LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Samuel,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de FORT-DE-FRANCE, en date du 21 avril 2009, qui, infirmant l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction, l'a renvoyé devant le tribunal correctionnel sous la prévention de faux et usage ;
Vu le mémoire produit ;
Vu l'article 574 du code de procédure pénale ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 183, 185, 574, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a dit recevable l'appel du procureur de la République contre l'ordonnance de non-lieu du juge d'instruction ;
" alors qu'à peine d'irrecevabilité, l'appel du procureur de la République doit être interjeté dans les cinq jours qui suivent la notification de la décision attaquée ; qu'en l'espèce, il appert expressément de l'ordonnance de non-lieu attaquée que cette décision a été notifiée au procureur de la République le 7 novembre 2008 ; qu'il est de même constant que le procureur de la République a interjeté appel de cette décision le 20 novembre 2008 ; qu'en disant recevable l'appel du procureur de la République formé après l'expiration du délai de cinq jours prévu par l'article 185, alinéa 2, du code de procédure pénale, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation du texte précité " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, saisi, par le procureur de la République de réquisitions de renvoi de Samuel X... devant le tribunal correctionnel des chefs de faux, usage et escroquerie, le juge d'instruction a, le 6 novembre 2008, rendu une ordonnance de non-lieu ; que le procureur de la République a interjeté appel de cette ordonnance le 20 novembre 2008 ;
Attendu que, pour déclarer recevable cet appel, l'arrêt, après avoir relevé qu'au pied de l'ordonnance figure la mention, datée du 7 novembre 2008 et signée par le greffier, que copie de l'ordonnance, non conforme à ses réquisitions, a été notifiée au procureur de la République et que, sous cette mention, figure l'indication suivante portée par celui-ci " reçu notification le 19 novembre 2008 " suivie de sa signature, énonce que la mention apposée par le greffier ne précise pas selon quel mode l'ordonnance a été notifiée au procureur de la République ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision, dès lors qu'en l'état des mentions incomplètes, portées par le greffier sur l'ordonnance de non-lieu, qui ne précisent pas la forme utilisée pour adresser au procureur de la République l'avis qui lui est destiné, le délai d'appel n'avait pas commencé à courir à son égard ;
Qu'ainsi, le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 441-1 du code pénal, 574, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que, l'arrêt infirmatif attaqué a ordonné le renvoi de Samuel X... devant le tribunal correctionnel pour y être jugé des chefs de faux et usage de faux ;
" aux motifs que la matérialité du faux document, en date du 14 décembre 2005, censé émaner du bureau des agréments de la direction générale des impôts au ministère des finances est reconnue par Samuel X... ; que le juge d'instruction écarte, cependant, la constitution du délit de faux prévu et puni par l'article 441-1 du code pénal, au motif que le document fabriqué par Samuel X... n'était pas susceptible de causer un préjudice ; que le mis en examen ajoute que le délit de faux n'est pas constitué dans la mesure où le document dont s'agit ne confère aucun droit et ne peut avoir aucune conséquence juridique ; que, selon le courrier fabriqué par Samuel X..., le fonctionnaire du bureau des agréments lui accuse réception d'un dossier de demande de réduction d'impôt sur le revenu au profit des personnes physiques qui s'associeraient dans l'investissement consistant pour la société SNEMBG à construire une unité d'emballage et de conditionnement de boisson liquide pour un montant de 4 386 014 euros ; que le dossier aurait été déposé le 2 mai 2005 et complété le 2 décembre 2005 ; que, par ailleurs, il est indiqué à Samuel X... qu'en l'état des renseignements dont dispose le rédacteur et après avis du ministre de l'outre-mer, l'investissement est susceptible de bénéficier de l'aide fiscale sollicitée à hauteur de 4 038 215 euros ; que ce faux document confectionné par Samuel X... fait donc la preuve d'un fait, le dépôt d'un dossier, qui a des conséquences juridiques, un agrément en matière de défiscalisation ; que le préjudice, élément constitutif du délit de faux, peut être matériel ou moral ; qu'en l'espèce, il est constant que le faux document fabriqué par Samuel X... n'a entraîné pour quiconque un préjudice matériel ; que, par contre, l'administration fiscale dont il est indiqué faussement qu'elle aurait donné un accord de principe et le fonctionnaire qui serait le rédacteur de ce courrier, et la société SNEMBG dont le faux document indique qu'elle va engager une opération de construction d'une unité d'emballage, peuvent se prévaloir d'un préjudice moral tenant à l'atteinte à leur image et à leur crédit ; que le faux est donc constitué, de même que celui d'usage de faux, Samuel X... ayant adressé le document qu'il avait fabriqué à MM. Y... et Z... ;
" 1°) alors qu'aux termes de l'article 441-1 du code pénal, le délit de faux n'est caractérisé que si l'écrit falsifié a un caractère probatoire ; qu'en l'espèce, il est reproché à Samuel X... d'avoir confectionné un faux document par lequel la direction générale des impôts au ministère des finances accusait réception d'une demande d'agrément fiscal pour le compte de la société SNEMBG ; qu'en décidant que le faux est constitué, lors même que le courrier incriminé ne conférait aucun droit à la société SNEMBG et ne liait aucunement l'administration fiscale, l'obtention définitive de l'agrément fiscal sollicité étant soumise à vérifications, la cour d'appel a violé le texte précité ;
" 2°) alors que le délit d'usage de faux résulte de l'utilisation ou la production d'un document falsifié, soit à titre probatoire, soit en vue de lui faire produire des effets de droit ; qu'en l'espèce, il est reproché à Samuel X... d'avoir communiqué le document argué de faux à deux salariés de la société SNEMB, en l'occurrence MM. Y... et Z... ; qu'en ordonnant le renvoi de Samuel X... sous la qualification d'usage de faux, lors même que l'envoi reproché, en l'absence de toute autre circonstance, ne peut être la base d'aucune action ni d'aucun droit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen " ;
Attendu que l'arrêt, rendu sur l'appel, par le ministère public, de l'ordonnance du juge d'instruction disant n'y avoir lieu à suivre, ne tranche à l'égard du demandeur aucune question de compétence et ne contient aucune disposition définitive de nature à s'imposer au tribunal saisi de la prévention ;
D'où il suit que le moyen n'est pas recevable ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Louvel président, M. Bloch conseiller rapporteur, M. Dulin, Mme Desgrange, M. Rognon, Mmes Nocquet, Ract-Madoux, M. Bayet, Mme Canivet-Beuzit conseillers de la chambre, Mmes Slove, Labrousse conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Lucazeau ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;