Vu la requête, enregistrée le 13 août 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n°10MA03283, présentée pour M. Abderrahim A, demeurant chez M. Kamal B, ..., par Me Ajil, avocat ;
M. A demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°1001534 du 30 juin 2010 du tribunal administratif de Nice qui a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 22 mars 2010 portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination ;
2°) d'annuler l'arrêté sus mentionné ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour, ou à défaut de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
--------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la circulaire du 24 novembre 2009 relative à la délivrance des cartes de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " au titre de l'admission exceptionnelle au séjour ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juin 2012 :
- le rapport de M. Salvage, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Chenal-Peter, rapporteur public ;
Considérant que M. C relève appel du jugement du 30 juin 2010 du tribunal administratif de Nice qui a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 22 mars 2010 portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;
Considérant, qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles " ; qu'en vertu de l'article 9 du même accord les dispositions de ce dernier ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur les tous les points non traités par l'accord. " ; que selon les dispositions de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L.313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L.313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L.311-7 (...) " ; qu'aux termes de l'article L.111-2 du même code : " Le présent code régit l'entrée et le séjour des étrangers en France métropolitaine, dans les départements d'outre-mer et à Saint-Pierre et Miquelon. (...) Ses dispositions s'appliquent sous réserve des conventions internationales. (...) " ;
Considérant que l'article L.313-14 sus rappelé n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; que dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut donc utilement invoquer les dispositions de l'article L.313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par cet accord, au sens de son article 9 ; que, toutefois, si cet accord ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant marocain qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit et il appartient alors au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation ;
Considérant, d'une part, que par un courrier du 14 janvier 2010, l'union départementale des syndicats CGT des Alpes-Maritimes, agissant pour le compte de M. A, a demandé en son nom sa régularisation " à titre exceptionnel par le travail dans le cadre de la nouvelle circulaire " ; que, certes, ce courrier ne saurait être interprété que comme demandant une régularisation en application de la circulaire sus visée du 24 novembre 2009 précisant les conditions de mise en oeuvre de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, il ressort des mentions du formulaire remis à l'intéressé, et relatif à " l'admission exceptionnelle au séjour en tant que travailleur salarié au titre de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " que celui-ci n'excluait de son dispositif que les ressortissants algériens et tunisiens, omettant notamment les marocains ;
que, dès lors, M. A est fondé à soutenir que ledit formulaire l'a induit en erreur en le conduisant à limiter sa demande au seul titre des dispositions de la circulaire du 24 novembre 2009 et des dispositions de l'article L.313-14 qui ne lui étaient en tout état de cause pas applicables ; qu'on ne saurait donc lui opposer la circonstance que le préfet n'était pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office s'il pouvait prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une stipulation de l'accord franco-marocain ; que, d'autre part et conséquemment, il ressort de ce qui a été dit précédemment que le préfet des Alpes-Maritimes a commis une erreur de droit en rejetant sa demande au seul visa de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en n'examinant pas au contraire sa situation en application des stipulations de l'article 3 de la convention franco-marocaine, seules applicables en matière de délivrance d'un titre de séjour mention " salarié " aux ressortissants marocains ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes ; qu'il y ainsi lieu d'annuler ledit jugement ainsi que l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 22 mars 2010 ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
Considérant qu'aux termes de l'article L.911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution. " ; que selon les dispositions de l'article L.911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ;
Considérant que, si l'annulation de l'arrêté querellé par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté la demande de délivrance de titre de séjour présentée par M. A n'implique pas nécessairement la délivrance d'un titre de séjour, elle impose à l'administration de réexaminer la situation de l'intéressé ; qu'il y a ainsi seulement lieu d'enjoindre au préfet de prendre une nouvelle décision après avoir procédé à l'instruction de la demande de l'appelant, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A d'une somme de 1 500 euros au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n°1001534 du 30 juin 2010 du tribunal administratif de Nice est annulé.
Article 2 : L'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 22 mars 2010 portant refus de délivrance d'un titre de séjour à M. A, obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de prendre une nouvelle décision sur la situation de M. A, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour.
Article 4 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Abderrahim A, au préfet des Alpes-Maritimes et au ministre de l'intérieur.
''
''
''
''
N° 10MA03283 2
cd