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13/04/2012 | FRANCE | N°11PA00412

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 13 avril 2012, 11PA00412


Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 2011, présentée pour la SCI TOAROTU, dont le siège social est à Punaauia, résidence Taina, BP 1247, à Papeete (98713), Polynésie française, par Me Jourdainne ;

la SCI TOAROTU demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1000359 rendu le 26 octobre 2010 par le Tribunal administratif de la Polynésie Française en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les transactions, assorties des intérêts de retard, auxquelles elle a été assujettie au titre des années 20

03 et 2004, à hauteur respectivement des sommes de 6 812 653 francs CFP et 4 524 847...

Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 2011, présentée pour la SCI TOAROTU, dont le siège social est à Punaauia, résidence Taina, BP 1247, à Papeete (98713), Polynésie française, par Me Jourdainne ;

la SCI TOAROTU demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1000359 rendu le 26 octobre 2010 par le Tribunal administratif de la Polynésie Française en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les transactions, assorties des intérêts de retard, auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2003 et 2004, à hauteur respectivement des sommes de 6 812 653 francs CFP et 4 524 847 francs CFP ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française le paiement de la somme de 300 00 francs CFP en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 ;

Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

Vu le code des impôts de la Polynésie française ;

Vu la loi n° 96-313 du 12 avril 1996 ;

Vu la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 ;

Vu la délibération n° 2004-33 en date du 12 février 2004 de l'Assemblée de la Polynésie française ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mars 2012 :

- le rapport de M. Couvert-Castéra, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Blanc, rapporteur public ;

Considérant que le service des contributions de la Polynésie française a remis en cause le crédit d'impôt sur les transactions dont la SCI TOAROTU avait bénéficié lors de l'année 2003, sur le fondement des dispositions de l'article 184-2 du code des impôts de la Polynésie française, au titre du financement d'un projet de construction immobilière réalisé par la SCI " Société financière d'investissements immobiliers " ; que la SCI TOAROTU relève appel du jugement du 26 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les transactions, assorties des intérêts de retard, auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2003 et 2004, à hauteur respectivement des sommes de 6 812 653 francs CFP et 4 524 847 francs CFP, en conséquence de la remise en cause de l'imputation du crédit d'impôt en cause sur l'impôt sur les transactions qu'elle devait au titre de ces deux années ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 433-6 du code des impôts de la Polynésie française : " Saisie dans le cadre de la procédure de redressement prévue à l'article 421-1-2, la commission émet un avis qui ne lie pas l'administration. Cependant, dans le cas où le service des contributions établit une imposition ou effectue un redressement sur la base d'une appréciation contraire à l'avis de la commission, il a l'obligation, avant la mise en recouvrement, sous peine de nullité de la procédure de vérification, de transmettre le dossier, pour décision, au Président de la Polynésie française ou à son délégataire. (...) " ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 433-6 du code des impôts de la Polynésie française que si, en vertu de la première phrase de cet article, la commission des impôts peut être saisie en cas de désaccord constaté dans le cadre de la procédure de redressement prévue à l'article 421-1-2 et émet un avis qui ne lie pas l'administration, l'obligation faite à cette dernière, par la deuxième phrase de l'article 433-6, de transmettre le dossier, pour décision, au président de la Polynésie française ou à son délégataire, lorsqu'elle envisage d'établir une imposition ou d'effectuer un redressement sur la base d'une appréciation contraire à l'avis de la commission, ne s'applique, sous peine de nullité de la procédure d'imposition, que lorsque la procédure de redressement a été précédée d'une procédure de vérification ; que la seule procédure de vérification prévue par le code des impôts de la Polynésie française est la vérification de comptabilité, qui figure à l'article 412-1 de ce code ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'imposition en litige a été établie selon la procédure de redressement contradictoire à l'issue d'un contrôle sur pièces et non d'une vérification de comptabilité ; qu'il s'ensuit que doit être écarté comme inopérant le moyen tiré par la SCI TOAROTU de ce que la procédure d'imposition serait entachée d'irrégularité au motif que le service des contributions a mis les impositions en litige en recouvrement sans transmettre préalablement le dossier, pour décision, au président de la Polynésie française, alors que les redressements ont été effectués sur la base d'une appréciation contraire à l'avis de la commission des impôts ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la prescription des impositions au titre de l'année 2003 :

Considérant qu'aux termes de l'article 184-2 du code des impôts de la Polynésie française dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " Les personnes assujetties à l'impôt sur les transactions bénéficient d'un crédit d'impôt pour tout financement égal ou supérieur à 10 millions de francs dans un projet de construction immobilière, à l'exception des projets à vocation hôtelière, d'un coût total égal ou supérieur à 100 millions de francs dont la demande de permis de construire aura été déposée avant le 31 décembre 2001. (...) Ce crédit d'impôt est imputable sur la moitié de l'impôt sur les transactions dû, établi au titre de l'exercice de la réalisation du financement, sur présentation d'une attestation précisant les modalités de financement délivrée par le constructeur. / Il en est tenu compte pour le calcul des acomptes. / Le solde éventuel du crédit d'impôt est imputable dans la même limite sur les cinq exercices suivants. (...) / Ces avantages sont remis en cause, et l'impôt dont le crédit a été préalablement accordé devient immédiatement exigible, nonobstant le cas échéant l'expiration des délais de prescription, dans les circonstances suivantes : (...) - non-présentation du certificat de conformité à l'issue du trentième mois suivant celui de la délivrance du permis de construire (...) " ;

Considérant que le principe de sécurité juridique s'oppose à ce que puisse être légalement édictée une disposition qui institue un droit de reprise au profit de l'administration fiscale en excluant, de façon générale et absolue, l'application de toute prescription ;

Considérant que la SCI TOAROTU est dès lors fondée à soutenir, par la voie de l'exception d'illégalité, que les dispositions précitées de l'article 184-2 du code des impôts de la Polynésie française, en tant qu'elles excluent tout délai de prescription, méconnaissent le principe de sécurité juridique ; qu'il s'ensuit qu'il y a lieu d'en écarter dans cette mesure l'application dans le présent litige ;

Considérant qu'il y a lieu, en conséquence, de faire application des dispositions de droit commun prévues, en ce qui concerne la prescription du droit de reprise de l'administration fiscale, par le code des impôts de la Polynésie française ;

Considérant qu'aux termes de l'article 451-1 du code des impôts de la Polynésie française, dans sa rédaction alors applicable : " Les omissions totales ou partielles constatées dans l'assiette ou la liquidation des impôts et taxes visés au présent code ainsi que les erreurs commises dans l'établissement des impositions, dans l'application des tarifs ou dans le calcul des cotisations peuvent être réparées jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due " et qu'aux termes de l'article 451-3 du même code : " Toute notification motivée de redressement est interruptive de prescription. Un nouveau délai de trois ans court à compter du jour de la réception de la notification " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le service des contributions de la Polynésie française a remis en cause le crédit d'impôt sur les sociétés dont la SCI TOAROTU avait bénéficié lors de l'année 2003, au motif que la SCI " Société financière d'investissements immobiliers " ne lui avait pas présenté, malgré la demande en ce sens qui lui avait été adressée le 25 septembre 2006, le certificat de conformité relatif au projet de construction immobilière autorisé par le permis de construire délivré le 14 août 2003 ; qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 184-2 du code des impôts de la Polynésie française que ce certificat de conformité devait être présenté à l'issue du trentième mois suivant celui de la délivrance du permis de construire, soit avant le 1er mars 2006 ; que ce n'est qu'à compter de cette date que le service des contributions de la Polynésie française était en mesure de constater le manquement à l'obligation de présenter le certificat de conformité et, par conséquent, de remettre en cause pour ce motif le crédit d'impôt dont la contribuable avait bénéficié, devenu immédiatement exigible à cette même date ; qu'il s'ensuit que, en application des dispositions précitées de l'article 451-1 du code des impôts de la Polynésie française, l'administration disposait en l'espèce pour exercer son droit de reprise d'un délai expirant au plus tard le 31 décembre 2009 ; que la notification de redressements portant sur l'imposition en litige, intervenue le 22 janvier 2007, soit avant l'expiration du délai de prescription, a interrompu celui-ci et fait courir un nouveau délai de trois ans à compter du jour de sa réception en application de l'article 451-3 du code des impôts de la Polynésie française ; que, dès lors, doit être écarté le moyen tiré par la société requérante de ce que l'imposition due au titre de l'année 2003 était prescrite à la date du 16 décembre 2009 à laquelle elle a été mise en recouvrement ;

En ce qui concerne le bien-fondé de la remise en cause du crédit d'impôt :

Considérant, d'une part, que l'article 1er de la délibération n° 2004-33 en date du

12 février 2004 de l'assemblée de la Polynésie française a introduit dans le code des impôts de cette collectivité une troisième partie, intitulée " Incitations fiscales à l'investissement ", qui comporte notamment un article 914-4 ainsi rédigé : " Le bénéfice du crédit d'impôt est en outre subordonné à : - la présentation au service des contributions d'un document délivré par la société réalisant le projet certifiant le financement effectif du projet et les modalités de ce financement par l'investisseur ; - la rétrocession par le bénéficiaire à la société réalisant le projet d'au moins 60% de l'avantage procuré au titre du ou des financements ; - l'engagement pris par le bénéficiaire de conserver les immeubles, les actions, parts ou apports en compte courant pendant 18 mois au moins ou jusqu'à la date de délivrance du certificat de conformité ou, s'agissant des projets qui ne sont pas concernés par ce certificat, du document spécifique prévu au titre des dispositions particulières du titre II du présent titre, si la date de délivrance intervient avant l'expiration du délai de 18 mois ; - la justification, en cas d'apports en compte courant, par l'associé ou actionnaire de la conservation par la société qui réalise le projet d'investissement de la rétrocession du crédit d'impôt./ Le certificat de conformité ou, s'agissant des projets qui ne sont pas concernés par ce certificat, le document spécifique prévu au titre des dispositions particulières du chapitre II du présent titre, doit être présenté au plus tard dans les quarante-deux mois suivant la date de délivrance du permis de construire ou du document attestant le début des travaux. / Toutefois, le Président du gouvernement peut, en cas de force majeure ou de difficultés liées à l'obtention de l'agrément de défiscalisation métropolitaine, autoriser une prorogation du délai de présentation du certificat de conformité ou, s'agissant des projets qui ne sont pas concernés par ce certificat, du document en tenant lieu. " ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 4 de la délibération précitée : " Les dispositions visées aux articles 1 à 3 de la présente délibération sont applicables aux projets d'investissement qui font l'objet d'une demande d'agrément postérieure à la date de publication de la présente délibération au Journal officiel de la Polynésie française.(...) Les projets d'investissement qui ont fait l'objet d'une demande de permis de construire avant la date de publication de la délibération n° 2002-161 APF du 5 décembre 2002, restent soumis au régime en vigueur avant cette date. Ils ne relèvent pas de la procédure d'agrément. " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le projet d'investissement au titre duquel la SCI TOAROTU a bénéficié d'un crédit d'impôt en application des dispositions de l'article 184-2 du code des impôts de la Polynésie française a fait l'objet d'une demande de permis de construire le 10 décembre 2001 ; qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 4 de la délibération n° 2004-33 du 12 février 2004 que les règles applicables à ce crédit d'impôt demeuraient celles de l'article 184-2 du code des impôts de la Polynésie française ; qu'il s'ensuit que les dispositions précitées de l'article 914-4 de ce code, qui autorisent le Président du gouvernement, en cas de force majeure ou de difficultés liées à l'obtention de l'agrément de défiscalisation métropolitaine, à proroger le délai de présentation du certificat de conformité, ne s'appliquent pas au crédit d'impôt en litige ;

Considérant que, ainsi qu'il a été dit plus haut, le certificat de conformité relatif au projet de construction immobilière autorisé par le permis de construire délivré le

14 août 2003 n'a pas été présenté dans le délai fixé par les dispositions précitées de l'article

184-2 du code des impôts de la Polynésie française ; que ces dispositions, qui prévoient la remise en cause du crédit d'impôt qu'elles instituent en cas de non-présentation du certificat de conformité à l'issue du trentième mois suivant celui de la délivrance du permis de construire, ne mentionnent aucune circonstance permettant de considérer que le délai de présentation du certificat de conformité est suspendu et n'autorisent ni le président du gouvernement de la Polynésie française ni aucune autre autorité à proroger ce délai ; qu'il s'ensuit que la SCI TOAROTU ne peut utilement se prévaloir, à l'appui de ses conclusions tendant à la décharge des impositions en litige, de la circonstance que, par une lettre du 15 février 2007, dans laquelle il fait référence aux dispositions de l'article 914-4 du code des impôts de la Polynésie française, le ministre des finances et de la fonction publique du gouvernement de la Polynésie française a demandé au chef du service des contributions de " suspendre la procédure engagée ", après avoir notamment fait valoir que " le dépassement du délai pour la production du certificat de conformité n'est pas imputable aux investisseurs " ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par la Polynésie française, que la SCI TOAROTU n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Polynésie française, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SCI TOAROTU demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions en mettant à la charge de cette société une somme de 500 euros au titre des frais exposés par la Polynésie française et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI TOAROTU est rejetée.

Article 2 : La SCI TOAROTU versera à la Polynésie française une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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