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25/03/2009 | FRANCE | N°07-45686

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 mars 2009, 07-45686


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 26 octobre 2007), que M. X... a été engagé le 25 octobre 2002, par la société Main sécurité, en qualité d'agent d'exploitation ; qu'il a été licencié par lettre du 3 mars 2006 au motif que la préfecture du Val-de-Marne avait informé l'employeur qu'il ne remplissait plus les conditions de la loi du 12 juillet 1983 pour exercer la profession d'agent de sécurité ; que le salarié a saisi le conseil de prud'homme d'une demande d'indemnité

pour licenciement abusif et la juridiction administrative d'une contestation de...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 26 octobre 2007), que M. X... a été engagé le 25 octobre 2002, par la société Main sécurité, en qualité d'agent d'exploitation ; qu'il a été licencié par lettre du 3 mars 2006 au motif que la préfecture du Val-de-Marne avait informé l'employeur qu'il ne remplissait plus les conditions de la loi du 12 juillet 1983 pour exercer la profession d'agent de sécurité ; que le salarié a saisi le conseil de prud'homme d'une demande d'indemnité pour licenciement abusif et la juridiction administrative d'une contestation de la décision de retrait d'agrément ; que par acte du 3 octobre 2006, le préfet du Val-de-Marne a décidé de revenir sur sa décision de retrait d'agrément et d'autoriser le salarié à exercer sa profession dans le domaine de la sécurité privée ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement du salarié était sans cause réelle et sérieuse et de l'avoir condamné au paiement de certaines sommes, alors, selon le moyen :

1° / que le retrait de l'agrément administratif donné à un salarié, agent d'exploitation, exerçant sa fonction au sein d'une entreprise de sécurité, impose à l'employeur, conformément aux prescriptions de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983, de licencier sans délai celui-ci et constitue un cas de force majeure privatif de toute indemnité pour le salarié ; que l'annulation ultérieure par la préfecture de la décision administrative de retrait d'agrément, également constitutive de force majeure, ne peut ni remettre en cause la rupture du contrat ni faire supporter à l'employeur les conséquences financières du licenciement ; qu'en décidant que l'annulation par l'administration elle-même de sa précédente décision de retrait d'agrément, avait pu priver de cause réelle et sérieuse le licenciement régulièrement prononcé par suite de retrait d'agrément initial, quand pourtant tant le retrait de l'agrément que son annulation ultérieure par la préfecture constituaient un cas de force majeure, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé l'article L. 122-14-3 du code du travail, les articles 1147 et 1148 du code civil, ainsi que les articles 5 et 6 de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 ;

2° / que la cause réelle et sérieuse du licenciement s'apprécie à la date de celui-ci ; qu'en l'espèce, M. X... a été licencié le 3 mars 2006, suite au retrait de son agrément par la préfecture du Val-de-Marne ; qu'en se fondant sur une décision postérieure de la préfecture, en date du 3 octobre 2006, annulant le retrait de l'agrément, pour considérer que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-3 du code du travail ;

Mais attendu, d'abord, qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des pièces de la procédure, que l'employeur avait invoqué devant la cour d'appel que le retrait de l'agrément et son annulation ultérieure constituaient un cas de force majeure ;

Attendu, ensuite, qu'eu égard à l'effet rétroactif que comporte une décision de l'autorité administrative rapportant un acte antérieur, la décision du préfet du Val-de-Marne en date du 3 octobre 2006 a conféré au salarié un droit définitivement acquis à être réputé n'avoir jamais perdu l'agrément nécessaire à l'exercice des fonctions d'agent de sécurité ; que, se plaçant au jour du licenciement, la cour d'appel, qui a constaté que, sur recours exercé par le salarié, la décision de retrait avait été annulée, en a exactement déduit qu'il ne reposait sur aucune cause réelle et sérieuse ;

D'où il suit que le moyen, nouveau et irrecevable en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Main sécurité aux dépens ;

Vu les articles 700 du code de procédure civile, 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Main sécurité à payer à la SCP Ancel et Couturier-Heller la somme de 2 500 euros à charge pour elle de renoncer à la part contributive de l'Etat ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP GATINEAU et FATTACCINI, avocat aux Conseils pour la société Main sécurité

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X... est sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la société MAIN SECURITE à payer à Monsieur X... la somme de 8. 000 euros à titre de dommagesintérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que celle de 1. 200 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et d'AVOIR ordonné à la société MAIN SECURITE de rembourser à l'ASSEDIC les prestations chômage versées au salarié dans la limite de deux mois ;

AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement du 3 mars 2006 qui fixe le cadre du litige est rédigée de la façon suivante : " Envisageant de prendre à votre égard une mesure de licenciement, nous vous avons convoqué pour un entretien préalable portant sur cette éventuelle mesure le 1er mars 2006.
Vous vous êtes présenté seul ; nous vous avons exposé la situation :
Par courrier du 13 février 2006, la Préfecture du Val de Marne nous a indiqué que vous ne remplissiez plus les conditions de l'article 6 de la loi du 12 / 07 / 1983 pour pouvoir exercer dans notre secteur d'activité et dans notre entreprise.
En application des articles 6 et 18 de ladite loi, vous ne pouvez plus être employé au sein de notre entreprise.
C'est pourquoi, nous sommes contraints de procéder à votre licenciement qui interviendra à première présentation de ce courrier et après observation de votre préavis conventionnel dont vous serez dispensé " ;
que par lettre du 13 février 2006, la Préfecture du Val de Marne a informé la société MAIN SECURITE que Julien X... ne remplissait plus les conditions requises pour exercer la profession d'agent de sécurité et l'a invitée à en tirer toutes les conséquences de droit ; qu'en cas de retrait d'agrément, la convention collective précise que le salarié ne peut être maintenu sur son poste " ce qui pourrait entraîner la rupture de " son " contrat de travail " ; qu'en l'espèce, le Préfet du Val de Marne est revenu par lettre du 3 octobre 2006 sur sa décision de retrait d'agrément du 13 février 2006 ; que cette nouvelle décision a un effet rétroactif de telle sorte que le licenciement qui en découle est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'en effet, le licenciement s'appuyait sur la décision préfectorale du 13 février 2006 qui a été anéantie rétroactivement ; que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ; que compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, de son ancienneté dans l'entreprise et de l'effectif de celle-ci, la Cour estime que le préjudice de Julien X... sera équitablement réparé par le versement d'une somme de 8 000 ; que le salarié ayant plus de deux ans d'ancienneté et l'entreprise occupant habituellement au moins onze salariés, il convient d'ordonner le remboursement par l'employeur des indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement dans la limite de deux mois en application des dispositions de l'article L 122-14-4 du code du travail ;

1) ALORS QUE le retrait de l'agrément administratif donné à un salarié, agent d'exploitation, exerçant sa fonction au sein d'une entreprise de sécurité, impose à l'employeur, conformément aux prescriptions de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983, de licencier sans délai celui-ci et constitue un cas de force majeure privatif de toute indemnité pour le salarié ; que l'annulation ultérieure par la préfecture de la décision administrative de retrait d'agrément, également constitutive de force majeure, ne peut ni remettre en cause la rupture du contrat ni faire supporter à l'employeur les conséquences financières du licenciement ; qu'en décidant que l'annulation par l'administration elle-même de sa précédente décision de retrait d'agrément, avait pu priver de cause réelle et sérieuse le licenciement régulièrement prononcé par suite de retrait d'agrément initial, quand pourtant tant le retrait de l'agrément que son annulation ultérieure par la Préfecture constituaient un cas de force majeure, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé l'article L 122-14-3 du Code du travail, les articles 1147 et 1148 du Code civil, ainsi que les articles 5 et 6 de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 ;

2) ALORS QUE la cause réelle et sérieuse du licenciement s'apprécie à la date de celui-ci ; qu'en l'espèce, Monsieur X... a été licencié le 3 mars 2006, suite au retrait de son agrément par la Préfecture du VAL DE MARNE ; qu'en se fondant sur une décision postérieure de la Préfecture, en date du 3 octobre 2006, annulant le retrait de l'agrément, pour considérer que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel a violé L 122-14-3 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-45686
Date de la décision : 25/03/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Défaut - Applications diverses - Salarié soumis à un agrément administratif - Retrait de l'agrément - Effet rétroactif - Portée

Eu égard à l'effet rétroactif que comporte une décision de l'autorité administrative rapportant un acte antérieur, la décision du préfet de revenir sur sa précédente décision de retrait d'agrément et d'autoriser le salarié à exercer sa profession dans le domaine de la sécurité privée a conféré à ce dernier un droit définitivement acquis à être réputé n'avoir jamais perdu l'agrément nécessaire à l'exercice des fonctions d'agent de sécurité. Fait une exacte application de la loi la cour d'appel qui, se plaçant au jour du licenciement, a constaté que, sur recours exercé par le salarié, la décision de retrait ayant été annulée, le licenciement ne reposait sur aucune cause réelle et sérieuse


Références :

article L. 122-14-3, alinéa 1er, phase 1, devenu L. 1231-1 du code du travail

articles 1147 et 1148 du code civil

articles 5 et 6 de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983
article L. 122-14-3, alinéa 1er, phase 1, devenu L. 1231-1 du code du travail

articles 1147 et 1148 du code civil

articles 5 et 6 de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 26 octobre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 mar. 2009, pourvoi n°07-45686, Bull. civ. 2009, V, n° 86
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, V, n° 86

Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Aldigé
Rapporteur ?: M. Flores
Avocat(s) : SCP Ancel et Couturier-Heller, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.45686
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