Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 18 mai 2010, sous le n° 10MA01907, présentée pour l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, dont le siège est impasse du Séminaire à Alet les Bains (11580), par la SCP d'avocats Cabinet Darribere ;
L'ASSOCIATION AVENIR D'ALET demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0701474 du 12 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation du récépissé de déclaration du 22 janvier 2007 établi par le préfet de l'Aude, sur demande de la commune d'Alet-les-Bains, relatif à la demande de prélèvement à l'émergence forée de la source des "Eaux chaudes" ;
2°) d'annuler ledit récépissé de déclaration, d'enjoindre au préfet de l'Aude de mettre en demeure la commune d'Alet-les-Bains de présenter un dossier de demande d'autorisation, dans le délai de trois mois suivant la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé ce délai ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le décret n°93-742 du 29 mars 1993 relatif aux procédures d'autorisation et de déclaration prévues par l'article 10 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau ;
Vu le décret n° 93-743 du 29 mars 1993 relatif à la nomenclature des opérations soumises à autorisation ou à déclaration en application de l'article 10 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau, modifié ;
Vu le décret n° 2006-881 du 17 juillet 2006 modifiant le décret n° 93-743 du 29 mars 1993 relatif à la nomenclature des opérations soumises à autorisation ou à déclaration en application de l'article 10 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau et le décret n° 94-354 du 29 avril 1994 relatif aux zones de répartition des eaux ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2012 :
- le rapport de Mlle Josset, premier conseiller,
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,
- les observations de M. Dargegen, président de l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET ;
Considérant que l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET demande l'annulation du jugement du 12 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation du récépissé de déclaration du 22 janvier 2007 délivré par le préfet de l'Aude, à la commune d'Alet-les-Bains, en vue de prélèvement d'eau à l'émergence forée de la source des "Eaux Chaudes" ;
Sur la régularité du jugement de premier instance :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 611-1 du même code : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. " ; que l'article R. 613-3 du code de justice administrative prescrit que " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 613-4 du même code: " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours (...) La réouverture de l'instruction peut également résulter d'un jugement ou d'une mesure d'investigation ordonnant le supplément d'instruction (...) " ;
Considérant que, conformément au principe selon lequel, devant les juridictions administratives, le juge dirige l'instruction, il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance d'un mémoire produit postérieurement à la clôture de l'instruction, avant de rendre sa décision, ainsi que de le viser sans l'analyser ; qu'il a la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, d'en tenir compte, après l'avoir visé et analysé ; qu'il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si ce mémoire contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction écrite et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office ; qu'il doit alors soumettre ce mémoire au débat contradictoire ;
Considérant que, par ordonnance du président du Tribunal administratif de Montpellier en date du 8 juillet 2008, la clôture de l'instruction avait été fixée au 30 septembre 2008, à 12 heures ; que si, postérieurement à cette date, la commune d'Alet a produit un mémoire enregistré 12 août 2009, qui est visé et analysé dans la minute du jugement, celui-ci ne comportait l'exposé d'aucune circonstance, de fait ou de droit, propre à imposer aux premiers juges d'en tenir compte et, par suite, de le soumettre au débat contradictoire, alors même que les premiers juges ont fait figurer dans la minute du jugement une analyse de ce mémoire qui n'était pas nécessaire ; qu'il ressort d'autre part des pièces du dossier que la commune n'a pas produit de mémoire enregistré le 29 août 2007, cette mention erronée qui figurait sur le site dit " Sagace " ayant ensuite été rectifiée ;
Considérant que l'association soutient que deux mémoires qu'elle a produits les 22 et 25 février 2010 n'ont pas été visés ; que, d'une part, la minute du jugement comporte le visa du mémoire du 25 février 2010 ; que, d'autre part, la fiche d'instruction de l'affaire ne fait état, à la date du 22 février 2010, que d'une communication à l'association du nouvel identifiant " Sagace ", sans qu'il soit établi ou qu'il ressorte des pièces du dossier que l'association appelante aurait adressé un mémoire enregistré à cette date du 22 février 2010 ;
Considérant que si, par le mémoire enregistré le 25 février 2010, l'association faisait valoir que le récépissé en litige méconnaissait les dispositions du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) entré en vigueur le 21 décembre 2009, soit postérieurement à la clôture de l'instruction, le tribunal a écarté ce moyen au motif que l'association appelante n'apportait aucun élément de nature à établir en quoi ce récépissé y serait contraire ; que, dès lors, en décidant de ne pas rouvrir l'instruction, les premiers juges n'ont entaché leur jugement d'aucune irrégularité ;
Sur la recevabilité de l'intervention en défense de la commune :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement. Pour les décisions individuelles, cette transmission intervient dans un délai de quinze jours à compter de leur signature. (...) Le maire certifie, sous sa responsabilité, le caractère exécutoire de ces actes. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2121-25 du même code : " Le compte rendu de la séance est affiché dans la huitaine " ; qu'aux termes de l'article R. 2121-11 : " L'affichage du compte rendu de la séance, prévu à l'article L. 2121-25, a lieu, par extraits, à la porte de la mairie. " ; que l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales permet au conseil municipal de donner délégation au maire pour, notamment, " intenter au nom de la commune des actions en justice (...) dans les cas définis par le conseil municipal " ;
Considérant que, par délibération du 14 avril 2008, qui a été transmise au contrôle de légalité, le conseil municipal de la commune d'Alet-les-Bains a donné délégation au maire pour défendre les intérêts de la commune dans les actions dirigées contre elle et notamment devant les juridictions administratives ; que le compte-rendu de cette délibération a fait l'objet d'un affichage en marie ; que, par suite, l'association appelante n'est pas fondée à soutenir que le maire n'avait pas été régulièrement habilité à produire des écritures au soutien des écritures en défense du ministre ;
Sur le bien-fondé du jugement :
Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune d'Alet ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 214-3 du code de l'environnement : " I. - Sont soumis à autorisation de l'autorité administrative les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles de présenter des dangers pour la santé et la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau, d'accroître notablement le risque d'inondation, de porter gravement atteinte à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique, notamment aux peuplements piscicoles (...) / II. - Sont soumis à déclaration les installations, ouvrages, travaux et activités qui, n'étant pas susceptibles de présenter de tels dangers, doivent néanmoins respecter les prescriptions édictées en application des articles L. 211-2 et L. 211-3. / Dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat, l'autorité administrative peut s'opposer à l'opération projetée s'il apparaît qu'elle est incompatible avec les dispositions du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux ou du schéma d'aménagement et de gestion des eaux, ou porte aux intérêts mentionnés à l'article L. 211-1 une atteinte d'une gravité telle qu'aucune prescription ne permettrait d'y remédier. Les travaux ne peuvent commencer avant l'expiration de ce délai (...) " ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, faisant suite au dépôt du dossier de déclaration établi par la commune d'Alet-les-Bains, intervenu le 18 janvier 2007, par décision en date du 22 janvier suivant, le préfet de l'Aude lui a délivré récépissé de cette déclaration, celle-ci portant sur l'exploitation à l'émergence du forage de captage de l'eau minérale naturelle de la source des " Eaux Chaudes ", située sur le territoire de cette commune ; que le débit d'exploitation fixé dans cette demande s'élevait à 199 000 mètres cubes par an ; que l'annexe du décret susvisé en date du 17 juillet 2006, désormais reprise sous l'article R. 214-1 du code de l'environnement, prévoit en sa rubrique 1.1.2.0. que sont soumis à déclaration les prélèvements permanents ou temporaires issus d'un forage, puits ou ouvrage souterrain dans un système aquifère, à l'exclusion de nappes d'accompagnement de cours d'eau, par pompage, drainage, dérivation ou tout autre procédé dès lors que le volume total prélevé est supérieur à 10 000 mètres cubes par an mais inférieur à 200 000 mètres cubes par an ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient l'association requérante, eu égard aux dispositions précitées, les travaux considérés n'apparaissent pas comme relevant d'une procédure d'autorisation mais d'une simple déclaration ; que la circonstance que cette même source fasse l'objet d'autres prélèvements aux fins d'alimentation en eau potable des communes d'Alet-les-Bains et de Limoux n'était pas de nature à modifier la nature de la décision administrative à intervenir ; qu'eu égard au seul objet de la décision contestée, les dispositions de l'article R. 214-42 du code de l'environnement, qui imposent de présenter une seule déclaration lorsque les ouvrages, installations, travaux ou activités envisagés dépendent de la même personne, de la même exploitation ou du même établissement et concernent le même milieu aquatique, ne sauraient être utilement invoquées en l'espèce ;
Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, c'est à bon droit que l'administration a délivré le récépissé en litige au regard du seul prélèvement effectué au niveau de l'émergence forée des Eaux Chaudes ; que, par suite, l'association appelante n'est pas fondée à soutenir que la déclaration dont s'agit serait entachée d'un vice substantiel pour n'avoir pas globalisé les prélèvements résultant d'autres greffons du site ; que l'association d'Alet-les-Bains soutient que la déclaration en cause devait mentionner au titre des autres émergences le puits Bernat ; que toutefois, si elle se prévaut à ce titre de l'étude du BRGM datée de 1974, il est constant que ledit rapport mentionne cinq émergences au nombre desquels ne figure pas le puits Bernat ; que, par suite, le moyen ne peut qu'être écarté ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du dossier de déclaration que le prélèvement destiné à l'embouteillage et à l'établissement thermal sera limité à 199 000 mètres cubes par an ; qu'aucune disposition ne faisait obligation de préciser le volume d'eau prélevé par l'embouteilleur pour son usage industriel ;
Considérant qu'il est constant que le forage réalisé par la commune d'Alet ne relevait, depuis la modification de la nomenclature entrée en vigueur au 1er octobre 2006, que de la seule procédure de déclaration ; qu'il est également constant que ledit forage a fait l'objet d'une déclaration auprès de l'administration ; qu'aucune disposition ne faisait obligation à la commune d'Alet-les-Bains de présenter une seule déclaration pour la réalisation du forage et le prélèvement effectué à partir de ce forage ; que, dans ces conditions, l'association appelante n'est pas fondée à soutenir que le récépissé en litige serait entaché d'un vice de forme substantiel ;
Considérant que le préfet de l'Aude ne s'est pas fondé sur les dispositions du IV de l'article L. 214-6 du code de l'environnement qui permettent aux installations déjà mises en service, pour lesquelles une modification de la nomenclature prévoit la nécessité d'une déclaration ou d'une autorisation, de continuer à fonctionner sous réserve de fournir certains renseignements à l'administration mais sur les dispositions précitées de l'article L. 214-3 du même code, qui concernent les déclarations initiales ; que, par suite, le moyen tiré des dispositions du IV de l'article L. 214-6 du code de l'environnement ne peut qu'être écarté ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, la déclaration de prélèvement d'eau effectué au niveau de l'émergence des "Eaux chaudes " n'avait pas à prendre en compte les autres prélèvements effectués sur le bassin à ciel ouvert ; que, dans ces conditions, l'association appelante ne peut valablement soutenir que l'ensemble des prélèvements effectués sur le site des "Eaux Chaudes" serait incompatible avec les dispositions du SDAGE ;
Considérant que la déclaration étant complète et compatible avec les dispositions du SDAGE, le préfet de l'Aude était tenu de délivrer le récépissé en cause ; que, par suite, les moyens tirés du détournement de procédure, de pouvoir et de l'erreur manifeste d'appréciation sont inopérants ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 12 mars 2010, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté le recours dirigé contre le récépissé de déclaration du 22 janvier 2007 ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que la présente décision, qui rejette la demande de l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être que rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET une somme de 1.000 euros au titre des frais exposés par la commune d'Alet-les-Bains et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er: La requête de l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET est rejetée.
Article 2 : L'ASSOCIATION AVENIR D'ALET versera une somme de 1000 euros à la commune d'Alet-les-Bains au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'ASSOCIATION AVENIR D'ALET, à la commune d'Alet-les-Bains et au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
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N° 10MA01907 2
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