire de M. B... ; que, dans ce cadre, le mandataire liquidateur a procédé à la vente de divers biens immobiliers et mobiliers appartenant aux époux B... ; que, le 10 juin 2003, Mme B... a demandé à l'administration la réparation des préjudices matériels et moraux qu'elle aurait subis du fait de la vente forcée de ses biens résultant de la mise en liquidation de son époux qu'elle impute aux fautes qu'aurait commises l'administration lors des opérations d'assiette et de recouvrement ; que devant le refus de l'administration, Mme B... a saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande indemnitaire qui a été rejetée par un jugement du 21 décembre 2006 ; que Mme B... s'est pourvue en cassation contre l'arrêt du 29 septembre 2008 par lequel la cour a rejeté sa requête ; que, par une première décision du 30 décembre 2011, le Conseil d'Etat a rejeté les conclusions du pourvoi de Mme B... dirigées contre le bien-fondé de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 29 septembre 2008 en tant qu'il porte sur la responsabilité de l'Etat pour faute du service chargé de l'établissement de l'impôt ; que, par une seconde décision du 14 décembre 2012, le Conseil d'Etat a annulé le même arrêt en tant qu'il statue sur la responsabilité de l'Etat à raison du fonctionnement du service chargé du recouvrement en ce qui concerne la créance déclarée le 23 novembre 1994 et renvoyé dans cette mesure l'affaire à cette cour ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 50 de la loi susvisée du 25 janvier 1985 dont les termes ont été repris à l'article L. 621-43 du code de commerce : "A partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au représentant des créanciers. Les créanciers titulaires d'une sûreté ayant fait l'objet d'une publication ou d'un contrat de crédit-bail publié sont avertis personnellement et, s'il y a lieu, à domicile élu. La déclaration des créances peut être faite par le créancier ou par tout préposé ou mandataire de son choix. La déclaration des créances doit être faite alors même qu'elles ne sont pas établies par un titre. Les créances du Trésor public (...) qui n'ont pas fait l'objet d'un titre exécutoire au moment de leur déclaration sont admises à titre provisionnel pour leur montant déclaré. En tout état de cause, les déclarations du Trésor (...) sont toujours faites sous réserve des impôts et autres créances non établis à la date de la déclaration ; sous réserve des procédures judiciaires ou administratives en cours, leur établissement définitif doit, à peine de forclusion, être effectué dans le délai prévu à l'article 100 (...)" ;

3. Considérant que Mme B... reproche aux services chargés du recouvrement de la créance de l'Etat d'avoir déclaré, dès le 23 novembre 1994, dans le cadre de la procédure collective ouverte à l'égard de son époux, la créance n° 17 d'un montant de 24 772 644 francs correspondant aux droits et pénalités figurant dans la notification de redressement du 24 novembre 1994 qui lui a été notifiée le lendemain ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que cette déclaration n'a été faite, en vertu des dispositions précitées, qu'à titre provisionnel ; qu'une telle déclaration pouvait ainsi être effectuée sans que, d'une part, l'administration soit tenue au préalable de notifier aux époux B...la notification de redressement dont procédait la créance et alors même, d'autre part, que consécutivement à la poursuite de la procédure de redressement, et notamment dans la réponse du service aux observations du contribuable du 6 juillet 1995, le montant des droits et pénalités susmentionné a été réduit ; que les services du Trésor n'ayant dès lors commis aucune faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat, le surplus des conclusions de la requête de Mme B... ne peut qu'être rejeté ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre délégué chargé du budget à la demande de première instance et l'exception de prescription opposée par le même ministre, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande en tant qu'elle tendait à la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices subis à raison d'une faute commise par les services chargés du recouvrement lors de la déclaration de créances effectuée le 23 novembre 1994 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme demandée par Mme B... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les conclusions de la requête de Mme B... tendant à la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices subis à raison d'une faute des services chargés du recouvrement sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions de Mme B... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Piot, président de chambre,

- M. Etienvre, premier conseiller,

- Mme Coiffet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 juin 2013.

Le rapporteur,

F. ETIENVRELe président,

J-M. PIOT

Le greffier,

C. CROIGER

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N° 12NT03341


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12NT03341
Date de la décision : 13/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PIOT
Rapporteur ?: M. Franck ETIENVRE
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : LE FRIANT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-06-13;12nt03341 ?
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