Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 19 mai 2011, complété par des mémoires enregistrés le 18 octobre 2011 et le 16 février 2012, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT ;
Le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0901336 en date du 14 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision implicite par laquelle le directeur des services fiscaux de la Haute-Marne a rejeté la demande de la commune d'Auberive tendant à l'assujettissement de l'Office national des forêts à la taxe professionnelle au titre des années 2006, 2007 et 2008 ;
2°) de rejeter la demande présentée par la commune d'Auberive devant le tribunal administratif ;
Il soutient :
- que le Tribunal administratif a dénaturé les écritures de l'administration qui n'avait jamais admis le caractère taxable des activités déployées par l'Office national des forêts sur le territoire de la commune ;
- que le Tribunal administratif a commis une erreur de droit, a entaché son jugement de contradiction de motifs et n'a pas exercé son office en n'examinant pas la nature des activités de l'Office national des forêts sur le territoire de la commune, en outre, après avoir indiqué qu'il convenait d'examiner ces activités ;
- que la disposition par l'Office national des forêts de deux maisons forestières et l'emploi par lui de salariés ne suffisent pas à indiquer qu'il réalise des opérations de caractère non agricole et concurrentiel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 septembre 2011, complété par un mémoire enregistré le 13 février 2012, présenté pour la commune d'Auberive, représentée par son maire en exercice dûment habilité, ayant pour mandataire Me Misset, avocat ;
La commune conclut :
- au rejet du recours ;
- à ce que la Cour ordonne à l'administration de procéder au recouvrement de la taxe professionnelle en litige sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
- à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient :
- que l'administration a reconnu que l'Office national des forêts devait être soumis à la taxe professionnelle ;
- que l'activité de l'Office national des forêts consiste à gérer et assurer l'exploitation régulière des bois et forêts situés sur le territoire de la commune en contrepartie de recettes provenant de tiers, qu'il tient une comptabilité commerciale et entre ainsi dans le champ d'application de la taxe professionnelle défini par l'article 1447 du code général des impôts ;
- que le seul fait pour l'Office national des forêts de se voir confier une mission d'intérêt général hors concurrence ne l'exonère pas de la taxe professionnelle, alors qu'il est un établissement public industriel et commercial, recherche des bénéfices, dispose de moyens financiers importants, exerce ses activités professionnelles moyennant rémunération et qu'il constitue ainsi une personne morale exerçant habituellement une activité professionnelle non salariée, susceptible de procurer un bénéfice, conformément aux critères de l'article 1447 du code général des impôts ;
- que le Tribunal administratif ne s'est pas borné à faire référence aux biens dont dispose l'Office national des forêts dans la commune et à l'emploi de salariés, mais a relevé le caractère marchand de ses activités ;
- que l'importance des moyens mis en oeuvre par l'Office national des forêts dans la commune constitue un indice important de ce qu'il doit être assujetti à la taxe professionnelle ;
Vu en date du 26 mai 2011, la communication de la procédure à l'Office national des forêts ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code forestier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 février 2012 :
- le rapport de Mme Stefanski, président,
- les conclusions de M. Féral, rapporteur public,
- et les observations de Me Misset, avocat de la commune d'Auberive ;
Considérant que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT demande l'annulation du jugement du 14 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé pour excès de pouvoir la décision par laquelle le directeur des services fiscaux de la Haute-Marne a rejeté implicitement la demande de la commune d'Auberive tendant à l'assujettissement de l'Office national des forêts à la taxe professionnelle au titre des années 2006 à 2008, à raison des activités de l'unité territoriale de cet Office située sur son territoire ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1447 du code général des impôts : " I. La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée... " ; que ne sont pas assujetties à l'impôt les personnes qui ne poursuivent pas leur activité dans les conditions habituelles d'exercice de la profession assujettie à la taxe professionnelle, mais se bornent à une exploitation ou à des opérations de caractère non lucratif ;
Considérant qu'en vertu des articles L. 121-1 et suivants du code forestier, l'Office national des forêts est un établissement public national à caractère industriel et commercial chargé de la gestion et de l'équipement des forêts et terrains à boiser ou à restaurer appartenant à l'Etat, dont les activités s'inscrivent dans un contrat de plan pluriannuel conclu avec l'Etat et déclinant ses obligations de service public, chargé, en outre, d'assurer la mise en oeuvre du régime forestier dans les bois, forêts et terrains relevant de ce régime ;
Considérant que les activités de gestion et de protection des forêts domaniales, exercées sur le territoire de la commune d'Auberive par l'unité territoriale de l'Office national des forêts, en application des articles L. 121-1 et suivants du code forestier, ne constituent, ni par leur nature, ni par leurs conditions d'exercice déterminées par le code forestier, des activités professionnelles au sens des dispositions précitées de l'article 1447 du code général des impôts ; que la gestion de la chasse en constitue le prolongement normal dès lors qu'elle s'exerce sur les mêmes forêts en vue d'en assurer la protection, avec le même personnel et les mêmes moyens matériels ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'unité territoriale d'Auberive aurait participé, au cours de la période litigieuse, en vertu de conventions particulières et au profit de personnes publiques ou privées autres que celles mentionnées aux articles L. 121-2 et L. 121-3 et L.121-4 du code forestier, à des opérations de prestations de services à caractère lucratif qui ne constitueraient pas le prolongement normal de ses missions de gestion et de protection des forêts ; que, dans ces conditions, les seules circonstances que, sur le territoire de la commune d'Auberive, l'unité territoriale d'Auberive dispose de deux maisons forestières et emploie treize personnes et que l'Office national des forêts soit un établissement public industriel et commercial qui tient une comptabilité commerciale et perçoit des recettes, ne sont pas, à elles seules, de nature à conférer à l'ensemble des opérations réalisées par cette unité territoriale de l'Office national des forêts un caractère professionnel au sens de l'article 1447 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision contesté du directeur des services fiscaux de la Haute-Marne ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que le présent arrêt, qui annule le jugement attaqué et rejette les conclusions présentées par la commune d'Auberive devant le tribunal administratif, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de la commune d'Auberive tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de procéder au recouvrement de la taxe professionnelle en litige sous astreinte de 500 euros par jour de retard, ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à la commune d'Auberive la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement en date du 14 avril 2011 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la commune d'Auberive devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT, à la commune d'Auberive et à l'Office national des forêts.
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