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05/05/2011 | FRANCE | N°10NC00969

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 05 mai 2011, 10NC00969


Vu la requête, enregistrée le 21 juin 2010, présentée pour la SA FRANCE TELECOM, dont le siège est 6 place d'Alleray à Paris Cedex 15 (75505), représentée par son président directeur général en exercice, par la SCP d'avocats aux Conseils Guillaume et Antoine Delvolvé ;

La SA FRANCE TELECOM demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000520 du 21 avril 2010 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg, saisi d'une demande d'exécution de son précédent jugement du 8 juillet 2009, a, à la demande du syndicat SUD PTT 54, ordonné à la SA FRANCE TELECOM

d'organiser la mise en place et la réunion de la commission administrative pari...

Vu la requête, enregistrée le 21 juin 2010, présentée pour la SA FRANCE TELECOM, dont le siège est 6 place d'Alleray à Paris Cedex 15 (75505), représentée par son président directeur général en exercice, par la SCP d'avocats aux Conseils Guillaume et Antoine Delvolvé ;

La SA FRANCE TELECOM demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000520 du 21 avril 2010 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg, saisi d'une demande d'exécution de son précédent jugement du 8 juillet 2009, a, à la demande du syndicat SUD PTT 54, ordonné à la SA FRANCE TELECOM d'organiser la mise en place et la réunion de la commission administrative paritaire locale compétente pour les personnels du site d'Heillecourt ayant été mutés d'office, dans le délai de deux mois à compter de la date de notification du présent jugement, sous astreinte de deux cents euros par jour de retard ;

2°) de rejeter la demande présentée par le syndicat SUD PTT 54 devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

3°) de mettre à la charge du syndicat SUD PTT 54 une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- l'annulation de la décision implicite refusant de procéder à la réunion d'une commission administrative paritaire locale par le jugement du 8 juillet 2009 imposait uniquement la consultation de commission administrative paritaire en cas de décisions individuelles portant changement de résidence administrative ;

- le tribunal administratif ne pouvait imposer l'institution d'une commission administrative paritaire locale en dehors des conditions légales ;

- le syndicat requérant a lui-même consacré le principe de commissions administratives paritaires au niveau national ;

- il n'y a pas lieu de revenir sur les décisions individuelles, créatrices de droit, de mutation des personnels du site d'Heillecourt qui ne trouvent pas leur fondement la décision annulée par le Tribunal administratif de Strasbourg ;

- au demeurant, aucun agent n'a fait de recours contre la décision de mutation le concernant ;

- en tout état de cause, il n'est pas possible de réunir une commission administrative paritaire qui n'existe pas dans un délai aussi bref que celui de deux mois ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 31 août 2010, présenté par le Syndicat SUD PTT 54, qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la SA FRANCE TELECOM d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que

- l'appel n'est pas recevable dès lors qu'il a uniquement pour but de ne pas exécuter la décision du tribunal administratif ;

- l'appel est abusif dans la mesure où la requérante n'a utilisé la faculté ni de demander des éclaircissements au Conseil d'Etat, ni de demander le sursis à exécution du jugement ;

- l'existence d'une commission administrative paritaire et l'élection des représentants du personnel à cette commission est une garantie statutaire fondamentale pour les fonctionnaires concernés que le syndicat doit faire respecter ;

- l'administration a l'obligation d'exécuter les décisions de justice en application de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la circulaire du Premier ministre du 13 octobre 1988 et du principe de l'autorité absolue de la chose jugée ;

- la requérante ne fait état d'aucun changement dans les circonstances de droit et de fait ;

- l'accord du 6 mai 2010 ne saurait faire obstacle à l'exécution d'un jugement antérieur ;

- cet accord, qui porte essentiellement sur les institutions représentatives du personnel applicables en droit privé, n'a pas pour but de supprimer les commissions administratives paritaires locales ;

- aucune commission administrative paritaire, à quelque niveau que ce soit, n'a été réunie ;

- la requérante se contente d'affirmer que les conditions légales de création d'une commission administrative paritaire n'étaient pas réunies sans en justifier ;

- le juge d'appel n'est pas saisi de demande d'annulation de décisions individuelles ;

- en tout état de cause, les actes portant mutation d'office sont entachés d'une illégalité si grave que le juge peut les déclarer inexistants ;

Vu les mémoires, enregistrés les 9 et 11 mars 2011, présenté pour la SA FRANCE TELECOM tendant aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que :

- l'exécution du jugement attaqué ne constitue pas une condition de recevabilité de l'appel ;

- une partie demeure libre de relever appel d'un jugement qui lui fait grief ;

- le décret du 11 février 1994 a consacré le principe de l'existence d'une commission administrative paritaire au niveau national et non pas local et le président de FRANCE TELECOM a décidé la création d'une commission nationale pour chaque corps ou groupe de fonctionnaires ;

- la procédure de consultation de la commission administrative paritaire au niveau national pour l'ensemble des agents concernés par les décisions de mutation sur le site d'Heillecourt a été engagée ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 mars 2011, présenté pour le syndicat SUD PTT 54 qui conclut aux mêmes fins que son mémoire en défense, par les mêmes motifs ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 94-131 du 11 février 1994 relatif aux commissions administratives paritaires de France Télécom ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 mars 2011 :

- le rapport de M. Trottier, président,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me Delvolvé, avocat de la SA FRANCE TELECOM, et de M. Gaudaré, pour le syndicat SUD PTT 54 ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le syndicat SUD PTT 54 :

Considérant qu'à supposer même que l'appel de la requérante aurait uniquement pour but de ne pas exécuter le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg, cette circonstance ne saurait avoir pour effet de rendre irrecevable la requête de la SA FRANCE TELECOM ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le syndicat SUD PTT 54 doit être écartée ;

Sur l'exécution du jugement du 8 juillet 2009 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. (...) Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition... ;

Considérant que, par un jugement du 8 juillet 2009 devenu définitif, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé, à la demande du syndicat SUD PTT 54, la décision implicite par laquelle la SA FRANCE TELECOM a refusé de procéder aux réunions de la commission administrative paritaire locale lorsqu'il est procédé à des mouvements de fonctionnaires comportant changement de résidence administrative ou modification de la situation des intéressés, au motif que la SA FRANCE TELECOM avait commis une erreur de droit en refusant de consulter la commission administrative paritaire à l'occasion de mouvements de personnels, notamment suite aux restructurations régulièrement opérées, emportant, outre des changements d'affectation géographique, des modifications de leur situation individuelle ; que, saisi d'une demande d'exécution de ce jugement, le Tribunal administratif de Strasbourg a, par un second jugement du 21 avril 2010, enjoint la SA FRANCE TELECOM d'organiser, dans le délai de deux mois sous astreinte de deux cents euros par jour de retard, la mise en place et la réunion de la commission administrative paritaire locale compétente pour les personnels du site d'Heillecourt ayant été mutés d'office ;

Considérant que l'annulation de la décision implicite refusant de procéder aux réunions de la commission administrative paritaire locale n'impliquait pas la réunion de la commission administrative paritaire locale compétente pour les personnels du site d'Heillecourt ayant été mutés d'office antérieurement au jugement du 8 juillet 2009 ; que cette annulation impliquait néanmoins, contrairement à ce que soutient la SA FRANCE TELECOM, pour cette dernière de réunir localement la commission administrative paritaire locale lorsqu'il est procédé à des mouvements de fonctionnaires comportant changement de résidence administrative ou modification de la situation des intéressés ;

Considérant que, dans le présent litige qui ne porte que sur l'exécution du jugement du 8 juillet 2009 annulant une de ses décisions refusant de procéder aux réunions de la commission administrative paritaire locale, la SA FRANCE TELECOM ne peut plus revenir sur ledit jugement en soutenant que, par une décision du 27 septembre 2004, le président de France TELECOM a, conformément au décret du 11 février 1994, décidé la création d'une commission administrative paritaire nationale pour chaque corps ou groupe de fonctionnaires ; que la requérante ne peut davantage utilement se prévaloir de l'accord du 6 mai 2010 sur le fonctionnement des instances de représentation du personnel conclu entre elle-même et des organisations syndicales dès lors que cet accord ne saurait être regardé comme comportant un changement dans la situation de fait ou de droit par rapport à celle en vigueur à la date du 8 juillet 2009 ; qu'il est constant qu'aucune commission administrative paritaire n'a été mise en place, et a fortiori réunie, localement, c'est-à-dire au sein de la direction territoriale Est ; que la société requérante n'apporte aucun élément permettant d'apprécier le bien-fondé de son allégation selon laquelle les conditions légales, notamment celle tenant aux effectifs des agents, ne seraient plus réunies pour mettre en place localement une commission administrative paritaire ; qu'ainsi, il convient d'enjoindre la SA FRANCE TELECOM de créer au sein de la direction territoriale Est une commission administrative paritaire qui sera réunie lorsqu'il est procédé à des mouvements de fonctionnaires comportant changement de résidence administrative ou modification de la situation des intéressés ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'un délai d'exécution de deux mois suivant la notification du présent arrêt et du prononcé, à défaut d'exécution par la SA FRANCE TELECOM de la décision dans ce délai, d'une astreinte de 200 euros par jour de retard jusqu'à la date à laquelle l'arrêt aura reçu exécution ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA FRANCE TELECOM est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg l'a enjointe, sous astreinte, d'organiser la mise en place et la réunion de la commission administrative paritaire locale compétente en tant qu'il vise les personnels du site d'Heillecourt ayant été déjà mutés d'office ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le syndicat SUD PTT 54 qui n'est pas, dans la présente instance, la partie principalement perdante, soit condamné à payer à la SA FRANCE TELECOM la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions susvisées en condamnant la SA FRANCE TELECOM à verser au syndicat SUD PTT 54 une somme de 1 000 euros ;

DECIDE :

Article 1er : Il est enjoint à la SA FRANCE TELECOM de créer au sein de la direction territoriale Est, dans le délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt, sous astreinte de deux cents euros par jour de retard, une commission administrative paritaire. Cette commission sera réunie lorsqu'il est envisagé de procéder à des mouvements de fonctionnaires comportant changement de résidence administrative ou modification de la situation des intéressés.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg du 21 avril 2010 est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 3 : La SA FRANCE TELECOM versera au syndicat SUD PTT 54 la somme de 1 000 euros (mille euros) sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SA FRANCE TELECOM et au syndicat SUD PTT 54.

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N° 10NC00969


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10NC00969
Date de la décision : 05/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exécution décision justice adm

Analyses

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - STATUTS - DROITS - OBLIGATIONS ET GARANTIES - COMMISSIONS ADMINISTRATIVES PARITAIRES.

36-07-05 Notification à France Télécom d'une injonction de créer une commission administrative paritaire au sein d'une direction territoriale.

PROCÉDURE - JUGEMENTS - EXÉCUTION DES JUGEMENTS - PRESCRIPTION D'UNE MESURE D'EXÉCUTION.

54-06-07-008 Notification à France Télécom d'une injonction de créer une commission administrative paritaire au sein d'une direction territoriale.


Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Thierry TROTTIER
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : DELVOLVE G. ET A.

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2011-05-05;10nc00969 ?
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