LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Vu l'article 262-1 du code civil dans sa rédaction issue de la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004, ensemble l'article 1315 du code civil ;
Attendu que, lorsqu'il est prononcé pour acceptation du principe de la rupture du mariage, le jugement de divorce prend effet dans les rapports entre époux, en ce qui concerne leurs biens, à la date de l'ordonnance de non-conciliation ; qu'à la demande de l'un des époux, le juge peut fixer les effets du jugement à la date à laquelle ils ont cessé de cohabiter et de collaborer ; que la cessation de la cohabitation fait présumer la cessation de la collaboration ; que si les conditions du report sont remplies, le juge ne peut le refuser que par une décision motivée ;
Attendu que M. X... et Mme Y... se sont mariés le 16 octobre 1972 sans contrat préalable ; que Mme
Y...
a saisi un juge aux affaires familiales d'une première requête en divorce pour faute ; qu'une ordonnance de non-conciliation du 13 juillet 2001 a autorisé les époux à résider séparément ; qu'un arrêt du 30 septembre 2004 a débouté les époux de leurs demandes en divorce ; que M. X... a introduit une nouvelle instance en divorce sur le fondement de l'article 233 du code civil ; qu'une ordonnance de non-conciliation du 7 octobre 2005 a constaté que les époux vivaient séparément et attribué à l'épouse la jouissance du domicile conjugal à titre onéreux ; qu'un jugement du 25 mai 2007 a prononcé le divorce de M. X... et de Mme
Y...
;
Attendu que pour rejeter la demande de M. X... tendant au report des effets du divorce au 1er septembre 2001, l'arrêt retient que si les époux n'ont pas repris leur cohabitation, la cessation de leur collaboration n'est pas démontrée alors que l'épouse qui demeurait au domicile conjugal avait encore les enfants à sa charge ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il incombe à celui qui s'oppose au report de prouver que des actes de collaboration ont eu lieu postérieurement à la séparation des époux, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions relatives au report des effets du divorce entre les époux en ce qui concerne leurs biens, l'arrêt rendu le 8 septembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne Mme
Y...
aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la demande de Monsieur X... tendant au report de la date des effets du divorce entre époux au 1er septembre 2001, ainsi que sa demande tendant à mettre à la charge de Madame
Y...
une indemnité d'occupation pour l'occupation de l'immeuble commun à compter de cette date ;
AUX MOTIFS PROPRES SUBSTITUES QU'une première procédure de divorce avait fait l'objet d'une ordonnance de non-conciliation en date du 13 juillet 2001 ; que le jugement de divorce prononcé le 16 septembre 2003 a été infirmé par arrêt de la Cour du 30 septembre 2004 de sorte que les dispositions de l'ordonnance de non-conciliation sont devenues caduques ; que si les époux n'ont pas repris leur cohabitation, la cessation de toute collaboration n'est pas démontrée alors que l'épouse qui demeurait au domicile conjugal avait alors encore les enfants à sa charge ; que, faisant application des dispositions de l'article 262-1 du Code civil, il y a lieu de considérer que la jouissance du domicile conjugal par l'épouse a conservé un caractère gratuit jusqu'à l'ordonnance de non-conciliation prise dans la présente procédure, soit jusqu'au 7 octobre 2005 ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la cessation de la cohabitation des époux fait présumer la cessation de leur collaboration ; qu'ayant constaté la cessation de la cohabitation des époux remontant à l'époque de la première procédure de divorce, sans en déduire qu'elle faisait présumer la cessation de leur collaboration, la Cour d'appel a violé l'article 262-1 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'il incombe à l'époux qui s'oppose à la demande de report des effets du divorce d'établir le maintien d'une collaboration entre époux, en dépit de la cessation de la cohabitation ; qu'en relevant que la cessation de la collaboration n'était pas démontrée, la Cour d'appel a méconnu l'objet de la preuve à rapporter et, par suite, sa charge, en violation de l'article 1315 du Code civil ;
ALORS, ENFIN, QUE le fait que l'un des époux continue à vivre au domicile conjugal avec les enfants à charge ne suffit pas à caractériser une quelconque collaboration des époux, postérieurement à la cessation de leur cohabitation ; qu'en se bornant à relever que l'épouse qui demeurait encore au domicile conjugal, avait encore les enfants à charge, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 262-1 du Code civil.