LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches, ci-après annexé, qui, en sa troisième branche, est nouveau, mais de pur droit :
Attendu que Patrice X... est décédé le 22 janvier 2003, en laissant pour lui succéder ses deux enfants issus de son premier mariage, Frédérique et Sébastien, et sa seconde épouse, Mme Y... ; que, par testament olographe du 30 septembre 1997, il avait légué à Mme Y... l'usufruit des 15 % de parts qu'il détenait en pleine propriété dans la SCI 40 pence ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Grenoble, 25 septembre 2007) d'avoir interprété le testament en ce que l'intention du testateur n'était pas de donner à Mme Y... le seul usufruit de ses parts dans la SCI 40 pence et d'avoir constaté que Mme Y... pouvait, outre le legs, réclamer les droits conférés par l'article 757 du code civil ;
Attendu qu'ayant retenu, par motifs adoptés et non contredits par son arrêt, que les termes du testament démontraient que Patrice X... avait souhaité assurer après son décès un revenu régulier et substantiel à son épouse, qu'en l'état de la législation et des droits du conjoint survivant au jour de la rédaction de l'acte, l'attribution d'un usufruit apparaissait comme la mesure la plus adaptée pour atteindre ce but, que, si le choix d'un legs en usufruit permettait la perception de revenus, il ne pouvait en être déduit que le testateur eût voulu écarter toute dévolution en pleine propriété au bénéfice de son conjoint, que les attestations versées aux débats démontraient la préoccupation de Patrice X... de préserver au mieux les intérêts de son épouse et ceux de ses enfants, que plus d'une année s'était écoulée entre la publication de la loi du 3 décembre 2001 et le décès de Patrice X... et que, ce dernier, bien conseillé, avait donc la possibilité, si tel avait été son souhait, de modifier, avant ou après l'entrée en vigueur des dispositions légales nouvelles, les dispositions testamentaires qu'il avait eu la précaution de prendre, la cour d'appel, ayant ainsi répondu aux conclusions invoquées et procédé à l'analyse de la volonté de Patrice X..., a estimé souverainement que, nonobstant l'intervention de la loi du 3 décembre 2001 dont elle a fait une exacte application, le maintien de la libéralité traduisait la volonté implicite de Patrice X... de permettre le cumul des droits légaux et de la libéralité ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 37 de la loi du 19 juillet 1991, rejette la demande de la SCP Peignot et Garreau ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juin deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour Mme X....
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir, par confirmation du jugement entrepris, interprété le testament du 30 septembre 1997 de Monsieur Patrice X... en ce que son intention n'était pas de donner à son épouse le seul usufruit de ses parts de la SCI 40 PENCE et d'avoir constaté que Claudine Y... pouvait, outre les legs effectués à son profit, réclamer les droits que lui conféraient l'article 757 du Code civil,
AUX MOTIFS QU'aux termes du testament en date du 30 septembre 1997, Monsieur Patrice X... a légué à son épouse née Claudine Y... : « L'usufruit des parts que je possède en pleine propriété, soit 15 % dans la SCI "40 Pence ... » ; que le testament précise : « Au cas de vente des parts, de dissolution de la société ou de disparition de l'immeuble social par vente ou autrement, mes héritiers seront tenus de remployer, en accord avec ma légataire le prix de cession ou produit de remplacement de façon à ce qu'elle continue de recevoir jusqu'à son décès un revenu équivalent à celui perçu au moment de cette mutation par ces 15 % de parts » ; que ce testament parfaitement clair, sans aucun terme ou disposition ambigu n'a pas à être interprété ; que d'après l'article 757 du Code civil, en présence d'enfants appelés à la succession, qui ne sont pas issus des deux époux, le conjoint survivant ne bénéficie d'aucune option successorale ; qu'il hérite de la propriété du quart de la succession de l'époux prédécédé ; que les appelants semblent contester le fait que les libéralités consenties au conjoint survivant ne s'imputent pas sur ses droits successoraux aux termes de la réforme du 3 décembre 2001 mais en réalité ils ne contestent que le bénéfice par Madame Y... de droits légaux en pleine propriété, sans cependant oser soutenir que les dispositions de l'article 757 du Code civil ne s'appliqueraient pas ; que si Monsieur X... avait annulé son testament, Madame Y... bénéficierait quand même d'un quart en pleine propriété sur les biens du défunt, de sorte que tous les développements sur la volonté du défunt sont sans intérêt, étant rappelé que ce que les appelants contestent sont les droits accordés par la loi et non l'usufruit résultant du testament ; que les appelants n'ayant pu contester utilement les droits d'héritière de Madame Y... seront déboutés de leur appel,
ALORS, D'UNE PART, QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; si bien qu'en laissant sans réponse les conclusions d'appel des consorts X... dans lesquelles ils invoquaient de manière précise l'intention du testateur, Monsieur Patrice X..., confirmée par de nombreuses attestations, de léguer à Madame Y..., son épouse, le seul usufruit des parts qu'ils détenaient en pleine propriété dans la SCI 40 PENCE et, par conséquent de ne pas instituer le cumul des droits légaux du conjoint survivant avec le bénéfice de la libéralité du 30 septembre 1997 qu'il lui avait consenti, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et violé l'article 455 du Code de procédure civile,
ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en refusant de rechercher l'intention véritable du testateur, au motif inopérant du caractère clair et non équivoque du testament, la Cour d'appel a confondu interprétation d'un testament et analyse de la volonté du testateur et, ce faisant, violé les articles 1002 et 1134 du Code civil,
ALORS, ENFIN, QUE la relation entre les libéralités dont la rédaction est antérieure au 1er juillet 2002, et les droits successoraux en faveur du conjoint survivant nés de l'entrée en vigueur de la loi du 3 décembre 2001, laisse applicable aux successions la solution supplétive de volonté résultant de l'article 767, alinéa 4, ancien du Code civil en vigueur au moment de la libéralité, suivant lequel le conjoint survivant doit cesser d'exercer son droit d'usufruit dans le cas où il aurait reçu du défunt des libéralité, même faits par préciput et hors part, dont le montant atteindrait celui des droits que l'article 767, alinéa 1, ancien du Code civil lui attribue ; si bien qu'en faisant application au cas d'espèce de l'article 757 du Code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 3 décembre 2001 et en faisant bénéficier Madame Y... du cumul de ses droits légaux issus de la loi du 3 décembre 2001 avec le bénéfice des libéralités consenties par le défunt avant l'entrée en vigueur de cette loi, la Cour d'appel a violé l'article 2 du Code civil, ensemble l'article 767 du même Code, dans sa rédaction antérieure à la loi du 3 décembre 2001.