LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 2 novembre 2011), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 7 avril 2010, pourvoi n° 09-13.977), qu'après l'avoir vainement mise en demeure de déclarer les dons manuels reçus par elle, l'administration des impôts a notifié à l'Arche de Marie, association congrégation enclave incardine, (l'association) un redressement au titre des droits afférents à ces dons pour les années 1999 et 2000 puis un avis de mise en recouvrement ; qu'après rejet de sa réclamation, l'association a saisi le tribunal de grande instance afin d'obtenir l'annulation de ce dernier avis ainsi que la décharge des droits et pénalités réclamés ;
Attendu que le directeur général des finances publiques fait grief à l'arrêt d'avoir infirmé le jugement rejetant cette demande et d'avoir déchargé l'association des droits et pénalités en cause, alors, selon le moyen, qu'aux termes de l'article 757 du code général des impôts, les actes renfermant soit la déclaration par le donataire ou ses représentants, soit la reconnaissance judiciaire d'un don manuel, sont sujets aux droits de donation ; que la même règle s'applique lorsque le donataire révèle un don manuel à l'administration fiscale ; que la révélation peut résulter de la présentation par le contribuable de sa comptabilité lors d'une procédure de vérification de comptabilité ; que la révélation n'exige pas l'aveu spontané du don de la part du donataire ; qu'en considérant, pour annuler la procédure d'imposition, que l'Arche de Marie association congrégation enclave incardine n'a rien révélé volontairement et que c'est à son corps défendant que sa comptabilité, examinée par les contrôleurs, a révélé les dons manuels enregistrés, la cour d'appel a ajouté à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas et violé l'article 757 du code général des impôts ;
Mais attendu que l'arrêt constate que l'association n'avait rien révélé volontairement à l'administration et que seule la vérification de sa comptabilité, par les contrôleurs, avait fait apparaître les dons manuels litigieux ; que la cour d'appel en a déduit à bon droit que la procédure de vérification de comptabilité mise en oeuvre ne pouvait être le support de l'appel des droits de donation ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le directeur général des finances publiques aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour le directeur général des finances publiques.
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement et prononcé la décharge des impositions et pénalités relatives à la taxation de dons manuels établies à l'encontre de l'Arche de Marie Association Congrégation Enclave Incardine.
AUX MOTIFS QUE « De l'article L 66 4° du livre des procédures fiscales relevant de la section V paragraphe 1 intitulé « TAXATION D'OFFICE A) En cas de défaut ou de retard dans le dépôt des déclarations », il ressort que « sont taxés d'office ... 4è aux droits d'enregistrement et aux taxes assimilées les personnes qui n'ont pas déposé une déclaration ou qui n'ont pas présenté un acte à la formalité de l'enregistrement dans le délai légal » (article 67 : délai de 30 jours à.compter de la mise en demeure ».
L'article L 74 du livre des procédures fiscales disposant cependant que « les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers », la question préliminaire qui se pose est moins celle de savoir si la procédure de taxation d'office a été régulièrement mise en oeuvre, alors que, aux termes d'un arrêt du 31 octobre 2006 la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation a jugé que « lorsque le contribuable est astreint à tenir et à présenter des documents comptables à raison de son activité professionnelle, l'Administration fiscale peut, dans le cadre de la vérification de cette comptabilité, contrôler les droits d'enregistrement et taxes assimilées à l'occasion de l'exercice de cette activité qui apparaissent ou devraient apparaître en comptabilité » (Bulletin Civil, IV numéro 210 page 233), que celle de savoir si l'Association L'ARCHE DE MARIE était tenue de déclarer les dons manuels qui lui avaient été adressés au cours des années 1999 et 2000 comme elle y était invitée par la mise en demeure du 20 juin 2002.
L'article 757 du code'général des impôts en sa rédaction en vigueur à la date de la vérification de comptabilité, inchangée depuis lors en ses alinéas 1 et 2 dispose : « les actes renferment soit la déclaration par le donataire ou ses représentants, soit la reconnaissance judiciaire d'un don manuel, sont sujets au droit de donation.
La même règle s'applique lorsque le donataire révèle un don manuel à l'administration fiscale ».
Le verbe « révéler » répond à la définition usuelle suivante : « faire connaître à quelqu'un quelque chose qui était ignoré, inconnu, caché ou secret (synonyme ; dévoiler) ». (Dictionnaire de la langue du 19è et 20è siècle Editions GALLIMARD/CNRS 1971).
Il admet deux sens :
- révéler quelque chose et le sujet désigne une personne : « révéler un fait, révéler un complot, une identité, etc ...- révéler quelque chose et le sujet désigne une chose : « les documents, les circonstances révèlent que ... ».
Il est communément admis que les lois fiscales sont « d'interprétation littérale » et que le juge n'a donc pas un pouvoir de libre recherche pour les interpréter.
En l'occurrence, il est constant que l'Administration des Impôts a engagé la procédure de taxation d'office, après envoi préalable d'une mise en demeure, sur le constat qu'elle avait fait de la remise de dons manuels effectuée au profit de l'Association L 'ARCHE DE MARIE, ce, sans que cette dernière ne manifeste à aucun moment sa volonté de déclarer ou « révéler » ces sources de financement, ce que confirme le fait que l'imprimé numéro 2735 a été renvoyé avec la mention « néant ».
Or, au regard des termes parfaitement clairs de l'article 757 alinéa 2 du code général des impôts, qui n'appellent aucune interprétation ou extension de sens sous quelqu'angle que ce soit, la révélation doit être le fait « du donataire », et donc, du contribuable lui-même : admettre comme l'envisage l'administration des impôts que la révélation pourrait être le fait sinon de ses services de contrôle en tout cas des circonstances et qu'elle résulterait de la présentation obligatoire de la comptabilité reviendrait à violer les termes précis de la loi fiscale.
En effet, l'appelante n'a rien révélé volontairement et c'est à son corps défendant que sa comptabilité, examinée par les contrôleurs, a révélé les dons manuels enregistrés.
Il est observé d'ailleurs que l'article L 180 alinéa 2 du livre des procédures fiscales use tout aussi clairement du terme « révélé par le document enregistré ou présenté » et qu'il ne saurait être fait l'amalgame entre deux sens très précis du verbe « révéler » sans dénaturer la portée des conditions posées par le législateur pour faire apparaître l'exigibilité des droits d'enregistrement et taxes assimilées selon les situations, diverses, dans lesquelles ces droits sont susceptibles d'être appelés.
C'est en conséquence à bon droit que l'Association L'ARCHE DE MARIE soutient que la procédure de vérification de comptabilité mise en oeuvre ne pouvait être l'utile support de l'appel des droits de donation dès lors qu'elle a fait retour de l'imprimé numéro 2735 vierge de toute mention de nature à établir une « révélation » au sens de l'article 757 alinéa 2 du code général des impôts, base de la taxation appliquée sur le fondement de ce même texte pris en son alinéa 1er.
Le jugement est donc infirmé sans qu 'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens invoqués par l'Association L'ARCHE DE MARIE et la demande de cette dernière tendant à la décharge des impositions et pénalités est accueillie ».
ALORS QU'aux termes de l'article 757 du code général des impôts (C.G.I.), les actes renfermant soit la déclaration par le donataire ou ses représentants, soit la reconnaissance judiciaire d'un don manuel, sont sujets aux droits de donation ; que la même règle s'applique lorsque le donataire révèle un don manuel à l'administration fiscale ; que la révélation peut résulter de la présentation par le contribuable de sa comptabilité lors d'une procédure de vérification de comptabilité ; que la révélation n'exige pas l'aveu spontané du don de la part du donataire ; qu'en considérant, pour annuler la procédure d'imposition, que L'Arche de Marie Association Congrégation Enclave Incardine n'a rien révélé volontairement et que c'est à son corps défendant que sa comptabilité, examinée par les contrôleurs, a révélé les dons manuels enregistrés, la cour d'appel a ajouté à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas et violé l'article 757 du C.G.I.