LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale ;
Attendu que les réserves visées par ce texte, s'entendant de la contestation du caractère professionnel de l'accident par l'employeur, ne peuvent porter que sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié de la société Leroy Merlin (la société), a été victime, le 9 novembre 2000, d'un accident du travail ; que cet accident ayant été pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie du Var (la caisse), la société a saisi d'un recours une juridiction de la sécurité sociale ;
Attendu que pour décider que la caisse était saisie d'une déclaration de la société assortie de réserves et aurait du procéder à l'information de celle-ci avant toute décision, et juger ainsi la prise en charge de l'accident inopposable à la société, l'arrêt retient que les dispositions de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale n'imposent pas que l'employeur détaille les réserves qu'il entend présenter ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 janvier 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société Leroy Merlin aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie du Var la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept février deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boutet, avocat aux conseils pour la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Var ;
MOYEN UNIQUE DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit inopposable à la Société LEROY MERLIN la décision de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE du VAR de prendre en charge l'accident dont Monsieur X... avait été victime le 9 novembre 2000 au titre de la législation professionnelle ;
AUX MOTIFS QUE le Tribunal avait débouté l'employeur au motif que les réserves accompagnant la déclaration d'accident du travail n'étaient pas suffisantes pour que la Caisse soit tenue de procéder à des mesures d'investigation complémentaires qui, par ailleurs, ne se justifiaient pas puisque l'accident avait eu lieu aux temps et lieu du travail ; que l'article L 411-1 du Code de la Sécurité Sociale considérait comme accident du travail l'accident survenu à l'occasion du travail, mais que cette présomption d'imputabilité pouvait être détruite si l'enquête révélait que les lésions avaient une origine totalement étrangère au travail ; qu'il résultait des articles R 441-10 et suivants du Code de la Sécurité Sociale que la Caisse disposait d'un délai de trente jours pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident et qu'une absence de décision dans ce délai valait reconnaissance implicite de ce caractère professionnel ; que cependant "hors les cas de reconnaissance implicite et en l'absence de réserves de l'employeur", la Caisse assurait l'information de la victime et de l'employeur avant de prendre sa décision sur les points leur faisant grief ; qu'"En cas de réserves de la part de l'employeur, ou si elle l'estime nécessaire" la Caisse adressait un questionnaire à l'employeur et à la victime ou bien procédait à une enquête (article R 441-11) ; que ce texte clair et précis n'imposait pas que l'employeur détaille les réserves qu'il entendait présenter, puisque c'était précisément ses réponses au questionnaire ou pendant la phase d'enquête qu'il serait amené à clarifier sa position ; qu'exiger de lui qu'il émette d'emblée des réserves détaillées serait ajouter au texte des conditions n'y figurant pas ; que permettre à la Caisse d'ignorer des réserves au motif qu'elles ne seraient pas détaillées reviendrait à lui laisser un pouvoir d'appréciation de ces réserves avant toute enquête contradictoire ; qu'il convenait enfin de rappeler que la prise en charge d'un accident au titre des accidents du travail avait des conséquences financières pour l'employeur dans le calcul de ses cotisations couvrant le risque professionnel (accidents du travail, maladies professionnelles et accidents de trajet) ; que l'employeur avait donc un intérêt évident à déclencher une enquête s'il avait des doutes sur l'imputabilité de l'accident ; qu'en l'espèce la Caisse avait manqué à ses obligations en décidant de ne pas donner suite aux réserves émises par l'employeur dans son courrier du 8 ou 9 novembre 2000 et de retenir le caractère professionnel de l'accident sans avoir procédé à l'enquête prévue par les textes susvisés qui auraient permis à l'employeur de prendre connaissance des éléments susceptibles de lui faire grief, de consulter le dossier et de connaître la date à laquelle elle prévoyait de prendre sa décision ; que la Cour infirmait le jugement entrepris et déclarait inopposable à l'appelant la décision de prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle ;
ALORS D'UNE PART QUE les réserves qui contraignent la caisse primaire d'assurance maladie à procéder à une mesure d'instruction et à l'information préalable de l'employeur sur la procédure d'instruction, les points susceptibles de lui faire grief, la possibilité de consulter le dossier constitué et la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision sur le caractère professionnel de l'accident s'entendent de la contestation du caractère professionnel de l'accident et ne peuvent porter que sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; qu'en considérant que le seul fait pour la Société LEROY MERLIN d'avoir énoncé qu'elle émettait des réserves sans préciser en quoi consistaient lesdites réserves suffisait à contraindre la CPAM du VAR à procéder à une enquête ou à l'envoi d'un questionnaire, ce qui aurait permis à l'employeur de prendre connaissance des éléments susceptibles de lui faire grief, de consulter le dossier et de connaître la date à laquelle la caisse primaire d'assurance maladie prévoyait de prendre sa décision, la Cour d'Appel a violé l'article R 441-11 du Code de la Sécurité Sociale ;
ALORS D'AUTRE PART QUE les réserves qui contraignent la caisse primaire d'assurance maladie à procéder à une mesure d'instruction et à l'information préalable de l'employeur sur la procédure d'instruction, les points susceptibles de lui faire grief, la possibilité de consulter le dossier constitué et la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision sur le caractère professionnel de l'accident s'entendant de la contestation du caractère professionnel de l'accident et ne peuvent porter que sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; que, pour dire inopposable à la Société LEROY MERLIN la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident dont Monsieur X... avait été victime le 9 novembre 2000, la Cour d'Appel qui a retenu que la CPAM du VAR avait manqué à ses obligations en ne donnant pas suite aux réserves émises par l'employeur sans constater que les réserves de la Société LEROY MERLIN auraient porté sur les circonstances de temps et de lieu de l'accident ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail, a privé sa décision de base légale au regard de l'article R 441-11 du Code de la Sécurité Sociale.
Le greffier de chambre