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25/05/2012 | FRANCE | N°11LY02612

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 25 mai 2012, 11LY02612


Vu la requête, enregistrée le 2 novembre 2011, présentée pour M. Jacques A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100094 du 22 septembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande qui tendait à l'annulation de la décision du 2 juillet 2010 par laquelle le préfet du Cantal a prorogé de deux mois le délai d'instruction de sa demande d'autorisation d'exploiter, et de l'arrêté du préfet du Cantal du 16 novembre 2010 en tant qu'il lui refuse l'autorisation d'exploiter des parcelles situées à Sai

nt-Simon appartenant à M. B ;

2°) d'annuler la décision et l'arrêté susmentio...

Vu la requête, enregistrée le 2 novembre 2011, présentée pour M. Jacques A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100094 du 22 septembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande qui tendait à l'annulation de la décision du 2 juillet 2010 par laquelle le préfet du Cantal a prorogé de deux mois le délai d'instruction de sa demande d'autorisation d'exploiter, et de l'arrêté du préfet du Cantal du 16 novembre 2010 en tant qu'il lui refuse l'autorisation d'exploiter des parcelles situées à Saint-Simon appartenant à M. B ;

2°) d'annuler la décision et l'arrêté susmentionnés ;

3°) d'ordonner au préfet du Cantal de produire l'ensemble du dossier d'instruction ;

4°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 4 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le Tribunal prétend à tort qu'il a sollicité une nouvelle demande d'autorisation d'exploiter auprès de la préfecture, le 26 mai 2010, et qu'il fallait apprécier les éléments à la date de la décision, et non à la date de la première demande ; que la demande d'autorisation d'exploiter au préfet a fait l'objet d'une lettre recommandée et a été envoyée le 25 mai 2010 ; qu'elle porte sur le renouvellement de la demande du 20 octobre 2007 ; que le préfet devait donc réexaminer le dossier avec les éléments de fait existant au moment de l'arrêté annulé du 8 avril 2008 et de la demande du 27 décembre 2007 ; que l'avis négatif sur sa demande donné par la commission départementale d'orientation de l'agriculture (CDOA) au préfet en novembre 2010, que le préfet a suivi, l'a été par une voix d'écart ; que siégeaient à la commission trois membres de la commission, qui ont donné un avis favorable à la demande concurrente de M. C, qui est un de leurs collègues à la chambre d'agriculture ; que M. A n'a pu être entendu par la commission et obtenir communication du dossier de M. C ; que cet avis vicie la procédure et méconnaît l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme, car l'arrêté du 16 novembre 2010 de refus d'autorisation attaqué est fondé sur le rang de priorité supérieur de M. C ; que l' arrêté du 16 novembre 2010 est insuffisamment motivé et entaché d'erreur d'appréciation, car il ne précise pas les raisons de la priorité de M. C et la situation de pluriactif de ce dernier, salarié à la chambre d'agriculture ; que le préfet a commis un détournement de pouvoir, car la demande de M. C est artificielle et favorisée par l'administration et M. B ; que l'autorisation d'exploiter qui lui a été accordée le 8 avril 2008, époque où il n'y avait pas de concurrent, doit lui être réattribuée ; que le signataire des deux décisions attaquées ne justifie pas d'une délégation de signature régulière du préfet ; que sa demande d'autorisation d'exploiter, déposée le 28 mai 2010, devait faire l'objet d'une décision dans le délai de quatre mois, en application de l'article R. 331-6 du code rural, ce qui n'a pas été le cas ; que M. A bénéficie donc d'une autorisation implicite d'exploiter ; que le préfet ne peut allonger le délai à six mois que par décision motivée ; que la décision prise en ce sens le 2 juillet 2010 est entachée de détournement de pouvoir, l'administration voulant trouver un concurrent qui n'existait pas alors ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 janvier 2012, présenté pour M. B, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. A à lui payer une somme de 3 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. B soutient que l'administration doit apprécier les éléments de fait et de droit existant à la date de la nouvelle décision qui statue sur la demande d'autorisation d'exploiter ; que le Tribunal a estimé à bon droit que les trois membres de la commission, sur 25, représentant la chambre d'agriculture, n'avaient pas pris de part active aux débats ; que M. C, jeune agriculteur récemment installé, était prioritaire, en application de l'article 7 du schéma directeur départemental des structures agricoles ; que l'arrêté attaqué est suffisamment motivé ; que le délai a été respecté, l'administration devant observer les formalités de publicité prévues par l'article R. 331-4 alinéa 5 du code rural ; qu'aucun détournement de pouvoir n'est démontré ; que le signataire des décisions attaquées est compétent, il bénéficie d'arrêtés de délégation de signature du préfet du Cantal des 4 mai et 8 novembre 2010, comme le Tribunal l'a jugé, et l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme n'est pas applicable à la CDOA ; que l'administration a régulièrement prorogé le délai d'instruction à six mois le 2 juillet 2010, en respectant l'article R. 331-6 du code rural, car la demande concurrente de M. C étant enregistrée par la préfecture le 30 juin 2010, et M. A ne bénéficie d'aucune autorisation tacite d'exploiter ;

Vu la lettre en date du 21 février 2012 par laquelle les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de retenir d'office le fait que la lettre du préfet prorogeant de deux mois le délai d'instruction de la demande d'autorisation d'exploiter de M. A ne faisait pas grief ;

Vu la réponse au moyen d'ordre public, enregistrée le 22 février 2012, présentée pour M. A ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 avril 2012, présenté par le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que le courrier du 2 juillet 2010 ne fait pas grief, comme l'a relevé la Cour ; que le préfet devait apprécier les éléments à la date de sa décision, que la procédure est régulière, et la motivation de l'arrêté attaqué est suffisante ; que M. C était prioritaire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mai 2012 :

- le rapport de M. Rabaté, président ;

- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

- et les observations de M. B ;

Considérant que M. A relève appel du jugement du 22 septembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de la lettre du 2 juillet 2010 par laquelle le préfet du Cantal a prorogé de deux mois le délai d'instruction de sa demande d'autorisation d'exploiter, et de l'arrêté du préfet du Cantal du 16 novembre 2010 en tant qu'il lui refuse une autorisation d'exploiter des parcelles appartenant à M. B, situées à Saint-Simon ;

Sur la lettre du 2 juillet 2010 :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 331-6 du code rural : " I. Le préfet dispose d'un délai de quatre mois à compter de la date d' enregistrement du dossier complet mentionnée dans l'accusé de réception pour statuer sur la demande. Il peut, par décision motivée, fixer ce délai à six mois à compter de cette date, notamment en cas de candidatures multiples soumises à l'avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture ou de consultation du préfet d'un autre département. Il en avise alors les intéressés dans les meilleurs délais par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise contre récépissé. (...) A défaut de notification d'une décision dans le délai de quatre mois à compter de la date d'enregistrement du dossier ou, en cas de prorogation de ce délai, dans les six mois à compter de cette date, l'autorisation est réputée accordée (...)" ;

Considérant que la lettre en date du 2 juillet 2010 par laquelle le préfet du Cantal a informé M. A, en application de l'article R. 331-6 précité du code rural, que le délai d'instruction de sa demande d'autorisation d'exploiter serait prorogé de quatre à six mois, est préparatoire à la décision par laquelle le préfet statue sur ladite demande ; qu'ainsi elle ne constitue pas une décision faisant grief susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; que par suite, M. A n'est pas fondé à se plaindre du rejet par le jugement attaqué de sa demande d'annulation de ladite lettre ;

Sur l'arrêté du 16 novembre 2010 :

Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, que la Cour fait siens, d'écarter les moyens invoqués par M. A, tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté, de l'irrégularité de la procédure suivie devant la commission départementale d'orientation de l'agriculture, et de la violation de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions précitées de l'article R. 331-6 du code rural ; qu'il en est de même des moyens invoqués par le requérant, tirés du fait que le préfet ne devait pas prendre en compte les éléments de fait et de droit existant au 16 novembre 2010, date de sa décision, de l'erreur d'appréciation commise par le préfet dans l'examen des demandes concurrentes au regard des priorités du schéma départemental des structures, et du détournement de pouvoir ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 331-6 II du code rural : " La décision d'autorisation ou de refus d'exploiter prise par le préfet doit être motivée au regard des critères énumérés à l'article L. 331-3 ; que cet article prévoit que l'administration doit " 1° observer l'ordre des priorités établi par le schéma départemental entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations agricoles (...)" ; que l'obligation de motivation instituée par ces dispositions n'impose pas au préfet de se prononcer sur tous les critères mentionnés par l'article L. 331-3 ;

Considérant que l'arrêté en litige, après avoir cité les textes applicables, indique que les demandes présentées par MM. A et C sont classées en 1ère catégorie " installation ", en application des articles 5, 6 et 9 du schéma directeur départemental des structures agricoles, qu'en application de l'article 7 du schéma il est tenu compte comme critère de priorité de l'installation d'un jeune agriculteur pouvant prétendre aux aides à l'installation, qu'au regard de son âge M. A ne peut prétendre à ces aides, et que sa demande relève d'un rang de priorité inférieur à celle de M. C ; que, dès lors, l'arrêté est suffisamment motivé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit utile d'ordonner au préfet de produire le dossier d'instruction de la demande d'autorisation d'exploiter, M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ;

Sur l'application de l'article L . 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à la condamnation de l'Etat, qui n'est pas partie perdante à l'instance ; que M. B, mis en cause dans la présente instance, n'est pas une partie, au sens des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il ne peut, par suite, bénéficier de ces dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de M. B relatives à l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jacques A, à M. Antoine Jean B et au ministre de l'agriculture et de l'agroalimentaire.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2012, à laquelle siégeaient :

M. Rabaté, président de la formation de jugement,

M. Seillet et Mme Dèche, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 25 mai 2012.

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N° 11LY02612


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY02612
Date de la décision : 25/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-05 Agriculture, chasse et pêche. Exploitations agricoles. Aides à l'exploitation.


Composition du Tribunal
Président : M. RABATE
Rapporteur ?: M. Vincent RABATE
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : PETITJEAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-05-25;11ly02612 ?
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