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19/06/2007 | FRANCE | N°06-88165

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 juin 2007, 06-88165


N° 3772
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf juin deux mille sept, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller LE CORROLLER, les observations de Me X..., de la société civile professionnelleCHOUCROY, GADIOU et CHEVALLIER et de la société civileprofessionnelle THOMAS-RAQUIN et BÉNABENT, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général BOCCON-GIBOD ;

REJET du pourvoi formé par Y... Blaise, la société Eropol finance et développement, parties civiles, contre l'arrÃ

ªt de la cour d'appel de Paris, 13e chambre, en date du 27 septembre 2006,...

N° 3772
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf juin deux mille sept, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller LE CORROLLER, les observations de Me X..., de la société civile professionnelleCHOUCROY, GADIOU et CHEVALLIER et de la société civileprofessionnelle THOMAS-RAQUIN et BÉNABENT, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général BOCCON-GIBOD ;

REJET du pourvoi formé par Y... Blaise, la société Eropol finance et développement, parties civiles, contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 13e chambre, en date du 27 septembre 2006, qui s'est déclarée incompétente pour connaître de la procédure suivie contre Ingemar Z... du chef de contrefaçon de brevet ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 113-2, 113-7 du code pénal, L. 615-14 du code de la propriété intellectuelle, 591 et 593 du code de procédure pénale :
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la juridiction correctionnelle française incompétente pour statuer sur les faits de contrefaçon de brevet reprochés à Ingemar Z... ;
"aux motifs que, pour que la loi pénale française s'applique et que les juridictions françaises soient compétentes, il faudrait que les faits dénoncés soient susceptibles de constituer l'infraction prévue par les articles L. 613-3 et L. 615-4 du code de la propriété intellectuelle ; que les faits consistaient à avoir, en Suède, participé à la commercialisation de produits directement obtenus à partir d'un procédé, objet d'un brevet, et fabriqué et utilisé partie des éléments couverts par ce brevet, en l'occurrence un brevet européen désignant la Suède mais non la France ; qu'à les supposer établis, ces faits ne pouvaient être un élément constitutif d'une infraction prévue par la législation française et punissable en France, l'attribution de compétence à la juridiction française impliquant l'application de la loi française ; que la législation sur les brevets était territoriale et que la protection n'était acquise qu'à l'intérieur des frontières de l'Etat l'ayant reconnue ; que non seulement la France n'avait pas été désignée par le brevet européen, mais aucun acte poursuivi n'avait été accompli sur le territoire français ; que contrefaire un brevet était violer un titre juridique délivré par un Etat pour son territoire et conférant à son titulaire un droit de propriété sur un territoire donné ; que la saisine in rem ne visait aucun fait commis en France et aucun titre permettant aux parties civiles d'invoquer une atteinte à leurs droits sur le territoire français ;
"alors, d'une part, que la loi pénale française s'applique à tout délit commis par un étranger hors du territoire français lorsque la victime est de nationalité française au moment de l'infraction, ce qui rend compétente la juridiction française ;
"alors, d'autre part, que l'infraction est réputée commise sur le territoire français, ce qui rend compétent le juge pénal français, dès lors qu'un de ses faits constitutifs a eu lieu sur ce territoire ; qu'en n'ayant pas recherché, comme elle y était invitée, si l'atteinte portée aux droits résultant du brevet ne s'était pas produite en France, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
"alors, enfin, que la contrefaçon d'un brevet d'invention consiste à porter sciemment atteinte aux droits du propriétaire d'un brevet, sans distinguer selon la nationalité du brevet ; qu'en ayant énoncé que la France n'avait pas été désignée par le brevet européen servant de fondement aux poursuites, la cour d'appel a ajouté une condition à la loi" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'Ingemar Z..., de nationalité suédoise, a été renvoyé devant le tribunal correctionnel de Paris, pour avoir, sur le territoire suédois, commercialisé, fabriqué et utilisé des éléments en fraude des droits du titulaire français d'un brevet européen désignant la Suède, faits prévus et réprimés par les articles L. 613-3 et L. 615-14 du code de la propriété intellectuelle ; que le tribunal correctionnel s'est déclaré territorialement incompétent et a renvoyé le ministère public à mieux se pourvoir ;
Attendu que, pour confirmer le jugement , l'arrêt retient que les faits consistent pour le prévenu à avoir, en Suède, participé à la commercialisation de produits obtenus directement à partir d'un procédé objet d'un brevet européen désignant la Suède, et donc produisant ses effets en Suède et non en France ; qu'il ajoute que la législation sur les brevets est territoriale et que la protection n'est acquise qu'à l'intérieur des frontières de l'Etat concerné par cette protection ; que les juges précisent qu'en l'espèce, la France n'est pas désignée par le brevet européen qui sert de fondement aux poursuites et qu'aucun acte n'a été commis sur le territoire français ; qu'ils indiquent que la contrefaçon d'un brevet consiste dans la violation d'un titre juridique délivré par un Etat pour son territoire et conférant à son titulaire un droit de propriété sur ce territoire et que la portée territoriale limitée du brevet en droit français, résultant de sa définition donnée par le code de la propriété intellectuelle, est confirmée par les conventions internationales ; qu'ils en déduisent que la loi pénale française est inapplicable et que les juridictions françaises sont incompétentes ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
DÉCLARE IRRECEVABLE la demande au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale, présentée par la société Eropol Finance et Développement et Blaise Y... ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Cotte président, M. Le Corroller conseiller rapporteur, M. Farge conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 06-88165
Date de la décision : 19/06/2007
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CONTREFAÇON - Brevet d'invention - Compétence - Compétence territoriale - Lieu du délit

CRIMES ET DELITS COMMIS A L'ETRANGER - Délit - Contrefaçon - Brevet d'invention - Compétence - Compétence territoriale - Détermination - Portée

Le délit de contrefaçon de brevet postule qu'existe en France une propriété industrielle à laquelle il porterait atteinte. Justifie, dès lors, sa décision d'incompétence la cour d'appel qui, après avoir constaté que les faits ont été commis en Suède, à partir d'un procédé objet d'un brevet européen désignant la Suède et produisant donc ses effets dans cet Etat et non en France, énonce que la législation sur les brevets est territoriale et que la protection n'est acquise qu'à l'intérieur des frontières de l'Etat concerné par cette protection


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 septembre 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 jui. 2007, pourvoi n°06-88165, Bull. crim. criminel 2007, N° 166
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2007, N° 166

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Boccon-Gibod
Rapporteur ?: M. Le Corroller
Avocat(s) : Me Blanc, SCP Choucroy, Gadiou et Chevallier, SCP Thomas-Raquin et Bénabent

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:06.88165
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