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12/09/2003 | FRANCE | N°1997-4862

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12 septembre 2003, 1997-4862


Par arrêt en date du 23 juin 2000, la cour, statuant sur l'appel formé par la S.N.C. AVENTIS PASTEUR MSD, venant aux droits de la société PASTEUR VACCINS, contre le jugement rendu le 4 avril 1997 par le tribunal de grande instance de NANTERRE à l'occasion des poursuites exercées contre elle par madame Paule COLONA X... épouse Y..., a : - infirmé le jugement déféré, avant dire droit sur la responsabilité, ordonné une expertise et commis pour y procéder : . messieurs les professeurs REMY, SEIZILLES DE MAZANCOURT, Z... et le docteur A..., aux fins, essentiellement, de déterminer le

lien de causalité entre la vaccination par GENHEVAC B ayant é...

Par arrêt en date du 23 juin 2000, la cour, statuant sur l'appel formé par la S.N.C. AVENTIS PASTEUR MSD, venant aux droits de la société PASTEUR VACCINS, contre le jugement rendu le 4 avril 1997 par le tribunal de grande instance de NANTERRE à l'occasion des poursuites exercées contre elle par madame Paule COLONA X... épouse Y..., a : - infirmé le jugement déféré, avant dire droit sur la responsabilité, ordonné une expertise et commis pour y procéder : . messieurs les professeurs REMY, SEIZILLES DE MAZANCOURT, Z... et le docteur A..., aux fins, essentiellement, de déterminer le lien de causalité entre la vaccination par GENHEVAC B ayant été administrée à madame Y... le 30 septembre 1995 et la maladie dont elle restait atteinte, ainsi que les préjudices par elle subis, - sursis à statuer sur les demandes présentées et réservé les dépens. La société AVENTIS PASTEUR MSD prie la cour de : - déclarer nul et de nul effet le rapport d'expertise déposé par le docteur A..., - en conséquence, sauf à ordonner une contre-expertise, statuer ce que de droit sur le rapport d'expertise déposé par les professeurs Z..., REMY et SEIZILLES DE MAZANCOURT, autorisés par le conseiller chargé du contrôle des expertises à déposer un rapport séparé, - constater que madame

Y... n'établit pas la réalité de la vaccination dont elle se prévaut, ne produisant que la photocopie d'un certificat de vaccination dont rien n'établit qu'il la concerne, et la débouter de ses demandes pour ce motif, - à titre subsidiaire, constater que madame Y... n'établit pas l'existence d'un lien de causalité entre la vaccination contre l' hépatite B qu'elle a reçue et la pathologie dont elle est atteinte, et en conséquence, la débouter de toutes ses demandes, - dire les dispositions de l'article L 221-1 du code de la consommation inapplicables et déclarer madame Y... irrecevable en ses demandes de ce chef, - dire les dispositions de la Directive européenne du 25 juillet 1985 inapplicables en l'absence de vaccination contre l'hépatite B, - aucune étude ne permet d'exclure l'existence d'un risque lié à la survenue de maladies neurologiques après ce type de vaccination, - en 1995, les indications reconnues par l'AMM initiale ont été élargies pour s'appliquer non plus aux populations à risques, mais aux populations désignées dans le cadre d'une politique vaccinale nationale, en vue d'une généralisation, mais il n'y a pas eu de nouveau rapport d'expert sur la tolérance du vaccin et le rapport bénéfice/risque, - l'examen de la littérature médicale permet d'affirmer qu'il existe une particularité liée à

l'administration du vaccin de l'hépatite B qui se distingue à la fois par la variété, la gravité et le nombre des effets indésirables, - on recense, au décours de la vaccination, un nombre particulièrement important d'effets indésirables qui doit être apprécié au regard d'une sous-notification négligée, quoiqu'admise par les autorités sanitaires, - le résumé des caractéristiques du produit prévoit expressément un risque de survenue de polyradiculonévrite en lien avec la vaccination, - le SGB ou polyradiculonévrite est imputé à une réaction dysimmunitaire et la vaccination est une réaction immunitaire susceptible de provoquer un phénomène de réaction dysimmunitaire, - aucune étiologie de nature à permettre de rapporter l'accident à une cause non vaccinale n'a été identifiée, - l'A.F.S.S.A.P.S., saisie de son cas, a estimé qu'elle présentait une complication notoire de la vaccination, - l'enquête de pharmacovigilance a entraîné, d'une part, une modification de l'Autorisation de Mise sur le Marché le 3 août 1995, avec référence à la possibilité de survenue de- l'enquête de pharmacovigilance a entraîné, d'une part, une modification de l'Autorisation de Mise sur le Marché le 3 août 1995, avec référence à la possibilité de survenue de polyradiculonévrites, d'autre part une modification, en 1998, du schéma de vaccination ne préconisant plus un rappel systématique

exonération de responsabilité sur le fondement du risque de développement prévu par la Directive précitée, ou de l'aléa thérapeutique ; Mais considérant que le vaccin GENHEVAC B de la société AVENTIS PASTEUR MSD a été en la circonstance le facteur déclenchant du syndrome de GUILLAIN BARRE développé par madame Y..., et que l'AMM de ce produit, dont l'obtention n'a pas pour effet d'exonérer le fabricant de sa responsabilité dans les conditions du droit commun, énumère cette affection au titre des effets indésirables de ce produit ; Qu'il en résulte que la société AVENTIS PASTEUR MSD ne peut faire admettre que madame Y... ne déduit le caractère défectueux du produit que de la seule survenance du dommage ; Que, d'autre part, si le juge national, saisi d'un litige dans une matière entrant dans le domaine d'application d'une Directive européenne, est tenu d'interpréter son droit interne à la lumière du texte et de la finalité de cette Directive avant sa transposition, c'est à la condition que celle-ci soit contraignante pour l'Etat membre et ne lui laisse pas, comme en l'espèce, une faculté d'option pour l'adaptation de son droit national au droit communautaire ;

Considérant qu'il est vrai que l'article 15-1-b de la directive CEE 85-374 du 25 juillet 1985, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres leur réserve la faculté d'introduire ou non dans leur législation interne l'exonération pour risque de développement ; Que cette disposition, non contraignante, ne saurait s'appliquer, compte tenu de la date des faits survenus avant la transposition de la Directive en droit interne, dès lors que le fabricant a l'obligation de livrer un produit exempt de vices et que le vice interne, à le supposer indécelable, ne peut être tenu pour une cause étrangère exonératoire de responsabilité ; Que la vaccination constituant une mesure de prophylaxie et une étape dans la prévention des maladies, défaut objectif du produit, la seule survenance du dommage ne pouvant induire un tel défaut, et, en tout état de cause, déclarer la société AVENTIS PASTEUR MSD bien fondée à se prévaloir de l'exonération de responsabilité du fait du risque de développement, - en cas de reconnaissance de l'existence d'un lien de causalité, dire la société PASTEUR VACCINS bien fondée à se prévaloir d'un aléa thérapeutique, constitué par un risque non maîtrisable en l'état des données acquises de la science, survenu en dehors de toute faute et donc exonératoire de responsabilité, - à titre plus subsidiaire, statuer

sur les seules réclamations de la CAISSE REGIONALE DES ARTISANS ET DES COMMERCANTS DE CORSE, et la débouter de ses demandes relatives au frais futurs, - réduire à de plus justes proportions les demandes présentées par madame Y... et débouter monsieur Y..., tant en son nom propre qu'ès qualités d'administrateur légal des biens de ses enfants Ferdinand et Julien, de l'ensemble de ses réclamations comme présentées pour la première fois devant la cour. La société AVENTIS PASTEUR MSD expose que : - SUR LE RAPPORT D'EXPERTISE DU DOCTEUR A... - le rapport d'expertise du docteur A... est nul, comme entaché de partialité, ce praticien ayant travaillé pendant plusieurs années avec l'un des fabricants du vaccin contre l'hépatite B, la société concurrente GLAXOSMITHKLINE, anciennement GLAXOSMITHKLINE BEECHAM, dont il avait mis en place le service de pharmacovigilance, - le docteur A... est l'auteur de divers articles de presse dans lesquels il a pris position sur la problématique du lien causal éventuel entre la vaccination contre

l'hépatite B et l'apparition de maladies neurologiques, et les effets indésirables du vaccin, - le docteur A... a fait l'objet de plusieurs récusations dans des décisions à ce jour définitives, par suite du rejet de pourvois formés à leur encontre, - il a conduit son expertise à charge, - la cour devra déclarer nul le rapport d'expertise, sur le fondement de accompagnée d'un changement de la politique de vaccination, ainsi que d'une décision de suspension de cette politique dans les établissements scolaires, et, enfin la prise de décisions d'indemnisation en application de l'article L 10 du code de la santé publique. La CAISSE REGIONALE DES ARTISANS ET DES COMMERCANTS DE CORSE sollicite la condamnation de la société AVENTIS PASTEUR MSD à lui payer, par priorité et due concurrence de l'indemnité qui sera mise à la charge du tiers, la somme de 76.693,42 euros, montant de ses débours - provisoires- engagés pour madame Y..., et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la demande et capitalisation desdits intérêts. Au titre d'une demande additionnelle, elle réclame pour les frais futurs

le versement d'une somme annuelle de 10.662,49 euros sur une période de dix ans. Elle demande également la somme de 762,25 euros sur le fondement de l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale et une somme de 1.000,00 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 24 avril 2003. DISCUSSION ET MOTIFS DE LA DECISION Considérant qu'au soutien de sa demande de condamnation présentée devant les premiers juges sur le fondement des articles L 221-1 du code de la consommation et 1147 du code civil à l'encontre de la société PASTEUR VACCINS devenue AVENTIS PASTEUR MSD, madame Y... a fait valoir qu'ayant reçu de son médecin de famille le 30 septembre 1995, après une campagne nationale de sensibilisation à la vaccination contre l'hépatite B, une injection du vaccin GENHEVAC B fabriqué par ladite société, elle avait développé un épisode pseudo-grippal ayant progressé jusqu'à l'apparition, le 13 octobre 1995, d'un état tétraplégique flasque avec évolution rapide et apparition de troubles de la déglutition, dysphonie et dyspnée, et que cet état avait donné lieu à un diagnostic médical de la maladie de GUILLAIN BARRE en liaison avec l'administration du vaccin ; I -

la société appelante ne peut davantage invoquer l'existence d'un aléa thérapeutique susceptible d'entrer dans les prévisions de l'article L 1142-1 du code de la santé publique visant la réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale ; Que la société AVENTIS PASTEUR MSD doit, dès lors, être tenue de réparer l'entier préjudice subi par madame Y... ; 3) SUR LA REPARATION DU DOMMAGE Considérant que madame Y..., née le 25 janvier 1961, a subi une incapacité totale de travail du 30 septembre 1995 au 30 décembre 1998 ; Que la date de consolidation a été fixée par les experts Z..., REMY et DE MAZANCOURT au 31 décembre 1998 ; Que le taux d'incapacité permanente partielle été évalué par ces derniers à 35 %, le pretium doloris à 4/7, le préjudice esthétique (atteinte du releveur du pied) à 2/7 ; Que le préjudice d'agrément a été qualifié de très important ; Que ces mêmes experts ont indiqué que le recours à une tierce personne s'imposait pour les actes de la vie courante et l'aide dans la vie professionnelle ; Considérant que madame Y... et sa famille sollicitent les réparations suivantes : A - DEMANDES DE MADAME Y... . PREJUDICE MATERIEL Considérant que madame Y... fait valoir que demeurant en Corse, elle a dû être hospitalisée sur le continent ; Qu'elle expose qu'elle a engagé des frais de déplacement à hauteur de 770,17 euros, et de 447,74 euros (déplacement d'elle-même et de son

mari, qui devait nécessairement l'accompagner pour l'expertise) ; Qu'elle sollicite également le paiement des frais de séjour de sa famille à l'hôtel pendant son hospitalisation (1.467,02 euros) ; - POSTES DE PREJUDICE SOUMIS AU RECOURS DES ORGANISMES SOCIAUX Considérant que madame Y... ne demande aucune indemnité spécifique pour des frais médicaux ; Considérant, en ce qui concerne l'incapacité totale de travail, que madame Y... fait valoir qu'elle exploite un magasin de prêt à porter à PORTO-VECCHIO depuis 1992, que ce magasin a été fermé l'article 237 du nouveau code de procédure civile et l'article 6 de la CONVENTION EUROPEENNE DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES,

- de surcroît, le docteur A... a excédé sa saisine, - SUR LE FOND ET A TITRE SUBSIDIAIRE - dans le contexte médical ou scientifique de la pharmacovigilance, l'imputabilité est l'appréciation clinique du caractère plus ou moins certain de l'existence d'un lien causal entre la survenue d'un événement chez un malade et la prise d'un médicament chez ce même malade, que ce lien soit exclusif ou partagé, direct ou indirect, - or en matière juridique, la responsabilité d'une personne ne peut être retenue que si le lien de causalité est certain, - la preuve du lien de causalité ne peut se déduire d'une simple probabilité, - cette appréciation découle tant de l'article 1386-9 du code civil que de la loi du 4 mars 2002 et de la position de la Cour de Justice des Communautés Européennes, - il existe une exception limitée en matière de contaminations post-transfusionnelles, - au contraire, la démonstration scientifique d'un lien de causalité entre la

vaccination contre l'hépatite B et les maladies démyélinisantes du système nerveux n'est pas acquise, si bien qu'il est impossible de s'affranchir de l'exigence de rapporter la preuve certaine du lien de causalité en substituant des présomptions, - tel est le cas du syndrome de GUILLAIN BARRE, le juge ne pouvant, par une application stricte de l'article 1353 du code civil, passer d'un fait connu à un fait inconnu, - si elle devait se contenter de présomptions, la cour devrait constater que les indices dont se prévaut madame Y... ne sont ni graves, ni précis, ni concordants, - dans un communiqué du 14 novembre 2002, L'AGENCE FRANCAISE DE SECURITE SANITAIRE DES PRODUITS DE SANTE (A.F.S.S.A.P.S.) a rappelé que les conclusions des données recueillies ne démontraient pas l'existence d'un risque de survenue d'affection démyélinisante associé à la vaccination contre l'hépatite SUR LA PREUVE DE L'ADMINISTRATION DU VACCIN GENHEVAC B Considérant que madame Y... a produit le 22 avril 2003 l'original de son certificat de vaccination ; Que le grief développé par la société AVENTIS PASTEUR MSD, qui reproche à madame Y... de n'avoir produit que la

photocopie d'un certificat n'établissant pas de façon certaine la réalité de la vaccination, n'est pas fondé, et doit, dès lors, être écarté ; II - SUR LES TRAVAUX DU DOCTEUR A... Considérant que la société AVENTIS PASTEUR MSD fait observer à juste titre que le docteur A... a tenu à son égard des propos manquant d'objectivité et de prudence, en affirmant, notamment, qu'elle entendait dissimuler des données à la justice, qu'elle s'exprimait avec une volonté d'intimidation scientifique, et en laissant entendre qu'elle restait "regrettablement opaque" quant aux liens entretenus avec les autres experts judiciaires désignés ; Qu'en raison de ces propos, qui traduisent la partialité du docteur A... au sens de l'article 6.1 de la CONVENTION EUROPEENNE DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES et de l'article 237 du nouveau code de procédure civile, le rapport de cet expert, qui a été autorisé à conclure dans un rapport séparé de celui des professeurs Z..., SEIZILLES DE MAZANCOURT et REMY, doit être écarté ; III - AU FOND 1) SUR LE LIEN DE CAUSALITE Considérant que selon messieurs Z..., SEIZILLES DE MAZANCOURT et REMY, le virus de l'hépatite B est un virus à ADN infectant le foie susceptible d'entraîner une nécrose hépato-cellulaire et une inflammation hépatique; que l'hépatite B est présentée comme une pathologie potentiellement grave, pouvant intervenir sous une forme aiguù et également sous une forme chronique, parfois fatale, en raison de la survenue d'une cirrhose ou d'un cancer du foie ; Que les experts ont précisé que l'hépatite

virale représentait un problème de santé publique au niveau mondial, la France étant toutefois une zone de faible densité de portage d'octobre 1995 à juin 1996, et qu'ensuite elle a bénéficié de l'aide de membres de sa famille pour la tenue de cet établissement ; Considérant que l'intimée explique qu'elle est également propriétaire d'un restaurant ("LE GALION") qu'elle avait mis en gérance ; Qu'elle ajoute qu'à la suite du décès du gérant en 1996, son mari monsieur Y..., qui aurait dû reprendre l'exploitation, n'a pu le faire puisqu'il s'occupait d'elle et de leurs jeunes enfants, et qu'elle a subi une perte d'exploitation de 58.768,00 euros ; Qu'en définitive, pour la durée totale de l'incapacité totale de travail, madame Y... sollicite la somme de 80.000,00 euros ; Considérant, en ce qui concerne l'incapacité permanente partielle, que madame Y..., qui est appareillée aux membres inférieurs avec des attelles en équin permettant la station debout et le mouvement, qui se déplace à l'aide d'une canne (périmètre de marche de 300 mètres) et qui a des difficultés de préhension manuelle, le tout justifiant à son sens une incapacité permanente partielle de 40 %, sollicite pour ce chef de dommage une somme de 90.000,00 euros ; Compte tenu de l'incidence professionnelle quant à l'exploitation de son magasin de prêt-à-porter et du restaurant, madame Y... demande une indemnité globale de 288.722,00 euros ; - POSTES DE PREJUDICE A CARACTERE PERSONNEL Considérant que madame Y... estime que son pretium doloris doit être évalué à 6/7 et justifie une indemnité

de 80.000,00 euros ; Considérant que, pour son préjudice esthétique, madame Y... sollicite la somme de 30.000,00 euros ; Considérant que madame Y... indique qu'elle a dû renoncer aux activités de plage, de même qu'à toute activité sportive; qu'elle réclame une indemnité de 20.000,00 euros pour son préjudice d'agrément ; Considérant que madame Y..., qui conclut à l'assistance d'une tierce personne pour les besoins de la vie quotidienne, prie la cour de lui accorder, parmi ses chefs de dommage à caractère personnel, une indemnité B, et qu'elles permettaient de conclure à l'absence de risque important, sans toutefois exclure la possibilité d'un risque faible, - en février 2002, les autorités de santé ont manifesté leur confiance au GENHEVAC B en renouvelant l'autorisation de mise sur le marché de ce vaccin pour cinq années, - la piste de recherches d'infections telle que celle de l'infection à CAMPYLOBACTER JEJUNI ne peut être écartée dans le cas de madame Y..., - en l'absence de lien de causalité établi, la responsabilité de la société AVENTIS PASTEUR MSD ne saurait être retenue sur la base des textes invoqués, à savoir l'article L 221-1 du code de la consommation, interprété à la lumière

de la Directive Communautaire du 25 juillet 1985, ce texte ne pouvant recevoir application en matière de médicament, soumis à une législation spécifique, - la loi du 19 mai 1988 transposant en droit français la Directive européenne du 25 juillet 1985 n'est -en principe- nullement applicable en la circonstance, puisqu'elle concerne un produit mis en circulation postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi, - la défectuosité du produit n'est pas démontrée par madame Y..., et ne peut s'induire du dommage lui-même, - à titre infiniment subsidiaire, si la défectuosité du produit était démontrée, il conviendrait de retenir qu'elle doit être exonérée de toute responsabilité du fait du risque de développement, - enfin, elle devrait être exonérée de toute responsabilité sur la base de l'aléa thérapeutique. Madame Y... demande à la cour de: - vu les articles L 221-1 du code de la consommation et la Directive européenne du 25 juillet 1985, dire et juger la société AVENTIS PASTEUR MSD entièrement responsable du syndrome de GUILLAIN BARRE dont elle a souffert postérieurement à l'administration du vaccin GENHEVAC B, et qu'elle devra en réparer les conséquences dommageables tant pour elle-même que pour ses enfants Ferdinand et Julien Y..., victimes par ricochet, - condamner la société AVENTIS

chronique (0,2 % de la population), et qu'il existait trois modes de transmission de cette affection, par voie sexuelle, par transmission parentérale lors de l'utilisation de matériel d'injection contaminé et par transmission foeto-maternelle pendant la grossesse et l'allaitement ; Qu'ils ont aussi expliqué qu'ayant d'abord été proposée aux populations les plus exposées (les populations à risques comme les toxicomanes par voie intraveineuse ou les personnes ayant des relations sexuelles avec des partenaires multiples ; les personnels de santé et d'institutions ; les patients susceptibles de recevoir des produits sanguins), cette vaccination avait été ensuite recommandée par l'Organisation Mondiale de la Santé aux nourrissons et préadolescents, mais que cette recommandation, mal interprétée, avait largement dépassé sa cible, puisqu'en FRANCE, des protocoles vaccinaux avaient été proposés à des adultes ne présentant qu'un risque très faible d'hépatite ; Considérant qu'ont été mis sur le marché français, en 1981, la vaccin HEVAC B, préparé à base de plasmas humains non infectants, puis en 1989, le vaccin (recombinant) GENHEVAC B de la société PASTEUR VACCINS ; Que les experts ont précisé que sur le territoire national, à la fin de l'année 2000, 20

à 27 millions de personnes avaient été vaccinées ; Considérant, par ailleurs, qu'il ressort des études régulièrement versées aux débats que le syndrome de GUILLAIN BARRE, dit SGB, est l'affection démyélinisante périphérique acquise la plus courante chez l'homme, que son incidence estimée est de un à deux cas pour 100.000 personnes par an, à la fois chez l'enfant et chez l'adulte ; Que selon le professeur CONFAVREUX (Revue Pratique 1992), une fois sur deux, un événement pouvant avoir valeur d'agression immunologique est noté dans le mois précédant le début du SGB (infection respiratoire ou digestive, en général mal définie) mais qu'il est possible de rattacher le syndrome à un agent précis (MYCOPLASMA PNEUMONIAE, calculée sur la base de quatre heures par jour pendant 365 jours, à 18,00 euros chacun, et d'un euro de rente de 13.838, soit au total :

18,00 euros x 4 heures x 365 jours x 13.838 = 363.663,00 euros ; Qu'elle indique enfin qu'elle peut prétendre à la réparation du préjudice résultant pour elle de l'éloignement de sa famille pendant sa période d'hospitalisation et des perturbations inhérentes à son invalidité, à hauteur de 60.000,00 euros ; B - DEMANDES DE MONSIEUR Y... Considérant que monsieur Y..., qui a dû s'occuper seul des deux enfants du couple, dont un est atteint de myopathie, sollicite une indemnité de 75.000,00 euros, en raison des perturbations familiales ; C - DEMANDES PRESENTEES POUR LES ENFANTS MINEURS Considérant qu'il est demandé, pour le préjudice moral de chacun des deux jeunes enfants du couple, Ferdinand et Julien, respectivement âgés de huit et quatre ans au moment de la maladie de leur mère, la somme de

50.000,00 euros chacun ; D - DEMANDES DE LA CAISSE REGIONALE DES ARTISANS ET COMMERCANTS DE CORSE Considérant que cet organisme, qui émet des réserves sur ses débours non encore connus, sollicite à titre principal la somme de 76.693,42 euros au titre des frais médicaux et d'hospitalisation engagés pour madame Y... (créance provisoire), et au titre de ses frais futurs, une somme annuelle de 10.662,49 euros, et ce, pour une période de dix ans ; E - OBSERVATIONS DE LA SOCIETE AVENTIS PASTEUR MSD Considérant que la société AVENTIS PASTEUR MSD fait observer, en ce qui concerne le préjudice matériel, que madame Y... sollicite non seulement le remboursement des frais de déplacement, mais également des frais de nourriture qui auraient, de toute façon, dû être engagés par sa famille ; Qu'elle prie la cour de ramener les demandes à de plus justes proportions et propose, à titre forfaitaire, 1.500,00 euros ; Considérant, en ce qui concerne les frais médicaux, que la société appelante conclut à un sursis à statuer dans l'attente des

PASTEUR MSD à lui verser : . 2.684,93 euros, pour son préjudice matériel, . 368.722,00 euros en réparation de son préjudice corporel, en sus de la créance des organismes sociaux, . 130.000,00 euros en réparation de son préjudice personnel, . 363.663,00 euros pour la tierce personne, . 60.000,00 euros en réparation de son préjudice familial. Monsieur Y..., intervenant devant la cour en application de l'article 554 du nouveau code de procédure civile, conclut à la condamnation de la société AVENTIS PASTEUR MSD à lui payer, à titre personnel, pour les perturbations dans la vie familiale, 75.000,00 euros et, ès qualités d'administrateur des biens des deux enfants mineurs du couple, Ferdinand et Julien, la somme de 50.000,00 euros chacun. Il est en outre demandé à la cour de condamner la société AVENTIS PASTEUR MSD à payer 30.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Madame Y... fait valoir que : - sensibilisée par une campagne massive en faveur de la vaccination contre l'hépatite B alors qu'elle n'était pas particulièrement exposée à cette maladie, elle a reçu, le 30 septembre 1995 une injection du vaccin GENHEVAC B produit par la

société PASTEUR VACCINS, - immédiatement après cette injection, elle a développé un syndrome pseudo-grippal, - le 17 octobre 1995, elle a été admise à la Clinique de PORTO VECCHIO, où elle a présenté un déficit distal des membres supérieurs et inférieurs, - le 18 octobre 1995, le diagnostic de syndrome de GUILLAIN BARRE a été posé, - le 22 octobre suivant, elle a présenté une tétraplégie et des troubles respiratoires, - après divers transferts en milieu hospitalier, son état s'est stabilisé depuis 1998, mais elle ne peut plus marcher qu'avec des attelles et en s'aidant d'une canne, - s'agissant de la nullité du rapport d'expertise du docteur A..., la demande de la société AVENTIS PASTEUR MSD est de pure opportunité, dès lors que le rapport de cet expert met en exergue des manquements graves de la

CAMPYLOBACTER JEJUNI, virus EPSTEIN BARR), à une vaccination, à un traumatisme ou à un acte chirurgical susceptible d'avoir lésé des nerfs périphériques ; Que le SGB se caractérise cliniquement par une faiblesse aigue ascendante symétrique, à évolution rapide, associée à une perte des réflexes ostéo-tendineux et à d'éventuels fourmillements dans les pieds et les mains, ainsi qu'à des douleurs musculaires (myalgies) ; Considérant, en cet état, que les parties s'opposent sur l'existence du lien de causalité entre la vaccination de madame Y... et le syndrome de GUILLAIN BARRE, dont elle a été atteinte, de façon non contestée, dans la quinzaine de jours suivant une première injection du vaccin GENHEVAC B ; Considérant que la preuve de la relation de cause à effet s'établit par tous moyens, y compris par présomptions, à condition que celles-ci soient graves, précises et concordantes, ainsi qu'il résulte de l'article 1353 du code civil ; Que le lien de causalité doit être certain et direct ; Considérant, en la circonstance, que les professeurs Z..., DE MAZANCOURT et REMY ont conclu que la relation de cause à effet entre la vaccination et l'affection ne pouvait être affirmée de façon scientifique, mais qu'elle ne pouvait pas non plus être exclue en son principe, les modalités d'analyse de causalité et les outils statistiques ne permettant pas une telle évaluation ; Considérant que la cour observe que si les experts ont estimé non rapportée la preuve scientifique d'une relation de cause à effet, il n'en ont pas moins

affirmé l'existence de cette possibilité ; Que les données actuelles de la science, telles qu'explicitées par les pièces soumises aux débats contradictoires, permettent d'affirmer que les effets indésirables de la vaccination n'ont pas une fréquence significative de nature à remettre en cause l'utilité de cette vaccination sur un plan général ; Que, cependant, une relation de cause à effet entre le SGB et la vaccination n'étant pas exclue, le juge judiciaire, sans justificatifs de la CAISSE REGIONALE DES ARTISANS et COMMERCANTS DE CORSE et de la R.A.M. ; Que la société appelante fait valoir que la demande relative aux frais futurs n'est pas justifiée et qu'elle doit être écartée ; Considérant, en ce qui concerne les sommes réclamées au titre de l'incapacité totale de travail, que la société AVENTIS PASTEUR MSD expose qu'en 1994 et 1995, les époux Y... n'étaient pas imposables, du fait de l'imputation des déficits professionnels globaux très importants ; Qu'elle ajoute que le magasin de prêt-à-porter n'a pas été fermé et que, quant au restaurant "LE GALION", celui-ci a fait l'objet de locations-gérances successives depuis son ouverture en 1992, monsieur Y... n'exerçant pour sa part aucune activité professionnelle ; Qu'elle indique encore que depuis 1996, le restaurant a retrouvé son activité habituelle et que les indemnités réclamées sur ce point ne sont, en conséquence, pas dues ; Considérant que pour l'incapacité permanente partielle de madame Y..., la société AVENTIS PASTEUR MSD propose la somme de 63.000,00 euros ; Qu'au titre de la tierce

personne dans les activités professionnelles, la société AVENTIS PASTEUR MSD propose, pour tenir compte de la gêne de principe dans les activités de madame Y..., la somme de 2.300,00 euros x 35 = 80.500,00 euros ; Que pour le surplus, elle propose, pour une aide ménagère de deux heures par jour, une rente annuelle de 7.300,00 euros, payable trimestriellement, à terme échu, et suspendue en cas d'hospitalisation supérieure à 45 jours ; Considérant que l'appelante chiffre à 6.000,00 euros le pretium doloris de madame Y..., et à 10.000,00 euros son préjudice esthétique ; Que s'agissant du préjudice d'agrément, elle indique qu'il conviendra de ramener la demande à de plus justes proportions ; Qu'en ce qui concerne le préjudice familial, la société AVENTIS PASTEUR MSD conclut au rejet de l'indemnité sollicitée ; Considérant, enfin, que la société

société, tant en ce qui concerne ses obligations en qualité de titulaire de l'AMM, mais aussi des défaillances en matière de prudence et de précaution, - son rapport est fondé sur un examen objectif des pièces et son impartialité a été démontrée, - il existe un faisceau d'éléments précis et concordants établissant un lien de causalité entre la vaccination et le syndrome de GUILLAIN BARRE, - il ne saurait être exigé de la victime qu'elle rapporte la preuve au delà de ce qui est scientifiquement possible, - les autorités sanitaires françaises ont réglementé l'évaluation des effets indésirables d'un produit sur la base de cinq degrés de probabilité (paraissant exclu, douteux, plausible, vraisemblable, très vraisemblable), - ces effets sont analysés au vu de divers critères chronologiques du délai d'apparition de l'affection, de l'évolution à l'arrêt du traitement, de l'évolution à la reprise du traitement, et de l'élimination d'une autre cause, - pour l'évaluation de l'échelle individuelle du risque, il convient de recourir aux mêmes méthodes, - lorsque la société AVENTIS PASTEUR MSD pose comme incontournable la principe de certitude, elle méconnaît à la fois l'esprit et la lettre de la loi, - il appartient à la cour de forger sa conviction sur un ensemble de présomptions dont il devra être déterminé si elles sont suffisamment convaincantes, graves, précises et concordantes, - la plupart des études récentes concernent le lien entre la survenance d'affections démyélinisantes centrales (sclérose en plaques) et

concluent à une élévation du risque, même considérée comme non significative, - il n'existe pas d'étude "cas-témoins" sur l'association entre le syndrome de GUILLAIN BARRE, dit SGB, et la vaccination contre l'hépatite B, - deux études dites de surveillance après commercialisation, mais relatives à un vaccin de la génération précédente (HEPTAVAX) ont mis cependant en évidence une augmentation significative du risque de survenue d'un SGB au décours de la attendre la réalisation hypothétique d'études supplémentaires susceptibles d'être réalisées dans un délai incertain, est tenu d'apprécier, en l'état des éléments qui lui sont fournis, s'il existe au cas par cas des indices graves, précis ou concordants de nature à mettre en évidence un lien de causalité direct et certain entre la vaccination et l'affection dénoncée ; Considérant que l'analyse des critères doit être faite selon une approche chronologique, clinique et biologique, et de notoriété ; Considérant qu'il est constant tout d'abord que madame Y..., jusque là en bonne santé, a présenté, dans la quinzaine de jours suivant l'administration du vaccin GENHEVAC B, un syndrome de GUILLAIN BARRE

dont elle conserve d'importantes séquelles ; Considérant que les experts ont estimé que le délai de quinze jours entre l'injection et les troubles était relativement court, -un délai de quatre à six semaines étant selon eux plus généralement admis-, mais que, cependant, ils ont affirmé que ce court délai ne permettait pas d'exclure le lien de causalité entre la vaccination et l'affection ; Considérant que les études produites tant par la société AVENTIS PASTEUR MSD que par madame Y... établissent que l'administration du vaccin contre l'hépatite B peut être suivi d' un certain nombre d'effets indésirables, au rang desquels figure le syndrome de GUILLAIN BARRE ; Considérant qu'après exécution d'une enquête officielle de pharmacovigilance faisant suite à la notification d'un certain nombre d'effets indésirables postérieurs à l'administration de ce vaccin, en particulier des atteintes démyélinisantes et d'autres pathologies auto-immunes, il a été décidé d'unifier l'information officielle de tous les vaccins de cette nature ; Que le nouveau Résumé des Caractéristiques du Produit (R.C.P.), paru au VIDAL dans l'édition 1996, a ainsi été libellé à la

rubrique "Effets indésirables" : "Des effets indésirables à type de réaction locale ou générale (céphalées, malaises, vertiges, AVENTIS PASTEUR MSD s'oppose aux réclamations présentées seulement devant la cour pour monsieur Y... et les enfants mineurs, en raison de leur caractère nouveau ; Considérant, en cet état, que la cour dispose des éléments d'appréciation lui permettant d'évaluer ainsi qu'il suit les différents chefs de dommage, étant précisé que les indemnités sollicitées pour la première fois devant la cour par monsieur Y..., pour lui-même et les enfants mineurs du couple, doivent être écartées, en raison de leur caractère nouveau, sans qu'il puisse être fait application des dispositions de l'article 554 du nouveau code de procédure civile : A - POSTES DE PREJUDICE DE MADAME Y... SOUMIS AU RECOURS DES ORGANISMES SOCIAUX . FRAIS MEDICAUX Considérant que madame Y... ne formule aucune demande de ce chef ; Considérant que la CAISSE REGIONALE DES ARTISANS ET DES COMMERCANTS DE CORSE, seul organisme social intéressé (la R.A.M. de CORSE n'étant qu'un organe de gestion), justifie avoir engagé pour madame Y..., au titre des frais

médicaux et d'hospitalisation, la somme provisoire de 76.693,42 euros ; Considérant par ailleurs que l'organisme social ne peut solliciter auprès du tiers responsable, sans son accord, le paiement immédiat de sommes correspondant pour partie à un remboursement anticipé de prestations non encore exposées, et ce, conformément aux dispositions de l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale ; Que la société AVENTIS PASTEUR MSD s'oppose à tout paiement à ce propos, et qu'en conséquence, la demande de la CAISSE REGIONALE DES ARTISANS ET DES COMMERCANTS DE CORSE doit, sur ce point, être écartée ; Que, cependant, il lui sera donné acte de ses réserves pour ses frais et débours non encore connus ; Considérant qu'en application de l'article 1153-1 du code civil, les sommes allouées, qui présentent un caractère indemnitaire, devront porter intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et que les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article paresthésies) ont été rarement rapportés". "De façon exceptionnelle, des cas de neuropathies périphériques (polyradiculonévrite, paralysie faciale), de névrite optique ou d'atteintes démyélinisantes du système nerveux central (poussée de sclérose en plaques) ont été rapportés dans les semaines suivant la vaccination, sans qu'un lien de causalité n'ait pu actuellement être établi " ; Considérant que l'Autorisation de Mise sur le Marché octroyée pour le vaccin GENHEVAC B qui a été modifiée le 3 août 1995, fait état, au titre des effets indésirables, "très rarement", de neuropathies périphériques (polyradiculonévrite, paralysie faciale) ; Qu'un communiqué du secrétaire d'Etat à la Santé du 1er octobre 1998 a annoncé la

décision de procéder à une stratégie vaccinale mieux ciblée, selon des modalités plus propices tant à "une bonne appréciation du risque individuel en ce qui concerne l'hépatite B qu'à l'éventuel risque vaccinal" ; Que la vaccination des adultes se trouve dorénavant limitée aux personnes dites à risque et en particulier aux professionnels de santé ; Que L'AGENCE FRANCAISE DE SECURITE SANITAIRE DES PRODUITS DE SANTE (A.F.S.S.A.P.S.), après une réunion des responsables de pharmacovigilance de février 2000 rendant compte au 31 décembre 1999, de 686 cas d'affections démyélinisantes centrales et de 87 cas d'atteintes périphériques, et de la nécessité de tenir compte d'un ratio de sous-notification des cas par les établissements de santé de 2 à 2,2, a conclu à l'existence d'un risque faible d'atteintes démyélinisantes ou d'affections auto-immunes ; Que ces données ont été actualisées au 31 décembre 2000, avec l'indication du signalement de 771 cas d'affections démyélinisantes centrales et de 91 atteintes périphériques ; Considérant, en ce qui concerne l'approche clinique ou biologique, que les experts ont indiqué que si dans 40 % des cas, on trouvait des

antécédents d'infection à CAMPYLOBACTER JEJUNI, cette hypothèse 1154 du code civil, pourvu qu'ils soient dus pour une année entière ; Considérant que la R.A.M. de CORSE, défaillante, n'a pas fait de demande ; - INCAPACITE TOTALE DE TRAVAIL Considérant que madame Y... n'est pas fondée à solliciter la réparation du préjudice résultant des difficultés d'exploitation de l'établissement "Le GALION" qu'elle avait mis en location-gérance, en raison d'événements étrangers à la présente affaire (décès du gérant des suites d'une mort violente) ; Qu'en ce qui concerne du magasin d'habillement "CYCLAMEN" qu'elle exploitait personnellement, madame Y... indique que sa perte totale de marge brute, soit 50 % de son chiffre d'affaires, est de 24.086,00 euros ; Que la société AVENTIS PASTEUR MSD a relevé à juste titre qu'il était toutefois avéré que dans les deux années précédant les faits, les époux Y... avaient subi des déficits professionnels importants ayant conduit à leur non-imposition ; Que la perte des bénéfices alléguée par madame Y..., en l'état des pièces produites,

n'est pas avérée ; Qu'à défaut de pièces relatives à la perte de revenus effective durant la période d'incapacité totale de travail, les demandes de madame Y... doivent être rejetées, les évaluations de son comptable, non étayées de pièces justificatives, ne pouvant être admises ; - INCAPACITE PERMANENTE PARTIELLE Considérant que messieurs Z..., DE MAZANCOURT et REMY ont évalué ce poste de préjudice à 35 %, en relevant une marche avec boiterie, la nécessité de cannes ou d'orthèses, et des difficultés dans la préhension ; Que madame Y... réclame une indemnisation sur la base de 40 % ; Considérant que sur la base du taux d'incapacité permanente partielle exactement défini par les experts susvisés, il convient à ce jour d'allouer à madame Y..., compte tenu des graves séquelles par elle subies et de l'âge atteint par celle-ci au moment de la consolidation (37 ans), 1.800,00 euros (le point) x 35, soit 63.000,00 euros ; Considérant

devait être rejetée pour madame Y..., puisque le compte-rendu d'hospitalisation de 1995 émanant du service du professeur GASTAUT à MARSEILLE mettait en évidence, d'une part, une sérologie à CAMPYLOBACTER JEJUNI négative, sans séroconversion, et, d'autre part, une absence d' autres antécédents infectieux possibles, les sérologies étant négatives ; Que dans le cas de madame Y..., tout antécédent infectieux doit donc être écarté ; Que le compte-rendu susévoqué et celui de la clinique de rééducation spécialisée SAINT-MARTIN font état, au titre de l'anamnèse de la maladie, soit de la vaccination de madame Y... par GENHEVAC B, soit de la rééducation d'un syndrome de GUILLAIN BARRE qualifié de "post-vaccinal" ; Qu'il existe donc un faisceau de présomptions graves, précises et concordantes établissant l'existence d'un lien de causalité certain et direct entre la vaccination de madame Y... contre l'hépatite B et l'affection par elle subie ; 2) SUR LE FONDEMENT DE LA RESPONSABILITE DE LA SOCIETE AVENTIS PASTEUR MSD Considérant que la responsabilité de la

société AVENTIS PASTEUR MSD doit être envisagée sur le fondement de l'article 1147 du code civil, interprété à la lumière de la Directive C.E.E. 85-374 du 25 juillet 1985, puisque les faits en cause sont survenus antérieurement à la loi du 19 mai 1998 ayant introduit ladite Directive dans le droit français ; Considérant qu'un produit est défectueux lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle ont peut légitimement s'attendre, et que la fabricant est tenu de livrer un produit, y compris un produit de santé, exempt de tout défaut de nature à causer un danger pour la personne ou pour les biens ; Considérant que la société AVENTIS PASTEUR MSD fait valoir, en ce qui concerne l'application de la Directive du 25 juillet 1985, que madame Y... prétend établir le caractère défectueux du produit par l'existence du seul dommage ; Que la société soutient également qu'elle peut se prévaloir d'une

qu'il convient de retenir un préjudice complémentaire au regard des répercussions professionnelles, en ce qui concerne l'exploitation du magasin CYCLAMEN seulement, pour les raisons qui ont été retenues ci-avant ; Que madame Y... a besoin d'une vendeuse à temps partiel ; Qu'elle a repris ses activités dans son magasin de prêt à porter en 1998, mais qu'elle doit recevoir une aide, compte tenu de ses difficultés motrices ; Que sur la base d'un salaire mensuel de 600,00 euros par mois pendant douze mois, et d'un euro de capitalisation jusqu'à l'âge de 65 ans de 12.344 compte tenu de la date de reprise des activités, il convient de lui allouer la somme arrondie de 88.876,00 euros ; Qu'en ce qui concerne les demandes présentées, s'agissant de la baisse de la redevance du nouveau locataire-gérant du restaurant "Le GALION", le lien de ce prétendu dommage avec la maladie de madame Y... n'est pas démontré ; Que la demande présentée de ce chef doit donc être écartée ; Qu'il reviendra au total à madame Y... une indemnité de 151.876,00 euros, déduction étant faite des frais médicaux ; Considérant, en ce qui concerne la demande relative aux frais nécessités par l'assistance d'une tierce personne dans la vie quotidienne, que celle-ci est justifiée, compte tenu des séquelles

subies par madame Y... ; Que madame Y... est rentrée à son domicile le 22 juin 1996, à l'âge de 35 ans ; Que sur la base de deux heures par jour à 15,00 euros, charges sociales incluses, et de 365 jours ainsi qu'il est demandé, il convient d'accorder à madame Y..., une rente annuelle de : 30,00 euros x 365 j = 10.950,00 euros, versée sous forme d'une rente de 2.737,50 euros payable trimestriellement, à terme échu avec une suspension en cas d'hospitalisation ou de séjour en milieu paramédical spécialisé supérieure à 45 jours ; Que compte tenu de l'âge de madame Y..., l'euro de rente à retenir est de 13.807, ce qui donne, à ce jour, une rente dont le capital

constitutif est de 151.186,65 euros ; Considérant, en définitive, que le préjudice de madame Y... doit être ainsi fixé : - Frais médicaux et d'hospitalisation ............

76.693,42 euros - Incapacité totale de travail..........................

0,00 euro - Incapacité permanente partielle..................

151.876,00 euros - Rente tierce personne..................................

151.186,65 euros 379.756,07 euros Qu'il reviendra à madame Y..., compte tenu du remboursement des frais médicaux et de la déduction du capital constitutif de la rente, la somme de 151.876 euros ; B) - PREJUDICE MATERIEL DE MADAME Y... Considérant que madame Y... sollicite le remboursement de ses frais de déplacement (770,17 euros et 447,74 euros) soit au total 1.217,91 euros ; Qu'il sera fait droit à cette demande qui est justifiée ; Que les frais d'hébergement de la famille de madame Y..., pendant son hospitalisation sur le continent, doivent être pris en charge à hauteur de 900,00 euros, déduction faite du coût de la nourriture ; Qu'au total, il reviendra à madame Y... la somme de 2.117,91 euros ; C) - POSTES DE PREJUDICE A CARACTERE PERSONNEL - PRETIUM DOLORIS Considérant que les docteurs

Z..., DE MAZANCOURT et REMY ont fixé ce poste de préjudice à 4/7 ; que madame Y... estime qu'il convient de le réparer à hauteur de 6/7 ; Considérant que pour les nombreuses et pénibles souffrances physiques endurées par madame Y... durant ses hospitalisations et traitements, seules réparables au titre de ce chef de préjudice et exactement fixées à 4/7, il y a lieu d'accorder la somme de 9.000,00 euros ; - PREJUDICE ESTHETIQUE Considérant qu'il a été exactement évalué à 2/7 par les experts ; Que madame Y... expose qu'étant appareillée, elle ne peut porter les tenues vestimentaires qui lui conviennent, qu'elle marche avec une canne et qu'elle a du mal à se tenir droite ; Considérant que la société AVENTIS PASTEUR MSD propose une somme de 10.000,00 euros ; Que compte tenu des atteintes esthétiques chez une jeune femme, une indemnité de 15.000,00 euros est justifiée ; - PREJUDICE D'AGREMENT Considérant que compte tenu des séquelles dont elle est atteinte, madame Y... ne peut plus profiter des

agréments de la vie courante (plage, natation, gymnastique, vélo) ; Qu'une indemnité de 15.000,00 euros réparera exactement ce poste de préjudice ; - PREJUDICE FAMILIAL Considérant que ce poste de préjudice s'analyse en un préjudice moral ; Que madame Y... sollicite la somme de 60.000,00 euros pour la privation des joies de la vie de famille pendant la durée de son hospitalisation, et les perturbations affectives inhérentes à son invalidité ; Considérant que la société AVENTIS PASTEUR MSD s'oppose à l'indemnisation de ce chef de dommage, indiquant qu'il a déjà été pris en charge au titre du préjudice d'agrément, ou de l'incapacité totale de travail ; Mais considérant que le préjudice invoqué par madame Y... est un préjudice distinct; qu'il sera exactement réparé par l'allocation de la somme de 3.000,00 euros ; Qu'au total, madame Y... percevra, au titre de son préjudice personnel, une indemnité totale de 42.000,00 euros ; - SUR LES AUTRES DEMANDES Considérant que madame Y... demande la somme de 30.000,00

euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, et la CAISSE REGIONALE DES ARTISANS ET DES COMMERCANTS DE CORSE la somme de 1.000,00 euros sur le même fondement ; Que l'organisme social demande également une indemnité de 762,25 euros en application de l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale modifié ; Considérant que l'équité commande d'accorder à madame Y... la somme de 7.000,00 euros pour ses frais, non inclus dans les dépens engagés en première instance et en cause d'appel, et à la CAISSE REGIONALE DES ARTISANS ET DES COMMERCANTS DE CORSE une somme de 700,00 euros ; Qu'en outre, il convient d'allouer à la CAISSE REGIONALE DES ARTISANS ET DES COMMERCANTS DE CORSE, sur le fondement de l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale modifié, une indemnité de 760,00 euros ; PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort, Vu l'arrêt de cette cour en date du 23 juin 2000, Vu l'article 1147 du code civil, interprété à la lumière de la Directive CEE 85-374 du 25 juillet

1985, Déclare la société AVENTIS PASTEUR MSD, venue aux droits de la société PASTEUR VACCINS, entièrement responsable du dommage subi par madame Y..., La condamne à payer : - à la CAISSE REGIONALE DES ARTISANS ET DES COMMERCANTS DE CORSE, la somme de 76.693,42 euros en remboursement des sommes versées pour son assurée, madame Y..., - à madame Y... : . au titre de son préjudice soumis à recours, la somme de 151.876,00 euros outre, au titre de la tierce personne, une rente annuelle de 10.950,00 euros payable à terme échu en quatre versements trimestriels de 2.737,50 euros chacun, dont le service sera suspendu à compter du 45 ème jour suivant une hospitalisation ou un séjour en établissement spécialisé, les prestations de l'organisme social étant déduites de ces montants, . au titre de son préjudice matériel, la somme de 2.117,91 euros, . au titre de son préjudice personnel, la somme de 42.000,00 euros, Déclare irrecevables les demandes d'indemnisation présentées par monsieur Y..., pour lui-même et ses enfants mineurs, Donne acte à la CAISSE REGIONALE DES ARTISANS ET DES

COMMERCANTS de CORSE de ses réserves pour les débours qu'elle pourrait être à l'avenir engagée à supporter pour madame Y..., son assurée, Dit que les sommes allouées à la CAISSE REGIONALE DES ARTISANS ET DES COMMERCANTS DE CORSE porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, et que les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du code civil pourvu qu'ils soient dus pour une année entière, Condamne la société AVENTIS PASTEUR MSD à payer à la CAISSE REGIONALE DES ARTISANS ET DES COMMERCANTS DE CORSE la somme de 760,00 euros sur le fondement de l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale, Condamne en outre la société AVENTIS PASTEUR MSD à payer à la CAISSE REGIONALE DES ARTISANS ET DES COMMERCANTS DE CORSE la somme de 700,00 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et la somme de 7.000,00 euros à madame Y... sur le même fondement pour les frais irrépétibles engagés en première instance et en cause d'appel, Déclare le présent arrêt commun à la R.A.M. de CORSE, Condamne la société AVENTIS PASTEUR MSD aux entiers dépens de premiers instance et d'appel et dit que les dépens d'appel,

incluant les frais d'expertise, pourront être recouvrés par les avoués de la cause en ayant fait la demande, conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle et à l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Arrêt prononcé par madame GUIRIMAND, président, Assisté de madame THEODOSE, greffier, Et ont signé le présent arrêt, Madame GUIRIMAND, président, Madame THEODOSE, greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-4862
Date de la décision : 12/09/2003

Analyses

COMMUNAUTE EUROPEENNE - Traité de Rome - Directive - Interprétation par le juge national du droit interne au regard de la directive - Condition

Si le juge national, saisi d'un litige dans une matière entrant dans le domaine d'application d'une directive, est tenu d'interpréter son droit interne à la lumière du texte et de la finalité de cette directive, c'est à la condition que celle-ci soit contraignante pour l'Etat membre et ne lui laisse pas une faculté d'option pour l'adaptation de son droit national au droit communautaire. Dès lors que l'article 15-1-b de la directive CEE n 85-374 du 25 juillet 1985 laisse aux Etats membres la faculté d'introduire ou non dans leur législation interne l'exonération pour risque de développement, une telle disposition non contraignante ne saurait s'appliquer à des faits antérieurs à la transposition de la directive en droit interne et constituer le fondement d'une cause étrangère exonératoire de responsabilité, alors qu'incombe au fabricant l'obligation de livrer un produit exempt de vices


Références :

Code civil, article 1147
Directive CEE n° 85-374 du 25 juillet 1985, article 15-1-b

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2003-09-12;1997.4862 ?
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