Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 13 mars 2007, présentée pour M. X, demeurant ..., par Me Guetta ;
M. X demande à la Cour :
- d'annuler le jugement n° 0203311 en date du 20 février 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à prononcer la décharge des cotisations supplémentaires au titre de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 1994, 1995 et 1996 ;
Il soutient :
- qu'un mémoire ampliatif au soutien de l'appel sera produit ultérieurement ;
Vu le mémoire, enregistré le 24 avril 2007, pour M. X, qui conclut aux mêmes fins que la requête, et demande à la Cour :
- de prononcer la décharge des impositions établies au titre des années 1994 et 1995
- de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
Il soutient :
- que l'administration a méconnu les règles de la procédure de demande de justification de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ; qu'en effet, le montant des crédits bancaires des années 1995 et 1996 était inférieur au double des revenus déclarés, et que, dans ces condition, la mise en oeuvre de l'article L. 16 n'était pas justifiée ; que les comptes ouverts auprès de l'agence Nivard Flornoy sont des comptes mixtes, à la fois privés et professionnels ; que, par suite, pour effectuer la comparaison entre le montant des crédits bancaires et celui des revenus déclarés, l'administration devait inclure le montant des recettes professionnelles ; que, pour l'année 1994, le service a fait état d'une discordance de 8,7 millions de francs, alors que le double des recettes brutes et autres revenus pour l'année en cause se montait à 20,9 millions de francs ; que, pour l'année 1995, la discordance dont faisait état l'administration se montait à 1,3 millions de francs, alors que le double des recettes professionnelles se montait à 26 millions de francs ;
- que la notification de redressement relative à l'année 1994 ne comporte pas, s'agissant du chef de redressement « revenus d'origine indéterminée », le montant des redressements afférents ; que la référence à la demande d'éclaircissement précédemment adressée au contribuable ne pouvait tenir lieu de motivation régulière, l'indication du montant chiffré dans le corps même de la notification de redressement étant une règle impérative ; qu'à tout le moins, l'administration aurait du annexer à la notification le document auquel il était fait référence ;
- que les salaires et les revenus fonciers ont fait l'objet d'une double imposition, dans la mesure où ils ont à la fois été taxés dans la catégorie revenus d'origine indéterminée et dans les catégories traitements et salaires et revenus fonciers ; que le montant des revenus d'origine indéterminée des années 1994 et 1995 aurait du, par conséquent, être diminué de 164 000 francs pour l'année 1994 et 161 729 francs pour l'année 1995 ;
- qu'il a démontré, en produisant les virements bancaires correspondants, que les remises de 394 000 francs du 29 avril 1994 et 680 000 francs du 13 mai 1994 correspondaient à des dépôts d'espèce suite à un virement de M. Y, et lui avaient été remboursées par virement le 14 novembre 1996 ;
- que la remise de 130 000 F du 14 mars 1995 correspondait à un dépôt provenant de sa mère, qui lui avait remis ces sommes à l'occasion d'un de ses séjours en France ; que ces sommes, devaient, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, être présumées constituer un prêt d'origine familiale, et que c'était à l'administration d'apporter la preuve contraire ;
- qu'il ne pouvait faire l'objet d'une imposition à taux fixe sur les années 1994, 1995 et 1996, alors qu'il démontrait au contraire une moins-value globale pour les ensemble des cessions de valeur mobilière lors de ces années ; qu'en application de l'article 94-A-6 du code général des impôts et de la documentation administrative 5-G-4524 du 15 décembre 1995, les pertes subies sont imputables sur les gains de même nature, et que ces gains s'entendent de l'ensemble des valeurs mobilières et droits sociaux cotés ou non cotés soumis au régime de l'article 92-B, et notamment des Sicav et des FCP, et que les OPCVM sont de même nature que les valeurs mobilières cotées soumises au régime de l'article 92-B ; que, par ailleurs, contrairement à ce que soutenait l'administration, le service vérificateur avait parfaitement connaissance du montant des pertes subies sur les cessions de valeur mobilière, puisqu'il a mentionné ce montant page 5 de la notification de redressement du 6 avril 1998 ;
- que, s'agissant des pénalités de mauvaise foi, en faisant référence à des circonstances inhérentes au déroulement de la vérification, et donc postérieure aux faits en litige, l'administration n'a pas apporté la preuve, qui lui incombe, de la connaissance des faits et de la conscience de commettre une infraction au moment où celle ci a été commise ; que, pour le reste, l'administration ne pouvait se fondait uniquement sur l'importance quantitative des redressements alors qu'elle aurait du faire référence aux circonstances particulières susceptibles d'établir la volonté d'éluder l'impôt ;
.............................................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 mars 2008 ;
- le rapport de M. Morri, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X a fait l'objet, du 20 mars 1997 au 6 avril 1998, d'un examen contradictoire de l'ensemble de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 1994, 1995 et 1996 ; que, corrélativement, il a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 20 novembre 1997 au 8 janvier 1998 au titre des mêmes années concernant son activité de gestion de portefeuille de titres ; qu'à la suite de ces vérifications, il a fait l'objet, après application de la procédure de taxation d'office s'agissant de revenus d'origine indéterminée et de la procédure contradictoire s'agissant des revenus de capitaux mobiliers, de trois redressements au titre de l'impôt sur le revenu et des cotisations sociales d'un montant respectif de 367 849 euros au titre de l'année 1994, de 184 997 euros au titre de l'année 1995 et de 154 099 euros au titre de l'année 1996 ; qu'il relève appel du jugement en date du 20 février 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à prononcer la décharge de ces cotisations supplémentaires ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Sur la mise en oeuvre de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales pour les années 1994 et 1995 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : « En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (…) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés » ;
Considérant que, pour l'application de ces dispositions, la différence de revenus dont l'importance doit justifier la mise en oeuvre de la procédure de demande de justifications, s'entend de celle que l'administration constate avant tout examen critique des crédits qu'elle a recensés préalablement à cette mise en oeuvre, quelles que soient les justifications que le contribuable a pu spontanément apporter postérieurement à l'engagement de l'examen de situation fiscale personnelle, et qui pourraient être de nature à réduire le montant des crédits sur lesquels il sera effectivement interrogé ;
Considérant que la somme des crédits recensés par le vérificateur sur les comptes bancaires de M. X s'élevait à 2 664 445 francs pour l'année 1994 et 1 330 426 F pour l'année 1995, alors que ce dernier avait déclaré des revenus s'élevant, respectivement, à 164 000 francs pour 1994 et 11 739 francs pour 1995 ; que si M. X fait valoir que l'administration aurait également dû prendre en compte les revenus qu'il tirait de son activité professionnelle de gestion de portefeuille, qui alimentaient les comptes faisant l'objet de la vérification, il résulte de l'instruction que ces revenus, qui n'avaient donner lieu à aucune déclaration de la part du contribuable, ont été révélés à l'administration postérieurement au déclenchement de l'examen de situation fiscale personnelle et, qu'en outre, cette activité avait un caractère occulte ; qu'ainsi, c'est à bon droit que l'administration s'est bornée à prendre en compte les revenus nets initialement déclarés par le contribuable à l'exclusion de ceux ultérieurement mis en évidence et tirés de son activité occulte de gestion de portefeuille ; que, compte tenu des montants qui ont été rappelés, les différences constatées autorisaient l'administration à user de la procédure de demande de justifications prévue par l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ;
Sur la motivation de la notification de redressement pour l'année 1994 :
Considérant que M. X soutient que la notification de redressement relative à l'année 1994 ne comporte pas les mentions exigées par l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ; qu'il fait valoir que, s'agissant du chef de redressement « revenus d'origine indéterminée », elle ne mentionne pas le montant des redressements afférents, et que la référence, pour déterminer ces montants, à la demande d'éclaircissement précédemment adressée au contribuable ne pouvait tenir lieu de motivation régulière dans la mesure où ce document n'avait pas été joint à la notification de redressement ;
Considérant, toutefois, que la notification en cause, qui ne porte que sur l'année 1994, comporte, dans la partie récapitulative, le montant des revenus d'origine indéterminée pour l'année en cause, soit 2 664 445 F ; que, dans le corps de la notification, elle indique, dans le point consacré aux revenus d'origine indéterminée, qu'elle se réfère expressément à la lettre en date du 15 septembre 2007 par laquelle l'administration a demandé à l'intéressé des justifications sur la liste détaillée des sommes portées au crédit de ses comptes bancaires ; que le montant total des revenus d'origine indéterminée pour 1994 figurant dans la notification de redressement correspond au total des crédits bancaires préalablement mentionnés dans le corps de la demande de renseignements du 15 septembre 2007 ; qu'il n'est par ailleurs pas contesté que M. X a reçu le courrier du 15 septembre 2007 et a pu en prendre personnellement connaissance ; que, par suite, et alors même que la copie de ce courrier n'a pas été jointe à la notification de redressement, M. X n'est pas fondé à soutenir que la notification des bases imposées d'office qui lui a été adressée aurait été irrégulière ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Sur les revenus d'origine indéterminée :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : « Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge de l'imposition. » ;
Considérant, en premier lieu, que si M. X fait valoir que ses salaires et ses revenus fonciers pour les années 1994 et 1995 ont fait l'objet d'une double imposition, dans la mesure où ils ont à la fois été taxés dans la catégorie « revenus d'origine indéterminée » et dans les catégories « traitements et salaires » et « revenus fonciers », il ne produit aucun document justifiant que les revenus en cause ont été crédités sur les comptes bancaires dont le total des crédits a été utilisé par l'administration pour déterminer le montant des revenus d'origine indéterminée de 1994 et 1995 ; qu'ainsi, il n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, du caractère exagéré de l'imposition ;
Considérant, en deuxième lieu, que M. X soutient que les sommes de 394 000 francs et 680 000 francs, créditées sur son compte bancaire le 29 avril 1994 et le 13 mai 1994, concernent des dépôts d'espèces faisant suite à un virement en francs CFA reçu de M. Louis Y par l'intermédiaire de l'Union togolaise de Banque le 12 avril 1994 et correspondant à un prêt consenti par ce tiers ; qu'à l'appui de ses allégations, il produit le justificatif d'un virement d'un montant de 107 400 000 francs CFA opéré par M. Akapko à son profit le 12 avril 1994 et celui d'un virement opéré par ses soins au profit de M. Y le 14 novembre 1996 qui correspondrait, selon lui, au remboursement du capital et des intérêts ; que, toutefois, M. X ne fournit aucun autre document portant date certaine pour justifier de l'existence et des modalités du prêt qui lui aurait été consenti en 1994 et n'apporte aucune justification des conditions dans lesquelles la somme reçue le 12 avril 1994 aurait été convertie en francs français et retirée en espèces ; qu'ainsi, il n'apporte pas la preuve que les sommes en cause correspondaient bien à un prêt de M. Y et n'avaient pas le caractère d'un revenu imposable ;
Considérant, en troisième lieu, que l'attestation établie le 30 novembre 1999 par la mère de M. X pour démontrer que cette dernière lui aurait consenti, le 14 mars 1995, un prêt de 130 000 F, est dépourvue de date certaine ; qu'en l'absence de tout autre document démontrant l'origine de cette somme, la seule circonstance que sa mère se trouvait, à cette date, sur le territoire français, ne démontre pas qu'elle lui aurait remis cette somme à titre de prêt familial ;
Sur les plus-values de cession mobilière :
Considérant que si M. X soutient avoir enregistré, pour les années 1994, 1995 et 1996, des moins-values de cessions mobilières de montants respectifs de 317 355 francs, 361 979 francs et 493 433 francs, qui feraient obstacle à son imposition au titre des plus-values de cession pour les années considérées, il ne produit, à l'appui de cette affirmation, que des documents non datés, qui ne peuvent suffire à attester la réalité et le montant des moins-values en cause ; que, dans ces conditions, la seule circonstance que l'administration ait, dans un premier temps, admis l'existence de ces moins-values avant d'en contester le principe et le montant ne suffit pas à en démontrer l'existence ; qu'ainsi, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur les pénalités :
Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : « 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionné à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40% si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (…) » ; que les droits mis à la charge de M. X à la suite de l'examen de situation fiscale personnelle dont il a fait l'objet ont été assortis de la majoration de 40 % pour mauvaise foi ;
Considérant, d'une part, que l'administration, qui a indiqué, dans sa notification de redressement, le texte dont elle faisait application, le taux des pénalités applicables et les circonstances particulières de l'espèce qui caractérisaient la volonté du requérant d'éluder l'impôt, a suffisamment motivé l'application des pénalités de mauvaise foi qu'elle a ajoutées à l'imposition due au titre des revenus d'origine indéterminée ;
Considérant, d'autre part, que, contrairement à ce que soutient M. X, l'administration ne s'est pas bornée, pour fonder l'application des pénalités en cause, à se référer à l'importance des sommes soustraites à l'impôt, mais a également, ainsi qu'il a été dit, recherché les circonstances démontrant la volonté d'éluder l'impôt ; que, dans ces conditions, eu égard à l'importance et au caractère systématique des omissions de déclaration du contribuable ainsi qu'au fait qu'il exerçait une activité occulte de gestion de portefeuille, l'administration doit être regardée comme établissant le bien fondé des pénalités litigieuses ;
Considérant, dès lors, que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des impositions en cause ;
Sur les conclusions relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à M. X les sommes qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
07VE00579 2