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15/04/2010 | FRANCE | N°09-12911

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 15 avril 2010, 09-12911


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la caisse d'allocations familiales du Puy-de-Dôme de ce qu'elle s'est désistée de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le directeur régional des affaires sanitaires et sociales d'Auvergne ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 512-2 et D. 512-2, 2°, du code de la sécurité sociale, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3 de la Convention internationale sur les droits de

l'enfant ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'entré en France en 1971 e...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la caisse d'allocations familiales du Puy-de-Dôme de ce qu'elle s'est désistée de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le directeur régional des affaires sanitaires et sociales d'Auvergne ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 512-2 et D. 512-2, 2°, du code de la sécurité sociale, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3 de la Convention internationale sur les droits de l'enfant ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'entré en France en 1971 et y séjournant sous le couvert d'une carte de séjour, M. X... a fait venir auprès de lui, en 2003, son fils Mohamed sans qu'ait été suivie la procédure de regroupement familial ; que la caisse d'allocations familiales du Puy-de-Dôme (la caisse) lui a refusé le bénéfice des prestations familiales, faute pour lui d'avoir produit le certificat médical délivré par l'Office des migrations internationales, devenu l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations ; que M. X... a saisi d'un recours une juridiction de la sécurité sociale ;
Attendu que, pour faire droit à la demande de M. X..., l'arrêt, après avoir rappelé, d'une part, que, selon l'article L. 512-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005, et l'article D. 512-2, 2°, du même code, l'étranger doit justifier, pour bénéficier des prestations familiales, de la situation de l'enfant en produisant, notamment, le certificat de contrôle médical de celui-ci délivré par l'Agence nationale d'accueil des étrangers et des migrations à l'issue de la procédure d'introduction ou d'admission au séjour au titre du regroupement familial, d'autre part, qu'il résulte des articles 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de l'article 3 de la Convention internationale sur les droits de l'enfant que la jouissance des droits aux prestations sociales doit être assurée sans distinction fondée sur l'origine nationale, retient que le fait de subordonner à la production d'un justificatif de la régularité du séjour des enfants mineurs le bénéfice des prestations familiales constitue une exigence contraire aux stipulations précitées ;
Qu'en statuant ainsi, alors que répondant à l'intérêt de la santé publique et à l'intérêt de la santé de l'enfant, la production du certificat médical exigée à l'appui de la demande de prestations familiales du chef d'un enfant étranger ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit à la vie familiale, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse d'allocations familiales du Puy-de-Dôme, ensemble l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de la la SCP Monod et Colin ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze avril deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la caisse d'allocations familiales du Puy-de-Dôme
Il est fait grief à la décision attaquée d'avoir dit que la Caisse d'Allocations Familiales du PUY DE DOME doit procéder à la liquidation des droits aux prestations familiales de Monsieur X... à compter du 24 mars 2006 et ce, sous astreint de 90 euros par jour de retard à compter d'un délai d'un mois suivant la notification du jugement ;
AUX MOTIFS QUE selon les dispositions des articles L 512-1 et L 513-1 du code de la sécurité sociale, toute personne française ou étrangère ayant à sa charge un ou plusieurs enfants résidant en France bénéficie pour ces enfants des prestations familiales ; que les prestations sont dues à la personne qui assume en France la charge effective et permanente des enfants ; que M. X..., entré en France en 1971, bénéficie d'une carte de résident valable jusqu'en 2012 ; qu'il a sollicité, le 13 mars 2006, le bénéfice des prestations familiales pour son fils Mohamed, né le 7 avril 1991 et entré en France, selon ses déclarations, en mars 2001, hors du cadre de la procédure de regroupement familial ; qu'il a produit le document de circulation délivré pour Mohamed le 3 juillet 2003 par la préfecture du Puy de Dôme ainsi que des certificats de scolarité établis les 4 octobre 2001 et 24 janvier 2003 ainsi que ceux concernant les années 2004/2005 et 2005/2006 ; que par lettre du 24 mars 2006, la caisse d'allocations familiales a refusé à M. X... le bénéfice des prestations familiales pour son fils pour le motif suivant :"Nous ne disposons pas du certificat médical de l'OMI (Office des Migrations Internationales) concernant votre fils MOHAMMED délivré à l'issue de la procédure de regroupement familial.Or, ce document est nécessaire pour prouver la régularité de son entrée et de son séjour sur le territoire français.Selon les nouvelles dispositions parues au Journal Officiel du 28.02.2006 modifiant l'article L 512-2 du Code de la Sécurité Sociale, le document de circulation pour étranger mineur délivré par la Préfecture, au nom de votre enfant n'est pas une pièce valable pour le versement des prestations familiales" ;que l'article L 512-2 du code de sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005 applicable en l'espèce, dispose que bénéficient de plein droit des prestations familiales les étrangers titulaires d'un titre pour résider régulièrement en France sous réserve qu'il soit justifié pour les enfants qui sont à leur charge et au titre desquels les prestations familiales sont demandées, d'un document attestant de la régularité de leur entrée et de leur séjour ; que les documents justifiant de cette situation sont énumérés à l'article D 512-2 du code de sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2006-234 du 27 février 2006 :
" 1) extrait d'acte de naissance en France, 2) Certificat de contrôle médical de l'enfant, délivré par l'agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations à l'issue de la procédure d'introduction ou d'admission au séjour au titre du regroupement familial, 3) livret de famille délivré par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, il défaut, un acte de naissance établi, le cas échéant, par cet office, lorsque l'enfant est membre de famille d'un réfugié, d'un apatride ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire. Lorsque l'enfant n'est pas l'enfant du réfugié, de l'apatride ou du bénéficiaire de la protection subsidiaire, cet acte de naissance est accompagné d'un jugement confiant la tutelle de cet enfant à l'étranger qui demande à bénéficier des prestations familiales, 4) Visa délivré par l'autorité consulaire et comportant le nom de l'enfant d'un étranger titulaire de la carte de séjour mentionnée à l'article L 313-8 ou au 5° de l'article L 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, 5) Attestation délivrée par l'autorité préfectorale précisant que l'enfant est entré en France au plus tard en même temps que l'un de ses parents admis au séjour sur le fondement de l'article L ou du 5'de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié,6) Titre de séjour délivré à l'étranger âgé de seize à dix-huit ans dans les conditions fixées par l'article L 311-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.Elle est également justifiée, pour les enfants majeurs ouvrant droit aux prestations familiales, par l'un des titres mentionnés à l'article D 512- 1" ;qu'il est ainsi exigé, pour bénéficier des prestations familiales, qu'il soit justifié d'une entrée régulière en France des enfants bénéficiaires ; que plus spécialement, il est nécessaire de produire le certificat délivré par l'ANAEM (ex OMI) lors de la visite médicale à l'issue de la procédure d'introduction ou d'admission au séjour au titre du regroupement familial ; que l'article 14 de la Convention européenne des Droits de l'Homme dispose que la jouissance des droits et libertés reconnus dans la convention doit être assurée sans distinction aucune fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ; que ces dispositions s'appliquent aux prestations sociales ; que par ailleurs, l'article 8 de cette même Convention impose aux Etats signataires de prendre les mesures nécessaires pour garantir aux personnes présentes sur leur territoire le droit au respect de la vie privée et familiale ; que les prestations familiales, qui visent à favoriser la vie familiale, relèvent de l'article 8 ; qu'aux termes de l'article 3 de la Convention Internationale des Droits de l'Enfant, "dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale" ; qu'il résulte de ces textes que la jouissance des droits et libertés reconnus dans la convention doit être assurée sans distinction fondée sur l'origine nationale et que le fait de subordonner à la production d'un justificatif de la régularité du séjour des enfants mineurs le bénéfice des prestations familiales porte une atteinte disproportionnée au principe de non-discrimination et au droit à la protection de la vie familiale ; qu'en l'espèce, dans la mesure où il n'est pas contesté que M. X... remplit la condition de régularité du séjour en France de même que la condition tenant à la charge effective et permanente de l'enfant Mohamed, la caisse ne pouvait lui refuser le bénéfice des prestations familiales pour cet enfant au motif qu'il ne produit pas un justificatif de la régularité du séjour de ce dernier, une telle exigence étant contraire aux dispositions des articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme ; que le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande et il convient d'ordonner à la Caisse la liquidation des droits aux prestations familiales de celui-ci à compter du 24 mars 2006 sous astreinte de 90,00 € par jour de retard à compter d'un délai d'un mois suivant la notification du jugement ;
1) ALORS QUE la subordination de l'accès aux prestations de sécurité sociale à une condition de régularité d'entrée et de séjour sur le territoire n'est pas contraire aux articles 8 et 14 de la Convention Européenne des Droits de l'Hommes ; qu'en jugeant néanmoins que Monsieur X... pouvait se prévaloir de ces deux articles pour obtenir le bénéfice des prestations familiales en faveur de son fils malgré le défaut de production d'un justificatif exigé par la législation française attestant de la régularité de séjour de ce dernier sur le territoire français, la Cour d'appel a violé les articles L.512-1, L 512-2 et D.511-1 du Code de la sécurité sociale, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et l'article 3 de la Convention internationale des droits de l'enfant ;
2) ALORS QUE les étrangers peuvent bénéficier des prestations familiales sous réserve qu'il soit justifié, pour les enfants qui sont à leur charge et au titre desquels les prestations familiales sont demandées, d'une entrée régulière dans le cadre de la procédure de regroupement familial visée au livre IV du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en constatant que l'enfant de Monsieur X... était entré en France "hors du cadre de la procédure de regroupement familial" pour néanmoins octroyer à ce dernier le bénéfice des prestations familiales, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé les articles L.512-1, L 512-2 et D.511-1 du Code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 09-12911
Date de la décision : 15/04/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, PRESTATIONS FAMILIALES - Prestations - Bénéficiaires - Enfant mineur étranger résidant en France - Conditions - Détermination - Portée

SECURITE SOCIALE, PRESTATIONS FAMILIALES - Prestations - Bénéficiaires - Enfant mineur étranger résidant en France - Conditions - Production du certificat médical délivré par l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations - Portée CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 8 - Respect de la vie familiale - Compatibilité - Code de la sécurité sociale - Article L. 512-2 - Portée

Répondant à l'intérêt de la santé publique et à l'intérêt de l'enfant, la production du certificat médical délivré, au titre de la procédure du regroupement familial, par l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations exigée à l'appui de la demande de prestations familiales en application des dispositions des articles L. 512-2, alinéa 2, et D. 512-2 2ème, du code de la sécurité sociale, ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit à la vie familiale


Références :

articles L. 512-2 et D. 512-2 2° du code de la sécurité sociale

articles 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

article 3 de la Convention internationale sur les droits de l'enfant

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 27 janvier 2009

Sur la portée de la détermination des conditions d'attribution des prestations familiales à un enfant mineur étranger résidant en France, antérieurement à la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005 : Conseil constitutionnel., 15 décembre 2005, décision n° 2005-528 DC, Recueil Cons. const., p. 157 ;2ème Civ., 6 décembre 2006, pourvoi n° 05-12666, Bull. 2006, II, n° 342 (cassation), et les arrêts cités


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 15 avr. 2010, pourvoi n°09-12911, Bull. civ. 2010, II, n° 85
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, II, n° 85

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Avocat général : Mme de Beaupuis
Rapporteur ?: M. Prétot
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Monod et Colin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.12911
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