Vu la requête, enregistrée le 26 mars 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Pierre C, demeurant ..., M. Gilles C, demeurant ..., Mlle Marie-Christine C, demeurant ..., M. Philippe A, demeurant ..., Mlle Nathalie A, demeurant ..., M. Jean-Pierre A, demeurant ..., par Me Grau ; les requérants demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0703843 du 5 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 16 février 2007 déclarant d'utilité publique la construction d'un immeuble et prononçant la cessibilité de deux parcelles cadastrées K 83 et K 33, situées 125 et 127, rue Anatole France, à Levallois-Perret ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- la délibération du 27 février 2006 par laquelle le conseil municipal de Levallois-Perret a demandé au préfet de prendre l'arrêté en cause est illégale en raison du non-respect des règles de convocation et d'information des conseillers municipaux ;
- cette même délibération est également illégale en raison de l'irrégularité des conditions de son adoption ;
- il n'est aucunement établi que le préfet ait été régulièrement saisi de l'ensemble du dossier par le maire de Levallois-Perret et que cette décision de transmission ait fait l'objet d'une publication ;
- l'arrêté du préfet ordonnant l'ouverture de l'enquête publique n'a pas fait l'objet de mesures de publicité régulières ;
- le dossier soumis à enquête publique était insuffisant faute d'une motivation précise notamment en ce qui concerne les justifications du choix du projet ;
- le montant des dépenses figurant au dossier d'enquête a été manifestement sous-évalué et ne permettait pas à tous les intéressés de s'assurer que l'acquisition projetée présentait un caractère d'utilisé publique ;
- le commissaire-enquêteur a entaché son avis d'irrégularité en refusant de prendre en compte les remarques qui lui avaient été faites par les requérants ;
- l'utilité publique de l'opération n'est pas établie, dès lors que la commune a réalisé le quota de logements sociaux que lui impose la loi Solidarité et Renouvellement Urbain et qu'elle reste propriétaire d'autres terrains pouvant servir à une telle opération ;
- les règles d'urbanisme et d'alignement ont été méconnues ;
- le bilan coût-avantages de l'opération est négatif, compte tenu des dépenses du projet, de l'état de la dette de la commune, de la densification excessive de l'habitat à Levallois-Perret et de la méconnaissance des règles d'urbanisme ;
- s'agissant de l'arrêté de cessibilité, c'est à tort que le tribunal a estimé pouvoir relever d'office une irrecevabilité concernant le moyen tiré des irrégularités de notification préalables à l'enquête publique ;
- le dossier d'enquête publique n'a pas été transmis à l'ensemble des propriétaires concernés ;
- l'arrêté de cessibilité ne mentionne pas l'identité des propriétaires ;
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Vu les pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 juin 2010 :
- le rapport de M. Lenoir, président assesseur,
- les conclusions de Mme Kermorgant, rapporteur public,
- et les observations de Me Grau, avocat des consorts C et A, et de Me Diot, avocat de la commune de Levallois-Perret ;
Après avoir pris connaissance des notes en délibéré présentées pour la commune de Levallois-Perret le 14 juin 2010 et pour les consorts C et A le 16 juin 2010 ;
Considérant que, par une délibération n°38 du 27 février 2006, de son conseil municipal la commune de Levallois-Perret a décidé d'adopter un dossier d'enquête préalable à une déclaration d'utilité publique concernant deux parcelles cadastrées K 83 et K 33, situées respectivement au n° 125 et au n° 127 de la rue Anatole France et appartenant en indivision aux consorts C et A ; que le recours à cette procédure avait pour but, après l'acquisition des parcelles en question et la démolition de constructions existantes, de permettre la réalisation d'un immeuble de six étages comprenant vingt-sept logements sociaux ,d'une superficie hors oeuvre nette totale de 3 034 m² ; que, par cette même délibération, le conseil municipal a décidé d'adresser le dossier ainsi adopté au préfet des Hauts-de-Seine en lui demandant d'édicter un arrêté portant déclaration d'utilité publique de l'opération et prononçant la cessibilité des parcelles en question ; qu'une enquête publique commune aux deux opérations s'est déroulée entre les 5 et 25 octobre 2006 ; que le commissaire-enquêteur a rendu son rapport le 25 novembre 2006 en donnant un avis favorable à la déclaration d'utilité publique ; que, par un nouvel arrêté en date du 16 février 2007, le préfet des Hauts-de-Seine a déclaré d'utilité publique, au profit de la commune de Levallois-Perret, l'opération mentionnée plus haut et a prononcé la cessibilité des parcelles K 83 et K 33 ; que les consorts C et A relèvent appel du jugement du 5 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 février 2007 ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant que, dans leur requête, les consorts C et A ne se bornent pas à reprendre leurs moyens soulevés en première instance, mais critiquent également la motivation retenue par les premiers juges pour rejeter leur demande ; que cette requête est, dès lors, suffisamment motivée et, par suite, recevable ;
Sur la recevabilité des mémoires présentés au nom de la commune de Levallois-Perret :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le maire de la commune de Levallois-Perret a été régulièrement habilité, par une délibération du conseil municipal du 25 mars 2008, complétée par une deuxième délibération du 29 juin 2009, à représenter cette commune en justice ; que, par suite, les mémoires qu'il a présentés au nom de cette collectivité sont recevables ;
Au fond, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : L'expropriant adresse au commissaire de la République pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement : I.- Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages : (...) 5° L'appréciation sommaire des dépenses (...) ;
Considérant que l'appréciation sommaire des dépenses définie par l'article R. 11-3 précité a pour objet de permettre à tous les intéressés de s'assurer que les travaux ou ouvrages ont, compte tenu de leur coût total réel tel qu'il peut être raisonnablement apprécié à l'époque de l'enquête, un caractère d'utilité publique ; qu'il ressort des pièces du dossier que le nouvel immeuble devant être réalisé à la suite de la déclaration d'utilité publique prononcée par l'arrêté du 16 février 2007 sera implanté sur un terrain formé par la réunion de deux parcelles K 33 et K 83, déclarées cessibles par ledit arrêté, et de deux parcelles cadastrées K 34 et K 35, situées aux n° 24 et 26 de la rue Paul-Vaillant Couturier ; que, toutefois, le poste acquisitions des immeubles et terrains mentionné en dernière page de l'étude de faisabilité jointe au dossier d'enquête publique ne tenait pas compte du coût de l'acquisition des deux parcelles K 34 et K 35 précitées, alors que le coût de cession de ces parcelles à l'aménageur avait été estimé, par une délibération du 3 novembre 2003, à une somme de 2 000 000 € ; qu'ainsi le dossier soumis à l'enquête, qui ne permettait pas de connaître le coût total de l'opération, ne répondait pas aux prescriptions de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; que, dès lors, les requérants sont fondés à soutenir que l'arrêté du 16 février 2007 déclarant l'utilité publique de l'opération de construction d'un immeuble de logements sociaux et prononçant la cessibilité des parcelles K 33 et K 83 a été pris sur le fondement d'une procédure irrégulière et que, par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à l'annulation dudit arrêté ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge des consorts C et A, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, le versement de la somme dont la commune de Levallois-Perret demande le paiement au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat le versement aux consorts C et A, pris ensemble, d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0703843 du 5 février 2009 du Tribunal administratif de Versailles et l'arrêté du 16 février 2007 du préfet des Hauts-de-Seine sont annulés.
Article 2 : Il est mis à la charge de l'Etat le versement à M. Pierre C, à M. Gilles C, à Mlle Marie-Christine C, à M. Philippe A, à Mlle Nathalie A et à M. Jean-Pierre A, pris ensemble, d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Levallois-Perret présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 09VE01066 2