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23/12/2010 | FRANCE | N°09LY00951

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 23 décembre 2010, 09LY00951


Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif, enregistrés les 4 mai et 12 octobre 2009, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER DE GRENOBLE ;

Le CENTRE HOSPITALIER DE GRENOBLE demande à la Cour :

1°) l'annulation du jugement n° 0501168 du 3 mars 2009 du Tribunal administratif de Grenoble qui l'a condamné à verser à M. A une indemnité de 104 000 euros en réparation du préjudice subi par ce dernier à la suite de son hospitalisation ;

2°) de rejeter la demande de M. A ;

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- de nombr

eux indices existent montrant le caractère endogène des germes à l'origine de l'infection dont a été...

Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif, enregistrés les 4 mai et 12 octobre 2009, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER DE GRENOBLE ;

Le CENTRE HOSPITALIER DE GRENOBLE demande à la Cour :

1°) l'annulation du jugement n° 0501168 du 3 mars 2009 du Tribunal administratif de Grenoble qui l'a condamné à verser à M. A une indemnité de 104 000 euros en réparation du préjudice subi par ce dernier à la suite de son hospitalisation ;

2°) de rejeter la demande de M. A ;

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- de nombreux indices existent montrant le caractère endogène des germes à l'origine de l'infection dont a été victime M. A ;

- la pluralité de germes évoque une infection de nature endogène ;

- si l'infection était exogène, les germes auraient dû être multi-résistants aux antibiotiques, alors qu'ils y ont été sensibles ;

- une lésion de l'oesophage, résultant d'un frottement répété du matériel d'ostéosynthèse sur le pharynx, est à l'origine de cette contamination ;

- le cas échéant une nouvelle expertise devrait être organisée ;

- de nombreux préjudices retenus sont sans lien direct de causalité avec l'infection ;

- le préjudice professionnel est d'un montant excessif ;

- les sommes pour perte future de revenus et troubles dans les conditions d'existence sont sans fondement ;

- l'incapacité permanente partielle de M. A fixée à 14 % n'est pas imputable à l'infection ;

- il n'est pas établi que son préjudice personnel serait en lien avec l'infection ;

- les chefs de préjudice ont été évalués de manière excessive ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 5 mai 2010, le mémoire en défense présenté pour M. Christian A, domicilié 350 avenue du docteur Truc Viriville (38980) qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros ainsi que les dépens soient mis à la charge du centre hospitalier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il fait valoir que :

- il n'y a pas d'erreur sur la définition de l'infection nosocomiale ;

- la présence du staphylocoque dans l'oesophage du patient n'est pas démontrée ;

- cette infection, qui a été contractée lors de la pose du matériel d'ostéosynthèse, est d'origine exogène ;

- les préjudices dont il a souffert sont directement en lien avec l'affection et ont été évalués à leur juste mesure ;

Vu, enregistré le 25 octobre 2010, le mémoire complémentaire présenté pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE GRENOBLE, qui persiste dans ses précédents moyens et conclusions, faisant en outre valoir que la notion d'infection nosocomiale retenue par l'expert n'est pas celle du juge administratif qui distingue les gènes endogènes des gènes exogènes ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi du 4 mars 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 décembre 2010 :

- le rapport de M. Picard, premier conseiller ;

- les observations de Me Balestas, avocat de M. A ;

- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée aux parties présentes ;

Considérant que M. A, né en 1953, souffre d'une arthrose cervicale dont les conséquences ont été aggravées par l'accident de la circulation dont il a été victime en 1999 ; que les douleurs cervicales s'étant intensifiées et présentant un caractère invalidant, il a subi le 4 avril 2000 au CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE GRENOBLE une intervention chirurgicale de discectomie au niveau C5-C6 et C6-C7 avec ostéosynthèse ; qu'après s'être amélioré, son état s'est rapidement dégradé ; qu'il a ainsi présenté des troubles de la déglutition en juin 2000 et l'intensification des douleurs cervicales dans un contexte de fièvre brutale ont justifié son hospitalisation le 16 août 2000 ; qu'un examen IRM a mis en évidence une infection dans la région opérée ; qu'il a fait l'objet d'une nouvelle intervention le 19 août 2000 destinée à l'ablation du matériel d'ostéosynthèse, suivie d'une antibiothérapie qui a permis de guérir son infection ; que M. A, qui se plaint de cervicalgies avec raideur et de diverses infirmités l'empêchant de reprendre pleinement des activités professionnelles ou de loisirs, a recherché la responsabilité du centre hospitalier devant le Tribunal administratif de Grenoble ; qu'un expert a été désigné qui a rendu son rapport le 23 octobre 2006 ; que, par un jugement du 3 mars 2009, le Tribunal a reconnu que M. A avait été victime d'une infection nosocomiale imputable au centre hospitalier et a condamné ce dernier à lui verser une indemnité de 104 000 euros en réparation des préjudices subis ;

Considérant que l'introduction accidentelle d'un germe microbien dans l'organisme lors d'un séjour dans un établissement hospitalier révèle une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service hospitalier et engage la responsabilité de celui-ci envers la victime des conséquences dommageables de l'infection ; qu'il en va toutefois autrement lorsque l'infection résulte de germes déjà présents dans l'organisme du patient avant l'hospitalisation ; qu'il résulte de l'instruction que M. A a été contaminé par trois germes appartenant à sa propre flore microbienne d'origine essentiellement bucco-dentaire et par un quatrième germe, le staphylocoque doré, qui, selon l'expert, serait d'origine indéterminée mais serait le principal germe responsable d'infections du site opératoire en chirurgie orthopédique ; qu'il résulte cependant de l'instruction, qu'à l'instar des autres germes retrouvés chez l'intéressé, le staphylocoque a été sensible à l'administration d'antibiotiques, notamment à la pénicilline, alors que, selon une analyse détaillée du laboratoire de bactériologie de l'hôpital, non sérieusement contestée par M. A, un tel germe, lorsqu'il provient de l'environnement hospitalier, est généralement multirésistant ; que, par ailleurs, si, lors de son hospitalisation, M. A n'était atteint d'aucune infection par staphylocoques déclarée, d'ordre cutané notamment, il ne résulte pas de l'instruction que ce germe, qui est connu pour coloniser la sphère oropharyngée d'individus sains, n'aurait pas déjà été présent dans l'organisme de l'intéressé ; que l'origine commensale de ce staphylocoque est accréditée par son association à des germes d'origine bucco-dentaire dans la contamination de M. A, dont l'expert n'a pas précisément explicité le mécanisme et qui, selon une analyse argumentée du médecin conseil de l'hôpital, non sérieusement contredite par l'intéressé, a très vraisemblablement pu se faire à travers une petite perforation dans l'oesophage, une radiographie et un examen IRM réalisés en juin 2000 ayant mis en évidence des signes cliniques en faveur d'une telle pathologie, notamment la présence d'une bulle d'air et un épaississement des parties molles de l'oesophage ; que, dans ces circonstances, la présence dans l'organisme de M. A, avant l'opération du 4 avril 2000, des germes à l'origine de son infection dont le staphylocoque doré, doit être regardée comme avérée ; qu'ainsi, comme le soutient le centre hospitalier, et alors que les dispositions des articles L. 1142-1 et suivants du code de la santé publique, issus de la loi du 4 mars 2002 n'étaient pas applicables en l'espèce, cette infection ne révèle pas, par elle-même, une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service ; que, sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE GRENOBLE est donc fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal l'a condamné à indemniser M. A des conséquences dommageables de l'infection déclarée dans les suites de l'intervention du 4 avril 2000 ;

Considérant qu'il y a lieu en l'espèce de mettre à la charge de M. A les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 1 108,15 euros ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions formées par M. A sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 3 mars 2009 est annulé.

Article 2 : La demande de M. A devant le Tribunal est rejetée.

Article 3 : Les frais d'expertise sont mis à la charge de M. A.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE HOSPITALIER DE GRENOBLE, à M. Christian A et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 2 décembre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Vivens, président de chambre,

Mme Steck-Andrez, président-assesseur,

M. Picard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 décembre 2010.

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N° 09LY00951


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY00951
Date de la décision : 23/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. VIVENS
Rapporteur ?: M. Vincent-Marie PICARD
Rapporteur public ?: Mme MARGINEAN-FAURE
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-12-23;09ly00951 ?
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