LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'invoquant des désordres affectant la réalisation de travaux, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Bellevue (le syndicat des copropriétaires) a assigné devant un tribunal de grande instance la société SIAREP, et son assureur, la société Axa France IARD (la société Axa), la société Bureau Veritas et la société BET Langlois ingénierie (la société Langlois), et son assureur, la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (la SMABTP) ; que la société Axa ayant interjeté appel du jugement la condamnant, in solidum avec la société Langlois et la SMABTP, au paiement d'une certaine somme, le conseiller de la mise en état a déclaré caduque la déclaration d'appel ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 906, 908 et 911 du code de procédure civile ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes qu'à peine de caducité de sa déclaration d'appel, l'appelant dispose d'un délai d'un mois, courant à compter de l'expiration du délai de trois mois prévu pour la remise de ses conclusions au greffe, pour les signifier aux parties qui n'ont pas constitué avocat ;
Attendu que pour déclarer caduque la déclaration d'appel, l'arrêt retient que l'appelante a fait signifier ses conclusions aux intimés n'ayant pas constitué avocat plus d'un mois après les avoir déposées au greffe de la cour d'appel ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que la société Axa avait signifié ses conclusions à la SMABTP, au Bureau Veritas et à la société Langlois, qui n'avaient pas constitué avoué, les 16 et 19 août 2011, soit moins de quatre mois suivant la déclaration d'appel, formée le 22 avril 2011, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen unique pris en troisième branche :
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;
Attendu que pour déclarer également caduque la déclaration d'appel, la cour d'appel retient, sur le fondement de l'article 902 du code de procédure civile, que la société appelante a omis d'assigner les parties intimées défaillantes dans le mois de l'avis adressé par le greffe ;
Qu'en statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen qu'elle avait relevé d'office, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Bellevue, la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics, la société BET Langlois ingénierie et la société Bureau Veritas aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Bellevue, la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics, la société BET Langlois ingénierie et la société Bureau Veritas à payer à la société Axa France IARD la somme globale de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Axa France IARD
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé l'ordonnance déférée et déclaré caduque la déclaration d'appel de la SA AXA FRANCE IARD en date du 22 avril 2011 ;
AUX MOTIFS QUE « en application des dispositions de l'article 911 du Code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret du 28 décembre 2010, et sous la sanction, s'agissant de l'appelant, de l'article 908 du Code de procédure civile, celui-ci doit notifier aux avoués des intimés ses conclusions dans le délai de leur remise au greffe et doit signifier dans le mois suivant l'expiration de ce délai, et non du délai maximum de 3 mois dont il dispose à compter de sa déclaration d'appel en vertu de l'article 908, ses conclusions aux parties qui n'ont pas constitué avoué. En pratique cette signification de conclusions doit être couplée avec l'assignation des intimés non-constitués, le dernier alinéa de l'article susvisé prévoyant qu'en cas de constitution d'un intimé entre le dépôt des conclusions au greffe et leur signification, il soit procédé par voie de notification entre avoués (avocats désormais). En l'espèce le conseiller de la mise en état a exactement constaté après avoir entendu les parties que la société AXA France IARD qui a interjeté appel le 22 avril 2011 a déposé ses conclusions au greffe de la cour le 5 juillet 2011 et les a signifiées le même jour au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier BELLEVUE mais les 16 et 19 août 2011 seulement à la SMABTP, à la société VERITAS et à la société BET LANGLOIS INGENIERIE qui n'avaient pas constitué, soit au-delà du délai d'un mois expirant le 5 août 2011. La cour relève que la société appelante encourait également la caducité de son appel sur la base de l'article 902 du Code de procédure civile pour n'avoir pas assigné les parties intimées défaillantes dans le mois de la lettre de notification du greffe en date du 22 juin 2011. Même saisi par un seul intimé au visa de l'article 911 du Code de procédure civile le conseiller de la mise en état ne pouvait après avoir entendu toutes les parties que relever d'office la caducité de l'acte d'appel sanctionnant le non-respect du délai édicté par cet article, ce, au profit de tous les intimés, y compris du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier BELLEVUE dont les conclusions notifiées le 4 août 2011, antérieurement à l'expiration du délai de caducité ne contiennent au demeurant aucune demande incidente au sens de l'article 401 du Code de procédure civile. A la différence de la nullité la caducité de l'acte d'appel prévue par l'article 908 du Code de procédure civile sanctionne en effet non pas l'irrégularité de l'acte mais le non-respect de formalités subséquentes imposées et emporte par suite de l'anéantissement rétroactif de l'acte unique d'appel extinction de l'instance. L'ordonnance déférée doit être confirmée » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « selon l'article 911 du Code de procédure civile modifié par le décret n° 2010-1647 du 28 décembre 2010 sous les sanctions prévues aux articles 908 à 910, les conclusions sont notifiées aux avoués des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour. Sous les mêmes sanctions, elles sont signifiées dans le mois suivant l'expiration de ce délai aux parties qui n'ont pas constitué avoué ; cependant si entre-temps celles-ci ont constitué avoué avant la signification des conclusions il est procédé par voie de notification à leur avoué. En l'espèce, l'examen des actes de procédure démontre que la SA AXA France IARD a déposé ses conclusions au greffe de la cour le 5 juillet 2011 et elle les a signifiées le même jour au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier BELLEVUE. Elle a fait signifier ses écritures par actes extrajudiciaires des 16 et 19 août 2011 à la SMABTP, à la SA VERITAS et à la SARL BET LANGLOIS qui n'avaient pas constitué avoué. Elle n'a pas dénoncé ses conclusions à la société SIAREP au motif qu'elle n'a plus d'existence légale comme ayant fait l'objet d'une radiation au registre du commerce et des sociétés consécutivement à une clôture pour insuffisance d'actif. Il s'évince de ces éléments que la SA AXA France IARD a fait signifier ses conclusions aux parties qui n'avaient pas constitué avoué au delà du délai d'un mois expirant le 5 août 2011. Le défaut de respect des délais édictés par l'article 911 du Code de procédure civile est sanctionné par l'article 908 du Code de procédure civile qui impose que soit relevée d'office la caducité de la déclaration d'appel. Cette caducité ayant un caractère indivisible il y a lieu de la prononcer » ;
1°) ALORS QUE l'appelant dispose d'un délai d'un mois, courant à compter de l'expiration du délai de trois mois prévu pour le dépôt de ses conclusions au greffe, pour les notifier aux parties n'ayant pas constitué avoué ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société AXA avait interjeté appel le 22 avril 2011, de sorte qu'elle disposait d'un délai pour déposer ses conclusions expirant le 22 juillet 2011 et qu'elle bénéficiait donc d'un délai jusqu'au 22 août pour notifier ses conclusions aux parties n'ayant pas constitué avoué ; qu'en considérant que l'appel était caduc, bien que la société AXA ait signifié ses conclusions aux parties n'ayant pas constitué les 16 et 19 août 2011, soit avant l'expiration du délai fixé par l'article 911 du Code de procédure civile, la cour d'appel a violé ce texte ;
2°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE la caducité de l'appel prononcée à raison du non-respect de l'article 911 du Code de procédure civile n'est générale que pour autant que soit constatée l'indivisibilité du litige entre les parties ayant régulièrement reçu notification des conclusions et les autres, ou leur solidarité ; qu'en l'espèce, en considérant que l'acte d'appel était caduc à l'égard de tous les intimés, sans rechercher si un lien de solidarité ou d'invidisibilité existait entre la société BUREAU VERITAS qui s'en était prévalue et les autres intimés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 908 et 911 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE les juges du fond doivent respecter le principe de la contradiction et doivent ainsi, notamment, susciter les observations des parties avant de relever un moyen d'office ; qu'en l'espèce, aucune des parties n'avait soulevé de moyen pris de ce que la déclaration d'appel serait caduque par application de l'article 902 du Code de procédure civile ; qu'en relevant dès lors d'office que la déclaration d'appel de l'exposante était caduque par application de ce texte, sans inviter préalablement les parties à s'en expliquer et, partant, sans permettre à l'exposante de se défendre et de produire toute pièce utile, la cour d'appel a violé l'article 16, al.3 du Code de procédure civile, ensemble les droits de la défense et l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.