LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 30 novembre 2010), que Jean-Christophe X... a été victime le 8 juillet 2005 d'un accident mortel de la circulation en Avignon, après avoir heurté avec sa motocyclette Jalal Y..., piéton, qui est également décédé des suites de l'accident ; que par actes des 10 et 17 juillet 2006, les consorts X...- Z..., ainsi que la société Contact Moto Services, dont Jean-Christophe X... était le gérant, ont assigné la société Les Mutuelles du Mans assurances (la société MMA), assureur de responsabilité civile de M. A..., chez lequel aurait habité le piéton, afin d'obtenir l'indemnisation des divers préjudices dont ils avaient souffert, par suite de la mort de leur parent et dirigeant social ; que par acte du 21 septembre 2007, la société MMA a appelé en garantie la société Axa France IARD (la société Axa), au motif que Jalal Y... habitait en réalité chez ses parents, assurés par cette société au titre d'un contrat responsabilité civile ; que la société Axa a contesté la domiciliation du piéton ; que la procédure a été dénoncée par les consorts X...- Z... au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO), lequel est intervenu volontairement à l'instance ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que la société Axa fait grief à l'arrêt de la condamner en tant qu'assureur de responsabilité civile, à indemniser les consorts X...- Z..., ayants droit de la victime d'un accident de la circulation et de mettre hors de cause la société MMA, alors, selon le moyen, que l'assureur, dont la garantie est demandée dans le cadre d'un régime d'assurance non obligatoire de dommages, n'est pas tenu, lorsqu'il excipe d'une cause de non-garantie, d'en aviser la victime et le FGAO afin de la leur rendre opposable ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a décidé le contraire, a violé les articles L. 421-1, L. 421-6 et R. 421-5 du code des assurances ;
Mais attendu que, selon l'article L. 421-1, alinéas 1er et 3, du code des assurances, dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003, applicable à l'espèce, le FGAO est chargé, lorsque le responsable demeure inconnu ou n'est pas assuré, d'indemniser tant les victimes des dommages résultant des atteintes à leur personne nés d'un accident dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur en circulation, que les victimes de dommages de même nature causés accidentellement par des personnes circulant sur le sol dans des lieux ouverts à la circulation publique ; qu'en application de l'article R. 421-4, alinéa 1er, du même code, lorsqu'un contrat d'assurance a été souscrit pour garantir les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile de l'auteur de dommages résultant d'atteintes aux personnes nés d'un accident mentionné à l'article L. 421-1, le FGAO ne peut être appelé à payer l'indemnité allouée à la victime ou à ses ayants droit qu'en cas de nullité du contrat, de suspension du contrat ou de la garantie, de non-assurance ou d'assurance partielle opposables à la victime ou à ses ayants droit ; que selon l'article R. 421-5, alinéa 1er, du même code, lorsque l'assureur entend invoquer la nullité du contrat d'assurance, sa suspension ou la suspension de la garantie, une non-assurance ou une assurance partielle opposables à la victime ou à ses ayants droit, il doit, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, le déclarer au FGAO et joindre à sa déclaration des pièces justificatives de son exception, et doit en aviser en même temps et dans les mêmes formes la victime ou ses ayants droit en précisant le numéro du contrat, le tout sous peine d'inopposabilité aux victimes de l'exception de non-garantie invoquée ; qu'il s'ensuit que les formalités ainsi requises s'appliquent dans tous les cas d'assurance de responsabilité civile sans distinction, qu'elles relèvent ou non d'un régime d'assurance obligatoire de dommages ;
Et attendu que l'arrêt retient que la société MMA était l'assureur de responsabilité civile de M. A..., beau-frère de Jalal Y... ; que la société Axa était l'assureur de la responsabilité civile de M. Y..., père de Jalal ; que chacun des assureurs invoquait une non-assurance, estimant que c'était l'autre qui devait prendre en charge le sinistre, en raison du domicile de M. Y... ; que la société Axa avait fait connaître, par lettre du 3 mai 2006, au conseil des consorts X...- Z... qu'elle ne pouvait prendre en charge leur préjudice, n'ayant aucun contrat incluant une garantie responsabilité civile au nom de Jalal Y..., ce dernier vivant avec son épouse, depuis leur mariage le 19 mars 2005 en Avignon, au domicile de M. A..., frère de l'épouse, assuré auprès de la société MMA ; que la société Axa n'avait pas informé le FGAO de cette exception de non-assurance ;
Que de ces constatations et énonciations, d'où il ressortait que la société Axa, assureur de responsabilité civile du père de l'auteur des dommages résultant d'une atteinte à la personne de Jean-Christophe X..., n'avait pas accompli la procédure d'information et de justification de l'exception de non-assurance qu'elle entendait invoquer à l'encontre des ayants droit de cette victime, la cour d'appel a exactement déduit que cette exception n'était pas opposable aux consorts X...- Z... et au FGAO ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches, tel que reproduit en annexe :
Attendu que la société Axa fait le même grief à l'arrêt ;
Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des productions que la société Axa a soutenu devant la cour d'appel que le fait d'avoir été appelée en intervention forcée la dispensait d'avoir à respecter les formalités de l'article R. 421-5 du code des assurances pour contester sa garantie ;
D'où il suit que le moyen, nouveau, mélangé de fait et de droit et, comme tel irrecevable en sa troisième branche, est dès lors inopérant en sa deuxième branche ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Axa France IARD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Axa France IARD à payer au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages la somme de 2 500 euros, rejette les demandes respectives de la société Les Mutuelles du Mans assurances et de la société Axa France IARD ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils pour la société Axa France Iard
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné un assureur de responsabilité civile (la société AXA FRANCE IARD) à indemniser les ayants droit (les consorts X...- Z...) de la victime d'un accident de la circulation et d'avoir mis hors de cause un autre assureur (la société MMA) ;
AUX MOTIFS QUE le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages intervient pour prendre en charge les dommages causés par une personne inconnue ou non assurée, dès lors qu'elle circule sur le sol dans des lieux ouverts à la circulation, conformément aux dispositions de l'article L 421-1 du code des assurances ; que la société MMA est l'assureur de responsabilité civile de M. Mohamed A..., beau-frère de M. Jalal Y... ; que la société AXA FRANCE IARD est l'assureur de la responsabilité civile de M. Mohamed Y..., père de Jalal ; que chacun des assureurs invoquait une non-assurance, estimant que c'était l'autre qui devait prendre en charge le sinistre, en raison du domicile de M. Y... ; qu'en vertu de l'article R 421-5 du code des assurances, lorsque l'assureur entend invoquer la nullité du contrat d'assurance, sa suspension ou la suspension de la garantie, une nonassurance ou une assurance partielle opposable à la victime ou à ses ayants droit, il doit d'une part le déclarer par lettre recommandée au fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages et joindre à sa déclaration des pièces justificatives de son exception, et d'autre part, en aviser en même temps et dans les mêmes formes la victime ou ses ayants droit en précisant le numéro du contrat ; qu'il résultait des dispositions combinées des articles L. 421-1 du code des assurances et R. 421-4 du même code que la procédure relative à l'information du Fonds de garantie d'une exception opposée par l'assureur s'applique à l'indemnisation des dommages résultant d'atteintes à la personne, et donc pas exclusivement dans le cadre d'un régime d'assurance obligatoire ; qu'en ce qui concernait la compagnie AXA FRANCE IARD, assureur de la responsabilité civile de M. Mohamed Y..., père du piéton, il était acquis aux débats qu'elle avait fait connaître, par lettre du 3 mai 2006, au Conseil des consorts X...- Z... qu'elle ne pouvait prendre en charge leur préjudice, n'ayant aucun contrat incluant une garantie responsabilité civile au nom de Jalal Y... et que ce dernier vivait avec son épouse, depuis leur mariage le 19 mars 2005 à Avignon, au domicile de M. Mohamed A..., frère de l'épouse, assuré auprès de la compagnie MMA ; que la société AXA FRANCE IARD n'avait pas informé le fonds de garantie de cette exception de non-assurance ; que, dès lors, faute d'avoir respecté la procédure suivie, elle n'était plus fondée à invoquer l'exception soulevée ; qu'en conséquence, la société AXA FRANCE IARD était tenue d'indemniser les ayants droit de M. X... ; que le jugement déféré, qui avait rejeté les demandes dirigées à son encontre, devait être infirmé ; qu'en ce qui concernait la compagnie d'assurances MMA, elle avait été appelée en cause, devant le tribunal de grande instance, par la société AXA FRANCE IARD, alors que la procédure était engagée et qu'aucune réclamation ne lui avait été présentée auparavant ; que le Fonds de garantie était intervenu volontairement à la procédure ; que, dès lors, il ne pouvait lui être reproché aucun manquement au regard des dispositions de l'article R. 421-5 susvisé ;
1°/ ALORS QUE l'assureur, dont la garantie est demandée dans le cadre d'un régime d'assurance non obligatoire de dommages, n'est pas tenu, lorsqu'il excipe d'une cause de non-garantie, d'en aviser la victime et le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages, afin de la leur rendre opposable ; qu'en l'espèce, la cour, qui a décidé le contraire, a violé les articles L. 421-1, L. 421-6 et R. 421-5 du code des assurances ;
2°/ ALORS QUE les juges du fond ne peuvent modifier les termes du litige ; qu'en l'espèce, la cour, qui a énoncé que la société MMA avait été appelée en garantie à la procédure par la société AXA FRANCE IARD, de sorte qu'il n'était pas possible de lui reprocher le défaut de respect des formalités de l'article R. 421-5 du code des assurances, quand c'était la société AXA FRANCE IARD qui avait été appelée en garantie à la procédure par la MMA, de sorte que la garantie de la société MMA était due, faute, pour elle, d'avoir respecté les formalités légales de notification de la cause de non-garantie qu'elle avait soulevée, a modifié les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
3°/ ALORS QUE si un assureur est appelé en garantie à la procédure tendant à l'indemnisation des préjudices d'une victime d'atteintes à la personne, il ne peut lui être reproché de ne pas avoir notifié à la victime et au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages la cause de non-garantie dont il entend se prévaloir ; qu'en l'espèce, la cour, qui a décidé que la garantie de la société AXA FRANCE IARD devait être mobilisée, au motif que cet assureur n'avait pas notifié la cause de non-garantie qu'il excipait aux ayants droit de la victime et au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages, quand la société AXA FRANCE IARD avait été appelée en garantie à la procédure par la société MMA, a violé les articles L. 421-1, L. 421-6 et R. 421-5 du code des assurances.