Vu la requête enregistrée, le 10 décembre 2012, présentée pour la Sarl Polycorn, dont le siège est Destis à Aillas (33124), représentée par son gérant en exercice, par la SCP Laporte- Monroux-Szewczyk, avocats ;
La Sarl Polycorn demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1004479 du 25 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté d'une part, sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 juillet 2010 par lequel le maire de Hure a retiré le permis de construire un abri de stockage recouvert de panneaux photovoltaïques qu'il lui avait délivré, au nom de l'Etat, le 7 avril 2010 et d'autre part, ses conclusions tendant à ce que la commune soit condamnée à lui verser une indemnité de 50 000 euros en réparation de ses préjudices consécutifs au retrait de cette décision ;
2°) de lui accorder une indemnité de 50 000 euros en réparation de ses préjudices, sauf à parfaire par une expertise ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mai 2014 :
- le rapport de Mme Sabrina Ladoire, conseiller ;
- les conclusions de Mme Christine Mège, rapporteur public ;
- et les observations de Me Mouroux avocat de la Sarl Polycorn ;
1. Considérant que la Sarl Polycorn a déposé, le 23 décembre 2009, une demande de permis de construire un bâtiment agricole de 1 200 mètres carrés recouvert de panneaux photovoltaïques sur un terrain situé au lieu-dit Rey sur le territoire de la commune de Hure (Gironde) ; que le 7 avril 2010, le maire de cette commune lui a délivré ce permis au nom de l'Etat ; que par un arrêté du 5 juillet 2010, il a procédé à son retrait au motif que la construction projetée se situait en zone naturelle de la carte communale où seules sont autorisées les constructions nécessaires à l'exploitation agricole et que le stockage des produits agricoles de cette société ne nécessitait pas un bâtiment d'une telle superficie ; que par un recours gracieux présenté le 13 août 2010, la SARL Polycorn a sollicité le retrait de cet arrêté ; que la société relève appel du jugement n° 1004479 du 25 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté d'une part, sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 juillet 2010 et d'autre part, ses conclusions tendant à ce que la commune de Hure soit condamnée à lui verser une indemnité de 50 000 euros en réparation de ses préjudices ;
Sur la légalité de l'arrêté :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L.424-5 du code de l'urbanisme : " (...) Le permis de construire, d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peut être retiré que s'il est illégal et dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision. Passé ce délai, le permis ne peut être retiré que sur demande explicite de son bénéficiaire. " ; que l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations modifiée dispose : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'autorité administrative n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique. / Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : 1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles ; 2° Lorsque leur mise en oeuvre serait de nature à compromettre l'ordre public ou la conduite des relations internationales ; 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière. (....) " ; qu'enfin, selon l'article R.124-3 du code de l'urbanisme relatif aux cartes communales : " Le ou les documents graphiques délimitent les secteurs où les constructions sont autorisées et ceux où les constructions ne sont pas autorisées, à l'exception de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension des constructions existantes ou des constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs, à l'exploitation agricole ou forestière et à la mise en valeur des ressources naturelles (...) " ;
3. Considérant en premier lieu, que l'arrêté portant retrait du permis de construire rappelle les dispositions de l'article R.124-3 du code de l'urbanisme et indique que le pétitionnaire n'a pas justifié, malgré plusieurs demandes en ce sens, les surfaces consacrées au matériel, aux récoltes et aux produits phytosanitaires alors que le gérant de la société titulaire de ce permis exerce par ailleurs une activité de distributeur de produits phytosanitaires distincte de l'exploitation agricole ; que cet arrêté indique également que le projet se situe dans un secteur de la carte communale où les constructions nouvelles ne sont pas autorisées et qu'il ne relève d'aucune des constructions admises par exception dans ce secteur ; que c'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cet arrêté ;
4. Considérant en deuxième lieu, que la Sarl Polycorn fait valoir qu'elle n'a pas disposé d'un délai suffisant pour présenter ses observations avant le retrait de son permis de construire dans la mesure où elle n'a pris connaissance du courrier l'informant de la volonté de la commune de retirer ce permis que le 3 juillet 2010 et n'a pu y répondre avant le 7 juillet 2010, par une lettre que la commune a reçue le 10 juillet suivant ; que cependant, il ressort des pièces du dossier que par un courrier daté du 16 juin 2010, le maire de Hure a informé cette société du fait qu'il envisageait de retirer le permis de construire qui lui avait été accordé le 7 avril 2010 et lui a imparti un délai de dix jours pour présenter ses observations ; que ce courrier a été présenté au siège social de cette société le 18 juin 2010, ce qui lui laissait un délai suffisant pour présenter ses observations avant l'expiration du délai de retrait le 7 juillet suivant ; que la société ne saurait se prévaloir utilement du fait qu'elle a eu connaissance de ce courrier tardivement compte tenu de l'absence de bureau de poste ouvert en permanence à Aillas dès lors qu'il lui appartenait de prendre les dispositions nécessaires pour retirer celui-ci dans de meilleurs délais ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que cet arrêté serait intervenu en méconnaissance du principe du contradictoire ne peut qu'être écarté ;
5. Considérant en troisième lieu, que la Sarl Polycorn soutient que la décision n'est pas justifiée dans la mesure où elle avait indiqué, lors de sa demande, que la construction de ce hangar était nécessaire à son activité agricole et que dans sa lettre adressée au préfet le 5 novembre 2010, elle en a justifié la superficie et la nécessité, tant du point de vue de son activité agricole que pour des raisons sécuritaires et environnementales ;
6. Considérant cependant, qu'il ressort des pièces du dossier que malgré les demandes de la direction départementale de l'équipement de la Gironde du 30 décembre 2009 et du maire de Hure du 16 juin 2010, la Sarl Polycorn n'a pas indiqué en quoi la construction d'un hangar agricole de 1 200 m² serait justifiée au regard de son activité ; que par un courrier du 18 janvier 2010 adressé au directeur départemental de l'équipement, la Sarl Polycorn a uniquement indiqué que ce bâtiment servirait à stocker son matériel agricole, ses produits de récoltes et ses intrants et consommables mais n'a justifié en rien la superficie du hangar projeté ; que ce n'est finalement que par un courrier daté du 5 novembre 2010, soit postérieurement à la décision en litige, que la société a précisé que ce hangar lui servirait à stocker plus de 200 tonnes d'engrais en permanence ce qui nécessiterait une surface de 150 mètres carrés, à abriter ses récoltes sur 775 mètres carrés compte tenu de la superficie agricole exploitée qui s'élève à 240 hectares, et à créer un atelier de 150 mètres carrés ainsi qu'un " local phyto " avec vestiaire aménagé ; qu'ainsi, à la date de la décision en litige, elle ne justifiait pas de la nécessité de créer un bâtiment de 1 200 mètres carrés au regard de son exploitation agricole ; que, par suite, la Sarl Polycorn n'est pas fondée à reprocher au tribunal d'avoir estimé que le maire de Hure pouvait, sur le fondement de l'article R.124-3 du code de l'urbanisme, retirer le permis de construire qu'il lui avait accordé au motif que la nécessité de cette construction pour l'exploitation agricole n'était pas établie ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que la circonstance que des permis de construire pour des bâtiments de même nature auraient été délivrés à des voisins agriculteurs, ce qui au demeurant n'est pas établi, est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;
8. Considérant en dernier lieu, que si la Sarl Polycorn soutient que cette décision résulterait de l'hostilité du maire à l'égard de son gérant, le détournement de pouvoir ainsi allégué n'est pas établi ;
Sur les conclusions indemnitaires :
9. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la Sarl Polycorn ait adressé au maire de Hure une demande d'indemnisation ; qu'en outre, ainsi qu'il a été dit plus haut, la décision du maire de Hure retirant le permis de construire qu'il lui avait délivré le 7 avril 2010 au nom de l'Etat n'est pas entachée d'illégalité et ne saurait dès lors, et en tout état de cause, engager la responsabilité de la commune ni celle de l'Etat, alors au demeurant que les conclusions de première instance n'étaient pas dirigées contre lui ; que par suite, les conclusions de la société Polycorn tendant à l'octroi d'une indemnité de 50 000 euros sans indiquer le débiteur de cette prétendue créance ne peuvent qu'être rejetées ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Sarl Polycorn n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la Sarl Polycorn au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la Sarl Polycorn est rejetée.
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No 12BX03097