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29/11/2011 | FRANCE | N°09MA03014

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 29 novembre 2011, 09MA03014


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 août 2009, présentée pour Mme Mathéa A, demeurant ..., par Me Seatelli, avocat ;

Mme A demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0800443 du 4 juin 2009, par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 février 2008 par laquelle le président de la chambre des métiers et de l'artisanat de

Haute-Corse a retiré la décision du 12 novembre 2007, la recrutant pour une période de soixante mois ;

2°) d'annuler ladit

e décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre à la chambre des métiers et de l'artisa...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 août 2009, présentée pour Mme Mathéa A, demeurant ..., par Me Seatelli, avocat ;

Mme A demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0800443 du 4 juin 2009, par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 février 2008 par laquelle le président de la chambre des métiers et de l'artisanat de

Haute-Corse a retiré la décision du 12 novembre 2007, la recrutant pour une période de soixante mois ;

2°) d'annuler ladite décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre à la chambre des métiers et de l'artisanat de la réintégrer à la date de son éviction, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, dans un emploi identique à celui qu'elle occupait ;

4°) à titre subsidiaire, d'annuler les articles 2 et 3 de la décision attaquée ;

5°) de condamner la chambre des métiers et de l'artisanat de Haute-Corse à lui verser la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 modifiée relative à l'établissement obligatoire d'un statut du personnel administratif des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et des chambres de métiers ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu l'arrêté du 19 juillet 1971 modifié relatif au statut du personnel administratif des chambres de métiers ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre exceptionnel, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 novembre 2011 :

- le rapport de Mme Hogedez, rapporteur,

- les conclusions de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur public,

- et les observations de Me Cano, du cabinet d'avocats Claisse et associés, pour la chambre de métiers et de l'artisanat de Haute-Corse ;

Considérant que Mme PIERUCCI, recrutée pour trois mois en qualité d'agent contractuel, par la Chambre des métiers et de l'artisanat de Haute-Corse, demande l'annulation du jugement du 4 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du président de la Chambre, en date du 14 février 2008, retirant une décision du 12 novembre 2007, portant à soixante mois la durée de son contrat ;

Sur la fin de non- recevoir opposée en défense :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge ; que contrairement à ce que soutient la chambre des métiers et de l'artisanat de

Haute-Corse, la requête introductive d'appel de Mme A ne constitue pas la seule reproduction littérale de son mémoire de première instance mais énonce à nouveau, de manière précise, les critiques adressées à la décision dont elle avait demandé l'annulation au tribunal administratif ; qu'une telle motivation répond aux conditions posées par l'article R. 411-1 précité du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'écarter la fin de non- recevoir opposée en défense ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Sur les conclusions en annulation dirigées contre la décision du 14 février 2008 :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 : Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui ...retirent ou abrogent une décision créatrice de droits (...) ; que la décision du 14 février 2008 mentionne les textes dont le président de la chambre des métiers et de l'artisanat a fait application et énumère, de façon détaillée, les considérations de fait, propres au contenu du contrat modifié, ayant conduit le président à procéder au retrait de la décision du 12 novembre 2007 ; qu'elle satisfait ainsi aux exigences de motivation de la loi susvisée ;

Considérant, en deuxième lieu, que Mme A a été recrutée par la chambre des métiers et de l'artisanat de Haute-Corse à compter du 16 octobre 2007 pour assurer le remplacement d'un agent provisoirement indisponible dans ses fonctions au sein du service comptabilité et général ; que, par une décision du 12 novembre 2007, la présidente alors en fonction de cet établissement l'a informée qu'elle était recrutée pour une durée de soixante mois, soit cinq ans, à compter du début de son engagement, le 16 octobre 2007, pour assurer ces mêmes fonctions, puis, une fois le poste à nouveau pourvu, pour renforcer le service de l'accueil ; qu'à la suite des élections procédant au renouvellement des élus de l'établissement, le nouveau président a décidé le 14 février 2008, de retirer la décision du 12 novembre 2007 ; que pour justifier cette décision, il a relevé que le contrat de cinq ans dont a finalement bénéficié Mme A n'était pas justifié par l'indisponibilité d'agents titulaire et fixait arbitrairement la durée de l'emploi à cinq ans, qu'il dérogeait à la période d'essai, fixée par l'article 6.1 de l'annexe contractuels au statut du personnel, qu'il avait une portée rétroactive et qu'il avait été signé frauduleusement peu avant le renouvellement des élus de la chambre ;

Considérant, d'une part, que, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ; que, d'autre part, sauf s'il présente un caractère fictif ou frauduleux, le contrat de recrutement d'un agent contractuel de droit public crée des droits au profit de celui-ci ; que, lorsque le contrat est entaché d'une irrégularité, notamment parce qu'il méconnaît une disposition législative ou réglementaire applicable à la catégorie d'agents dont relève l'agent contractuel en cause, l'administration est tenue de proposer à

celui-ci une régularisation de son contrat afin que son exécution puisse se poursuive régulièrement ; que si le contrat ne peut être régularisé, il appartient à l'administration, dans la limite des droits résultant du contrat initial, de proposer à l'agent un emploi de niveau équivalent, ou, à défaut d'un tel emploi et si l'intéressé le demande, tout autre emploi, afin de régulariser sa situation ; que, si l'intéressé refuse la régularisation de son contrat ou si la régularisation de sa situation, dans les conditions précisées ci-dessus, est impossible, l'administration est tenue de le licencier ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 susvisée: Le présent titre s'applique aux personnes qui, régies par les dispositions du titre Ier du statut général, ont été nommées dans un emploi permanent à temps complet et titularisées dans un grade de la hiérarchie des administrations centrales de l'Etat, des services déconcentrés en dépendant ou des établissements publics de l'Etat ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : Les emplois permanents de l'Etat et des établissements publics de l'Etat énumérés ci-après ne sont pas soumis à la règle énoncée à l'article 3 du titre Ier du statut général : 1° Les emplois supérieurs dont la nomination est laissée à la décision du Gouvernement, en application de l'article 25 du présent titre ; 2° Les emplois ou catégories d'emplois de certains établissements publics figurant, en raison du caractère particulier de leurs missions, sur une liste établie par décret en Conseil d'Etat après avis du conseil supérieur de la fonction publique (...). Les remplacements de fonctionnaires occupant les emplois de l'Etat et de ses établissements publics mentionnés à l'article 3 du titre Ier du statut général, dans la mesure où ils correspondent à un besoin prévisible et constant, doivent être assurés en faisant appel à d'autres fonctionnaires. Toutefois, des agents non titulaires peuvent être recrutés pour assurer le remplacement momentané de fonctionnaires autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d'un congé de maladie, d'un congé de maternité, d'un congé parental, d'un congé de présence parentale, de l'accomplissement du service civil ou national, du rappel ou du maintien sous les drapeaux ou de leur participation à des activités dans le cadre de l'une des réserves mentionnées à l'article 53, ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d'un an à la vacance d'un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu dans les conditions prévues par le présent titre ; qu'aux termes de l'article 4 de ladite loi : Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 du titre Ier du statut général, des agents contractuels peuvent être recrutés dans les cas suivants : 1° Lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A et, dans les représentations de l'Etat à l'étranger, des autres catégories, lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient. Les agents ainsi recrutés sont engagés par des contrats à durée déterminée, d'une durée maximale de trois ans. Ces contrats sont renouvelables, par reconduction expresse. La durée des contrats successifs ne peut excéder six ans. Si, à l'issue de la période maximale de six ans mentionnée à l'alinéa précédent, ces contrats sont reconduits, ils ne peuvent l'être que par décision expresse et pour une durée indéterminée. Les dispositions de l'alinéa précédent ne s'appliquent pas aux contrats conclus pour la mise en oeuvre d'un programme de formation, d'insertion, de reconversion professionnelle ou de formation professionnelle d'apprentissage. Pour l'ensemble des règles de droit applicables aux agents non titulaires qui occupent des emplois sur le fondement du présent article, le recrutement de ces personnels particuliers est une entrée au service, et la fin de leur engagement, une sortie de service ;

Considérant que ces dispositions limitent le recrutement par contrat des agents des chambres des métiers et de l'artisanat, établissements publics de l'Etat, à des cas qu'elles énumèrent strictement, en vue notamment d'assurer le remplacement momentané de fonctionnaires indisponibles temporairement, de faire face temporairement à la vacance d'un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu et, en ce cas, pour une durée maximale d'un an, ou encore lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient et en ce cas pour une durée maximale de trois ans, renouvelable une fois ; qu'ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, Mme A a été initialement recrutée à compter du 16 octobre 2007 afin de pourvoir au remplacement d'un agent momentanément absent ; que la décision de porter la durée de son contrat à cinq années, en date du 12 novembre 2007, est directement contraire aux dispositions légales précitées, lesquelles limitent en tout état de cause la durée maximale d'un premier contrat à trois années, dans le seul cas, au surplus, ou la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient ; qu'au égard à la nature du poste occupé par l'intéressée, cette dernière condition n'apparaissait pas satisfaite ; que le contrat de Mme A mentionnait d'ailleurs que son recrutement s'opérait sur le fondement de l'article 2, c, du statut du personnel administratif des chambres consulaires, aux termes duquel : Les organismes visés à l'article précédent peuvent engager des personnels non soumis au présent statut dans les cas limitatifs suivants : c - en vue de pallier l'indisponibilité d'un agent titulaire ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la prolongation de son engagement aurait satisfait à l'un des autres cas mentionnés par les dispositions précitées ; que les illégalités dont le contrat du 12 novembre 2007 était entaché, tenant non seulement à sa durée mais aussi à son objet, n'imposaient pas à l'administration de procéder à sa régularisation ; qu'ainsi, eu égard à la nature des illégalités en cause, et en supposant même que les autres motifs exposés par le président de la chambre des métiers et de l'artisanat n'étaient pas établis, voire insuffisamment établis, ou auraient été insusceptibles, à eux seuls, d'entacher d'illégalité la décision du 12 novembre 2007, le président de la chambre était tenu de procéder au retrait de cette dernière décision ;

Considérant que la décision du 12 novembre 2007 n'était pas devenue définitive à la date du 14 février 2008 ; que, par suite, le président de la chambre des métiers et de l'artisanat a pu légalement procéder à son retrait dans le délai de quatre mois ayant suivi son édiction ;

Considérant, en troisième lieu, que si l'article 15 du règlement de la chambre des métiers et de l'artisanat de Haute-Corse prévoit la consultation du bureau avant toute décision de révocation, la décision du 14 février 2008 ne constitue pas une décision de révocation mais, ainsi qu'il a été dit, le retrait d'une décision illégale ; que le moyen tiré de la méconnaissance de cet article ne peut qu'être écarté, comme inopérant ;

Considérant, en quatrième lieu, que, pour le même motif, la décision du 14 février 2008 ne constitue pas une décision de licenciement ; que, par suite, Mme A ne peut utilement invoquer le non-respect de la procédure disciplinaire à son égard ;

Considérant, en cinquième lieu, que cette décision ne constitue pas davantage une mesure disciplinaire et n'impliquait pas, en conséquence, la mise en oeuvre de la procédure disciplinaire ;

Considérant, en dernier lieu, qu'alors même que la décision de retrait a affecté la situation personnelle de Mme A, il ressort des pièces du dossier qu'elle a été prise en raison de considérations objectives liées aux clauses du contrat modifié, et non en raison du comportement personnel de l'agent ; qu'ainsi, dès lors que cette décision ne constituait pas une mesure prise en considération de la personne de l'intéressée, la requérante ne saurait utilement soutenir qu'elle a été privée de la possibilité d'accéder à son dossier administratif ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté ses conclusions susvisées à fin d'annulation, ainsi que celles à fin d'injonction, dès lors que le jugement ne nécessitait aucune mesure d'exécution au regard des dispositions de

l'article L. 911-1 du code de justice administrative ; que, de même, il y a lieu de rejeter par voie de conséquence de tout ce qui précède ses conclusions à fin d'injonction présentées en appel ;

Sur la recevabilité des conclusions présentées à titre subsidiaire :

Considérant que si Mme A demande également pour la première fois devant la Cour l'annulation des articles 2 et 3 de la décision du 14 février 2008, une telle demande ne peut, en tout état de cause, être présentée directement devant le juge d'appel ; que, dès lors, de telles conclusions doivent être rejetées comme irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que les conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par Mme A, partie perdante à l'instance, ne peuvent qu'être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la chambre des métiers et de l'artisanat de Haute-Corse présentées sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête n° 09MA03014 de Mme A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la chambre des métiers et de l'artisanat de Haute-Corse sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Mathéa A, à la chambre des métiers et de l'artisanat de Haute-Corse et au ministre de l'intérieur, de l'outre mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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