LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Abbas, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 11e chambre, en date du 5 février 2009, qui, dans la procédure suivie contre Faramarz Y..., du chef de diffamation publique envers un particulier, a constaté l'extinction de l'action publique par la prescription ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 65 de la loi du 29 juillet 1881, 86 et 88 du code de procédure pénale, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a constaté la prescription de l'action ;
" aux motifs que, sur le premier moyen tiré de la suspension de la prescription, le tribunal a estimé, à juste titre, que la partie civile ne pouvait se prévaloir dans le cadre des présentes poursuites exercées sur citation directe, d'une suspension du délai de prescription qui serait intervenu dans une procédure distincte ouverte sur plainte avec constitution de partie civile ayant abouti à une ordonnance de refus d'informer en raison de l'irrégularité de cette plainte ;
" et aux motifs adoptés que le conseil du prévenu soutient que la prescription trimestrielle prévue par l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 est acquise dès lors que la citation a été délivrée le 13 février 2008 et que la publication des propos poursuivis a été constatée le 12 novembre 2007, sans qu'il soit utile de rechercher la date de la première mise en ligne de ceux-ci qui remonte au 18 juillet et 31 août 2007 ; que la partie civile répond qu'une première tentative de délivrance de la citation a été faite le 7 février 2008 et, par ailleurs qu'une plainte avec constitution de partie civile concernant les imputations diffamatoires du texte litigieux avait été déposée le 28 novembre 2007, que la prescription a été suspendue de cette date à celle du versement de la consignation dans le délai imparti et que la date de ce versement, soit le 26 décembre 2007 (dans le dossier d'instruction), fixe le point de départ du délai prévu par l'article 65 de la loi sur la liberté de la presse ; qu'en l'espèce, la citation directe, qui constitue le premier acte de poursuite dans la présente instance, a été délivré au prévenu le 13 février 2008 à la requête de la partie civile qui poursuit comme diffamatoire à son égard les propos diffusés le 12 novembre 2007 sur deux sites internet ; qu'elle produit notamment à l'audience le procès-verbal dressé par un huissier de justice à cette dernière date, constatant la présence de textes en langue persane, sur les sites litigieux ; que plus de trois mois s'étant écoulés entre la date de publication revendiquée par la partie poursuivante et celle à laquelle cette dernière a fait délivrer la citation introductive de la présente instance, c'est à juste titre que le prévenu fait observer qu'il n'est pas nécessaire de déterminer, en l'espèce, la date de la première mise en ligne sur chacun des sites, date qui constitue le point de départ de la prescription trimestrielle en la matière ; qu'il convient uniquement de rechercher si cette prescription a été interrompue ou suspendue entre le 12 novembre 2007 et le 13 février 2008 ; que, d'une part, Abbas X... justifie avoir déposé le 19 novembre 2007 une plainte avec constitution de partie civile, datée du 16 novembre 2007, en se plaignant de la diffusion des mêmes propos sur les sites en question et en se fondant sur le même constat d'huissier dressé le 12 novembre ; que le 26 décembre 2007, il a versé le montant de la consignation dans le délai imparti par le juge d'instruction ; mais qu'à la suite de réquisitions de non-informer prises par le procureur de la République le 21 janvier 2008, le juge d'instruction a rendu une ordonnance de refus d'informer en date du 30 janvier 2008, aux motifs que la plainte laissait incertaine la base de la poursuite (en raison de propos qualifiés cumulativement de diffamatoires et d'injurieux, le passage non cité précisément et des textes visés), qu'elle ne satisfait donc pas aux exigences de l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881 et ne pouvait valablement déclencher l'action publique ; qu'en conséquence, la partie civile ne saurait se prévaloir, dans le cadre des présentes poursuites, d'une interruption ni d'une suspension de prescription, qui serait intervenue dans une procédure distincte ouverte sur plainte avec constitution de partie civile visant des qualifications différentes ayant abouti à une ordonnance de refus d'informer en raison de l'irrégularité de cette plainte ; que, d'autre part, la partie civile verse aux débats un courrier daté du 30 mai 2008 et adressé à son avocat, aux termes duquel la société civile professionnelle d'huissiers de justice ayant procédé à la signification de la citation directe du 13 février 2008 indique que « une première tentative de signification est intervenue le 7 février 2008 » que « à cette occasion le clerc significateur (bureau commun) n'ayant pu obtenir la confirmation du domicile du destinataire, la copie de l'acte a été retournée à notre étude non signifiée » et que « l'acte n'a finalement été signifié que le 13 février 2008 » ; que le bureau commun de signification des Hauts de Seine a confirmé le passage de ce clerc « pour tentative de signification le 7 février 2008 » à l'adresse figurant dans l'assignation finalement délivrée le 13 février en mairie ; que toutefois, la tentative de signification de la citation ainsi invoquée n'est pas corroborée par une mention figurant dans l'acte effectivement délivré ; que les documents produits ne suffisent pas à prouver que la citation ayant fait l'objet de cette tentative de signification était rédigée dans les mêmes termes que celle qui a été signifiée ; que de toute façon, cette tentative n'est donc pas susceptible d'avoir valablement interrompu la prescription, qui en conséquence se trouve acquise ;
" alors que le délai de prescription de l'action publique et de l'action civile prévu par l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 est nécessairement suspendu à compter du dépôt de la plainte avec constitution de partie civile jusqu'au versement de la consignation fixée en application de l'article 88 du code de procédure pénale par le juge d'instruction et ce peu important qu'intervienne par la suite une ordonnance de refus d'informer ; que le demandeur avait fait valoir que la prescription de l'action avait nécessairement été suspendue à compter de sa plainte avec constitution de partie civile du 19 novembre 2007 jusqu'au 26 décembre 2007, date à laquelle il avait versé le montant de la consignation dans le délai fixé par le juge d'instruction et par conséquent qu'au jour de la délivrance de la citation directe, le 13 février 2008, la prescription de l'infraction constatée le 12 novembre 2007 par l'huissier de justice n'était pas acquise ; qu'en se fondant sur la circonstance que la plainte avec constitution de partie civile déposée le 19 novembre 2007 avait fait l'objet d'une ordonnance de refus d'informer le 30 janvier 2008 pour retenir que le délai de la prescription n'avait pas été suspendu entre la date de la plainte avec constitution de partie civile et le versement du montant de la consignation dans le délai fixé par le juge d'instruction, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles « 65 et 53 de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a constaté la prescription de l'action ;
" aux motifs que sur le second moyen, le tribunal a également estimé à juste titre que la tentative de délivrance de la citation ne saurait s'assimiler à un acte régulier de poursuite répondant aux exigences de l'article 53 de la loi sur la presse comme telles susceptibles d'interrompre la prescription ;
" et aux motifs adoptés que le conseil du prévenu soutient que la prescription trimestrielle prévue par l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 est acquise dès lors que la citation a été délivrée le 13 février 2008 et que la publication des propos poursuivis a été constatée le 12 novembre 2007, sans qu'il soit utile de rechercher la date de la première mise en ligne de ceux-ci qui remonte au 18 juillet et 31 août 2007 ; que la partie civile répond qu'une première tentative de délivrance de la citation a été faite le 7 février 2008 et, par ailleurs qu'une plainte avec constitution de partie civile concernant les imputations diffamatoires du texte litigieux avait été déposée le 28 novembre 2007, que la prescription a été suspendue de cette date à celle du versement de la consignation dans le délai imparti et que la date de ce versement, soit le 26 décembre 2007 (dans le dossier d'instruction), fixe le point de départ du délai prévu par l'article 65 de la loi sur la liberté de la presse ; qu'en l'espèce la citation directe, qui constitue le premier acte de poursuite dans la présente instance, a été délivré au prévenu le 13 février 2008 à la requête de la partie civile qui poursuit comme diffamatoire à son égard les propos diffusés le 12 novembre 2007 sur deux sites internet ; qu'elle produit notamment à l'audience le procès-verbal dressé par un huissier de justice à cette dernière date, constatant la présence de textes en langue persane, sur les sites litigieux ; que, plus de trois mois s'étant écoulés entre la date de publication revendiquée par la partie poursuivante et celle à laquelle cette dernière a fait délivrer la citation introductive de la présente instance, c'est à juste titre que le prévenu fait observer qu'il n'est pas nécessaire de déterminer, en l'espèce, la date de la première mise en ligne sur chacun des sites, date qui constitue le point de départ de la prescription trimestrielle en la matière ; qu'il convient uniquement de rechercher si cette prescription a été interrompue ou suspendue entre le 12 novembre 2007 et le 13 février 2008 ; que, d'une part, Abbas X... justifie avoir déposé le 19 novembre 2007 une plainte avec constitution de partie civile, datée du 16 novembre 2007, en se plaignant de la diffusion des mêmes propos sur les sites en question et en se fondant sur le même constat d'huissier dressé le 12 novembre ; que le 26 décembre 2007, il a versé le montant de la consignation dans le délai imparti par le juge d'instruction ; mais qu'à la suite de réquisitions de non-informer prises par le procureur de la République le 21 janvier 2008, le juge d'instruction a rendu une ordonnance de refus d'informer en date du 30 janvier 2008, aux motifs que la plainte laissait incertaine la base de la poursuite (en raison de propos qualifiés cumulativement de diffamatoires et d'injurieux, le passage non cité précisément et des textes visés), qu'elle ne satisfait donc pas aux exigences de l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881 et ne pouvait valablement déclencher l'action publique ; qu'en conséquence, la partie civile ne saurait se prévaloir, dans le cadre des présentes poursuites, d'une interruption ni d'une suspension de prescription, qui serait intervenue dans une procédure distincte ouverte sur plainte avec constitution de partie civile visant des qualifications différentes ayant abouti à une ordonnance de refus d'informer en raison de l'irrégularité de cette plainte ; que, d'autre part, la partie civile verse aux débats un courrier daté du 30 mai 2008 et adressé à son avocat, aux termes duquel la SCP d'huissiers de justice ayant procédé à la signification de la citation directe du 13 février 2008 indique que « une première tentative de signification est intervenue le 7 février 2008 » que « à cette occasion le clerc significateur (bureau commun) n'ayant pu obtenir la confirmation du domicile du destinataire, la copie de l'acte a été retournée à notre étude non signifiée » et que « l'acte n'a finalement été signifié que le 13 février 2008 » ; que le bureau commun de signification des Hauts de Seine a confirmé le passage de ce clerc « pour tentative de signification le 7 février 2008 » à l'adresse figurant dans l'assignation finalement délivrée le 13 février en mairie ; que toutefois, la tentative de signification de la citation ainsi invoquée n'est pas corroborée par une mention figurant dans l'acte effectivement délivré ; que les documents produits ne suffisent pas à prouver que la citation ayant fait l'objet de cette tentative de signification était rédigée dans les mêmes termes que celle qui a été signifiée ; que de toute façon, cette tentative n'est donc pas susceptible d'avoir valablement interrompu la prescription, qui en conséquence se trouve acquise ;
" alors que constitue un acte de poursuite au sens de l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881, tout acte de procédure par lequel le demandeur manifeste son intention d'engager l'action ou de continuer l'action engagée même si cet acte n'est pas porté à la connaissance de la partie adverse elle-même ; que le demandeur avait fait valoir et démontré que si la citation directe avait été effectivement délivrée le 13 février 2008, une première tentative de signification de cet acte était intervenue le 7 février 2008 ainsi que cela ressortait des termes d'une lettre de l'huissier et ajouté que cette tentative de signification devait être considérée comme un acte de poursuite au sens de l'article 65 de la loi susvisée ayant interrompu la prescription ; qu'en retenant que la tentative de délivrance de la citation ne saurait s'assimiler à un acte régulier de poursuite répondant aux exigences de l'article 53 de la loi sur la presse et comme tel susceptible d'interrompre la prescription, la Cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, le 17 novembre 2007, Abbas X... a porté plainte et s'est constitué partie civile du chef de diffamation publique envers un particulier en raison de propos diffusés le 12 novembre 2007 sur des sites internet ; que le juge d'instruction a rendu, le 30 janvier 2008, une ordonnance de refus d'informer au motif que la plainte ne répondait pas aux exigences de l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Attendu que, après une première tentative le 7 février 2008, la partie civile a fait citer directement Faramarz Y..., le 13 février 2008, devant le tribunal correctionnel, du même chef visant les mêmes propos ;
Attendu que, pour confirmer le jugement ayant constaté l'extinction de l'action publique par la prescription, l'arrêt retient, d'une part, que la partie civile ne pouvait se prévaloir d'une suspension du délai de prescription résultant d'une procédure ayant abouti à une ordonnance de refus d'informer en raison de l'irrégularité de la plainte, d'autre part que, la tentative de citation invoquée ne saurait constituer un acte de poursuite répondant aux exigences de l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : Mme Anzani conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Monfort conseiller rapporteur, Mme Palisse conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;