LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 24 mars 2009), que la SCP Montamat, Chevallier, Fillastre, Larroze, Gachassin (la SCP), avocat au barreau de Tarbes, a été condamnée à payer une somme d'un certain montant à la société CDA SO (la société) en réparation de sa faute professionnelle ; qu'elle a assigné en garantie l'assureur du barreau de Tarbes, la société Assurances générales de France, devenue Allianz (l'assureur) ;
Attendu que la SCP fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes tendant à voir condamner l'assureur à la garantir des condamnations prononcées contre elle dans le cadre du litige l'opposant à la société, sauf à déduire la franchise contractuelle, alors, selon le moyen :
1°/ que si l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré, les juges du fond doivent rechercher si le souscripteur de l'assurance a eu la volonté de commettre le dommage tel qu'il est survenu ; que pour dire que l'assureur était bien fondé à refuser sa garantie, la cour d'appel s'est bornée à relever que la SCP ne s'était pas contentée de laisser prescrire l'action par oubli voire même négligence mais avait sciemment trompé son client en lui donnant de faux renseignements et qu'elle avait donné de fausses indications à son client en lui laissant croire que les assignations avaient été délivrées et que la procédure était en cours ; qu'en statuant ainsi sans rechercher si en agissant ainsi, la SCP avait eu la volonté de créer le dommage tel qu'il était survenu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du code des assurances ;
2°/ qu'en toute occurrence, la volonté de créer le dommage peut être établie par la démonstration que l'assuré a délibérément violé ses obligations avec la conscience qu'un dommage résulterait inéluctablement de son comportement ; que la cour d'appel s'est bornée à relever que la SCP avait conscience de ses engagements fautifs, sans constater qu'elle avait délibérément violé ses obligations avec la conscience qu'un dommage résulterait inéluctablement de son comportement ; qu'elle a ainsi encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du code des assurances ;
Mais attendu que l'arrêt retient que la société a fait construire une installation de froid alimentaire dont une expertise a révélé qu'elle était affectée de multiples malfaçons ; que, selon les parties, l'action devait donc être engagée au plus tard entre les 31 mai et 19 août 2003 ; que la SCP a établi en mai 1995 deux projets d'assignation au fond, soumis à l'approbation de la société qui les a annotés puis renvoyés à la SCP par courrier du 22 mai 1995 ; qu'en réponse aux courriers de la société l'interrogeant sur le déroulement de la procédure, la SCP lui répondait le 21 novembre 2001 être intervenue auprès du greffe du tribunal de commerce pour qu'il rappelle cette affaire à une de ses audiences ; que le 6 mai 2003, la SCP écrivait à son client "dans ce dossier, je vais revenir une nouvelle fois auprès du tribunal de commerce de Tarbes. Je ne manquerai pas de vous tenir informé" ; que par courriers des 9 juillet, 26 août, 1er, 10 et 20 octobre et 5 novembre 2003 ainsi que par une télécopie du 14 novembre 2003, la société demandait à la SCP où en était son dossier ; que par courrier du 24 novembre 2003, la société renouvelait sa demande et ajoutait qu'à défaut de réponse, elle dessaisirait la SCP "du dossier pour le confier à un autre conseil ; que la SCP a répondu le 12 mai 2004 "Vous trouverez ci-joint les pièces du dossier en ma possession dans cette affaire. Il y figure également les assignations que j'avais établies mais que je n'avais pas fait délivrer" ; qu'en conséquence la SCP ne s'est pas contentée de laisser prescrire l'action par oubli voire par négligence mais a sciemment trompé son client en lui donnant de faux renseignements ; qu'en effet, il résulte de ces échanges de courriers que la SCP a donné de fausses indications à son client en lui laissant croire que les assignations avaient été délivrées et que la procédure était en cours, notamment le 6 mai 2003 alors qu'à cette date, la prescription n'étant pas encore acquise, elle aurait pu empêcher le dommage ; que son dernier courrier enfin dans lequel elle renvoie à son client le dossier tout en mentionnant in fine qu'elle n'a jamais fait délivrer les assignations et ce, sans autre explication, est également révélateur de la conscience qu'elle avait de ses manquements fautifs ; que la prescription de l'action est intervenue du fait du comportement de l'avocat et de ses déclarations mensongères ;
Que par ces constatations et énonciations faisant ressortir que la SCP avait l'intention de causer le dommage tel qu'il est survenu, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCP Montamat, Chevallier, Fillastre, Larroze, Gachassin aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCP Montamat, Chevallier, Fillastre, Larroze, Gachassin à payer à la société Allianz IARD la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier juillet deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Copper-Royer, avocat aux Conseils pour la SCP Montamat, Chevallier, Fillastre, Larroze, Gachassin
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la SCP MONTAMAT de ses demandes tendant à voir condamner la Compagnie AGF à la garantir des condamnations prononcées contre elle dans le cadre du litige l'opposant à la Société CDA, sauf à déduire la franchise contractuelle ;
AUX MOTIFS QUE « la société CDA SO a fait construire une installation de froid alimentaire affectée de multiples malfaçons ;
« …que par ordonnances de référé des 1er juin, 6 et 20 août 1993, le Président du Tribunal de Commerce de TARBES, a désigné un expert en la personne de Monsieur Y... ;
« Que l'action devait donc être engagée au plus tard entre les 31 mai et 19 août 2003 selon les parties ;
« …qu'aux termes de son rapport, l'expert a mis en évidence les malfaçons existantes et chiffré le montant des travaux de reprise ;
« …qu'à la suite du dépôt de ce rapport, la SCP MONTAMAT a établi en mai 1995 deux projets d'assignation au fond, soumis à l'approbation de la société CDA SO;
« Que celle-ci les a annotés puis renvoyés à la SCP par courrier du 22 mai 1995;
« …que le 2 octobre 2001, la société CDA SO écrivait en ces termes à la SCP :
« « Nous revenons vers vous dans le cadre du dossier ci dessus référencé.En effet, le 25 août 2000, vous nous indiquiez qu'une «audience de mise en état était prévue pour le 6 octobre 2000.Depuis, nous n'avons pas reçu d'éléments nouveaux.
Pourriez vous nous indiquer où en est cette affaire ? » ;
« Que le 8 novembre 2001, elle renouvelait sa demande, faute de réponse ;
« Que le 21 novembre 2001, la SCP lui répondait être intervenue auprès du greffe du Tribunal de Commerce pour qu'il rappelle cette affaire à une de ses audiences ;
« …que le 6 mai 2003, la SCP écrivait à son client « dans ce dossier, je vais revenir une nouvelle fois auprès du Tribunal de Commerce de TARBES. Je ne manquerai pas de vous tenir informé. » ;
« …que par courriers des 9 juillet, 26 août, 1er, 10 et 20 octobre et 5 novembre 2003 ainsi que par une télécopie du 14 novembre 2003, la société demandait à la SCP où en était son dossier ;
« Que par courrier du 24 novembre 2003, la société renouvelait sa demande et ajoutait qu'à défaut de réponse, elle dessaisirait la SCP du dossier pour le confier à un autre conseil ;
« …que la SCP a répondu le 12 mai 2004 :
« « Vous trouverez ci joint les pièces du dossier en ma possession dans cette affaire.
« Il y figure également les assignations que j'avais établies mais que je n'avais pas fait délivrer et le rapport de l'expert, Monsieur Y... » ;
« …qu'en conséquence, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, la SCP ne s'est pas contentée de laisser prescrire l'action par oubli voire même négligence mais a sciemment trompé son client en lui donnant de faux renseignements ;
« …qu'en effet, il résulte de ces échanges de courriers que la SCP a donné de fausses indications à son client en lui laissant croire que les assignations avaient été délivrées et que la procédure était en cours, notamment le 6 mai 2003 alors qu'à cette date, la prescription n'étant pas encore acquise, elle aurait pu empêcher le dommage ;
« Que son dernier courrier enfin dans lequel elle renvoie à son client le dossier tout en mentionnant in fine qu'elle n'a jamais fait délivrer les assignations et ce, sans autre explication, est également révélateur de la conscience qu'elle avait de ses manquements fautifs ;
« Que dès lors, la société AGF est bien fondée à refuser sa garantie, la prescription de l'action étant intervenue du fait du comportement de l'avocat et de ses déclarations mensongères ;
« …qu'en dernier lieu … la SCP invoque en vain la confusion qu'elle aurait opérée entre deux procédures menées pour la société CDA SO, d'une part les références des courriers envoyés par la société CDA SO étant claires et sans ambiguïté et d'autre part, aucun élément de cette procédure n'étant versé aux débats pas davantage que le jugement dont il est fait état en date du 19 décembre 2001 » (arrêt p. 4 alinéas 1 à 7 des motifs et p5 alinéas 1 à 14) ;
ALORS QUE, D'UNE PART, si l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré, les juges du fond doivent rechercher si le souscripteur de l'assurance a eu la volonté de commettre le dommage tel qu'il est survenu ; que pour dire que la Société AGF était bien fondée à refuser sa garantie, la Cour d'appel s'est bornée à relever que la SCP MONTAMAT ne s'était pas contentée de laisser prescrire l'action par oubli voire même négligence mais avait sciemment trompé son client en lui donnant de faux renseignements et qu'elle avait donné de fausses indications à son client en lui laissant croire que les assignations avaient été délivrées et que la procédure était en cours ; qu'en statuant ainsi sans rechercher si en agissant ainsi, la SCP MONTAMAT avait eu la volonté de créer le dommage tel qu'il était survenu, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du Code des assurances.
ALORS QUE, D'AUTRE PART et en toute occurrence, la volonté de créer le dommage peut être établie par la démonstration que l'assuré a délibérément violé ses obligations avec la conscience qu'un dommage résulterait inéluctablement de son comportement ; que la Cour d'appel s'est bornée à relever que la SCP MONTAMAT avait conscience de ses engagements fautifs, sans constater qu'elle avait délibérément violé ses obligations avec la conscience qu'un dommage résulterait inéluctablement de son comportement ; qu'elle a ainsi encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du Code des assurances.