- Y... Mohamed,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction du tribunal supérieur d'appel de MAMOUDZOU, en date du 4 octobre 2007, qui, dans l'information suivie contre lui, du chef de trafic d'influence, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 20 novembre 2007, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit et les observations complémentaires présentées ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, préliminaire,427,485,591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble le principe de loyauté de la preuve, violation de la loi, défaut de motifs, défaut de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a débouté Mohamed Y...de sa requête en annulation d'actes et de pièces de la procédure et renvoyé le dossier en l'état devant le magistrat instructeur chargé de la procédure ;
" aux motifs qu'il ressort de l'instruction que seul Jean Z...est à l'origine de la demande d'intervention des forces de gendarmerie afin qu'elles constatent, sur ordre du parquet, les manoeuvres dont il faisait l'objet ; que les forces de l'ordre n'ont fait que constater passivement l'action délictueuse de la personne soupçonnée, de sorte qu'il n'y a pas eu de leur part incitation à commettre cette infraction qui même sans leur intervention, aurait été commise, et qui, en l'espèce, semblait préexister depuis le matin et avait déjà été dénoncée ; que, dans le précédent arrêt rendu le 27 février 2007 par cette même chambre de l'instruction, il avait été relevé " très subsidiairement, et pour répondre aux moyens figurant dans le mémoire établi et remis par la défense, que la gendarmerie nationale n'a établi aucun stratagème afin de provoquer la commission d'un délit, mais n'a fait que constater le délit qui devait se commettre, et d'en réunir les preuves " ; que le principe de loyauté n'a pas été méconnu quand l'intervention des forces de l'ordre a eu pour seul effet de permettre la constatation d'une infraction et, en l'espèce, ces forces de l'ordre n'ont pas déterminé Mohamed Y...à commettre l'infraction poursuivie ; que, même sans ces enregistrements vidéo par les forces de l'ordre et la remise des fonds, les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve, et le fait que Mohamed Y...ait été interpellé à la sortie des bureaux du plaignant alors qu'il détenait sur lui les billets de banque dont les numéros avaient été préalablement relevés, semble constituer une autre charge suffisante pour caractériser l'infraction poursuivie ; qu'enfin, si Mohamed Y...soutient qu'il n'avait aucun pouvoir de décision, il convient de relever que le texte visant les poursuites fait état d " abus d'influence réelle " mais également " supposée ", d'autant que nul n'ignore l'importance de la personne qui prépare un dossier technique et l'expose ensuite pour délibération ;
" alors, de première part, que l'assistance active d'un agent de l'autorité publique à la provocation à la commission d'une infraction rend nuls les actes de procédure qui lui sont consécutifs ; qu'en constatant, d'un côté, qu'une fois informés des faits imputés à Mohamed Y...par Jean Z..., les gendarmes ont accepté de participer à l'organisation du rendez-vous donné par le second au premier, qu'ils ont pris part au relevé des numéros des billets de banque devant être remis à Mohamed Y...et qu'ils ont procédé à l'installation d'une caméra de vidéosurveillance sur le lieu du rendez-vous et, de l'autre côté, que les forces de l'ordre n'ont fait que constater passivement l'action délictueuse de la personne soupçonnée, de sorte qu'il n'y a pas eu de leur part incitation à commettre cette infraction, la chambre de l'instruction s'est prononcée par des motifs contradictoires quant à la participation des gendarmes à la commission de l'infraction ;
" alors, de deuxième part, que la provocation est caractérisée dès lors qu'elle est antérieure à la commission de l'infraction et qu'elle en est le facteur déclenchant ; qu'en constatant que Jean Z...a lui-même organisé un rendez-vous avec Mohamed Y...et a impliqué les forces de gendarmerie dans l'organisation de cette rencontre en leur faisant relever les numéros des billets de banque et en leur faisant filmer l'entrevue, de sorte que ceux-ci n'ont plus eu qu'à interpeller Mohamed Y...portant des billets précédemment identifiés, la chambre de l'instruction a fait ressortir que l'interpellation de Mohamed Y...avait procédé d'une machination de nature à déterminer les agissements délictueux et que, par ce stratagème, qui a vicié la recherche et l'établissement de la vérité, il a été porté atteinte au principe de la loyauté des preuves ; qu'en retenant néanmoins que les forces de l'ordre n'ont fait que constater passivement l'action délictueuse de la personne soupçonnée de sorte qu'il n'y a pas eu de leur part incitation à commettre une infraction, la cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations ;
" alors, de troisième part, que la provocation à la commission d'une infraction rend nuls les actes de procédures qui lui sont consécutifs dès lors qu'elle émane d'un agent de l'autorité publique ou d'un intermédiaire, non dépositaire de l'autorité publique ; qu'en se bornant à relever que seul Jean Z...est à l'origine de l'intervention des forces de gendarmerie sans rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si Jean Z...n'avait pas provoqué la commission de l'infraction en tant qu'intermédiaire, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, le 12 février 2007, Mohamed Y..., directeur général adjoint des services du conseil général de Mayotte, chargé du développement, a demandé à Jean Z..., qui avait déposé un dossier de projet de parc de loisirs à Mamoudzou, de se rendre au conseil général pour se faire remettre un accusé de réception de ce dossier ; que, selon Jean Z..., au cours de l'entretien qui a suivi, Mohamed Y...lui aurait dit qu'il fallait verser de l'argent pour que le dossier aboutisse ; que, le même jour, Jean Z...a porté plainte à la gendarmerie et, dans le même temps, a fixé un rendez-vous, le soir-même, à Mohamed Y...pour lui remettre l'argent demandé au siège de sa société après avoir relevé les numéros des billets de banque devant être utilisés ; qu'informés de ce rendez-vous, les gendarmes ont constaté la remise des fonds et interpellé Mohamed Y..., porteur de cinq mille euros en billets dont les numéros correspondaient à ceux précédemment relevés ;
Attendu que Mohamed Y..., mis en examen du chef de trafic d'influence, a demandé l'annulation de toutes les pièces de la procédure en soutenant que les enquêteurs et Jean Z...avaient mis en scène un stratagème pour le piéger en le conduisant à commettre un délit ;
Attendu que, pour écarter cette argumentation, l'arrêt attaqué retient que l'intervention des gendarmes a eu pour seul effet de permettre la constatation d'une infraction dénoncée par le plaignant et dont ils n'ont pas déterminé la commission ;
Attendu qu'en cet état, l'arrêt n'encourt pas les griefs du moyen, lequel doit, dès lors, être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Le Gall conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Arnould conseiller rapporteur, Mme Chanet, M. Pelletier, Mmes Ponroy, Koering-Joulin, MM. Corneloup, Pometan conseillers de la chambre, Mme Caron conseiller référendaire ;
Avocat général : M. Finielz ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;