Vu la requête, enregistrée le 6 août 2010, présentée pour la SOCIETE COFINFO, ayant son siège 23 Boulevard Poissonnière à Paris (75002), par Me Doueb ; la SOCIETE COFINFO demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0705967 / 0717469 du 9 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des deux arrêtés du préfet de Paris en date du 28 décembre 2006 et du 11 juillet 2007, déclarant d'utilité publique l'acquisition par la Société immobilière d'économie mixte de la ville de Paris (S.I.E.M.P.) d'un immeuble sis 3 et 5 rue Godefroy-Cavaignac et déclarant cessible cet immeuble ;
2°) d'annuler ces deux arrêtés ;
3°) subsidiairement, de procéder à des mesures d'instruction ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, d'une part, et de la S.I.E.M.P., d'autre part, une somme de 5 000 euros chacun en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de l'expropriation ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 70-612 du 10 juillet 1970 tendant à faciliter la suppression de l'habitat insalubre ;
Vu la loi n° 2005-809 du 20 juillet 2005 relative aux concessions d'aménagement ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 octobre 2011 :
- le rapport de M. Bergeret, rapporteur,
- les conclusions de Mme Vidal, rapporteur public,
- et les observations de Me Doueb pour la SOCIETE COFINFO et de Me Froger pour la S.I.E.M.P. et la ville de Paris ;
Considérant que la ville de Paris a intérêt au maintien du jugement attaqué ; que son intervention en défense doit être admise ;
Considérant que, par arrêté en date du 28 décembre 2006, le préfet de Paris a déclaré d'utilité publique l'acquisition par la Société immobilière d'économie mixte de la ville de Paris (S.I.E.M.P.), par voie d'expropriation, d'un immeuble sis 3 et 5 rue Godefroy-Cavaignac et déclaré cessible cet immeuble ; que, par un second arrêté en date du 11 juillet 2007, le préfet a retiré et remplacé son premier arrêté en tant qu'il portait déclaration de cessibilité de l'immeuble pour le déclarer à nouveau cessible ; que la SOCIETE COFINFO, propriétaire de ce bien immobilier, relève appel du jugement du 9 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces deux arrêtés ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant, d'une part, que le tribunal, qui a statué au fond, a nécessairement estimé qu'il disposait des éléments suffisants pour ce faire ; que le juge n'est pas tenu, lorsqu'il écarte un moyen, de répondre à chacun des arguments ou chacune des observations présentés par un demandeur à l'appui de ce moyen ; que, de même, dès lors que le juge écarte un moyen au motif que celui-ci ne peut être utilement soulevé pour contester l'acte attaqué, il peut se borner à relever ce caractère inopérant du moyen sans avoir à expliciter le raisonnement dont il déduit celui-ci ; que, par suite, doit être écarté le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé aux motifs qu'il ne reprendrait pas l'argumentation développée dans les écritures au soutien des différents moyens invoqués ou qu'il n'indiquerait pas pourquoi le moyen tiré de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales serait dépourvu d'utilité ;
Considérant, d'autre part, que le tribunal n'avait pas, contrairement à ce que soutiennent les requérants, à rejeter expressément la demande d'expertise qui n'avait pas été présentée à titre subsidiaire mais au titre d'une mesure d'instruction ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l'irrégularité du jugement attaqué doivent être écartés ;
Au fond et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que le conseil d'administration de la S.I.E.M.P., par délibération en date du 9 mars 2006 se référant à la convention publique d'aménagement en date du 30 mai 2002, modifiée par plusieurs avenants, en vertu de laquelle la ville de Paris avait confié à cette société d'économie mixte une mission d'éradication de l'habitat insalubre en lui déléguant ses pouvoirs en matière d'expropriation pour l'exercice de cette mission, a demandé au préfet de Paris l'ouverture d'une procédure de déclaration d'utilité publique aux fins d'expropriation de l'immeuble sis au 3 et 5 rue Godefroy Cavaignac se trouvant dans un état de délabrement général , en vue d'y réaliser une vingtaine de logements sociaux et trois locaux d'activité en rez-de-chaussée ; qu'une telle délibération, prise par l'organe compétent d'une personne morale de droit privé chargée de l'exécution d'une mission de service public et investie à cette fin de prérogatives de puissance publique, dont elle a fait usage à cette occasion, constitue une décision administrative, premier élément de l'opération complexe à l'issue de laquelle sont intervenus les arrêtés préfectoraux litigieux portant déclaration d'utilité publique et déclaration de cessibilité ; que, par suite, sa légalité peut être utilement contestée, devant la juridiction administrative, à l'appui d'une demande dirigée contre ces arrêtés préfectoraux ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, d'une part, que suite à des travaux réalisés d'office aux frais et risques du propriétaire en 2003, l'immeuble n'était plus, à la date de la délibération du 9 mars 2006, exposé à des risques d'intoxication au plomb ; que d'autre part, si la notice explicative du dossier d'enquête publique rédigée par la S.I.E.M.P. et le rapport du commissaire enquêteur font valoir que l'immeuble était dans un état particulièrement dégradé, il résulte de l'ensemble des pièces du dossier, et notamment d'un rapport d'huissier du 13 mars 2007, d'un rapport d'audit d'un cabinet d'architectes, des termes de la notice jointe à la demande de permis de construire déposée par la S.I.E.M.P. pour la réhabilitation de l'immeuble après sa prise de possession, et des termes mêmes du jugement du juge des expropriations du Tribunal de grande instance de Paris en date du 25 juin 2007, rendu après visite approfondie de l'immeuble effectuée le 28 mars 2007, que si cet immeuble nécessitait d'importants travaux d'entretien, dont l'absence durant plusieurs années était d'ailleurs largement imputable aux décisions par lesquelles le préfet de police avait refusé, à plusieurs reprises, d'accorder le concours de la force publique pour l'expulsion judiciairement ordonnée dès le 22 mars 2000 d'occupants sans titre, il ne pouvait, sans erreur d'appréciation, être regardé comme insalubre ni en état de délabrement général ni même comme particulièrement dégradé ; que, dès lors, la délibération précitée qui se fonde sur un état d'insalubrité ou de dégradation avancée qui ne correspond pas à la réalité, et qui avait d'ailleurs pour but d'engager une procédure d'expropriation au profit d'un organisme qui, aux termes de la convention précitée, ne pouvait ainsi mettre en oeuvre les pouvoirs qui lui avaient été délégués en matière d'expropriation en-dehors du cadre fixé par sa mission d'éradication de l'habitat insalubre, a été prise pour un motif erroné ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en raison de l'illégalité de la délibération précitée du 9 mars 2006, l'arrêté en date du 28 décembre 2006 portant déclaration d'utilité publique de l'immeuble sis 3 et 5 rue de Godefroy Cavaignac est entaché d'illégalité, de même, par voie de conséquence, que l'arrêté en date du 11 juillet 2007 portant déclaration de cessibilité de cet immeuble ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE COFINFO est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que la S.I.E.M.P. étant partie perdante dans la présente instance, ses conclusions formulées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; que la même demande formulée par la ville de Paris ne peut en tout état de cause qu'être rejetée dès lors qu'elle n'émane pas d'une partie à l'instance ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SOCIETE COFINFO et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : L'intervention de la ville de Paris est admise.
Article 2 : Le jugement n° 0705967 / 0717469 du 9 juillet 2010 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 3 : L'arrêté du préfet de Paris en date du 28 décembre 2006 portant déclaration d'utilité publique de l'immeuble sis 3 et 5 rue de Godefroy Cavaignac et l'arrêté du préfet de Paris en date du 11 juillet 2007 déclarant cessible ce même immeuble sont annulés.
Article 4 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à la SOCIETE COFINFO au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions des parties et de l'intervenante est rejeté.
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N° 10PA04025