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12/05/2011 | FRANCE | N°09NT02135

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 12 mai 2011, 09NT02135


Vu le recours et le mémoire complémentaire, respectivement enregistrés les 28 août et 9 octobre 2009, présentés par le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE ;

Le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE demande à la cour d'annuler le jugement n° 09-449 du 25 juin 2009 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision du 18 août 2008 du préfet de Loir-et-Cher portant notification définitive des droits à paiement unique (DPU) de l'EARL du Nigeot pour l'année 2006 en tant qu'elle n'a pas décoché les primes spéciales aux bovins mâles (PSBM) pour les

années 2000 et 2001 dans le calcul du montant de ces droits et n'en a pas...

Vu le recours et le mémoire complémentaire, respectivement enregistrés les 28 août et 9 octobre 2009, présentés par le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE ;

Le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE demande à la cour d'annuler le jugement n° 09-449 du 25 juin 2009 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision du 18 août 2008 du préfet de Loir-et-Cher portant notification définitive des droits à paiement unique (DPU) de l'EARL du Nigeot pour l'année 2006 en tant qu'elle n'a pas décoché les primes spéciales aux bovins mâles (PSBM) pour les années 2000 et 2001 dans le calcul du montant de ces droits et n'en a pas fixé la valeur moyenne à 2 352 euros, ensemble la décision du 4 décembre 2008 du préfet rejetant le recours gracieux formé par l'EARL ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement n° 1782/2003 (CE) du Conseil du 29 septembre 2003 établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune ;

Vu le décret n° 2006-710 du 19 juin 2006 relatif à la mise en oeuvre de l'aide au revenu prévue par le règlement n° 1782/2003 (CE) du Conseil du 29 septembre 2003 ;

Vu le décret n° 2006-1440 du 24 novembre 2006 relatif à l'octroi de dotations et droits de paiement unique supplémentaires issus de la réserve nationale au titre de la période transitoire et modifiant le code rural ;

Vu l'arrêté du 20 novembre 2006 portant application du décret n° 2006-710 du 19 juin 2006 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 avril 2011 :

- le rapport de M. Coiffet, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Geffray, rapporteur public ;

- et les observations de Me Heckmann, avocat de l'EARL du Nigeot ;

Considérant que l'EARL du Nigeot a reconverti son activité dans la production de viande en octobre 2000 après que l'intégralité de son troupeau de vaches laitières eut été abattu en raison d'une épizootie ; que, par une demande en date du 21 décembre 2005 adressée à la direction départementale de l'agriculture et de la forêt de Loir-et-Cher, elle a sollicité la prise en compte d'une circonstance exceptionnelle, au sens de l'article 40 du règlement susvisé du Conseil du 29 septembre 2003, circonstance survenue en 2000, 2001 ou 2002, pour le calcul du montant de référence de ses droits à paiement unique (DPU), en indiquant que le montant de ses primes spéciales aux bovins mâles et de ses primes à l'abattage de bovins avait été affecté durant cette période ; que, le 28 novembre 2006, le préfet de Loir-et-Cher lui a notifié le nombre et la valeur de ses DPU définitifs, en retenant dans la base de calcul les primes à l'abattage (PAB) des bovins perçues par l'EARL du Nigeot en 2000 et en 2002 et la prime spéciale aux bovins mâles (PSBM) reçue en 2002 ; que, par un jugement du 19 juin 2008 devenu définitif, le tribunal administratif d'Orléans, qui a estimé que la baisse du montant des primes à l'abattage en 2000 et en 2002 résultait de l'épizootie, eu égard au délai nécessaire pour reconstituer un cheptel et nonobstant le choix de l'EARL du Nigeot de remplacer son cheptel de vaches laitières par un cheptel de vaches allaitantes à partir du mois d'octobre 2000, a annulé la décision du 28 novembre 2006 en tant qu'elle prenait en compte pour les années 2000 et 2002 les PAB des animaux accordées à l'EARL du Nigeot dans le calcul du montant de ses droits à paiement unique normaux ; que ce tribunal a, en revanche, pour rejeter le surplus de la demande de l'EARL du Nigeot, estimé qu'elle ne démontrait pas, ni même n'alléguait que le montant de sa PSBM pour 2002 était inférieur de plus de 10 % à celle qu'elle touchait avant l'épizootie ; que le préfet de Loir-et-Cher, saisi à nouveau de la demande de l'entreprise agricole, a, par une nouvelle décision du 18 août 2008, fixé définitivement les DPU de l'EARL du Nigeot pour l'année 2006 ; que, par la présente requête, le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE relève appel du jugement du 25 juin 2009 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision du 18 août 2008 en tant qu'elle n'a pas décoché les PSBM pour les années 2000 et 2001 dans le calcul du montant des DPU et n'en a pas fixé la valeur par année à 2 352 euros ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement :

Considérant qu'aux termes de l'article 37 du règlement (CE) n° 1782/2003 du Conseil

du 29 septembre 2003 : 1. Le montant de référence est la moyenne sur trois ans des montants totaux des paiements accordés à un agriculteur au titre des régimes de soutien visés à l'annexe VI, calculé et adapté conformément à l'annexe VII, au cours de chaque année civile de la période de référence visée à l'article 38 ; qu'aux termes de l'article 38 du même règlement : La période de référence comprend les années civiles 2000, 2001 et 2002 ; et qu'aux termes de l'article 40 : 1. Par dérogation à l'article 37, tout agriculteur dont la production a été gravement affectée au cours de la période de référence par un cas de force majeure ou des circonstances exceptionnelles survenus avant ou pendant ladite période de référence est habilité à demander que le montant de référence soit calculé sur la base de l'année ou des années civiles de la période de référence qui n'ont pas été affectées par le cas de force majeure ou les circonstances exceptionnelles. 2. Si la totalité de la période de référence a été affectée par le cas de force majeure ou les circonstances exceptionnelles, l'Etat membre calcule le montant de référence sur la base de la période 1997 à 1999. Dans ce cas, le paragraphe 1 s'applique mutatis mutandis. 3. Un cas de force majeure ou des circonstances exceptionnelles ainsi que les preuves y relatives apportées à la satisfaction de l'autorité compétente sont notifiés par l'agriculteur concerné à cette dernière, par écrit, dans un délai fixé par chaque Etat membre. 4. Les cas reconnus comme force majeure ou circonstances exceptionnelles par l'autorité compétente sont par exemple : a) le décès de l'agriculteur ; b) l'incapacité professionnelle de longue durée de l'agriculteur ; c) une catastrophe naturelle grave qui affecte de façon importante les superficies agricoles de l'exploitation ; d) la destruction accidentelle des bâtiments de l'exploitation destinés à l'élevage ; e) une épizootie affectant tout ou partie du cheptel de l'agriculteur. (...) ; qu'aux termes du 2ème alinéa de l'article 1er du décret du 19 juin 2006 relatif à la mise en oeuvre de l'aide au revenu prévue par le règlement précité du Conseil du 29 septembre 2003 : Pour être pris en compte, ces cas ou circonstances exceptionnelles doivent avoir conduit à une diminution du montant d'aides perçu au titre des années concernées par rapport au montant d'aides perçu au titre des années de référence déterminées en application du règlement n° 1782/2003 non affectées par l'événement. Cette diminution, qui est calculée selon des modalités fixées par arrêté du ministre chargé de l'agriculture, doit être au moins équivalente à 10 %. ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 20 novembre 2006 portant application dudit décret du 19 juin 2006 : l. Pour l'application dans les cas de force majeure et circonstances exceptionnelles visés par l'article 1er du décret n° 2006-710 du 19 juin 2006 susvisé, la diminution du montant d'aides est calculée en considérant de manière isolée le type d'aides correspondant à la production gravement affectée par le cas de force majeure ou la circonstance exceptionnelle. Les types d'aides distingués sont au nombre de 11 et sont constitués comme indiqué ci-après (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que la production de l'agriculteur qui en sollicite le bénéfice sera considérée comme gravement affectée au cours de la période de référence 2000, 2001 et 2002 si, pour un type d'aides donné, il est constaté que le cas de force majeure ou la circonstance exceptionnelle invoqué(e) a entraîné une diminution d'au moins 10 % du montant perçu au titre desdites aides par rapport aux années non affectées par ce cas ou cette circonstance, et qu'en vertu du 2. de l'article 40 du règlement (CE) susvisé du Conseil du 29 septembre 2003 il y a lieu pour l'Etat membre, si la totalité de la période de référence a été affectée par le cas de force majeure ou les circonstances exceptionnelles, de calculer le montant de référence sur la base de la période 1997 à 1999 ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'EARL du Nigeot, qui ne percevait pas de PSBM avant l'épizootie, laquelle relève des circonstances exceptionnelles énoncées au 4 de l'article 40 du règlement du 29 septembre 2003, qui a affecté son cheptel et a conduit à l'abattage de l'intégralité de son troupeau de vaches laitières en juillet 2000, n'en a demandé le bénéfice qu'à compter de l'année 2002 ; que, dans ces conditions, et bien que, ainsi que l'a jugé définitivement le tribunal administratif d'Orléans le 19 juin 2008, la totalité de la période de référence ait été affectée par l'épizootie, le préfet de Loir-et-Cher était dans l'impossibilité, s'agissant de cette aide, de se référer aux années 1997 à 1999 pour le calcul du montant des DPU, et a pu estimer à bon droit que la circonstance exceptionnelle n'avait pas impacté cette aide ; que, par ailleurs, et ainsi que l'ont rappelé justement les premiers juges sur ce point, l'EARL du Nigeot ne saurait utilement se prévaloir des quotas laitiers dont elle disposait avant l'épizootie, qui n'entrent pas dans la liste des paiements directs liés au paiement unique, pour le calcul du montant de référence de ses DPU, non plus que de droits à l'aide directe laitière alors qu'elle a cessé sa production de lait depuis l'épizootie survenue en 2000 ; qu'il s'ensuit que, les conditions susrappelées prévues à l'article 40 du règlement du 29 septembre 2003 n'étant pas réunies pour ce type d'aide, c'est également sans commettre d'erreur d'appréciation que le préfet a pu estimer que le montant d'aides à prendre en compte pour le calcul du montant de référence de l'agriculteur devait être évalué selon les modalités décrites au 1 de l'article 37 du même règlement, permettant de retenir la moyenne sur trois ans des aides accordées soit, au cas d'espèce, un montant de 784 euros (2352/3) ; que c'est, dès lors, à tort que le tribunal a retenu, pour annuler la décision contestée du 18 août 2008, que le préfet de Loir-et-Cher avait, s'agissant des PSBM, commis une erreur de droit en ne procédant pas à leur décochage pour les années 2000 et 2001 ;

Considérant qu'il y a lieu, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par l'EARL du Nigeot devant les premiers juges et devant la cour ;

Considérant, en premier lieu, que l'EARL du Nigeot se prévaut d'une exception d'illégalité et d'inconventionnalité de l'article 1er du décret du 19 juin 2006 et de l'article 2 de l'arrêté du 20 novembre 2006 précités en ce qu'ils fixeraient des conditions plus restrictives que celles prévues par l'article 40 du règlement CE du 29 septembre 2003 pour l'appréciation des droits à aide en cas de circonstances exceptionnelles ; que, toutefois, d'une part, l'article 1er du décret a pu considérer, sans méconnaître les dispositions de l'article 40 du règlement précité, que la condition posée par ledit règlement tenant à ce que la production soit gravement affectée, était satisfaite dès lors qu'était observée une diminution de 10 % du montant d'aides perçu au titre des années concernées par rapport au montant d'aides perçu au titre des années de référence ; que, d'autre part, en se bornant à préciser pour chaque type d'aide concernée les années à prendre en compte lorsque toute la période de référence était affectée, l'article 2 de l'arrêté du 20 novembre 2006 n'a pas contrevenu à ces mêmes dispositions ; que, par suite, le moyen sera écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'EARL du Nigeot entend également se prévaloir d'une exception d'illégalité et d'inconventionnalité des 2° et 3° de l'article 13 du décret du 24 novembre 2006 susvisé au regard du 5 de l'article 40 du règlement CE du 29 septembre 2003, lequel a pour seul objet de faire application aux agriculteurs soumis à des engagements agro-environnementaux des dispositions prévues en cas de circonstances exceptionnelles ; que, d'une part, si l'EARL du Nigeot entend soutenir que l'administration aurait dû calculer ses DPU en tenant compte de ses quotas laitiers pendant la période 1997-1999, lesdits quotas ne font pas partie des paiements directs liés au paiement unique listés à l'annexe VII du règlement CE du 29 septembre 2003 ; que, d'autre part, l'EARL du Nigeot se borne à affirmer que le 2° et le 3° de l'article 13 du décret du 24 novembre 2006 institueraient une inégalité entre les deux catégories d'agriculteurs pouvant bénéficier de la dotation issue de la réserve nationale, sans indiquer en quoi ces différences, à les supposer établies, seraient contraires à l'article 40 du règlement du 29 septembre 2003 ; que, par suite, le moyen ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que l'EARL du Nigeot soutient que la décision contestée n'assure pas une égalité de traitement entre les agriculteurs puisqu'alors qu'elle se trouve dans la même situation qu'un exploitant agricole de Vendée ayant reconstitué son troupeau avec des génisses, elle s'est vue refuser l'attribution de primes au maintien du troupeau de vaches allaitantes et que ce refus est source d'une distorsion des marchés et de la concurrence ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que la prime au maintien de la vache allaitante n'ayant pas été découplée n'entre pas dans le calcul des DPU ; que le moyen ne peut, par suite, qu'être écarté ;

Considérant, en dernier lieu, que si l'EARL du Nigeot soutient qu'elle devrait bénéficier du programme spécifique n° 1 et qu'elle n'a pas été informée que ce programme n'était pas cumulable avec une dotation pour investissement, d'autant que sa dotation pour investissement est très faible et qu'elle est disposée à l'abandonner pour obtenir une dotation en primes et DPU, elle se borne à se prévaloir sur ce point d'une circulaire du 14 juin 2006 qui est dépourvue de valeur réglementaire ; que, par suite, le moyen ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision du préfet de Loir-et-Cher du 18 août 2008 en tant qu'elle n'a pas décoché les PSBM pour les années 2000 et 2001 dans le calcul du montant des DPU et n'en a pas fixé la valeur pour chaque année à 2 352 euros, ensemble la décision du 4 décembre 2008 rejetant son recours gracieux ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 09-449 du tribunal administratif d'Orléans en date du 25 juin 2009 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par l'EARL du Nigeot devant le tribunal administratif d'Orléans est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE, DE LA RURALITE ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE et à l'EARL du Nigeot.

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N° 09NT02135 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 09NT02135
Date de la décision : 12/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: M. GEFFRAY
Avocat(s) : HECKMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2011-05-12;09nt02135 ?
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