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25/10/2012 | FRANCE | N°11VE01310

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 25 octobre 2012, 11VE01310


Vu la requête, enregistrée le 11 avril 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Didier A, demeurant ..., par Me Hoin ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0707797 du 15 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations complémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2002 et 2003 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations complémentaires à l'impôt sur le

revenu et aux contributions sociales mises à sa charge et celle des intérêts de r...

Vu la requête, enregistrée le 11 avril 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Didier A, demeurant ..., par Me Hoin ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0707797 du 15 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations complémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2002 et 2003 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations complémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales mises à sa charge et celle des intérêts de retard y afférents, à concurrence de 115 499 euros au titre de l'année 2002 et à concurrence de 41 593 euros au titre de l'année 2003 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A soutient que la procédure d'imposition a méconnu l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ; que, compte tenu des justifications qu'il a apportées, l'administration n'était pas fondée à recourir à la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 69 du livre des procédures fiscales ; que les sommes en provenance de clients de la société Netcall établis au Cameroun, qui ont été portées au crédit de son compte bancaire ouvert auprès de la banque BNP Paribas, constituent des revenus professionnels, ce que l'administration a admis implicitement, et ne pouvaient donc pas être imposées en tant que revenus d'origine indéterminée ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 2012 :

- le rapport de Mme Vinot, président assesseur,

- les conclusions de Mme Garrec, rapporteur public,

- et les observations de Me Amadori, substituant Me Hoin, pour M. A ;

Connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 11 octobre 2012, présentée pour M. A ;

Considérant que M. A a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur la période du 1er janvier 2001 au 3 juin 2003 ; que dans le cadre de ce contrôle, compte tenu de la disproportion observée entre les revenus déclarés par le requérant, soit 19 253 euros au titre de l'année 2002 et 8 187 euros au titre de la période concernée de l'année 2003, et les sommes portées au crédit de son compte bancaire ouvert auprès de la BNP Paribas, soit 229 390 euros en 2002 et 69 055 euros au titre de la période concernée de l'année 2003, l'administration fiscale lui a adressé deux demandes de justifications, respectivement au titre de chacune des deux années, en application de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ; que l'administration a estimé que les réponses de M. A étaient insuffisantes et lui a adressé deux mises en demeure d'avoir à les compléter, auxquelles M. A a répondu par deux courriers notifiés le 17 mai 2005 ; que le service a, d'une part, admis que la somme de 15 000 euros portée au crédit de son compte le 28 mai 2003 correspondait à un prêt familial et n'était par suite pas imposable et que le montant des chèques établis au nom de M. A par la société camerounaise Netcall était à rattacher aux salaires spontanément déclarés par le requérant, et, d'autre part, considéré que le surplus des crédits devait être imposé, à défaut de justifications quant à leur nature, dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée et selon la procédure de taxation d'office, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales ; que les cotisations complémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales ont été mises en recouvrement le 30 septembre 2006 ; que M. A relève appel du jugement du 15 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces cotisations ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, que si M. A soutient que la procédure est entachée d'irrégularité, au motif qu'aucun avis d'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle ne lui aurait été remis, il résulte de l'instruction que l'avis d'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle en date du 28 septembre 2004 lui a été notifié le 30 septembre 2004, comme en atteste la copie de l'accusé de réception signé que l'administration produit au dossier et qui, contrairement aux allégations réitérées du requérant, mentionne clairement cette dernière date comme date de distribution du pli ; que dans ces conditions, M. A n'est pas fondé à soutenir qu'il n'aurait pas été informé de l'examen de situation fiscale personnelle ;

Considérant, en second lieu, que si l'administration ne peut régulièrement taxer d'office, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, les sommes dont elle n'ignore pas qu'elles relèvent d'une catégorie précise de revenus, elle peut en revanche procéder à cette taxation d'office si, au vu des renseignements dont elle disposait avant l'envoi de la demande de justifications fondée sur l'article L.16 du livre des procédures fiscales et des réponses apportées par le contribuable à cette demande, la nature des sommes en cause, et donc la catégorie de revenus à laquelle elles seraient susceptibles de se rattacher, demeure inconnue ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, s'agissant des sommes demeurées réintégrées dans les revenus imposables de M. A, que ce dernier s'est borné à affirmer, en réponse aux demandes de justification qui lui étaient adressées en application des articles L. 16 et L. 16 A du livre des procédures fiscales, que les crédits portés sur son compte bancaire ouvert auprès de la BNP Paribas et provenant de l'encaissement de chèques établis à son ordre personnel correspondaient à des paiements effectués par des clients de la société Netcall ou par ceux d'une autre société identifiée par le contribuable en tant que " société africaine " et que les espèces déposées sur ce compte correspondaient à des paiements effectués par des " clients " ; que si M. A a, en outre, produit la copie de factures établies au nom de la société Netcall en faisant valoir que certaines sommes débitées de son compte personnel correspondaient au paiement de ces factures, il n'a apporté aucun élément probant à l'appui de ses allégations selon lesquelles son compte personnel aurait été utilisé, dans le cadre de l'activité exercée par la société Netcall, pour enregistrer en crédit les paiements en provenance des clients de la société et en débit les règlements par cette société de ses fournisseurs ; qu'il n'a pas apporté davantage d'élément probant susceptible de permettre à l'administration de déterminer l'objet des paiements par chèques ou en espèces qui ont été effectués, selon les réponses du contribuable apportées aux demandes de justifications, par les clients de la société Netcall ou par les clients d'une " société africaine " ou encore par d'autres " clients " ; que par suite, et dès lors que la nature des sommes correspondantes demeurait inconnue, l'administration a pu régulièrement les imposer d'office en tant que revenus d'origine indéterminée, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant que M. A, qui supporte la charge de la preuve en vertu de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, soutient qu'au cours des années en cause il a existé une confusion entre ses patrimoines professionnel et privé l'ayant amené à encaisser sur son compte bancaire personnel, à titre de recettes de la société Netcall, 184 953 euros en 2002 et 86 528 euros en 2003, et à verser à partir de ce même compte, en paiement de factures correspondant aux charges de cette société, 168 248 euros en 2002 et 70 001 euros en 2003, de sorte que les sommes litigieuses portées au crédit de son compte bancaire sont susceptibles d'être imposées uniquement dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, dans l'hypothèse où il devrait être regardé comme ayant encaissé les sommes en cause en poursuivant l'activité de la société Netcall ou, à défaut, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, dans l'hypothèse où il devrait être regardé comme ayant perçu ces sommes en tant qu'agent indépendant ; que le requérant ajoute que, s'agissant du calcul de l'enrichissement qu'il a tiré de cette activité, les sommes en cause doivent être réduites à concurrence des factures qu'il a acquittées à la place de la société Netcall ;

En ce qui concerne la catégorie de revenus :

Considérant qu'il est loisible au contribuable régulièrement taxé d'office en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales d'apporter devant le juge de l'impôt la preuve que les sommes concernées, soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie déterminée de revenus ; que, dans ce cas, le contribuable peut obtenir, le cas échéant, une réduction de l'imposition d'office régulièrement établie au titre du revenu global, à raison de la différence entre les bases imposées d'office et les bases résultant de l'application des règles d'assiette propres à la catégorie de revenus à laquelle se rattachent, en définitive, les sommes en cause ;

Considérant cependant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que la société Netcall est établie au Cameroun, où elle exerce son activité et où elle est soumise à l'impôt sur les sociétés ; que si M. A soutient qu'au cours des années en cause il a existé une confusion entre ses patrimoines professionnel et privé, il n'établit pas ni même n'allègue que son compte bancaire ouvert en France aurait été utilisé pour encaisser l'ensemble des recettes de la société Netcall et payer l'ensemble de ses charges ; qu'en outre, si les pièces produites par M. A permettent d'opérer certains rapprochements, mois par mois, d'une part, entre les crédits bancaires demeurés inexpliqués et les recettes de la société Netcall enregistrées sur des documents comptables visés par l'expert comptable de cette société et par l'administration fiscale du Cameroun, et, d'autre part, entre des sommes débitées de son compte bancaire et les dépenses de la société enregistrées sur les documents susmentionnés, lesdits documents, sans date certaine et dont il ne résulte pas de l'instruction qu'ils auraient été regardés par l'administration camerounaise comme retraçant fidèlement la comptabilité de la société Netcall, ne peuvent être regardés comme ayant une valeur probante quant à la comptabilité de cette société au titre des années 2002 et 2003 ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir que les sommes en cause devraient être rattachées à la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 92 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus. (...) " ; que ni la circonstance alléguée que M. A, associé et gérant de la société Netcall, aurait été contraint, à la suite de la fermeture du compte de cette société ouvert en France, d'utiliser son propre compte bancaire ouvert en France pour permettre le paiement des fournisseurs français de la société, ni les pièces produites par M. A qui notamment, ainsi qu'il a été dit, sont dépourvues de valeur probante quant à la comptabilité de la société Netcall, ne permettent de tenir pour établi que le requérant aurait servi de prête-nom pour permettre la poursuite de l'activité exercée par la société Netcall en contrepartie d'une rémunération pour l'usage ainsi fait de son nom et de son compte bancaire, ou qu'il aurait exercé une activité professionnelle non commerciale en lien avec l'activité de cette société, ou, de façon générale, que tout ou partie des sommes en cause entrerait dans le champ des dispositions précitées de l'article 92 du code général des impôts ;

Considérant par ailleurs, et contrairement à ce que soutient le requérant, que l'administration ne saurait être regardée comme ayant admis implicitement, dans la réponse aux observations du contribuable du 6 septembre 2005, que les sommes en cause devraient être qualifiées de bénéfices industriels et commerciaux ou, à défaut, de bénéfices non commerciaux ;

Considérant qu'il suit de là, et dès lors que M. A n'apporte pas la preuve que les sommes en cause se rattacheraient à une catégorie déterminée de revenus, que c'est à bon droit que l'administration les a imposées en tant que revenus d'origine indéterminée ;

En ce qui concerne le montant des sommes réintégrées dans les revenus imposables du requérant :

Considérant que M. A, s'il produit des documents permettant d'opérer certains rapprochements, mois par mois, entre des sommes débitées de son compte bancaire et les dépenses de la société Netcall enregistrées sur des documents comptables qui, ainsi qu'il a été dit, sont dépourvus de valeur probante quant à la comptabilité de la société Netcall, ainsi que plusieurs factures émises, en 2002 ou en 2003, pour certaines à son nom et pour d'autres au nom de la société Netcall, et dont il ressort des termes mêmes du récapitulatif des annexes jointes à son mémoire enregistré le 4 octobre 2012 que leurs " paiements sont difficilement identifiables ", ne démontre pas l'exagération des montants réintégrés dans ses revenus imposables, dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par suite, ses conclusions à fins d'annulation et de décharge ne peuvent qu'être rejetées, de même que, par voie de conséquence, celles qu'il présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 11VE01310


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE01310
Date de la décision : 25/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : M. COUZINET
Rapporteur ?: Mme Hélène VINOT
Rapporteur public ?: Mme GARREC
Avocat(s) : CABINET ANDRÉ HOIN et PARTENAIRES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-10-25;11ve01310 ?
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