Vu la requête, enregistrée le 25 septembre 2007, présentée pour M. Serge A, domicilié ... ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0601992 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 10 juillet 2007 en tant que, par ce jugement, le Tribunal a rejeté, en premier lieu, sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de l'Allier a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'opération de désinfection de ses locaux d'élevage qui a été ordonnée par l'administration, en second lieu, sa demande de condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 49 433,22 euros hors taxes en réparation de ces préjudices ;
2°) d'annuler cette décision et de condamner l'Etat à lui verser cette somme, outre intérêts au taux légal ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. A soutient que :
- le préfet de l'Allier n'a répondu que deux jours avant l'audience du Tribunal, soit hors délai, à la mise en demeure de répondre à sa demande qui avait été adressée par le Tribunal ; que le mémoire du préfet n'a donc pas été communiqué ; que l'Etat devait donc être réputé avoir admis l'exactitude des faits, tels qu'ils les avait exposés ; que c'est donc sans tenir compte de ces faits que le Tribunal a tranché le litige ; que, du fait de ladite abstention des services de l'Etat, le Tribunal a statué dans un sens qu'il n'a pas été en mesure de débattre ;
- il résulte clairement du rapport d'expertise que les dommages qu'il a subis résultent des opérations de désinfection qui ont été ordonnées par la direction départementale des services vétérinaires, ces opérations n'ayant pas été réalisées dans les règles de l'art et le défaut de rinçage soigneux ayant eu pour conséquence directe la corrosion des bâtiments et des véhicules lui appartenant apparue peu de temps après ; que le préjudice ainsi causé à ses biens doit être réparé, puisqu'il découle d'une faute commise lors de l'exécution desdites opérations et d'un défaut de surveillance de la part des services ayant ordonné la désinfection ; que, contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal, il n'est pas nécessaire de démontrer l'existence d'une faute lourde pour engager la responsabilité de l'Etat ; que, si en matière de police administrative, la responsabilité de l'administration ne peut être engagée qu'en cas de faute lourde dès lors qu'une mission est délicate, par sa nature, les risques encourus, l'urgence ou l'imprévisibilité du dommage, toutefois, comme dans les autres domaines d'intervention de l'administration, l'exigence d'une faute lourde est en net recul, la préoccupation de protéger les intérêts des administrés étant croissante ; que la jurisprudence ayant renoncé à rechercher une faute lourde dans des domaines où existent des difficultés, il ne saurait en être autrement dans un domaine qui ne présente pas de difficulté majeure ; que, dans le domaine de la police sanitaire, la faute lourde n'est plus toujours requise, même dans des cas présentant une certaine difficulté d'exécution ; qu'en l'espèce, le Centre technique d'hygiène, parfaitement informé de la nocivité des produits utilisés, ne pouvait ignorer que le contact des produits avec les surfaces métalliques devait être de courte durée et qu'un rinçage minutieux devait être réalisé, pour supprimer toutes traces de désinfectant ; que, si une difficulté aurait peut-être pu être retenue en cas d'échec des mesures de désinfection, les opérations de rinçage ne présentaient aucune difficulté particulière ; qu'il n'est pas impossible de dissocier ces deux opérations, s'agissant dans un premier temps d'éliminer tout risque de contamination puis, dans un second temps, de parer aux effets nocifs des produits utilisés ; que, si la manipulation de produits corrosifs peut être considérée comme délicate, un rinçage à l'eau ne saurait recevoir une telle qualification ; qu'en tout état de cause, eu égard à la nature de l'opération et aux compétences que l'on est en droit d'exiger de spécialistes, soit en l'espèce le Centre technique d'hygiène, la faute lourde ne pouvait être requise ; que, dans l'hypothèse même où une faute lourde serait nécessaire, le responsabilité de l'Etat ne pourrait être écartée ; qu'en effet, les manquements commis dans le cadre des opérations de rinçage constituent une faute manifeste, dont les conséquences ne pouvaient être ignorées ; que la nécessité de procéder à un rinçage soigneux à la suite de l'utilisation de produits nocifs ne pouvait être ignorée, d'autant que les locaux en cause sont destinés à recevoir des animaux et leur nourriture ; que le Tribunal a donc commis une erreur en estimant que la méconnaissance des règles de l'art ne permettait pas de caractériser une faute lourde ;
- il s'en remet à l'évaluation des préjudices qui a été réalisée par l'expert, sous réserve de la production de devis plus récents, s'agissant de la réparation des bâtiments et de deux véhicules, pour un total de 49 433,22 euros hors taxes ; que le responsabilité des services de l'Etat étant clairement établie par le rapport d'expertise, le jugement devra être confirmé en ce qu'il a mis les frais et honoraires de l'expert à la charge de l'Etat ;
Vu le jugement attaqué ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 3 décembre 2008, la clôture de l'instruction a été fixée au 9 janvier 2009 ;
Vu le mémoire, enregistré le 22 décembre 2008, présenté par le ministre de l'agriculture, qui demande à la Cour de rejeter la requête ;
Le ministre soutient que :
- le requérant ne peut utilement soutenir que l'Etat, qui n'a pas produit dans les délais devant le Tribunal, doit être réputé avoir acquiescé aux faits et que le Tribunal n'aurait pas dû faire une autre appréciation de ceux-ci, dès lors que le Centre technique d'hygiène a produit un mémoire en défense, dans lequel les faits étaient parfaitement exposés et conformes à ce que soutient l'Etat ;
- contrairement à ce que soutient le requérant, une faute simple des services vétérinaires ne peut engager la responsabilité de l'Etat, compte tenu des difficultés particulières des mesures prises par ces services dans le cadre de la lutte contre la fièvre aphteuse, compte tenu de la gravité de la situation, de l'urgence à enrayer le développement et à poursuivre l'extinction de cette maladie contagieuse et des difficultés propres à cette épizootie ; que la fièvre aphteuse est une maladie hautement contagieuse, qui touche toutes les espèces de ruminants et de porcins, qui se transmet entre les animaux par le vent, les produits d'origine animale, ou par des vecteurs inanimés ; que le virus est par ailleurs extrêmement résistant et la diffusion de la maladie peut être foudroyante ; que la France avait fortement à craindre le développement d'une épizootie sur son territoire ; qu'un tel contexte justifie que seule une faute lourde soit susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat ; que, d'ailleurs, quand les services vétérinaires sont confrontés à des activités complexes, telles que la lutte contre les maladies contagieuses, seule une faute lourde peut permettre d'engager la responsabilité de l'Etat ; que la fièvre aphteuse figure sur la liste des maladies réputées contagieuses qui donnent lieu à l'application de mesures de police sanitaire, notamment de désinfection ; que le directeur départemental des services vétérinaires a confié la mission de désinfection au Centre technique d'hygiène, qui bénéficie d'une expérience de 18 ans en matière d'hygiène dans l'élevage et dispose de matériels adaptés et de personnels qualifiés ; que les produits qui ont été utilisés, conformes à la réglementation, contenaient des agents anti-corrosion et exigeaient un rinçage à l'eau potable et une utilisation précautionneuse sur les métaux légers ou colorés ; que les services vétérinaires n'avaient aucune raison de penser que ledit centre n'effectuerait pas un rinçage suffisamment rigoureux, ne permettant pas d'éliminer totalement les substances corrosives ; que c'est donc à bon droit que le Tribunal a jugé que cette carence ne saurait caractériser l'existence d'une faute lourde susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat ; que, contrairement à ce que soutient M. A, une telle carence ne constitue même pas une faute simple ; qu'en effet, même un rinçage abondant ne permet pas d'éliminer la totalité des agents agressifs et donc d'éviter un phénomène de corrosion ; que, d'autre part, le préjudice subi par l'intéressé est mineur, car seulement d'ordre esthétique ; qu'enfin, il ressort du rapport d'expertise qu'une corrosion préexistait, du fait de la présence de fourrage et d'animaux et de l'absence d'entretien des charpentes métalliques ; qu'ainsi, aucune faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat n'est démontrée ;
- contrairement à ce que soutient M. A, l'expert n'a pas chiffré le préjudice à la somme de 49 433,22 euros hors taxes ; que, dès lors que l'expert ne considère pas que la mise en peinture du plafond en aluminium est nécessaire, le coût doit être largement minoré ; que, s'agissant des véhicules, aucun élément ne justifie de retenir les devis les plus élevés, comme le fait le requérant, et non l'expert ; qu'en outre, ce dernier précise que, du fait de l'ancienneté des véhicules et de leur utilisation, une certaine vétusté doit être retenue ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 29 décembre 2008, la clôture de l'instruction a été reportée au 28 janvier 2009 ;
Vu le mémoire, enregistré le 9 janvier 2009, présenté pour le Centre technique d'hygiène, qui demande à la Cour de confirmer le jugement attaqué en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a mis hors de cause ;
Le Centre technique d'hygiène soutient que M. A ne formule aucune réclamation à son encontre ; que, par ailleurs, le Tribunal a estimé que les fautes qu'il a pu commettre dans le cadre de la mission de police sanitaire exclusivement dévolue à l'Etat ne peuvent engager que la seule responsabilité de ce dernier ;
Vu le mémoire, enregistré le 28 janvier 2009, présenté pour M. A, tendant aux mêmes fins que précédemment et, en outre, à la condamnation de l'Etat à réparer le préjudice résultant des dépenses supplémentaires qu'il a dû engager pour réparer le camion Iveco, outre intérêts au taux légal ;
Le requérant soutient en outre que :
- si le ministre fait valoir que le Centre technique d'hygiène a produit dans les délais un mémoire en défense devant le tribunal, l'Etat et ce centre constituent toutefois deux entités distinctes ; que seul l'Etat a invoqué la nécessité de démontrer l'existence d'une faute lourde, argumentation que le Tribunal a retenue ; qu'ainsi, ce dernier n'a pas respecté le principe du contradictoire, en ne le mettant pas à même de discuter cette argumentation retenue par le jugement ; que, de plus, il ne pouvait même pas user de la possibilité de présenter une note en délibéré, les conclusions du commissaire du gouvernement lui étant favorables et ne faisant pas référence à la faute lourde ;
- la désinfection des bâtiments ne présente pas les mêmes difficultés que le traitement d'êtres vivants ; qu'il n'y avait aucune urgence à désinfecter, d'autant que les prélèvements sanguins effectués se sont révélés négatifs ; qu'aucun agent de la direction des services vétérinaires n'était présent pour surveiller les opérations de nettoyage ; que la situation dans laquelle il se trouvait ne présentait pas de difficulté et d'urgence justifiant le recours à un régime de responsabilité pour faute lourde ;
- les conclusions de l'expert qui a été mandaté par la compagnie d'assurance du Centre technique d'hygiène ne peuvent être prises en compte ; que l'expert qui a été mandaté par le Tribunal n'a jamais indiqué que les dommages étaient antérieurs à la désinfection, ayant simplement rappelé l'obligation d'entretien qui incombe au propriétaire ; qu'il ne saurait être soutenu que les préjudices ne sont que d'ordre esthétique, la corrosion ayant évolué avec le temps et l'intégralité des structures internes des bâtiments ayant besoin d'être remplacée ; que la carrosserie du camion Iveco a été entièrement refaite, étant devenue très dangereuse pour le transport des animaux ; que les frais engagés pour réparer ce camion devront être pris en compte tels qu'il les a réglés ; qu'il a dû vendre la bétaillère, le montant des réparations étant trop élevé ; que l'état de dégradation a entraîné une très forte dévaluation pour la reprise ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 6 février 2009, la clôture de l'instruction a été rouverte ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 31 mars 2009, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 avril 2009 ;
Vu le mémoire, enregistré le 23 avril 2009, présenté par le ministre de l'agriculture, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
Le ministre soutient en outre que :
- le Tribunal n'a fait qu'appliquer la jurisprudence sur la faute lourde sur l'activité des services de l'Etat en matière sanitaire, sans avoir besoin de se référer à son mémoire non communiqué ; que le jugement n'est donc pas irrégulier ;
- la désinfection des bâtiments et des véhicules constitue une opération indispensable pour parvenir à l'éradication de l'épizootie ; que cette opération devait intervenir dans les plus brefs délais après l'abattage des animaux, compte tenu de la nature du virus, qui se propage rapidement et est difficilement détectable ; qu'en outre, l'opération de désinfection des bâtiments et des véhicules est délicate et complexe, du fait du caractère résistant du virus de la fièvre aphteuse ;
- le requérant ne peut soutenir que les conclusions du rapport du cabinet Constantin ne peuvent être retenues, ces conclusions étant expressément citées par l'expert judiciaire ; qu'il n'appartient pas à l'Etat de pallier les négligences du propriétaire et de financer une remise à neuf des biens ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 24 avril 2009, la clôture de l'instruction a été reportée au 20 mai 2009 ;
Vu le mémoire, enregistré le 19 mai 2009, présenté pour M. A, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
Le requérant soutient en outre que :
- la méthode qui a été choisie par l'Etat, consistant à abattre, par facilité, un maximum d'animaux, montre bien l'absence de difficulté pour les services de l'Etat, qui sont intervenus sans rechercher véritablement l'existence de foyers d'infection ; qu'en outre, seul le rinçage a échoué en l'espèce, ce sur quoi l'Etat ne revient jamais ;
- contrairement à ce que soutient le ministre en défense, l'expert judiciaire ne fait pas siennes les conclusions du CEBTP et du cabinet Constantin ; que ses biens étaient parfaitement entretenus ; que le préjudice n'a été qualifié d'esthétique que s'agissant de la toiture, et non du reste des équipements ; que le préjudice s'aggrave, la corrosion gagnant nécessairement du terrain ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu le décret 91-1318 du 27 décembre 1991 relatif à la lutte contre la fièvre aphteuse ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 2009 :
- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;
- les observations de Me Coulombeau, avocat du Centre technique d'hygiène ;
- les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;
- la parole ayant à nouveau été donnée à la partie présente ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant, en premier lieu, qu'en estimant que seule une faute lourde peut engager la responsabilité de l'Etat, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a appliqué les règles qui, selon lui, doivent en l'espèce présider à la mise en cause de la responsabilité de l'Etat, mais ne s'est pas fondé sur des éléments seulement invoqués par le préfet de l'Allier dans un mémoire qui n'a pas été communiqué à M. A, car produit après la date de clôture automatique de l'instruction, fixée en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative, trois jours francs avant l'audience ; que, par suite, le requérant ne peut soutenir que le Tribunal a méconnu le principe du contradictoire ;
Considérant, en deuxième lieu, que M. A ne peut utilement faire valoir qu'il a été privé de la possibilité de produire une note en délibéré en raison du fait que, lors de l'audience publique, le commissaire du gouvernement aurait prononcé des conclusions favorables à ses intérêts ;
Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'art R. 612-6 du code de justice administrative : Si malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant ; que, malgré la mise en demeure qui lui a été adressée en application de ces dispositions, le préfet de l'Allier n'a pas produit de mémoire en défense avant la date susindiquée de clôture automatique de l'instruction ; que, toutefois, cette circonstance ne dispensait pas le Tribunal de tenir compte des écritures en défense produites avant cette date par le Centre technique d'hygiène, dont la responsabilité était également recherchée en première instance par M. A, ainsi que des pièces produites avant cette même date ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier de première instance que le Tribunal aurait statué en se fondant sur des faits exposés ou sur des pièces produites par le préfet seulement après la date de clôture d'instruction ; que, dès lors, M. A n'est pas fondé à soutenir que les dispositions précitées ont été méconnues par le Tribunal ;
Sur la responsabilité :
En ce qui concerne la faute :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 221-1 du code rural : Suivant les modalités prévues par un arrêté conjoint du ministre chargé de l'agriculture et du ministre chargé de l'économie et des finances, le ministre chargé de l'agriculture peut prendre toutes mesures destinées à prévenir l'apparition, à enrayer le développement et à poursuivre l'extinction des maladies des animaux réputées contagieuses, en vertu du présent titre (...) ; qu'aux termes de l'article L. 223-8 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : Après la constatation de la maladie, le préfet statue sur les mesures à mettre en exécution dans le cas particulier. / Il prend, s'il est nécessaire, un arrêté portant déclaration d'infection remplaçant éventuellement un arrêté de mise sous surveillance. / Cette déclaration peut entraîner, dans le périmètre qu'elle détermine, l'application des mesures suivantes : / (...) 5° La désinfection des écuries, étables, voitures ou autres moyens de transport, la désinfection ou même la destruction des objets à l'usage des animaux malades ou qui ont été souillés par eux, et généralement des objets quelconque pouvant servir de véhicules à la contagion (...) ; qu'aux termes des dispositions alors en vigueur de l'article 13 du décret susvisé du 27 décembre 1991 : A l'égard de l'exploitation hébergeant l'animal reconnu infecté, la déclaration d'infection entraîne la mise en oeuvre ou le maintien des mesures mentionnées aux articles 7 et 8 du présent décret. En outre, l'exploitation est soumise dans les plus brefs délais, sous le contrôle du directeur des services vétérinaires, aux mesures suivantes : / (...) 4° Les locaux et leurs abords sont désinfectés, tout objet ou toute matière qui ne peut pas être désinfecté est détruit ou enfoui sur l'exploitation elle-même ou sur un autre terrain réquisitionnés en vertu de l'article 237 du code rural (...) ;
Considérant qu'à la suite de l'épizootie de fièvre aphteuse qui s'est déclarée en Grande-Bretagne le 20 février 2001, dans le cadre des mesures prises pour éviter la propagation de la maladie sur le territoire français, le ministre de l'agriculture, par instruction du 27 février 2001, a demandé aux services vétérinaires d'abattre et de détruire préventivement tous les ovins vivants en provenance du Royaume-Uni ou dont l'origine ne pouvait être déterminée avec certitude introduits en France après le 31 janvier 2001 ; que, par instruction du 28 février 2001, le ministre a également demandé aux services vétérinaires de procéder à l'abattage préventif et à la destruction des animaux des espèces sensibles en contact avec les ovins importés du Royaume-Uni ; qu'en application de ces instructions, le préfet de l'Allier a fait procéder à l'abattage d'animaux appartenant à M. A ; qu'ensuite, le 15 mars 2001, à la demande des services vétérinaires de ce département, le Centre technique d'hygiène est intervenu sur l'exploitation de M. A pour désinfecter les bâtiments d'élevage, ainsi que deux véhicules appartenant à ce dernier ; que M. A, qui soutient que cette mission de désinfection a été réalisée dans des conditions fautives, sollicite la condamnation de l'Etat à en réparer les conséquences dommageables ;
Considérant qu'eu égard aux difficultés particulières que présentent les mesures prises par les services vétérinaires de l'Etat dans le cadre de la police sanitaire et dans l'intérêt de la protection de la santé publique en vue d'assurer l'exécution d'un arrêté portant déclaration d'infection et compte tenu de l'urgente nécessité d'éviter la propagation de l'épizootie, la responsabilité de l'Etat n'est susceptible d'être engagée qu'en cas de la faute lourde ; que, contrairement à ce que soutient M. A, les opérations de désinfection, destinées elles-mêmes à éviter la propagation de la fièvre aphteuse, présentaient un caractère d'urgence, compte tenu de la suspicion de contamination du troupeau ; que, si, à cet égard, le requérant fait valoir qu'en définitive, les tests effectués sur ses animaux se sont avérés négatifs, en tout état de cause, il n'établit pas la date à laquelle ces résultats ont été connus ; que, par ailleurs, compte tenu du contexte général, notamment caractérisé par l'urgence, dans lequel les opérations de désinfection ont été réalisées, contrairement à ce que soutient également le requérant, il n'y a pas lieu de distinguer entre les différentes phases de ces opérations pour caractériser la gravité de la faute susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat ;
Considérant toutefois qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert qui a été désigné par le Tribunal, que les locaux et les deux véhicules appartenant à M. A qui ont fait l'objet de mesures de désinfection n'ont pas été rincés avec suffisamment de précaution, alors pourtant que les produits utilisés pour la désinfection, fortement corrosifs, impliquaient un rinçage abondant après application, afin d'éviter une corrosion ultérieure des parties métalliques ; que, si le ministre de l'agriculture fait valoir que même un rinçage abondant n'aurait pas permis d'éliminer la totalité des agents agressifs et d'éviter un phénomène de corrosion, du fait de l'accumulation des produits utilisés en certains points particuliers, tels par exemple que les angles, ledit rapport d'expertise fait apparaître que la corrosion n'affecte pas seulement des points particuliers, mais l'ensemble des surfaces qui ont fait l'objet d'une désinfection ; que, dans ces conditions, M. A est fondé à soutenir que le Centre technique d'hygiène, que l'administration présente elle-même comme un professionnel compétent en matière de désinfection et qui ne pouvait ignorer les précautions à prendre, a commis une faute lourde ; que, même si aucune faute des services vétérinaires, qui n'avaient pas à assurer une surveillance particulière des opérations de désinfection, n'est démontrée, l'Etat, à la demande duquel le Centre technique d'hygiène est intervenu, dans un cadre général de police sanitaire et de mise en oeuvre de prérogatives de puissance publique, doit répondre de cette faute lourde ;
En ce qui concerne les préjudices :
Considérant, en premier lieu, que l'expert qui a été désigné par le Tribunal a évalué le coût du nettoyage, du dérochage et de la peinture des plafonds en aluminium des bâtiments à la somme globale de 23 895 euros HT et le coût de remise en état des structures métalliques, comprenant le décapage et la peinture de ces structures, à la somme de 18 120 euros HT ; que, cependant, alors que le ministre de l'agriculture fait valoir que l'expert a estimé que la peinture des plafonds en aluminium n'est en réalité pas nécessaire, et présenterait même quelques inconvénients, M. A n'apporte aucun élément pour démontrer l'utilité de ces travaux ; que le coût de la peinture des plafonds, que l'instruction ne permet toutefois pas précisément de déterminer, doit donc être déduit de ladite somme de 23 895 euros HT ; qu'à l'inverse, si le ministre, en se fondant sur le rapport de l'expert de la compagnie d'assurance du Centre technique d'hygiène, se prévaut d'une corrosion préexistante, il n'apporte aucune précision suffisante à l'appui de ses allégations, dont l'exactitude ne ressort pas du rapport d'expertise judiciaire ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte du rapport d'expertise que la remise en état des deux véhicules appartenant à M. A peut être effectuée pour une somme totale de 5 509 euros HT ; que M. A n'apporte aucun élément pour démontrer qu'il serait nécessaire de réaliser les travaux prévus par des devis plus onéreux ; que si, dans le dernier état de ses écritures, le requérant invoque le fait qu'il a dû engager des frais supplémentaires pour ses deux véhicules, il ne produit aucune pièce justificative à l'appui de ses allégations ; qu'enfin, ainsi que l'expert l'a précisé dans son rapport, il y a lieu d'appliquer un coefficient de vétusté sur le montant des réparations des véhicules, qui doit, dans les circonstances de l'espèce, être fixé à 40 % ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il sera fait une juste appréciation des préjudices subis par M. A en fixant le montant total de ces préjudices à la somme de 30 000 euros HT, tous intérêts compris au jour du présent l'arrêt ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de la décision implicite du préfet de l'Allier rejetant sa demande indemnitaire en tant que, par cette décision, le préfet a refusé de faire droit à cette demande à hauteur de ladite somme de 30 000 euros HT ; qu'à hauteur de cette somme, M. A est également fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal a rejeté sa demande de condamnation de l'Etat ; qu'en conséquence, il y a lieu, dans cette mesure, d'annuler ce jugement et cette décision et de condamner l'Etat à verser à M. A la somme de 30 000 euros HT, tous intérêts compris au jour du présent arrêt ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros au bénéfice de M. A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du 10 juillet 2007 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé en tant que, par ce jugement, le Tribunal a rejeté la demande d'annulation de la décision implicite du préfet de l'Allier rejetant la demande indemnitaire de M. A en tant que, par cette décision, le préfet a refusé de faire droit à cette demande à hauteur de la somme de 30 000 euros HT et en tant qu'à hauteur de cette somme, le Tribunal a rejeté les conclusions indemnitaires de M. A.
Article 2 : La décision par laquelle le préfet de L'allier a rejeté la demande indemnitaire de M. A est annulée en tant que, par cette décision, le préfet a refusé de faire droit à cette demande à hauteur de la somme de 30 000 euros HT.
Article 3 : L'Etat est condamné à verser à M. A la somme de 30 000 euros HT, tous intérêts compris au jour du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à M. A une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Serge A, au Centre technique d'hygiène et au ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Délibéré après l'audience du 8 décembre 2009 à laquelle siégeaient :
M. Fontbonne, président de la formation de jugement,
M. Chenevey et Mme Chevalier-Aubert, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 22 décembre 2009.
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N° 07LY02147