Vu la requête sommaire, enregistrée le 17 août 2009, présentée pour la société RINVEST, dont le siège est 12 rue Jean Hoet à Mantes-la-Jolie (78200), prise en la personne de son liquidateur en exercice, Me Olivier A, demeurant ..., par Me Michel ; la société RINVEST demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0308890/1-1 du 29 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 957 379 euros en réparation des préjudices résultant des agissements fautifs des services fiscaux chargés tant de l'assiette que du recouvrement, ainsi que la somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de condamner l'Etat à verser à la société RINVEST, en la personne de son liquidateur, Me A, la somme de 957 379 euros en réparation de ses préjudices, majorée des intérêts légaux du jour de la réception de la réclamation préalable et des intérêts capitalisés un an plus tard et à chaque échéance annuelle ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société RINVEST, en la personne de son liquidateur, Me A, de la somme de 8 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de l'organisation judiciaire modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 juin 2011 :
- le rapport de M. Bernardin, rapporteur,
- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public,
- et les observations de Me Dorel, substituant Me Michel, pour la société RINVEST ;
Considérant que la société RINVEST fait appel du jugement du 29 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 957 379 euros en réparation des préjudices résultant pour elle des agissements fautifs des services fiscaux tant de l'assiette que du recouvrement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre :
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 431-1 du code de justice administrative : Lorsqu'une partie est représentée devant le tribunal administratif par un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2, les actes de procédure, à l'exception de la notification de la décision prévue aux articles R. 751-3 et suivants, ne sont accomplis qu'à l'égard de ce mandataire ; qu'il ressort des mentions du jugement attaqué du 29 avril 2009 que les parties ont été dûment convoquées à l'audience publique ; qu'une telle mention fait foi par elle-même jusqu'à preuve contraire ; que, de plus, il ressort du dossier de première instance, et notamment de l'avis de réception de la lettre recommandée adressée le 24 mars 2009 par le Tribunal administratif de Paris à Me Runfola, avocat de Me A, mandataire liquidateur de la société RINVEST, que le conseil du liquidateur a accusé réception, le 26 mars 2009, de la convocation à l'audience du 29 avril 2009 ; que, cette convocation ayant ainsi été faite conformément à l'article R. 431-1 du code de justice administrative, la société requérante n'est, dès lors, pas fondée à soutenir qu'elle n'aurait pas été régulièrement convoquée à l'audience du 29 avril 2009 ;
Considérant, par ailleurs, que si, dans la requête sommaire qu'elle a présentée le 17 août 2009 devant la Cour de céans, la société requérante a indiqué qu'elle démontrerait que le jugement attaqué est affecté de vices de forme, cette allégation n'a à aucun moment été assortie de la moindre précision permettant à la Cour d'en apprécier la pertinence ;
Considérant, enfin, qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments développés par la société requérante, ont répondu aux moyens de fait et de droit soulevés devant eux et suffisamment justifié les motifs par lesquels ils ont rejeté la demande de la société requérante, notamment en ce qui concerne le bien-fondé des impositions ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué doit être écarté ;
Sur la compétence du juge administratif :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 252 du livre des procédures fiscales : Le recouvrement des impôts est confié aux comptables publics compétents par arrêté du ministre chargé du budget. Ces comptables exercent également les actions liées indirectement au recouvrement des créances fiscales et qui, dès lors, n'ont pas une cause étrangère à l'impôt. ; qu'aux termes de l'article L. 281 dudit livre : Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents [...] doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. Les contestations ne peuvent porter que : 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte, 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution, dans le second cas, devant le juge de l'impôt tel qu'il est prévu à l'article L. 199. ; qu'en outre, aux termes de l'article L. 213-6 modifié du code de l'organisation judiciaire : Le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire. Dans les mêmes conditions, il autorise les mesures conservatoires et connaît des contestations relatives à leur mise en oeuvre. Le juge de l'exécution connaît, sous la même réserve, de la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s'élèvent à l'occasion de celle-ci et des demandes nées de cette procédure ou s'y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit ainsi que de la procédure de distribution qui en découle. Il connaît, sous la même réserve, des demandes en réparation fondées sur l'exécution ou l'inexécution dommageables des mesures d'exécution forcée ou des mesures conservatoires. Il connaît des mesures de traitement des situations de surendettement des particuliers et de la procédure de rétablissement personnel. ;
Considérant que les conclusions de la société RINVEST, en tant qu'elles tendent à l'engagement de la responsabilité des services fiscaux chargés du recouvrement à raison des fautes qu'ils auraient commises en 1998 en diligentant auprès du juge judiciaire, afin de garantir le recouvrement d'une créance d'impôt sur le revenu détenue au titre des années 1988 et 1989 sur M. et Mme B, des actions en déclaration de simulation visant à faire reconnaître ces derniers comme les propriétaires réels de divers biens et immeubles acquis par des sociétés du groupe B, des actions pauliennes tendant à déclarer inopposables au Trésor la vente de meubles et l'apport d'immeubles par les époux B auxdites sociétés et une action en dissolution d'une société civile, ne ressortissent pas, s'agissant de litiges qui se rattachent à des procédures judiciaires, à la compétence de la juridiction administrative ; qu'il en est de même des conclusions de la société requérante en tant qu'elles tendent à l'engagement de la responsabilité des services fiscaux du recouvrement à raison des fautes qu'ils auraient commises en prenant, à l'occasion des actions sus-décrites, des mesures conservatoires, notamment des hypothèques judiciaires provisoires autorisées par le juge de l'exécution, afin d'éviter une nouvelle transmission des biens en question, ou encore en pratiquant, sur autorisation du même juge, des saisies conservatoires sur des loyers versés à certaines des sociétés du groupe B ; qu'il n'en va pas différemment des conclusions tendant à la condamnation des services du recouvrement pour la prétendue lenteur avec laquelle, après la notification à l'administration fiscale, le 15 septembre 1999, du jugement du Tribunal administratif de Versailles du 29 juin 1999 prononçant la décharge de la majeure partie des impositions, ils se sont désistés, le 25 octobre suivant, des actions en reconstitution de patrimoine sus-indiquées en donnant mainlevée des saisies conservatoires opérées ; que, dans cette triple mesure, les conclusions de la requérante tendant à l'engagement de la responsabilité des services fiscaux chargés du recouvrement se rattachant à des procédures engagées devant le juge judiciaire, et non aux cas visés par l'article L. 281 précité du livre des procédures fiscales, c'est à bon droit que les premiers juges se sont déclarés incompétents pour en connaître ;
Sur la responsabilité de l'Etat dans la mise en liquidation de la société requérante :
Considérant que, pour demander la condamnation de l'Etat à verser à la société RINVEST, prise en la personne de son liquidateur, la somme de 957 379 euros, cette société se prévaut, d'une part, de la perte subie sur la valeur des actifs immobiliers et, d'autre part, de la perte de chance résultant de l'impossibilité de cession desdits actifs immobiliers au terme de la période de remboursement des emprunts y afférents, laquelle cession aurait pu intervenir à meilleur prix et dégager ainsi une plus-value complémentaire, pertes résultant l'une comme l'autre de sa mise en liquidation judiciaire provoquée, selon elle, par l'action en recouvrement des impositions supplémentaires mises à la charge de M. et Mme B ;
Considérant, toutefois, que l'administration soutient sans être sérieusement contredite que les services fiscaux ne sont pas à l'origine de l'ouverture de la procédure collective et que les créances que l'administration a déclarées dans le cadre de cette procédure, à la suite d'un jugement du Tribunal de commerce de Versailles du 30 septembre 1999, ne représentaient qu'une partie des créances totales déclarées ; qu'en particulier, il ressort des documents produits par la société requérante devant le Tribunal administratif de Paris que, dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l'encontre du groupe B, la liste des créances déclarées portait sur un montant total de créances de 63 millions d'euros, essentiellement détenues par des établissements bancaires, et plus particulièrement par la banque La Hénin, qui avait d'ailleurs engagé, avant l'intervention du comptable public, des poursuites à l'encontre des sociétés du groupe B, notamment de la société requérante ; qu'il résulte, en outre, de l'instruction, et notamment des mentions du jugement rendu le 22 juin 2000 par le Tribunal de commerce de Versailles prononçant la liquidation judiciaire de la société requérante, ainsi que de toutes les autres sociétés du groupe B, que la société appelante n'était pas en mesure de présenter à ses créanciers un plan de redressement par voie de continuation au profit d'un tiers investisseur et qu'aucune ébauche de plan n'ayant pu être élaborée après huit mois de procédure, la liquidation judiciaire était inévitable ; que, par ailleurs, dans un arrêt du 6 septembre 2007, la Cour d'appel de Versailles a relevé que, si le trésorier principal de Paris avait procédé, entre mars et octobre 1998, à l'inscription d'hypothèques judiciaires provisoires sur des immeubles appartenant à plusieurs sociétés du groupe B, y compris des sociétés non concernées, que ce soit directement ou indirectement, par le prêt consenti par la banque La Hénin, plusieurs de ces inscriptions étaient primées par une inscription antérieure et que la preuve n'était nullement apportée de ce que ces inscriptions, qu'elles soient ou non critiquables, aient constitué un quelconque obstacle à une gestion normale des sociétés, propriétaires des immeubles grevés, ou provoqué la mise en oeuvre par la banque La Hénin de la déchéance du terme du prêt, ou même qu'elles auraient pu être, pour l'une ou l'autre des sociétés, la cause d'une impossibilité de faire face à ses obligations, et ainsi présenter quelque lien de causalité que ce soit avec la mise en liquidation des sociétés du groupe B ;
Considérant, enfin, que, dans un jugement du 22 octobre 1997, le Tribunal de grande instance de Paris a reconnu M. B coupable d'abus de biens ou du crédit d'une société par actions par un dirigeant à des fins personnelles en retenant que, depuis les années 1980, celui-ci s'était lancé dans la constitution d'un patrimoine immobilier personnel financée, au travers de différentes sociétés civiles ou commerciales, par des recours massifs à des découverts et prêts bancaires et qu'il était ainsi devenu le principal débiteur de la banque Finindus, dont il était le président ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment des mentions de ce jugement, qu'au 31 décembre 1994, le total des actifs immobiliers détenus par M. B était estimé à 327 millions de francs, pour un endettement de 400 millions de francs, dont 99 millions auprès de la banque Finindus ; que, l'évaluation des actifs immobiliers de M. B étant ainsi inférieure à son endettement, les emprunts effectués par ce dernier auprès de la banque ont été, par suite, classés en créances douteuses ;
Considérant que, dans ces conditions, la perte alléguée de patrimoine immobilier, tant pour la société RINVEST que pour M. B, résulte des conditions du financement de ce dernier, et non pas des contrôles fiscaux dont M. et Mme B ont fait l'objet ; que, dès lors, la société requérante, qui n'apporte aucun élément permettant de démontrer un quelconque lien de causalité direct entre le comportement des services fiscaux et son prétendu préjudice, n'établit pas que sa liquidation judiciaire, prononcée le 22 juin 2000 par le Tribunal de commerce de Versailles, résulterait directement des contrôles fiscaux engagés à l'encontre de M. et Mme B au titre de leur situation fiscale personnelle et, a fortiori, que les préjudices financiers dont elle fait état auraient un lien de causalité directe avec des fautes commises par les services fiscaux lors de ces contrôles ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société appelante n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a, en tant qu'elle relevait de la compétence du juge administratif, rejeté sa demande d'indemnisation ;
Considérant que, par voie de conséquence de l'ensemble de ce qui a été dit ci-dessus, les conclusions de la société requérante tendant à ce que la Cour de céans condamne l'Etat à lui verser, en la personne de son liquidateur, Me A, la somme de 957 379 euros à titre de réparation de ses préjudices, avec les intérêts légaux du jour de la réception de la réclamation préalable et les intérêts capitalisés un an plus tard et ensuite à chaque échéance annuelle doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ; qu'en vertu de ces dispositions, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la société RINVEST doivent, dès lors, être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société RINVEST est rejetée.
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N° 09PA05161