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05/05/2011 | FRANCE | N°10-20435

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 05 mai 2011, 10-20435


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société SQLI du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre MM. X..., Y..., Z... et A... ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois premières branches :
Vu les articles 42, 145 et 493 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, qu'invoquant des actes de débauchage de ses salariés et de pillage de son savoir-faire qu'elle imputait à la société Alti (la société), ainsi qu'à MM. B..., de C... et A..., la société SQLI a sais

i le président du tribunal de grande instance de Nanterre d'une requête unique tend...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société SQLI du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre MM. X..., Y..., Z... et A... ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois premières branches :
Vu les articles 42, 145 et 493 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, qu'invoquant des actes de débauchage de ses salariés et de pillage de son savoir-faire qu'elle imputait à la société Alti (la société), ainsi qu'à MM. B..., de C... et A..., la société SQLI a saisi le président du tribunal de grande instance de Nanterre d'une requête unique tendant à la désignation d'huissiers de justice en vue de la réalisation d'investigations tant au siège social de cette société qu'aux domiciles des trois autres intéressés ; que par quatre ordonnances distinctes, visant chacune l'un d'eux, la demande de la société SQLI a été accueillie ;
Attendu que pour rétracter l'ordonnance concernant M. B... et annuler les actes d'exécution subséquents, l'arrêt retient que l'existence de quatre ordonnances distinctes fait obstacle à ce que le président du tribunal de grande instance de Nanterre retienne sa compétence territoriale pour ordonner des mesures devant être mises en oeuvre au domicile de M. B..., sis dans le ressort du tribunal de grande instance de Créteil ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'instance introduite par la requête unique de la société SQLI visait plusieurs personnes, dont certaines étaient domiciliées dans le ressort du tribunal de grande instance de Nanterre, susceptible de connaître de l'éventuelle instance au fond, et qu'étaient formées à leur encontre des demandes connexes tendant à conserver ou établir la preuve de faits similaires dont pourrait dépendre la solution d'un même litige, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, sauf en ses dispositions déclarant irrecevables l'appel provoqué de M. A... ainsi que les interventions volontaires de MM. X..., Y... et Z... et déclarant recevables les interventions volontaires de la société Alti et de M. de C..., l'arrêt rendu le 30 juin 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne MM. B..., de C... et la société Alti aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de MM. B..., de C... et la société Alti, les condamne à payer à la société SQLI la somme de 1 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mai deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société SQLI.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rétracté l'ordonnance sur requête visant Monsieur B... du 23 mars 2009 et d'avoir en conséquence annulé tous les actes effectués en exécution de cette ordonnance, et condamné la société SQLI à restituer les éléments collectés ;
AUX MOTIFS QUE le juge territorialement compétent pour rendre une ordonnance sur requête est le président de la juridiction saisie au fond ou à défaut, celui du tribunal du lieu où la mesure demandée doit être exécutée ; qu'en l'occurrence, à la date de présentation de la requête unique visant la société ALTI et Messieurs A..., B... et Monsieur DE C..., aucune juridiction n'était saisie au fond d'un litige opposant les parties ; que d'autre part, l'ordonnance rendue le 23 mars 2009 à l'encontre de Monsieur B... ne vise que Monsieur B... à l'exclusion des personnes, physiques et morales, concernées par d'autres ordonnances spécifiquement prononcées le même jour et le 28 mars suivant ; qu'en effet, aux termes de cette ordonnance, le président du tribunal de grande instance de Nanterre saisi à la requête de la société SQLI a désigné la SCP MEUNIER GENDRON DI PERI, huissiers de justice, avec pour mission de se rendre au lieu d'habitation effectif de Monsieur B... demeurant à Joinville le Pont (94) ; que ce magistrat a également les 23 et 28 mars 2009, rendu trois autres ordonnances à l'encontre de trois autres personnes, la société ALTI et Messieurs A... et DE C... et désigné à cette fin trois autres huissiers exerçant leur activité dans des départements différents et ayant reçu mission d'instrumenter dans des lieux différents de ceux occupés par Monsieur B... ; que l'existence de quatre ordonnances distinctes faisant obstacle à ce que le président du tribunal de grande instance de Nanterre retienne sa compétence pour ordonner des mesures devant être mises en oeuvre au domicile de Monsieur B..., situé à Joinville le Pont au seul motif que d'autres mesures, celles concernant en particulier la société ALTI et Monsieur DE C..., devaient être réalisées dans le ressort du tribunal de grande instance de Nanterre ; qu'il s'ensuit que la société SQLI n'avait pas d'autre alternative que de saisir, pour chacune des personnes visées par les mesures les concernant respectivement, la juridiction matériellement et territorialement compétente, soit en ce qui concerne Monsieur B..., le président du tribunal de grande instance de Créteil dans le ressort duquel se trouvait le lieu d'habitation de l'intéressé ; que dans la mesure où le président du tribunal de grande instance de Nanterre était dépourvu de pouvoir pour statuer par voie d'ordonnance à l'encontre de Monsieur B..., il convient d'infirmer l'ordonnance de référé rendue le 10 juin 2009 et de rétracter l'ordonnance sur requête prononcée le 23 mars 2009 à l'encontre de Monsieur B... ; que par voie de conséquence, il y a lieu d'annuler les constatations dressées par huissier de justice suivant procès-verbal du 30 mars 2009,
1) ALORS QUE la compétence du juge s'apprécie au moment de sa saisine et n'est pas remise en cause par les évènements qui surviennent postérieurement ; que les conditions de la prorogation de compétence pour pluralité de défendeurs s'apprécient au moment de la saisine du juge et ne sont pas remises en cause par les circonstances qui surviennent postérieurement, qu'il y a pluralité de défendeurs dès lors que le demandeur saisit le juge de demandes connexes dirigées contre plusieurs personnes physiques ou morales ; qu'en se bornant à constater que l'ordonnance litigieuse ne visait que Monsieur B... sans rechercher si l'instance n'avait pas été introduite à l'encontre de plusieurs défendeurs, contre lesquels étaient formées des demandes connexes, de sorte que les règles de prorogation de compétence devaient s'appliquer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 42, 145 et 493 du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE la situation de pluralité de défendeurs n'est pas remise en cause par le fait que le juge, saisi par un acte unique, de demandes connexes dirigées contre plusieurs défendeurs, décide, sans remettre en cause sa compétence fondée sur la prorogation, de rendre une ordonnance par défendeur à seule fin d'en faciliter l'exécution ; qu'en écartant les règles de prorogation de compétence en se fondant sur le seul constat matériel que l'ordonnance visait uniquement Monsieur B..., sans rechercher si au-delà de cette modalité, les conditions de la prorogation n'en continuaient pas moins à s'appliquer, s'agissant d'un litige qui avait pour objet une action concertée entre la société ALTI, Messieurs B..., A... et DE C..., et compte-tenu de la connexité des demandes et des mesures prononcées contre eux, la cour d'appel a violé les articles 42, 145 et 493 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE le juge compétent pour statuer sur la requête est celui qui serait compétent pour connaître de l'éventuelle instance au fond ; que la société SQLI a assigné le 17 juillet 2009 la société ALTI, Monsieur DE C..., Monsieur A... et Monsieur B... devant le tribunal de grande instance de Nanterre, juge compétent à l'encontre des quatre défendeurs sur le fondement d'une prorogation tant matérielle que territoriale ; qu'en ne recherchant pas si les règles de prorogation de compétence qui trouvaient à s'appliquer devant le juge du fond ne devaient pas trouver à s'appliquer devant le juge des requêtes, dont la compétence est la même que celle du juge du fond, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 42, 145 et 495 du code de procédure civile ;
4) ALORS QU'en refusant d'appliquer les règles de prorogation de compétence, s'agissant d'un litige qui opposait la société SQLI à plusieurs défendeurs pour lesquels la chose à juger était la même et en imposant ainsi un morcellement du contentieux entre quatre juges différents, ce dont résultaient des risques de décisions contraires et une multiplication inutile des contentieux, la cour d'appel a méconnu le principe de cohérence et de concentration du procès, en violation de l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rétracté l'ordonnance sur requête visant Monsieur B... du 23 mars 2009 et d'avoir en conséquence annulé tous les actes effectués en exécution de cette ordonnance,
AUX MOTIFS QU'il est admis que la personne à laquelle l'ordonnance est opposée est celle contre laquelle un procès est envisagée et/ou la personne chez qui la mesure est exécutée ; qu'il doit être observé que cette ordonnance n'a pas en son temps été portée à la connaissance de Monsieur DE C... et de la société ALTI alors pourtant que ces derniers étaient nommément désignés dans la requête unique présentée au président du tribunal de grande instance de Nanterre ce dont il résulte qu'ils faisaient partie des personnes auxquelles ladite ordonnance était opposée ; qu'il s'ensuit que c'est en violation de l'article 495 du code de procédure civile qu'aucune copie de l'ordonnance rendue à l'encontre de Monsieur B... n'a été signifiée ni à la société ALTI ni à Monsieur DE C... ; que le défaut de notification de cette ordonnance à Messieurs A..., B... et DE C... justifie à titre surabondant la rétractation de l'ordonnance sur requête rendue le 23 mars 2009 à l'encontre de Monsieur B...,
1) ALORS QUE copie de la requête et de l'ordonnance est laissée à la personne à laquelle elle est opposée ; que la personne à laquelle l'ordonnance est opposée est celle qui est visée par les mesures d'investigation, au domicile de laquelle la mesure est exécutée et qui doit prêter son concours à l'huissier, en le laissant exécuter sa mission ; qu'en retenant que Monsieur DE C... et la société ALTI, pour la seule raison qu'ils étaient évoqués dans la requête et pouvaient se voir opposer, non pas l'ordonnance mais les éléments de preuve qui pourraient être collectés par l'huissier, devaient en recevoir notification, quand les mesures d'investigation prescrites par l'ordonnance étaient dirigées exclusivement contre Monsieur B..., la cour d'appel a violé l'article 495 du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE ayant constaté que l'ordonnance litigieuse ne visait que Monsieur B... (arrêt p. 9), la cour d'appel ne pouvait retenir que la société ALTI et Monsieur DE C... étaient visés par cette ordonnance et constituaient des « personnes à laquelle la l'ordonnance est opposée » ; que ce faisant, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 495 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-20435
Date de la décision : 05/05/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

MESURES D'INSTRUCTION - Sauvegarde de la preuve avant tout procès - Ordonnance sur requête - Requête - Juge territorialement compétent - Pluralité de défendeurs - Prorogation de compétence - Conditions

Saisi, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, d'une requête unique visant plusieurs personnes dont certaines sont domiciliées hors de son ressort, le juge des requêtes est compétent pour ordonner, par des ordonnances distinctes, des mesures d'instruction concernant l'ensemble des personnes visées par la requête, dès lors que l'une d'entre elles au moins est domiciliée dans son ressort, que les mesures sollicitées tendent à conserver ou établir la preuve de faits similaires dont pourrait dépendre la solution d'un même litige et que la juridiction à laquelle il appartient est susceptible de connaître de l'éventuelle instance au fond


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 30 juin 2010

A rapprocher :2e Civ., 30 avril 2009, pourvoi n° 08-15421, Bull. 2009, II, n° 105 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 05 mai. 2011, pourvoi n°10-20435, Bull. civ. 2011, II, n° 104
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, II, n° 104

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Rapporteur ?: M. André
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 25/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.20435
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