AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. X..., ayant la double nationalité française et ivoirienne, et Mme Y..., de nationalité française, se sont mariés en 1976 en Côte-d'Ivoire ; que l'épouse a assigné son mari en divorce, le 12 septembre 2001, devant le tribunal de grande instance de Bordeaux ; que le mari a déposé une requête en divorce le 17 octobre 2001, devant le tribunal civil d'Abidjian (Côte-d'Ivoire) et soulevé dans la procédure intentée par son épouse l'incompétence de la juridiction française au profit de la juridiction ivoirienne déjà saisie ;
Sur la recevabilité du pourvoi contestée par la défense :
Attendu que Mme X... soutient que l'arrêt qui a statué sur une exception de procédure sans mettre fin à l'instance est irrecevable par application des articles 606 et 608 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel ayant statué sur une exception de litispendance internationale, le pourvoi en cassation est immédiatement recevable ;
Sur le moyen unique :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Bordeaux, 12 février 2003) d'avoir retenu la compétence du juge français pour statuer sur la demande en divorce formée par l'épouse alors, selon le moyen :
1 / que pour déterminer le juge premier saisi, les juges du fond doivent identifier et analyser tous les actes des deux procédures et les situer dans le temps., qu'en se bornant à énoncer que "le fait qu'il ait ensuite engagé une procédure identique en Côte-d'Ivoire ne peut créer une difficulté de litispendance puisque celle-là a été initiée après la procédure bordelaise à l'initiative de l'épouse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des règles régissant l'exception de litispendance internationale ;
2 / que le juge ne peux être considéré comme saisi que si le lien d'instance est crée et que ce lien suppose que la demande ait été portée à la connaissance du défendeur et que celui ci ait été invité à comparaître ; qu'en s'abstenant de chercher à quelle date la requête aux fins de conciliation avait été portée à la connaissance de M. X... et à quelle date il avait été invité à comparaître, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des règles régissant l'exception de litispendance internationale ;
3 / que si l'exception de litispendance internationale ne peut être admise qu'à la condition que la décision étrangère soit ultérieurement susceptible de reconnaissance en France, les articles 14 et 15 du code civil ne font pas échec à la reconnaissance du jugement rendu à l'étranger ; que ces articles ne peuvent donc pas être invoqués pour donner une base légale à la décision, au regard des règles régissant l'exception de litispendance internationale ;
Mais attendu, d'abord, que selon des dispositions de l'article 2.1.b) du Règlement (CE) n° 1347/2000 (Bruxelles II) relatif à la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale des enfants communs, applicable au litige, la juridiction française était compétente en raison de la nationalité française des deux époux ; que par ce motif de pur droit substitué, dans les conditions de l'article 1015 du nouveau code de procédure civile, à celui critiqué par le moyen, l'arrêt se trouve légalement justifié ; qu'ensuite, la cour d'appel, qui n'était saisie d'aucune contestation sur les dates de saisine des deux juridictions, a souverainement estimé que la juridiction française avait été saisie la première ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille six.