Vu la requête, enregistrée le 11 janvier 2010, présentée pour la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES, par Me Demay, avocat au barreau de Guingamp ; la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 06-1410 en date du 17 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Rennes l'a condamnée à verser à l'organisme de gestion de l'école catholique (OGEC) Notre-Dame de Plestin les Grèves la somme de 222 344,70 euros, assortie des intérêts, au titre des dépenses de fonctionnement des classes maternelle et élémentaires pour les années scolaires 1991-1992 à 2001-2002, et mis à sa charge les frais d'expertise ;
2°) subsidiairement de condamner l'Etat à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre ;
3°) et de mettre à la charge de l'OGEC le versement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959 sur les rapports entre l'Etat et les établissements d'enseignement privés ;
Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;
Vu la loi n° 82-213 du 2 mars 1982, relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions ;
Vu le décret n° 60-389 du 22 avril 1960 relatif au contrat d'association à l'enseignement public passé par les établissements d'enseignement privés ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juin 2011 :
- le rapport de M. Gauthier, premier conseiller,
- les conclusions de M. Villain, rapporteur public ;
- les observations de Me Demay, pour la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES ;
- et les observations de Me Bernot, pour l'OGEC Notre-Dame ;
Considérant que, par une délibération du 28 novembre 1981, le conseil municipal de Plestin les Grèves a donné son accord pour la prise en charge des dépenses de fonctionnement des classes primaire et maternelle de l'école Notre-Dame dans le projet de contrat d'association à conclure entre l'Etat, cette école privée et l'organisme de gestion de cet établissement ; que le 15 janvier 1982, ce contrat a été conclu entre les participants pour une durée indéterminée ; que toutefois un différend a opposé l'organisme de gestion de l'école catholique (1'OGEC) Notre-Dame de Plestin les Grèves à la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES en ce qui concerne, d'une part, la contribution au fonctionnement de la classe maternelle et, d'autre part, le montant des forfaits annuels fixés et réglés par la commune pour les élèves des classes primaires ; que la commune, après avoir, par une délibération du 22 juillet 1993, dénoncé l'accord qu'elle avait initialement donné pour la prise en charge des dépenses correspondant à la classe maternelle et demandé au préfet de modifier en conséquence le contrat d'association qui avait été conclu, a cessé de prendre en compte la classe maternelle dans le calcul de sa contribution ; que la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES interjette appel du jugement en date du 17 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Rennes l'a condamnée à verser à l'OGEC Notre-Dame de Plestin les Grèves la somme de 222 344,70 euros, assortie des intérêts, au titre des dépenses de fonctionnement des classes maternelle et élémentaires pour les années scolaires 1991-1992 à 2001-2002, et mis à sa charge les frais d'expertise ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES à la demande de première instance présentée par l'OGEC Notre-Dame :
Considérant que la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES soutient que l'OGEC n'est pas partie au contrat d'association signé le 15 janvier 1982 et n'a donc aucune qualité et aucun intérêt à agir et que son action est, par suite, irrecevable ; qu'il résulte, toutefois, de l'instruction, comme il a été dit, que le contrat d'association susvisé a été conclu entre l'Etat, l'école privée et l'organisme de gestion de cet établissement ; que, par suite, ce dernier justifiait d'un intérêt à agir devant le tribunal ; que la fin de non-recevoir opposée à sa demande de première instance doit donc être rejetée ;
Sur l'exception de prescription quadriennale opposée par la COMMUNE DE PLESTIN-LES-GREVES :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 susvisée : Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis (...) ; qu'aux termes de l'article 2 de cette loi : La prescription est interrompue par : Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du règlement ; tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ; toute communication écrite d'une administration intéressée, même si cette communication n'a pas été faite directement au créancier qui s'en prévaut, dès lors que cette communication a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance ; toute émission de moyen de règlement, même si ce règlement ne couvre qu'une partie de la créance ou si le créancier n'a pas été exactement désigné. Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée. ;
Considérant qu'il est constant que l'OGEC a, d'une part, demandé à la COMMUNE DE PLESTIN-LES-GREVES, par lettre du 25 novembre 1992, de réévaluer le montant de la contribution financière aux dépenses de fonctionnement matériel des classes élémentaires et maternelle due en exécution du contrat d'association, et, d'autre part, saisi le tribunal administratif, le 25 septembre 1996, d'une demande tendant à l'annulation de l'avis du 11 juillet 1996, par lequel la chambre régionale des comptes de Bretagne a constaté que les crédits inscrits au budget 1996 de la commune étaient suffisants pour couvrir les dépenses de fonctionnement de ladite école pour les années scolaires 1991/1992 à 1995/1996 ; que cette dernière procédure a donné lieu à un jugement du 29 mai 2002 du tribunal administratif de Rennes, confirmé par arrêt du 28 juin 2004 de la Cour administrative d'appel de Nantes, lesquels arrêt et jugement ont été par la suite annulés par une décision du 21 mars 2007 du Conseil d'Etat statuant au contentieux ; qu'en outre, l'OGEC de l'école Notre-Dame a, le 16 juin 2005, saisi le juge des référés dudit tribunal administratif d'une demande d'expertise afin de déterminer le montant des contributions dont la commune lui était redevable au titre des années scolaires 1991/1992 à 2004/2005 ; que l'OGEC a saisi le même tribunal administratif, le 29 mars 2006, d'une demande tendant à la condamnation de la commune à lui payer la somme de 292 283 euros en réparation de son préjudice du fait de l'insuffisance du forfait alloué au titre des frais de fonctionnement de l'école Notre-Dame à compter de l'année scolaire 1991/1992 ; qu'ainsi, pour les années scolaires 1991-1992 à 2001-2002, les demandes et recours formulés par l'OGEC ont interrompu les délais de prescription ; qu'il suit de là que la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES n'est pas fondée à opposer l'exception de prescription quadriennale à la créance dont se prévaut l'OGEC de l'école Notre-Dame ;
Sur la demande indemnitaire présentée par l'OGEC de l'école Notre-Dame :
En ce qui concerne le bien-fondé de la créance :
Considérant que les dispositions du troisième alinéa de l'article 4 de la loi du 31 décembre 1959 susvisée, reprises à l'article L. 442-5 du code de l'éducation, prévoient que : (...) Les dépenses de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mêmes conditions que celles des classes correspondantes de l'enseignement public ; que l'article 7 du décret du 22 avril 1960 susvisé, dispose que : En ce qui concerne les classes maternelles et enfantines, la commune siège de l'établissement, si elle a donné son accord à la conclusion du contrat, est tenue d'assumer, pour les élèves domiciliés dans la commune et dans les mêmes conditions que pour les classes maternelles et enfantines publiques, les dépenses de fonctionnement (matériel) des classes sous contrat, sous réserve des charges afférentes aux personnels enseignants rémunérés par l'Etat. (...) ;
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 2 mars 1982 susvisée alors applicable : (...) les actes pris au nom de la commune (...) sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou à leur notification aux intéressés (...) ;
Considérant que l'obligation de la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES pour la prise en charge des dépenses de fonctionnement des classes primaire et maternelle de l'école Notre-Dame résulte de la délibération du 28 novembre 1981 de son conseil municipal ; que la circonstance que cette délibération, favorable à l'OGEC et antérieure aux dispositions de l'article 2 de la loi du 2 mars 1982, n'aurait pas été notifiée à l'OGEC, est sans incidence sur son caractère exécutoire ;
Considérant que, si la délibération du 14 mai 1983, qui a fixé un taux uniforme par élève pour les dépenses de fonctionnement des classes enfantines ou élémentaires, peut être regardée comme ayant une portée générale en ce qu'elle définit les conditions de la participation de la commune aux dépenses de fonctionnement de l'école privée, elle n'en comporte pas moins, sur ce point, des dispositions propres à la situation de l'école Notre-Dame lesquelles, dès lors que leur portée est exclusivement limitée à cet établissement, représenté par son organisme de gestion, conféraient à cette délibération le caractère d'une décision individuelle dans cette mesure, vis-à-vis de ce dernier ; que ladite délibération devait donc être notifiée à l'OGEC concerné pour acquérir un caractère exécutoire ; qu'il résulte de l'instruction que, ni cette délibération, ni celles du 22 juillet 1993, dénonçant l'accord donné par la commune à la conclusion du contrat d'association, et des 16 septembre 1992, 10 septembre 1993, 13 octobre 1994 et 18 janvier 1996 fixant la participation de la commune, respectivement pour les années scolaires 1991/1992, 1992/1993, 1993/1994 et 1994/1995, qui présentaient le caractère de décisions individuelles, n'ont été notifiées à l'OGEC, alors même que le directeur de celui-ci a adressé le 15 décembre 1994 à la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES une lettre constatant l'absence de prise en charge par cette dernière des classes enfantines ; qu'en outre, les courriers adressés à l'OGEC par le préfet des Côtes d'Armor et le directeur diocésain de l'enseignement catholique ne peuvent être regardés comme valant notification des délibérations en cause ; que, dès lors, ces délibérations, dépourvues de caractère exécutoire, n'ont pu mettre un terme à l'obligation de la commune à l'égard de l'OGEC ;
En ce qui concerne le montant de la créance :
Considérant que la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES soutient que le coût du personnel pour les années 1994 et 2004 doit être réduit de la somme de 6 302 euros, retenue par l'expert désigné par ordonnance du 8 septembre 2005 au titre de l'intervention des services techniques ; que, toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que cette charge a affecté l'estimation des coûts de fonctionnement de la seule année 2004 et ne concerne pas les années en litige ;
Considérant que, si la commune conteste la méthode proposée par l'expert pour le calcul des charges non affectées, en particulier pour évaluer le coût réel des fournitures de vêtements, des fournitures administratives et des frais d'affranchissement, elle ne propose aucune autre méthode de nature à permettre d'évaluer ces charges avec davantage de précision ; qu'en outre les fournitures administratives n'ont pas été confondues avec les fournitures scolaires ; que les écarts relevés sur les coûts de personnel, ne concernent que l'année 2004, qui n'est pas en litige ; que si la commune conteste le montant des frais d'affranchissement et les charges d'assurance, en se prévalant d'un historique des dépenses , elle ne produit pas ce document et ne permet pas ainsi au juge d'apprécier le bien-fondé de sa contestation ;
Considérant que si la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES fait valoir que la somme de 18 306,95 euros représente une dépense d'investissement en mobilier qui doit être déduite des sommes dont elle est redevable, les premiers juges ont déjà procédé à cette déduction, correspondant à l'équipement d'une nouvelle classe ;
Considérant que si la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES critique l'évaluation faite par l'expert du coût des services de paie et de comptabilité, elle n'apporte aucun élément probant à l'appui de ses affirmations ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes l'a condamnée à indemniser l'OGEC de l'école Notre-Dame pour un montant de 222 344,70 euros ;
Sur les conclusions d'appel en garantie :
Considérant qu'aux termes de l'article 15 du décret du 22 avril 1960 susvisé : Tout établissement ayant passé avec l'Etat un contrat d'association à l'enseignement public peut, au cours ou au terme du contrat, demander son intégration dans cet enseignement. Dans tous les autres cas, la fin du régime du contrat a pour effet de replacer l'établissement sous le régime en vigueur pour les établissements d'enseignement privés qui ne sont pas liés à l'Etat par contrat (...) En cas de manquements graves aux dispositions légales et réglementaires ou aux stipulations du contrat, et après avis de la commission de concertation prévue par l'article 27-8 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 modifiée, la résiliation pourra être prononcée par le préfet du département. La décision de résiliation devra mentionner les manquements qui la justifient. Elle aura effet au terme de l'année scolaire en cours. Le contrat pourra également être résilié d'un commun accord entre les parties contractantes. ;
Considérant que la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES soutient qu'en s'abstenant de résilier le contrat d'association la liant à l'OGEC le préfet des Côtes d'Armor a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; que, cependant, ni la circonstance que la commune ait décidé, par sa délibération du 22 juillet 1993, de renoncer à prendre en charge les classes maternelles de l'école Notre-Dame, ni celle que l'article 14 du contrat permet sa résiliation par l'une ou l'autre des parties, ne faisaient obligation au préfet de prononcer la résiliation dudit contrat ; que, par suite les conclusions de la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES tendant à ce que l'Etat la garantisse de toutes condamnations prononcées à son encontre doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'OGEC de l'école Notre-Dame, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES le versement à l'OGEC de l'école Notre-Dame de la somme de 1 500 euros en remboursement des frais de même nature qu'il a supportés ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES est rejetée.
Article 2 : La COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES versera la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros à l'OGEC de Notre-Dame de Plestin les Grèves en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE PLESTIN LES GREVES et à l'OGEC de Notre-Dame de Plestin-les-Grèves et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Une copie sera adressée au préfet des Côtes-d'Armor.
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N° 10NT00069
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