Vu la requête, enregistrée le 4 février 2008, présentée pour la SOCIETE LES TAMARINES, dont le siège est 10, rue des Oiseaux du Paradis à Piton-Saint-Leu (97424), représentée par sa gérante en exercice, par Me Consalvi ; la SOCIETE LES TAMARINES demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 11 octobre 2007 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 6 janvier 2005 par laquelle la commune de Saint-Raphaël a refusé de lui accorder un permis de construire, ainsi que la décision en date du 14 mars 2005 de rejet de son recours gracieux ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune de Saint-Raphaël de prendre une nouvelle décision dans le délai maximum d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Raphaël la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions, et notamment son article 2 ;
Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 pris par le vice-président du Conseil d'Etat autorisant la cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mars 2010 :
- le rapport de M. Massin, rapporteur ;
- les conclusions de M. Bachoffer, rapporteur public ;
- les observations de Me Consalvi, pour la SOCIETE LES TAMARINES ;
- et les observations de Me Garcia, pour la commune de Saint-Raphaël ;
Considérant que par jugement du 11 octobre 2007, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de la SOCIETE LES TAMARINES dirigée contre la décision en date du 6 janvier 2005 par laquelle la commune de Saint-Raphaël a refusé de lui accorder un permis de construire, ainsi que contre la décision en date du 14 mars 2005 par laquelle la commune de Saint-Raphaël a rejeté son recours gracieux ; que la SOCIETE LES TAMARINES interjette appel de ce jugement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que la SOCIETE LES TAMARINES est fondée à soutenir que le jugement est irrégulier en ce que les premiers juges ont omis d'examiner la légalité du refus de permis de construire au regard de l'article ND1-II-1 du règlement du plan d'occupation des sols, moyen qu'elle avait soulevé par le mémoire enregistré le 14 septembre 2007 au greffe du tribunal administratif de Nice ; qu'ainsi, le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 11 octobre 2007 doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer sur la demande présentée par la SOCIETE LES TAMARINES devant le tribunal administratif de Nice ;
Sur la légalité du refus de permis de construire :
Considérant que par jugement d'adjudication du tribunal de grande instance de Draguignan du 14 février 1997, la société Domus, Mme Monique Ballaresque et la société Réalisation Palmade ont été déclarés adjudicataires d'une propriété de 18 715 m² située à Saint-Raphaël pour le prix de 510 000 F, décrite dans le cahier des charges de l'adjudication comme une maison élevée d'un étage sur rez-de-chaussée à l'état de ruines ; qu'antérieurement, le cabinet Socotec avait relevé dans un rapport établi le 13 mai 1992 : cette villa, à l'abandon total, sert depuis une dizaines d'années, d'après la date de certains graffitis, de refuge à des squatters occasionnels (...) ; que dans un courrier en date du 12 août 1992, M. Muller, commissaire principal de police alertait en ces termes le maire de Saint-Raphaël : J'ai pu constater que l'immeuble (...) est dans un état de délabrement total (...) il paraît indispensable, eu égard aux risques imminents et réels, d'envisager la prise d'un arrêté de péril ordonnant la destruction. ; que le procès-verbal de description des biens à saisir établi le 31 mai 1996 par Me Berge, huissier de justice, relevait : sur la parcelle 35 se trouve édifiée une maison élevée d'un étage sur rez-de-chaussée et sous-sol, à l'état de ruine, (...) inhabitable et inoccupée. ;
Considérant, en premier lieu, que la SOCIETE LES TAMARINES soutient que le refus de permis de construire méconnaît l'article ND 1-II-1 du règlement du plan d'occupation des sols aux termes duquel : Ne sont admises que (...) les restaurations ou améliorations de construction à usage d'habitation existant dans les conditions prévues à l'article ND 14 ; ; qu'aux termes de l'article ND14 du même règlement : Les restaurations ou agrandissements des constructions existantes à usage d'habitation, susceptibles d'être admises dans la zone, ne doivent pas entraîner un accroissement de la superficie de plancher hors oeuvre nette supérieure à 30% de la surface hors oeuvre nette existante. De plus, la superficie de plancher hors oeuvre nette obtenue après extension, ne doit pas excéder, annexes comprises, 200 m² maximum (...). ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que seules les constructions habitables au moment de l'approbation du plan d'occupation des sols peuvent donner lieu à restauration ;
Considérant que le plan d'occupation des sols applicable le 6 janvier 2005, date à laquelle a été refusé le permis de construire en litige, a été approuvé le 23 octobre 1997 ; qu'il est constant que l'état de ruine de la construction que la SOCIETE LES TAMARINES souhaite restaurer, en application des dispositions précitées de l'article ND 1-II-1 du règlement du plan d'occupation des sols, avait été constaté dès 1992 ; que la SOCIETE LES TAMARINES ne démontre pas que cette construction en ruine décrite le 31 mai 1996 par Me Berge, huissier de justice, comme inhabitable et inoccupée, ait été habitée depuis ; que, dès lors qu'il n'existait pas de construction à usage d'habitation au sens du règlement du plan d'occupation des sols à la date d'approbation du plan d'occupation des sols, la SOCIETE LES TAMARINES ne peut revendiquer l'application de l'article ND 1-II-1 du règlement du plan d'occupation des sols ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L.146-6 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur : Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. Un décret fixe la liste des espaces et milieux à préserver, comportant notamment, en fonction de l'intérêt écologique qu'ils présentent, les dunes et les landes côtières, les plages et lidos, les forêts et zones boisées côtières, les îlots inhabités, les parties naturelles des estuaires, des rias ou abers et des caps, les marais, les vasières, les zones humides et milieux temporairement immergés ainsi que les zones de repos, de nidification et de gagnage de l'avifaune désignée par la directive européenne n° 79-409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages et, dans les départements d'outre-mer, les récifs coralliens, les lagons et les mangroves (...). ; qu'aux termes de l'article R.111-21 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur : Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ; qu'aux termes de l'article R.146-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur : En application du premier alinéa de l'article L.146-6, sont préservés, dès lors qu'ils constituent un site ou un paysage remarquable ou caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral, sont nécessaires au maintien des équilibres biologiques ou présentent un intérêt écologique : a) Les dunes, les landes côtières, les plages et les lidos, les estrans, les falaises et les abords de celles-ci (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est situé, en dehors de toute urbanisation, sur les côtes du Trayas , partie naturelle du site classé du massif de l'Estérel ; qu'il est constant que les parcelles surplombent le rivage, à moins de 100 m de celui-ci, dans une zone restée à l'état naturel ; que le projet en litige est, par sa situation, de nature à porter atteinte au paysage naturel caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral ; qu'il méconnaît ainsi les articles L.146-6, R.111-21 et R.146-1 du code de l'urbanisme ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L.111-3 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur : La reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit par un sinistre est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale ou le plan local d'urbanisme en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié. Peut également être autorisée, sauf dispositions contraires des documents d'urbanisme et sous réserve des dispositions de l'article L.421-5, la restauration d'un bâtiment dont il reste l'essentiel des murs porteurs lorsque son intérêt architectural ou patrimonial en justifie le maintien et sous réserve de respecter les principales caractéristiques de ce bâtiment. ;
Considérant qu'il est constant que l'état de ruine de la construction que la SOCIETE LES TAMARINES souhaite reconstruire, en application des dispositions précitées de l'article L.111-3, avait été constaté dès 1992 ; que si des incendies ou des explosions qui auraient eu lieu, dans des conditions au demeurant non clairement établies, en 1995 et 1996 ont pu aggraver la ruine de cette villa, ils n'en ont pas été à l'origine ; que, par suite, le délabrement du bâtiment en litige ne peut être regardé comme imputable à un sinistre au sens de l'article L.111-3 et sa reconstruction ne peut être autorisée sur le fondement de ces dispositions ;
Considérant que la SOCIETE LES TAMARINES ne soutient ni n'allègue que le bâtiment en question présenterait un intérêt architectural ou patrimonial qui en justifierait le maintien ; que, par suite, sa restauration ne peut être autorisée sur le fondement du second alinéa de l'article L.111-3 cité ci-dessus ;
Considérant que la SOCIETE LES TAMARINES n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que le refus de permis de construire attaqué méconnaît l'article L.111-3 du code de l'urbanisme sans qu'il soit besoin de statuer sur la portée et, pour les mêmes raisons de l'article ND 1-II-10 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Saint-Raphaël aux termes duquel : Ne sont autorisées, en cas de sinistre, que les reconstructions à l'identique (...) des constructions existantes à la date d'approbation du présent plan d'occupation des sols, en état d'habitation (...) ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE LES TAMARINES n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision en date du 6 janvier 2005 par laquelle la commune de Saint-Raphaël a refusé de lui accorder un permis de construire, ainsi que celle de la décision en date du 14 mars 2005 par laquelle la commune de Saint-Raphaël a rejeté son recours gracieux ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Raphaël, qui n'est pas la partie perdante, la somme que demande la SOCIETE LES TAMARINES au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE LES TAMARINES une somme de 1 500 euros à payer à la commune de Saint-Raphaël au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 11 octobre 2007 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la SOCIETE LES TAMARINES devant le tribunal administratif de Nice et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 3 : La SOCIETE LES TAMARINES versera à la commune de Saint-Raphaël une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE LES TAMARINES, à la commune de Saint-Raphaël et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.
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N° 08MA005032
RP