LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la ville de Bordeaux ayant procédé à divers travaux sur l'immeuble appartenant à M. X... sans son autorisation, celui-ci l'a assignée devant un juge des référés, pour voie de fait, en réparation de son préjudice ;
Attendu que, pour dire que la ville de Bordeaux devrait réaliser les travaux de remise en état tels que décrits et évalués par l'expert judiciaire dans ses deux rapports, l'arrêt, après avoir constaté que celle-ci ne contestait pas l'existence d'une voie de fait, retient d'abord que les prétentions de M. X... sont excessives et injustifiées, comme portant sur des travaux d'un coût disproportionné par rapport à ce que requiert la remise en état de l'immeuble, puis que la solution préconisée par l'expert est de nature à assurer une remise du bien en son état antérieur tant sur le plan architectural que structurel, avant de constater que la ville de Bordeaux est en mesure de la mettre en oeuvre ;
Qu'en statuant ainsi, alors que M. X... demandait la condamnation de la ville de Bordeaux à lui verser des dommages-intérêts correspondant au coût des travaux de remise en état à faire effectuer par l'entreprise de son choix, et s'opposait à leur réalisation par la commune, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que réformant partiellement l'ordonnance du juge des référés, ayant donné acte à la commune de Bordeaux de son offre de réaliser les travaux préconisés par l'expert et l'ayant condamnée au besoin à y procéder, il a dit qu'en plus des travaux ainsi mis à la charge de la commune, celle-ci devrait faire réaliser les travaux de remise en état de la partie droite de la façade tels que décrits dans le second rapport, et que ces travaux devraient être réalisés avec ceux visés dans l'ordonnance entreprise dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt, l'arrêt rendu le 20 mars 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;
Condamne la commune de Bordeaux aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la commune de Bordeaux, la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR confirmé l'ordonnance du juge des référés du Tribunal de grande instance de BORDEAUX en ce qu'elle a donné acte à la commune de BORDEAUX de son offre de faire réaliser les travaux préconisés par l'expert Monsieur Y... à la page quatre de son rapport d'expertise et, au besoin, l'a condamnée à réaliser ces travaux, D'AVOIR, réformant ladite ordonnance, dit qu'en plus des travaux que cette ordonnance a mis à la charge de la commune de BORDEAUX, celle-ci devrait faire réaliser les travaux de remise en état de la partie droite de la façade de l'immeuble de Monsieur X... qui sont décrits et évalués à 746, 43 euros par Monsieur Y... dans son second rapport en date du 12 mai 2005 et d'AVOIR dit que ces travaux devraient être réalisés avec ceux qui sont visés dans l'ordonnance entreprise dans un délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt ;
AUX MOTIFS QUE « la prétention de Monsieur X... d'obtenir une indemnité représentant le coût, selon devis d'une entreprise, de travaux de remplacement de l'intégralité des pierres endommagées est excessive et injustifiée au regard de l'avis donné à ce sujet par l'expert judiciaire ; selon celui-ci, ces travaux qui supposent un étayage au niveau de l'ouverture constituée par la devanture du magasin représentent une solution d'un coût disproportionné par rapport à ce que requiert la remise en état de l'immeuble ; la solution qu'il préconise, par l'adjonction de parements en pierre, est celle qui est utilisée en accord avec l'architecte des Bâtiments de France pour la restauration des immeubles anciens dans les secteurs sauvegardés et elle est de nature, eu égard aux méthodes de construction moderne, à assurer une remise du bien de Monsieur X... en son étant antérieur tant sur le plan architectural (l'immeuble a été édifié à la fin du XVIIIème siècle) que sur le plan structurel ; c'est par conséquent à bon droit que le premier juge a retenu cette solution que Monsieur Y... chiffre à 1. 322, 66 euros et, la ville de BORDEAUX étant en mesure de la mettre en oeuvre, a pris acte en prononçant contre elle une condamnation en tant que de besoin de la proposition de cette dernière de la mettre en oeuvre à ses frais » ;
ET AUX MOTIFS QU'« en revanche, les attestations produites par Monsieur X..., en particulier celle du locataire du local commercial, Monsieur Edvard Z..., et l'état des lieux rédigé le 18 février 2005 par un agent de la ville qui a pris en compte les dégradations constatées sur la partie droite de la façade de l'immeuble, établissent que la Ville de BORDEAUX est responsable de la deuxième série de dégradations consécutives à la pose puis au retrait d'un second boîtier électrique ainsi qu'à la réalisation de saignées de passage de câbles grossièrement rebouchées avec du mortier ; il y a lieu sur ce point d'accueillir l'appel de Monsieur X..., pour partie dans la mesure où celui-ci n'est pas fondé à réclamer la mise en.. uvre d'une solution près de quatre fois plus onéreuse que celle préconisée par l'expert judiciaire dans son second rapport ; la Ville de BORDEAUX devra faire réaliser ces travaux chiffrés par Monsieur Y... à la somme de 746, 33 euros, en plus de ceux prévus dans la décision déférée et dans un délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt » ;
ALORS QUE le responsable d'un dommage ne peut imposer à la victime la réparation en nature du préjudice subi par celle-ci ; qu'en donnant acte à la commune de BORDEAUX de son offre de faire réaliser les travaux de remise en état de l'immeuble de Monsieur X... préconisés par l'expert et en l'a condamnant, au besoin, à réaliser ces travaux, quand Monsieur X... s'opposait expressément à la réparation en nature de son préjudice et sollicitait l'allocation de dommages et intérêts représentant le coût des travaux, la Cour d'appel a violé les articles 544 et 1382 du Code civil.