AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen, pris en sa première branche, qui est préalable :
Vu l'article 1147 du Code civil, interprété à la lumière de l'article 6 de la directive n° 85-374 du Conseil des Communautés européennes du 25 juillet 1985, alors non encore transposée en droit interne ;
Attendu qu'aux termes du premier des textes susvisés, dès lors qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, le débiteur de l'obligation est responsable de l'inexécution de celle-ci, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part ; que, selon l'interprétation de ce texte,commandée par le second, le producteur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat, est responsable de l'inexécution de cette obligation en cas de dommage causé par son produit lorsqu'au moment où il l'a mis en circulation pour être vendu ou distribué, ce produit n'offrait pas la sécurité à laquelle on pouvait légitimement s'attendre compte tenu de toutes les circonstances, et, notamment, de sa présentation, de l'usage qui pouvait en être raisonnablement attendu et du moment de sa mise en circulation ;
Attendu que Mme X..., ayant présenté le syndrome de la maladie de Guillain-Barré après s'être fait vacciner, en septembre 1995, contre l'hépatite B au moyen du vaccin Genhevac B, fabriqué et mis sur le marché en 1989 par la société Pasteur Vaccins, a assigné celle-ci en réparation de son préjudice ; que l'arrêt attaqué a, sur le fondement de l'article 1147 du Code civil, interprété à la lumière de la directive CE n° 85-374 du 25 juillet 1985, déclaré la société Aventis Pasteur MSD, venant aux droits de la société Pasteur Vaccins, entièrement responsable du dommage subi par Mme X... et l'a condamnée à payer diverses sommes à celle-ci et à la Caisse régionale des artisans et des commerçants de Corse ;
Attendu que, pour décider que le vaccin litigieux était atteint d'un défaut qui ne lui permettait pas d'offrir la sécurité à laquelle on pouvait légitimement s'attendre, l'arrêt retient que le vaccin Genhevac B avait été le facteur déclenchant du syndrome de Guillain-Barré développé par Mme X... et que l'autorisation de mise sur le marché de ce produit, dont l'obtention n'avait pas pour effet d'exonérer le fabricant de sa responsabilité dans les conditions du droit commun, énumérait cette affection au titre des effets indésirables de ce produit, en mentionnant "très rarement, des neuropathies périphériques" ;
Qu'en déduisant le caractère défectueux du vaccin litigieux de ces seules constatations, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 septembre 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu les articles 700 du nouveau Code de procédure civile et 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de la SCP Defrenois et Levis, avocat des époux X... et de leurs enfants mineurs ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le premier président en son audience publique du vingt-quatre janvier deux mille six.