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12/12/2013 | FRANCE | N°12-24836

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 12 décembre 2013, 12-24836


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 26 novembre 2005, Maurice X..., passager du véhicule conduit par M. Y..., assuré auprès de la Caisse interprofessionnelle mutuelle d'assurance (la CIMA), est décédé dans un accident de la circulation survenu en Nouvelle-Calédonie ; que le 5 novembre 2007, les ayants droit de Maurice X... (les consorts X...) ont assigné en indemnisation M. Y... et la CIMA devant le tribunal de première instance de Nouméa ; que le Fonds de garantie des assurances obligatoires de

dommages (FGAO) est intervenu volontairement devant le tribunal ;
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 26 novembre 2005, Maurice X..., passager du véhicule conduit par M. Y..., assuré auprès de la Caisse interprofessionnelle mutuelle d'assurance (la CIMA), est décédé dans un accident de la circulation survenu en Nouvelle-Calédonie ; que le 5 novembre 2007, les ayants droit de Maurice X... (les consorts X...) ont assigné en indemnisation M. Y... et la CIMA devant le tribunal de première instance de Nouméa ; que le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) est intervenu volontairement devant le tribunal ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est préalable, pris en sa première branche :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de faire application en Nouvelle-Calédonie de l'article R. 421-5 du code des assurances alors, selon le moyen, que les articles R. 421-1, R. 421-5 et R. 421-58 du code des assurances, dans leur rédaction en vigueur en métropole, n'ont jamais été adoptés ou transposés en Nouvelle-Calédonie et y sont donc inapplicables, en vertu du principe de spécialité législative ; qu'en jugeant que la CIMA aurait été tenue de respecter les formalités édictées par l'article R. 421-5 du code des assurances, motif pris de l'interprétation combinée des articles R. 421-58 et R. 421-1 du même code, quand ces textes étaient inapplicables au présent litige, la cour d'appel a violé les articles R. 420-1, R. 420-5 et R. 420-58 du code des assurances, dans leur rédaction applicable à l'espèce, ensemble l'article 7 de la loi n° 76-1222 du 28 décembre 1976 ;
Mais attendu que l'article R. 421-58 du code des assurances, dans sa rédaction issue du décret n° 81-30 du 14 janvier 1981, publié le 16 mars 1981 au Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie, rend applicable en Nouvelle-Calédonie les articles R. 420-1 à R. 420-70 du même code, dans leur rédaction issue du même décret ; que le décret n° 88-261 du 18 mars 1988 ayant seulement recodifié à droit constant les dispositions règlementaires concernées et maintenu expressément l'article R. 421-58 du code des assurances, les articles R. 421-1 et R. 421-5 du code des assurances sont applicables en Nouvelle-Calédonie ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que les deuxième et troisième branches du moyen unique du pourvoi incident ne sont pas de nature à permettre son admission ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal :
Vu l'article R. 421-5 du code des assurances ;
Attendu, selon ce texte, que lorsque l'assureur entend invoquer la nullité du contrat d'assurance, sa suspension ou la suspension de la garantie, une non-assurance ou une assurance partielle opposables à la victime ou à ses ayants droit, il doit, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, le déclarer au FGAO et joindre à sa déclaration les pièces justificatives de son exception ; qu'il doit en aviser en même temps et dans les mêmes formes la victime ou ses ayants droit en précisant le numéro du contrat ;
Attendu que pour déclarer recevable et bien fondée l'exception de nullité du contrat d'assurance soulevée par la CIMA, l'arrêt énonce que le correspondant de la CIMA, qui venait de se voir communiquer les procès-verbaux de gendarmerie, a immédiatement informé, par lettre recommandée avec accusé de réception, le conseil des ayants droit et le FGAO de son intention de soulever une exception de nullité ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que l'assureur n'avait pas avisé personnellement les ayants droit de la victime de son intention d'invoquer la nullité du contrat d'assurance, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il a déclaré recevable et bien fondée l'exception de nullité de la CIMA et annulé le contrat d'assurance, l'arrêt rendu le 26 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa, autrement composée ;
Condamne la Caisse interprofessionnelle mutuelle d'assurances aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages la somme de 2 850 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages, demandeur au pourvoi principal
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la Cima recevable et bien fondée en son exception de nullité du contrat d'assurance, et d'avoir, en conséquence, débouté le Fonds de garantie de ses demandes tendant à être mis hors de cause ainsi qu'à faire peser sur la Cima l'obligation de garantir les conséquences dommageables de l'accident de la circulation survenu le 26 novembre 2005 ;
Aux motifs qu'« en vertu de R 421-5, "lorsque l'assureur entend invoquer la nullité du contrat d'assurance, sa suspension ou la suspension de la garantie, une nonassurance ou une assurance partielle opposables à la victime ou à ses ayants droit, il doit, par lettre recommandée avec avis de réception, le déclarer au fonds de garantie et joindre à sa déclaration les pièces justificatives de son exception; il doit en aviser en même temps et dans les mêmes formes la victime ou ses ayants droit" ; qu'il est établi par les éléments du dossier et il n'est pas contesté que l'assuré, M. Y..., s'est volontairement abstenu d'informer son assureur de la survenance de l'accident ; que la compagnie d'assurance CIMA n'a pas non plus été informée, ni par le souscripteur, ni par d'éventuelles parties civiles de l'audience du tribunal correctionnel, section détachée de Koné, audience foraine de Poindimié du 19 avril 2006 au cours de laquelle M. Y... a dû répondre des conséquences de cet accident survenu sous l'emprise d'un état alcoolique ; que la correspondance adressée le 10 octobre 2006 par l'avocat des ayants droit de Maurice X... à l'OCAM (correspondant de la CIMA) ne permettait pas au correspondant de la compagnie d'assurance d'identifier le dossier évoqué, puisque ni le nom de la victime, ni la date du sinistre, ni l'immatriculation du véhicule assuré, ni le numéro de contrat de police d'assurance n'y figuraient ; que ce n'est qu'en mai 2007, que le conseil des ayants droits de la victime décédée adressait un courrier plus explicite accompagné de la sommation interpellative faite à M. Léon Y... ; que le correspondant de la CIMA, qui venait de se voir communiquer les procès-verbaux de gendarmerie, a immédiatement informé, par lettre recommandée avec accusé de réception, le conseil des ayants droit et le FGAO de son intention de soulever une exception de nullité ; que la compagnie d'assurance CIMA a respecté les exigences de l'article R 421-5 du code des assurances, en avisant concomitamment le fonds de garantie et les ayants droit de la victime, de son intention de soulever une exception de nullité, aussitôt après avoir pris connaissance de l'existence de celle-ci » (arrêt attaqué, p. 6, § 7 à p. 7, § 2) ;
Alors qu'il résulte de l'article R. 421-5 du code des assurances que l'assureur qui entend soulever la nullité du contrat d'assurance doit en aviser le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; qu'il doit, en même temps et dans les mêmes formes, en informer personnellement la victime ou ses ayants droits ; qu'à défaut, la contestation soulevée par l'assureur est inopposable, non seulement à la victime ou à ses ayants droit, mais aussi au F.G.A.O. ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de l'arrêt attaqué (p. 7, 1er §) que la Cima n'avait pas avisé personnellement les ayants droit de la victime décédée de son intention d'invoquer la nullité du contrat d'assurance couvrant la responsabilité de M. Y..., mais qu'elle s'était contentée d'en informer leur conseil ; qu'en jugeant néanmoins l'exception de nullité opposable aux ayants droit de la victime ainsi qu'au Fonds de garantie, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article R. 421-5 du code des assurances, rendu applicable en Nouvelle-Calédonie par l'article R. 421-58 du même code.

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la Caisse interprofessionnelle mutuelle d'assurance, demanderesse au pourvoi incident
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR réformé le jugement déféré en ce qu'il avait dit que l'article R. 421-5 du Code des assurances n'était pas applicable en Nouvelle Calédonie et, statuant à nouveau, d'avoir dit que cet article était applicable en Nouvelle Calédonie ;
AUX MOTIFS QUE le FGAO a invoqué l'irrecevabilité de l'exception de nullité du contrat d'assurance, faute pour la CIMA d'avoir respecté les dispositions des articles R 421-5 et suivants du Code des assurances, figurant à la section I du chapitre Ier ; que l'article R. 421-58, issu du décret no 81-30 du 14 janvier 1981 rendu applicable sur le territoire de Nouvelle- Calédonie, dispose que « sont applicables sur le territoire (...) les sections I et IV du chapitre I , dans la mesure où elles concernent les accidents causés par des véhicules définis à l'article R. 421-1, 2ème alinéa » ; que ce dernier article vise « les véhicules terrestres à moteur ainsi que les remorques ou semi-remorques de ces véhicules ayant leur stationnement habituel sur le territoire d'un État, autre que la France, tels que définis à l'article L. 211-4 du Code des assurances » ; que l'article L. 200-1 du Code des assurances stipule que « les mots "la France" et les mots "en France" désignent la France métropolitaine et les collectivités territoriales régies par l'article 73 de la constitution », ce qui exclut la Nouvelle Calédonie ; qu'en l'occurrence, l'article R. 421-5 du Code des assurances, étant inclus dans la section I susvisée, est donc applicable en Nouvelle Calédonie ; que, dès lors, le jugement entrepris doit être réformé en ce qu'il a dit que l'article R 421-5 n'était pas applicable en Nouvelle Calédonie ;
1°) ALORS QUE les articles R. 421-1, R. 421-5 et R. 421-58 du Code des assurances, dans leur rédaction en vigueur en métropole, n'ont jamais été adoptés ou transposés en Nouvelle-Calédonie et y sont donc inapplicables, en vertu du principe de spécialité législative ; qu'en jugeant que la CIMA aurait été tenue de respecter les formalités édictées par l'article R. 421-5 du Code des assurances, motif pris de l'interprétation combinée des articles R. 421-58 et R. 421-1 du même Code, quand ces textes étaient inapplicables au présent litige, la Cour d'appel a violé les articles R. 420-1, R. 420-5 et R. 420-58 du Code des assurances, dans leur rédaction applicable à l'espèce, ensemble l'article 7 de la loi no du 28 décembre 1976 ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, la Nouvelle-Calédonie n'est pas un État, mais une collectivité sui generis régie par le titre XIII de la Constitution du 4 octobre 1958 ; qu'en jugeant que l'article R. 421-1 al. 2 du Code des assurances, qui fait référence aux « véhicules terrestres à moteur ainsi que les remorques ou semi-remorques de ces véhicules ayant leur stationnement habituel sur le territoire d'un État, autre que la France tels que définis à l'article L. 211-4 du Code des assurances », pouvait viser les véhicules ayant leur stationnement habituel sur le territoire de Nouvelle-Calédonie, quand cette collectivité n'est pas un État, la Cour d'appel a violé l'article R. 421-1 al. 2 du Code des assurances ;
3°) ALORS QU'en toute hypothèse, la Nouvelle-Calédonie ne fait pas partie des États définis à l'article L. 211-4 du Code des assurances, qui fait référence, d'une part, aux « États membres de la Communauté européenne » et, d'autre part, aux « État tiers pour lequel les bureaux nationaux de tous les Etats membres de la Communauté européenne se portent individuellement garants du règlement des sinistres survenus sur leur territoire et provoqués par la circulation des véhicules ayant leur stationnement habituel dans cet État tiers », autrement dit les États membres du système dit « carte verte » ; qu'en jugeant néanmoins que l'article R. 421-1 al. 2 du Code des assurances, qui fait référence aux « véhicules terrestres à moteur ainsi que les remorques ou semi-remorques de ces véhicules ayant leur stationnement habituel sur le territoire d'un État, autre que la France tels que définis à l'article L. 211-4 du Code des assurances », pouvait viser les véhicules ayant leur stationnement habituel sur le territoire de Nouvelle-Calédonie, quand cette collectivité n'est pas un État visé par l'article L. 211-4 du Code des assurances, la Cour d'appel a encore violé l'article R. 421-1 al. 2 du Code des assurances.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 12-24836
Date de la décision : 12/12/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

FONDS DE GARANTIE - Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages - Indemnisation - Demande de la victime - Opposabilité des exceptions par l'assureur - Conditions - Avis à la victime et au fonds de garantie - Avis à la victime - Avis à l'avocat de la victime ou de ses ayants droit - Possibilité (non)

ASSURANCE (règles générales) - Action de la victime - Opposabilité des exceptions par l'assureur - Conditions - Avis à la victime et au fonds de garantie - Avis à la victime - Avis à l'avocat de la victime ou de ses ayants droit - Possibilité (non)ACCIDENT DE LA CIRCULATION - Victime - Action contre l'assureur - Opposabilité des exceptions par celui-ci - Cause de non-garantie - Conditions - Avis à la victime et au Fonds de garantie - Avis à la victime - Avis à l'avocat de la victime ou de ses ayants-droit - Possibilité (non)

Viole l'article R. 421-5 du code des assurances la cour d'appel qui énonce que l'assureur d'un véhicule impliqué dans un accident de la circulation qui entend soulever la nullité du contrat d'assurance peut en aviser l'avocat de la victime ou de ses ayants droit, alors que cet avis doit leur être adressé personnellement


Références :

article R. 421-5 du code des assurances

Décision attaquée : Cour d'appel de Nouméa, 26 avril 2012

Sur l'obligation, pour l'assureur excipant de la nullité du contrat d'assurance, d'aviser les victimes et le fonds de garantie en même temps et dans les mêmes formes, à rapprocher :2e Civ., 7 décembre 2006, pourvoi n° 05-18442, Bull. 2006, II, n° 344 (cassation)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 12 déc. 2013, pourvoi n°12-24836, Bull. civ. 2013, II, n° 236
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, II, n° 236

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : M. Lautru
Rapporteur ?: M. Adida-Canac
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.24836
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