CHAMBRE MIXTE
Arrêt n° 273 P + B + R + I Pourvoi n° K 11-28. 688
LA COUR DE CASSATION, siégeant en CHAMBRE MIXTE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par M. Nicolas X..., domicilié..., 21000 Dijon,
contre l'arrêt rendu le 14 octobre 2011 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (15e chambre A), dans le litige l'opposant à la BRED Banque populaire, société anonyme, dont le siège est 18 quai de la Râpée, 75012 Paris,
défenderesse à la cassation ;
M. le premier président a, par ordonnance du 7 septembre 2012, renvoyé le pourvoi devant une chambre mixte composée des première, deuxième et troisième chambres civiles ;
Le demandeur invoque, devant la chambre mixte, le moyen de cassation annexé au présent arrêt ;
Ce moyen unique a été formulé dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, avocat de M. X... ;
Des observations et un mémoire complémentaire en défense ont été déposés au greffe de la Cour de cassation par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat de la BRED Banque populaire ;
Le rapport écrit de M. Maunand, conseiller, et l'avis écrit de M. Azibert, premier avocat général, ont été mis à la disposition des parties ;
Sur quoi, LA COUR, siégeant en chambre mixte, en l'audience publique du 10 décembre 2012, où étaient présents : M. Lamanda, premier président, MM. Charruault, Terrier, Mme Flise, présidents, M. Maunand, conseiller rapporteur, MM. Bargue, Pluyette, Bizot, Mme Bardy, MM. Mas, Grellier, Mme Feydeau, M. Savatier, conseillers, M. Azibert, premier avocat général, Mme Tardi, directeur de greffe ;
Sur le rapport de M. Maunand, conseiller, assisté de M. Cardini, auditeur au service de documentation, des études et du rapport, les observations de la SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, l'avis de M. Azibert, premier avocat général, auquel la SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, invitée à le faire, n'a pas souhaité répliquer, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 octobre 2011), que la société BRED Banque populaire (la banque) a engagé des poursuites de saisie immobilière à l'encontre de M. X... sur le fondement d'un acte notarié de prêt établi en vue d'une acquisition immobilière ; que M. X... a contesté le caractère exécutoire du titre servant de fondement aux poursuites ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de mainlevée de saisie immobilière, de constater que la banque disposait d'un titre exécutoire comportant une créance liquide et exigible lui permettant de diligenter des voies d'exécution et d'ordonner la vente aux enchères publiques de l'immeuble saisi sur la mise à prix fixée par le créancier, alors, selon le moyen :
1°/ qu'une procuration doit, soit être annexée à l'acte pour lequel elle a été consentie, soit déposée au rang des minutes, sans que l'annexion à un autre acte ne puisse valoir annexion à cet acte ou dépôt au rang des minutes, lequel constitue un acte distinct ; qu'en considérant néanmoins que l'annexion de la procuration donnée par M. X... et reçue par M. Y... à un acte de vente reçu par M. Z... satisfaisait aux dispositions de l'article 8 du décret du 26 novembre 1971, devenu les articles 21 et 22 du même décret, la cour d'appel a violé ces textes ;
2°/ que constitue un clerc d'une étude notariale, une personne qui dispose d'une formation juridique et de compétences spécifiques qui en font un professionnel du droit qualifié, sans pouvoir être assimilé à tout salarié d'une étude notariale, notamment à une secrétaire ; qu'en considérant que Mme A..., secrétaire, avait valablement représenté M. X..., quand ce dernier avait donné procuration à un clerc de notaire pour le représenter, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1984 et 1985 du code civil ;
3°/ que la confirmation d'un acte vicié exige à la fois la connaissance du vice affectant cet acte et l'intention de le réparer ; qu'en retenant que le mandat donné par M. X... aurait été ratifié du fait de l'exécution du contrat de prêt, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à caractériser tant la connaissance qu'avait M. X... du vice que son intention de le réparer, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1338 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, que l'inobservation de l'obligation, pour le notaire, de faire figurer les procurations en annexe de l'acte authentique ou de les déposer au rang de ses minutes ne fait pas perdre à l'acte son caractère authentique, partant son caractère exécutoire ; que, par ce motif de pur droit suggéré par la défense, substitué à ceux critiqués, la décision déférée se trouve légalement justifiée ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant souverainement retenu que le mandat litigieux avait été ratifié par M. X... du fait de l'exécution par celui-ci du contrat de prêt, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer la somme de 2 500 euros à la société BRED Banque populaire ; rejette la demande de M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, siégeant en chambre mixte, et prononcé le vingt-et-un décembre deux mille douze par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Moyen produit par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils pour la BRED Banque populaire
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande de mainlevée de saisie immobilière, tirée de l'absence de titre exécutoire régulier, constaté que la banque disposait d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible lui permettant de diligenter des voies d'exécution et ordonné la vente aux enchères publiques de l'immeuble saisi sur la mise à prix fixée par le créancier ;
Aux motifs que M. X... invoque le défaut d'annexion de la procuration à l'acte de prêt du 1er décembre 2003, ce qui aurait pour conséquence de faire perdre à cet acte son caractère exécutoire, de sorte qu'il ne pourrait plus servir de fondement à une saisie immobilière ;
Attendu que M. X... ne conteste ni l'existence ni avoir signé une procuration reçue par Maître Y..., notaire, le 17 juillet 2003, aux termes de laquelle il a constitué pour son mandataire spécial « tous clercs de notaire de l'Etude de Maître Z... Jean-Pierre, notaire à Aix-en-Provence (13100) ..., pouvant agir ensemble ou séparément » et à qui il a donné pouvoir « d'acquérir en l'état futur d'achèvement et contrat en mains de la société dénommée Le Village vers de Rousset... moyennant le prix global … de 640 000 euros, lequel prix s'appliquant, savoir, au lot n° 29 pour 195 000 euros, au lot n° 30 pour 195 000 euros, au lot n° 45 pour 250 000 euros » et « emprunter de tout établissement financier choisi par le mandant, jusqu'à concurrence de la somme de 640 000 euros en une ou plusieurs fois » ;
Attendu que l'examen de l'acte de vente du 4 novembre 2003 démontre que la procuration notariée du 17 juillet 2003 y est bien annexée, cette procuration portant la mention « annexée à la minute d'un acte reçu par le notaire soussigné le 4 novembre 2003 » suivi de la signature du notaire ;
Que la procuration ayant plusieurs objets, elle ne pouvait être annexée qu'à l'un des actes, en l'occurrence l'acte de vente du 4 novembre 2003, référence à cette procuration étant portée dans les autres actes ;
Que les dispositions de l'article 8 du décret 71-941 du 25 novembre 1971 ont donc été respectées ;
Attendu ainsi que le moyen tiré du défaut d'annexion à la procuration à l'acte de prêt est infondé et doit être rejeté ;
Attendu que M. X... se prévaut ensuite d'une erreur affectant l'acte de prêt du 1er décembre 2003 qui indique que le brevet original est annexé à l'acte de vente en l'état futur d'achèvement dressé le 3 novembre 2003 alors que cet acte a été établi le 4 novembre 2003 ;
Mais attendu que cette inexactitude, faute par M. X... de justifier d'un quelconque grief, ne saurait affecter la validité du titre ;
Que ce moyen doit également être rejeté ;
Attendu enfin que M. X... prétend que Mme A..., par qui il a été représenté lors des actes des 4 novembre et 1er décembre 2003 ne serait pas clerc de notaire mais secrétaire notariale ;
Qu'il en déduit, que du fait du défaut de qualité de cette dernière, il n'aurait pas été valablement représenté à ces actes ;
Mais attendu que cette contestation est infondée dès lors qu'il n'existe aucune définition légale de la fonction de clerc, qui doit être considérée comme exerçant de telles fonctions toute personne habituellement employée en l'étude notariale et qu'il n'est pas contesté que l'intéressée est employée en l'étude de Maître Z... en qualité de secrétaire ;
Au surplus, le mandat donné par M. X... a été ratifié du fait de l'exécution du contrat de prêt, tant par la banque que par M. X... ;
Alors que une procuration doit soit être annexée à l'acte pour lequel elle a été consentie, soit déposée au rang des minutes, sans que l'annexion à un autre acte ne puisse valoir annexion à cet acte ou dépôt au rang des minutes, lequel constitue un acte distinct ; qu'en considérant néanmoins que l'annexion de la procuration donnée par M. X... et reçue par Me Y... à un acte de vente reçue par Me Z... satisfaisait aux dispositions de l'article 8 du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971, devenu les articles 21 et 22 du même décret, la cour d'appel a violé ces textes ;
Alors, encore, que constitue un clerc d'une étude notariale, une personne qui dispose d'une formation juridique et de compétences spécifiques qui en font un professionnel du droit qualifié, sans pouvoir être assimilé à tout salarié d'une étude notariale, notamment à une secrétaire ; qu'en considérant que Mme A..., secrétaire, avait valablement représenté M. X..., quand ce dernier avait donné procuration à un clerc de notaire pour le représenter, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1984 et 1985 du code civil ;
Alors, en tout état, que la confirmation d'un acte vicié exige à la fois la connaissance du vice affectant cet acte et l'intention de le réparer ; qu'en retenant que le mandat donné par M. X... aurait été ratifié du fait de l'exécution du contrat de prêt, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à caractériser tant la connaissance qu'avait M. X... du vice que son intention de le réparer, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1338 du code civil.