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28/03/2013 | FRANCE | N°12NC01362

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 28 mars 2013, 12NC01362


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 31 juillet 2012, présentée pour la commune d'Aubigny-les-Pothées, représentée par son maire, à ce dûment habilité, élisant domicile à l'hôtel de ville à Aubigny-les-Pothées (08150), par la société d'avocats Huglo Lepage et associés conseil ;

La commune d'Aubigny-les-Pothées demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000486 en date du 14 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne lui a enjoint de reprendre les relations contractuelles avec la communauté d'agglomération d

e Charleville Mézières ;

2°) de rejeter la demande de la communauté d'agglomération...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 31 juillet 2012, présentée pour la commune d'Aubigny-les-Pothées, représentée par son maire, à ce dûment habilité, élisant domicile à l'hôtel de ville à Aubigny-les-Pothées (08150), par la société d'avocats Huglo Lepage et associés conseil ;

La commune d'Aubigny-les-Pothées demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000486 en date du 14 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne lui a enjoint de reprendre les relations contractuelles avec la communauté d'agglomération de Charleville Mézières ;

2°) de rejeter la demande de la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières ;

3°) subsidiairement, d'ajouter une clause à la convention du 16 décembre 1935 visant à ce que la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières lui verse une redevance d'occupation du domaine public ;

4°) plus subsidiairement, de nommer avant dire droit un expert afin qu'il fixe les modalités de calcul de cette redevance d'occupation du domaine public ;

5°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la demande de la communauté d'agglomération n'était pas recevable dès lors qu'elle n'a pas entendu saisir les premiers juges d'un recours de plein contentieux tendant à la reprise des relations contractuelles, mais uniquement de conclusions en annulation de la décision de résiliation de la convention du 16 novembre 1935 ;

- elle est fondée à se prévaloir d'un motif d'intérêt général justifiant la résiliation de la convention du 16 novembre 1935, dès lors que ladite convention n'a prévu le versement d'aucune redevance d'occupation du domaine public, que les circonstances de fait et de droit qui ont prévalu lors de la conclusion de la convention ont changé, qu'elle souhaite réorganiser son service public et qu'il y a mésentente entre les deux cocontractants ;

- elle peut conclure une nouvelle convention avec la communauté d'agglomération ;

- la délibération du 23 septembre 2009 autorisant son maire à résilier la convention est régulière dès lors que les membres du conseil municipal ont été suffisamment informés avant l'adoption de la délibération, qui n'était pas prématurée ; le conseil municipal était suffisamment informé sur les conséquences financières de la résiliation ;

- la décision du maire de résilier la convention, en date du 11 janvier 2010, était suffisamment motivée ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 février 2013, présenté pour la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières, représentée par son président, élisant domicile 49 avenue Léon Bourgeois à Charleville-Mézières (08003), par Me Pugeault, avocat ;

Elle conclut au rejet de la requête et de mettre à la charge de la commune d'Aubigny-les-Pothées la somme de 10 000 euros chacun au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la procédure de mise en oeuvre d'une déclaration d'utilité publique en 1931, telle qu'invoquée par la commune, n'a pas été à son terme ; une seconde déclaration d'utilité publique a été adoptée par arrêté du 9 mai 1936 ; la seconde déclaration d'utilité publique a constitué la commune de Charleville-Mézières en qualité de seule exploitante en titre et régulière des sources de la Grande Fontaine et de la Fontaine Saint Martin ;

- l'article 2 de l'arrêté de déclaration d'utilité publique du 2 juin 2008 prévoit des quantités suffisantes d'alimentation en eau ; si ledit arrêté a été annulé pour un motif de légalité externe, un nouvel arrêté a été édicté le 16 novembre 2012 ;

- la requête de la communauté d'agglomération était recevable devant le Tribunal administratif ;

- la décision de résiliation n'est fondée sur aucun motif d'intérêt général dès lors que :

* l'exécution de la convention du 16 novembre 1935 permet à la commune de disposer d'un volume d'eau suffisant ;

* la commune ne justifie pas être en mesure de disposer du captage de la Grande Fontaine et des ouvrages implantés ;

* la circonstance que ce captage permet de desservir un nombre d'usagers plus importants que ce qui était envisagé en 1935 n'altère pas la finalité de la convention ;

* le maintien de la convention est conforme à l'intérêt général ;

- le motif tiré de la nécessité de réorganiser le service public de fourniture de l'eau n'est pas établi ;

- la communauté d'agglomération n'occupe pas gratuitement la parcelle C 102 dès lors qu'elle fournit à la commune depuis 1935 une eau gratuite ;

- la communauté d'agglomération est la gestionnaire exclusive de la parcelle C 2 N° 102, et elle capte l'eau de la Fontaine Saint Martin sur des terrains lui appartenant ;

- le motif financier invoqué n'est pas le motif d'intérêt général invoqué dans la décision litigieuse pour justifier la résiliation ;

- la question de l'éventuelle indemnisation de la commune du fait de l'occupation par la communauté d'agglomération de la parcelle C 2 n° 102 sera réglée par la convention de transfert de gestion à conclure entre les parties suite à l'arrêté de déclaration d'utilité publique du 16 novembre 2012 ;

- aucun changement de circonstances ne justifie la résiliation ;

- la résiliation porte atteinte au principe constitutionnel de continuité du service public ;

- la délibération du 23 septembre 2009 est irrégulière car les membres du conseil municipal n'ont pas été suffisamment informés du contexte et des enjeux de la décision de résiliation ;

- la demande subsidiaire d'une modification des clauses de la convention de 1935 est nouvelle à hauteur d'appel, et par suite irrecevable ; au surplus, l'arrêté du 16 novembre 2012 prévoit en son article 8 alinéa 2 le transfert en gestion de la parcelle section C 2 n° 102 au bénéfice de la communauté d'agglomération ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 1er mars 2013, présenté pour la commune d'Aubigny-les-Pothées, qui conclut aux mêmes fins que la requête et soutient en outre que :

- la procédure de mise en oeuvre de la déclaration d'utilité publique de 1931 a été menée à son terme ;

- la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières ne peut se prévaloir de l'arrêté de déclaration d'utilité publique du 16 novembre 2012 dès lors qu'il fait l'objet d'un recours devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ; qu'au surplus, cet arrêté ne prévoit pas d'instaurer une convention de gestion entre la commune et la communauté d'agglomération ;

- l'interdiction qui lui est faite de résilier le contrat alors que l'équilibre de celui-ci a été bouleversé est contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales garanti par l'article 72 de la Constitution ;

- elle a réalisé de nombreux travaux d'aménagement et d'entretien à ses frais ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 mars 2013 :

- le rapport de M. Vincent, président de chambre,

- les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public,

- et les observations de Me Menard, avocat de la commune d'Aubigny-les-Pothées ;

1. Considérant que, par une convention signée le 16 novembre 1935, approuvée par le préfet le 18 décembre 1935, la commune d'Aubigny et la commune de Charleville sont convenues que les immeubles et installations, réalisés par la commune d'Aubigny en vue de son alimentation en eau désignés : " commune d'Aubigny, section B-Le Pré des Saules-n° 93 p et section C - Au dessus de la Grand Fontaine - nos 391 p ; 392 p - drains et galerie de captages - mur d'arrêt, regard de captage des eaux de la Grande Fontaine, regard de batterie du bélier, regard du bélier, conduite d'alimentation du regard de batterie, conduite de batterie, bélier hydraulique et ses accessoires, conduite de refoulement jusqu'au réservoir d'Aubigny " seraient gérés par la commune de Charleville ; qu'en contrepartie, cette commune s'est engagée à maintenir les ouvrages en bon état, à assurer l'alimentation suffisante du réservoir de la commune d'Aubigny ; que le versement d'une somme nette et forfaitaire de 125 000 F a également été prévu ; qu'il résulte de l'exposé des motifs de la convention que cette dernière avait pour objet de permettre à la commune de Charleville d'utiliser les eaux de fuite du bélier provenant de Grande Fontaine afin de renforcer son alimentation en eau, en contrepartie de quoi elle s'engageait à assurer la gestion des équipements de captage et l'alimentation en eau d'Aubigny en provenance de cette source ; que la commune de Charleville-Mézières s'est substituée à la commune de Charleville en 1966 ; qu'ultérieurement, en 2005, la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières s'est substituée à la commune de Charleville-Mézières pour gérer les ouvrages de captage des eaux ; que, par une délibération du 23 septembre 2009, le conseil municipal de la commune d'Aubigny-les-Pothées a estimé que la convention du 16 novembre 1935 devait être résiliée pour motif d'intérêt général et a autorisé le maire à procéder à cette résiliation ; que, par une décision en date du 11 janvier 2010, le maire d'Aubigny-les-Pothées a prononcé la résiliation de la convention ; que, par le jugement contesté, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, après avoir estimé illégale ladite résiliation, a enjoint à la commune de reprendre les relations contractuelles avec la communauté d'agglomération de Charleville Mézières ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que si la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières a seulement demandé aux premiers juges d'annuler la décision unilatérale de résiliation de la convention du 16 novembre 1935 prise par la commune d'Aubigny-les-Pothées, le juge du contrat, saisi d'un recours contre une mesure de résiliation, doit se considérer comme également saisi d'une demande de reprise des relations contractuelles ; que, par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé qu'en contestant la validité de la résiliation de la convention du 16 novembre 1935 et en sollicitant en conséquence l'annulation de la décision de résiliation du 11 janvier 2010, la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières devait être regardée comme exerçant un recours de plein contentieux tendant à la reprise des relations contractuelles ;

Sur le bien-fondé de la résiliation :

3. Considérant, en premier lieu, qu'il n'est pas contesté que la parcelle C n° 102 sur laquelle se situent les ouvrages de captage de la source de la Grande Fontaine, affectée au service public de la distribution de l'eau qu'elle concourt à assurer et aménagée à cet effet, constitue une dépendance du domaine public de la commune d'Aubigny-les-Pothées ; qu'il est constant que la convention litigieuse ne prévoit le versement d'aucune redevance d'occupation du domaine public ; que la commune justifie sa volonté de résilier la convention afin d'instaurer une telle redevance par la double circonstance, d'une part, que l'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques dispose que " Toute occupation ou utilisation du domaine public (...) donne lieu au versement d'une redevance (...) " alors que la convention n'a prévu que le versement d'une somme forfaitaire de 125 000 francs qui, ramenée au nombre d'années d'occupation, représente une somme de 247 euros par an, et, d'autre part, que ladite convention ne rentre dans aucune des dérogations au principe de gratuité prévu par l'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques ; que, toutefois, la convention litigieuse doit être regardée non comme constituant une convention d'occupation du domaine public de la commune d'Aubigny-les-Pothées, mais, eu égard aux termes de son exposé des motifs et de son article 1er, comme opérant un transfert de gestion des immeubles dépendant de son domaine public pour permettre à la personne publique bénéficiaire de gérer ces immeubles en fonction de leur affectation, comme le permettent les dispositions de l'article L. 2123-3 du code général de la propriété des personnes publiques ; que si la rémunération d'un tel transfert de gestion est prévue par l'article L. 2123-6 dudit code, qui précise que " Le transfert de gestion prévu aux articles L. 2123-3 à L. 2123-5 donne lieu à indemnisation à raison des dépenses ou de la privation de revenus qui peuvent en résulter pour la personne dessaisie " , la commune d'Aubigny-les-Pothées n'établit pas, contrairement à ce qu'elle soutient, avoir exposé des dépenses ou été privée de revenus du fait de ce dessaisissement ; qu'en effet, la commune a été indemnisée des travaux réalisés avant l'entrée en vigueur de la convention par la somme forfaitaire de 125 000 francs prévue par son article 6, qui correspond uniquement à cet objet ; que si elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, avoir réalisé à ses frais " de nombreux travaux d'aménagement et d'entretien " ainsi que l'établiraient des factures produites en première instance, le dossier de première instance ne comporte aucune facture produite par ses soins ; que la commune d'Aubigny-les-Pothées, qui n'a au demeurant vocation à utiliser le captage que pour sa propre alimentation, n'allègue par ailleurs pas avoir subi une perte de revenus ou être exposée à une telle perte de revenus dans l'avenir ; qu'en tout état de cause, à supposer même que, comme le soutient la requérante, la convention litigieuse puisse être regardée comme constituant une convention d'occupation de son domaine public, l'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques prévoit une dérogation au principe de versement d'une redevance lorsque l'occupation contribue directement à assurer la conservation du domaine public, ce qui est le cas en l'espèce, contrairement à ce que soutient la commune, dès lors que l'utilisation du captage par la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières contribue à sa conservation ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la commune d'Aubigny-les-Pothées fait également valoir que la convention de 1935, par laquelle la commune de Charleville s'engage à garantir à ses frais la quantité d'eau nécessaire pour assurer l'alimentation de la commune sur la base de 125 litres par jour et par habitant, limite au demeurant franchie sans qu'il soit allégué que la communauté de communes ait jamais manqué à son engagement, ne lui garantirait plus une telle quantité minimale dès lors que l'arrêté du 2 juin 2008 portant déclaration d'utilité publique de dérivation des eaux souterraines de la source de la Grande Fontaine limiterait la quantité d'eau des installations à 50 m3 par jour et qu'ainsi les quantités d'eau à prélever seraient désormais fixées par le préfet des Ardennes et non plus par la convention de 1935 ; que, toutefois, l'article 2 dudit arrêté invoqué par la requérante est relatif au volume des eaux traitées et non des eaux extraites ; qu'au surplus, l'arrêté du 16 novembre 2012, qui s'est substitué à celui du 2 juin 2008, ne fixe aucun volume global maximal d'eau susceptible d'être puisée pour alimenter la commune d'Aubigny-les-Pothées ;

5. Considérant, en troisième lieu, que la commune d'Aubigny-les-Pothées fait également valoir la circonstance que la source n'a plus désormais vocation à alimenter la seule ville de Charleville-Mézières, mais la totalité des communes membres de la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières ainsi que divers établissements publics de coopération intercommunale spécialisés ; que, toutefois, l'augmentation des prélèvements en eau qui résulte d'un accroissement de la population desservie n'entraîne aucun bouleversement des relations contractuelles dès lors qu'elle demeure sans incidence sur l'alimentation en eau de la commune d'Aubigny-les-Pothées, dont les besoins se sont au demeurant également accrus sans qu'il soit allégué, comme il vient d'être dit, que la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières ait jamais manqué à son engagement de fournir gratuitement en eau la commune, la convention litigieuse ne comportant par ailleurs aucune quantité maximale susceptible d'être prélevée ni population desservie maximale ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que la commune justifie également la résiliation de la convention par l'intention qui serait celle de la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières de lui faire payer une prestation concernant la remontée de l'eau de source depuis le captage jusqu'à la chambre à vannes ; que, toutefois, la circonstance que, par une correspondance au demeurant postérieure à la résiliation litigieuse, la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières a effectué une simulation du coût de l'alimentation en eau de la commune au moyen d'une " facture ", et ce afin d'attirer l'attention de la commune sur les avantages résultant pour elle de la convention qu'elle souhaite rompre, ne saurait être regardée comme valant intention de lui facturer ce service ;

7. Considérant, en cinquième lieu, que la commune soutient que la résiliation de la convention répond également à la nécessité de réorganiser le service public afin de moderniser et d'étendre le réseau d'eau potable pour alimenter une collectivité religieuse et diverses exploitations agricoles et qu'elle aurait été confrontée au refus de la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières de se raccorder directement à cet effet à la source de la Grande Fontaine, ce qui l'a conduit à prévoir un système de raccordement plus onéreux ; que, toutefois, il résulte des termes de la convention de 1935 que celle-ci ne régit que la production d'eau et non son transport et sa distribution ; qu'une éventuelle réorganisation de la distribution de l'eau est ainsi sans incidence sur la convention litigieuse ;

8. Considérant, en sixième lieu, que si la requérante fait également valoir que la convention ferait obstacle à ce qu'elle entretienne les ouvrages lui appartenant, qui seraient selon elle vétustes, il ne résulte pas de l'instruction que l'état actuel des installations, que la communauté d'agglomération assure au demeurant entretenir régulièrement, ait jamais réduit la quantité ou nui à la qualité de l'eau fournie à la commune ;

9. Considérant, en dernier lieu, que s'il est constant qu'il existe une mésentente entre la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières et la commune d'Aubigny-les-Pothées, et que celle-ci entend retrouver la maîtrise de son alimentation en eau, cette seule circonstance ne saurait légalement justifier la résiliation de la convention ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la résiliation de la convention de 1935 ne répond à aucun motif d'intérêt général ; que c'est ainsi à juste titre que les premiers juges ont estimé que cette résiliation était illégalement intervenue ;

Sur la reprise des relations contractuelles :

11. Considérant qu'il incombe au juge du contrat, saisi par une partie d'un recours de plein contentieux contestant la validité d'une mesure de résiliation et tendant à la reprise des relations contractuelles, lorsqu'il constate que cette mesure est entachée de vices relatifs à sa régularité ou à son bien-fondé, de déterminer s'il y a lieu de faire droit, dans la mesure où elle n'est pas sans objet, à la demande de reprise des relations contractuelles, à compter d'une date qu'il fixe, ou de rejeter le recours, en jugeant que les vices constatés sont seulement susceptibles d'ouvrir, au profit du requérant, un droit à indemnité ; que, pour déterminer s'il y a lieu de faire droit à la demande de reprise des relations contractuelles, il incombe au juge du contrat d'apprécier, eu égard à la gravité des vices constatés et, le cas échéant, à celle des manquements du requérant à ses obligations contractuelles, ainsi qu'aux motifs de la résiliation, si une telle reprise n'est pas de nature à porter une atteinte excessive à l'intérêt général ;

12. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, l'intérêt général milite en faveur du maintien de la poursuite des relations contractuelles entre la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières et la commune d'Aubigny-les-Pothées, le captage des eaux de la source de la Grande Fontaine permettant d'alimenter en eau plus du tiers de la population départementale ; qu'eu égard à l'importance de la ressource en eau ainsi prélevée, il n'est pas établi que, comme le soutient la commune, l'intérêt général serait préservé quand bien même la convention serait résiliée dès lors que la communauté d'agglomération de Charleville Mézières est également alimentée en eau par d'autres captages ; que c'est ainsi à juste titre que le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a enjoint à la requérante de reprendre les relations contractuelles avec la communauté d'agglomération de Charleville Mézières ; qu'eu égard à ce qui précède, la requérante ne saurait utilement faire valoir que la décision du Tribunal en ce sens serait constitutive d'une interdiction de résilier un contrat en méconnaissance du principe de libre administration des collectivités territoriales garanti par l'article 72 de la Constitution ; qu'enfin, eu égard aux motifs qui précèdent, la commune d'Aubigny-les-Pothées ne saurait demander à titre subsidiaire d'ajouter à la convention litigieuse une clause visant à ce que la communauté d'agglomération de Charleville Mézières lui verse une redevance l'occupation de son domaine public ;

13. Considérant qu'il s'ensuit que la requête de la commune d'Aubigny-les-Pothées ne peut qu'être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à charge de la commune de la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières le paiement à la commune d'Aubigny-les-Pothées de la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la requérante, au bénéfice de la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières, une somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune d'Aubigny-les-Pothées est rejetée.

Article 2 : La commune d'Aubigny-les-Pothées versera à la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Aubigny-les-Pothées et à la communauté d'agglomération de Charleville-Mézières.

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12NC01362


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC01362
Date de la décision : 28/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Domaine - Domaine public - Régime - Occupation - Utilisations privatives du domaine - Contrats et concessions.

Eaux - Ouvrages - Établissement des ouvrages - Prises d'eau.

Marchés et contrats administratifs - Fin des contrats - Résiliation - Motifs.

Marchés et contrats administratifs - Fin des contrats - Résiliation - Pouvoirs du juge.


Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Pierre VINCENT
Rapporteur public ?: Mme GHISU-DEPARIS
Avocat(s) : HUGLO LEPAGE et ASSOCIÉS - SCP

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-03-28;12nc01362 ?
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