Vu la requête, enregistrée le 26 mars 2012, présentée pour M. Georges A, domicilié 5 allée Euphrosyne à Saint-Genis Laval (69230) ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1105241 du 24 janvier 2012 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a limité à 3 500 euros le montant de la somme mise à la charge solidaire de La Poste et de l'Etat en réparation du préjudice qu'il a subi en raison du blocage de sa carrière dans un corps de "reclassement" ;
2°) de condamner La Poste et l'Etat à lui verser solidairement la somme globale de 104 048 euros au titre des différents préjudices subis, avec intérêt au taux légal à compter de sa demande préalable ;
3°) de mettre à la charge solidaire de La Poste et de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- l'Etat a commis une faute lourde dans le cadre de la tutelle ;
- le blocage de carrière dont il a été la victime trouve bien son origine dans les fautes commises par l'Etat et la Poste, qui lui ont causé une perte de chance sérieuse de promotion ;
- il a subi, à raison du blocage de sa carrière, un préjudice professionnel et matériel, résultant du gel de sa carrière depuis 1993 alors qu'il devait bénéficier d'un déroulement de carrière selon la procédure normale, eu égard à sa notation, et il a subi un manque à gagner concernant son traitement et les primes afférentes ; il a subi également des troubles dans ses conditions d'existence, en raison de son défaut d'avancement et de l'absence de revenu correspondant à une carrière normale, ainsi qu'un préjudice moral, en raison notamment d'une "mise au placard" ;
- le préjudice qu'il a subi, en raison de la perte d'une chance sérieuse d'avancement, doit être chiffré à la somme de 54 048 euros, en raison de sa perte financière, à 30 000 euros, en raison d'un préjudice professionnel, à hauteur de 15 000 euros, au titre de son préjudice moral et à 5 000 euros au titre des troubles dans ses conditions d'existence ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 25 mai 2012, présenté pour le ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- le dommage allégué par M. A n'est ni certain ni établi, l'intéressé ne démontrant pas avoir été privé d'une chance sérieuse de promotion ;
- il n'existe pas de lien de causalité entre la prétendue faute de l'Etat et les dommages allégués, dès lors que les dommages trouvent leur origine dans le choix de l'agent de profiter ou non des possibilités d'intégration et de promotion offertes par les statuts de reclassification ;
- le montant du dommage n'est pas valablement établi ;
Vu le mémoire, enregistré le 2 juillet 2012, présenté pour M. A, qui maintient ses conclusions par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 25 juillet 2012, présenté pour La Poste, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge de M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- ce n'est qu'à partir de 2010 qu'il a été jugé que les fonctionnaires reclassés de La Poste pouvaient se prévaloir d'une illégalité statutaire et d'une éventuelle réparation du préjudice en résultant, alors que le président du conseil d'administration, qui n'a pas le pouvoir d'édicter des décrets ni de prendre des mesures ayant des effets statutaires ne pouvait pas ne pas faire application des décrets régissant les statuts particuliers des corps de reclassement ;
- l'agent ne démontre pas avoir disposé d'un potentiel certain permettant de le regarder comme ayant eu des chances sérieuses d'accéder au grade supérieur, et donc remplir les conditions permettant d'obtenir réparation des préjudices qu'il allègue, eu égard aux notes obtenues, aux appréciations de ses supérieurs et eu égard à la proportion des agents bénéficiant d'une telle appréciation ;
Vu le mémoire, enregistré le 1er août 2012, présenté pour M. A, qui maintient ses conclusions par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 17 septembre 2012, présentée pour M. A ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;
Vu la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ;
Vu le décret n° 57-1319 du 21 décembre 1957 ;
Vu le décret n° 58-777 du 25 août 1958 ;
Vu le décret n° 72-500 du 23 juin 1972 ;
Vu le décret n° 90-1224 du 31 décembre 1990 ;
Vu le décret n° 91-103 du 25 janvier 1991 ;
Vu le décret n° 2009-1555 du 14 décembre 2009 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 septembre 2012 :
- le rapport de M. Clément, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;
- et les observations de Me Bineteau, pour M. A ;
Considérant que M. A, agent de La Poste, titulaire du grade d'agent d'exploitation distribution acheminement, fait appel du jugement du 24 janvier 2012 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a limité à 3 500 euros le montant de la somme mise à la charge solidaire de La Poste et de l'Etat en réparation du préjudice qu'il a subi en raison du blocage de sa carrière dans un corps de " reclassement " ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A, agent d'exploitation distribution acheminement de La Poste satisfaisait, à compter du mois d'avril 1996, aux conditions posées par les statuts pour figurer sur la liste d'aptitude pour l'accès au grade de conducteur de travaux distribution-acheminement ; que l'intéressé a fait constamment l'objet, au cours de la période correspondant aux années 1995 à 2006 d'une appréciation globale dans la catégorie "B", impliquant une valeur professionnelle correspondant parfaitement aux exigences du poste occupé ; que son aptitude à exercer des fonctions supérieures, lorsqu'elle a été appréciée, au cours des années 2000 à 2006, a été qualifiée de "bonne" ; que le Tribunal, qui a considéré que les fautes commises tant par La Poste que par l'Etat ont privé M. A d'une chance sérieuse de promotion dans le grade de conducteur de travaux, à compter de l'année 2006 et jusqu'à la date à partir de laquelle il a bénéficié d'une dispense d'activité, le 20 octobre 2009, n'a pas fait une inexacte appréciation de son préjudice de carrière en évaluant à 2 000 euros l'indemnisation due à ce titre ; que le requérant ne peut utilement se prévaloir, sur ce point, d'une proposition, émise le 31 juillet 1995 par la commission technique et mixte locale, de rattacher son poste de travail sur une fonction de niveau I.3, supérieur à celui de son grade, dans un grade de reclassification, alors qu'il a refusé d'intégrer un corps de reclassification, et qu'il ne remplissait pas, à la date de cet avis, les conditions pour bénéficier d'un avancement ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la faute, consistant à priver l'intéressé de toute possibilité de promotion interne, aurait causé à M. A des troubles dans ses conditions d'existence, nonobstant la circonstance que le requérant a été placé en congé de maladie entre mai 2008 et mai 2009 et bénéficié d'un traitement et d'un suivi médical à raison d'un état anxio-dépressif lié, selon le certificat médical produit, à un contexte de souffrance au travail, dont il n'est pas démontré qu'il trouverait son origine dans l'absence d'avancement de M. A ;
Considérant que si M. A est également fondé à se prévaloir du préjudice moral subi à raison desdites fautes, le Tribunal n'a pas davantage fait une inexacte appréciation de son préjudice moral en évaluant à 1 500 euros l'indemnisation due à ce titre ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a limité à 3 500 euros, outre intérêts au taux légal, le montant de la somme mise à la charge solidaire de La Poste et de l'Etat en réparation du préjudice qu'il a subi en raison du blocage de sa carrière dans un corps de " reclassement " ;
Sur les conclusions de La Poste tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A et les conclusions de La Poste tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Georges A, à La Poste et au ministre de l'économie, des finances et du commerce extérieur.
Délibéré après l'audience du 4 septembre 2012, à laquelle siégeaient :
M. Tallec, président de chambre,
M. Rabaté, président-assesseur,
M. Clément, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 septembre 2012.
''
''
''
''
1
2
N° 12LY00809
vv