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10/05/2023 | FRANCE | N°22MA02657

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 10 mai 2023, 22MA02657


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... et M. E... B... ont demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler les arrêtés du 28 mars 2022, par lesquels le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de leur délivrer un titre de séjour compte tenu de l'état de santé de leur enfant et a assorti ces décisions d'obligations de quitter le territoire français dans un délai de trente jours mentionnant le pays de destination.

Par un jugement n°s 2202130 et 2202131 du 22 septembre 2022, le tribunal administratif de Nice a rejeté leurs

demandes.

Procédure devant la Cour :

I°) Par une requête et un mémoire, enregis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... et M. E... B... ont demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler les arrêtés du 28 mars 2022, par lesquels le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de leur délivrer un titre de séjour compte tenu de l'état de santé de leur enfant et a assorti ces décisions d'obligations de quitter le territoire français dans un délai de trente jours mentionnant le pays de destination.

Par un jugement n°s 2202130 et 2202131 du 22 septembre 2022, le tribunal administratif de Nice a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la Cour :

I°) Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 octobre 2022 et le 12 avril 2023 sous le n° 22MA02657, Mme C..., représentée par Me Trombetta, demande à la Cour :

1°) de lui accorder l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 22 septembre 2022 ;

3°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

4°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de procéder à un nouvel examen de sa demande, sous une astreinte de 50 euros par jour de retard et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur le refus de séjour :

- il est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'erreur de fait en tant qu'il mentionne qu'elle ne réside pas habituellement en France ;

- le préfet s'est cru lié par l'avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) et n'a pas examiné sa situation personnelle ;

- la décision attaquée méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la mesure d'éloignement :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur de fait ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement :

- elle est entachée d'incompétence de son auteur ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Un courrier du 15 décembre 2022 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 612-3 alinéa 3 du code de justice administrative les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

Le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas produit de mémoire en défense.

L'Office français de l'immigration et de l'intégration a présenté des observations le 6 avril 2023.

Par décision du 3 mars 2023, le bureau d'aide juridictionnelle a refusé d'accorder à Mme C... l'aide juridictionnelle.

II°) Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 octobre 2022 et le 12 avril 2023 sous le n° 22MA02658, M. B..., représenté par Me Trombetta, demande à la Cour :

1°) de lui accorder l'aide juridictionnelle provisoire ;

2) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 22 septembre 2022 ;

3°) d'annuler l'arrêté du 28 mars 2022 ;

4°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de réexaminer sa situation et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous une astreinte de 50 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il reprend les mêmes moyens que ceux invoqués dans l'instance enregistrée sous le n° 22MA02657.

Un courrier du 15 décembre 2022 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

Le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas produit de mémoire en défense.

L'Office français de l'immigration et de l'intégration a présenté des observations le 6 avril 2023.

Par décision du 3 mars 2023, le bureau d'aide juridictionnelle a refusé d'accorder à M. B... l'aide juridictionnelle.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-647 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Isabelle Gougot, rapporteure.

Considérant ce qui suit :

1. Par deux arrêtés du 28 mars 2022, le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté les demandes de titre de séjour que lui avaient présentées le 30 juin 2021 Mme C... et M. B..., ressortissants géorgiens, sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, compte tenu de l'état de santé de leur enfant D... B..., et a assorti chacune de ces décisions d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Mme C... et M. B... relèvent appel du jugement du 22 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nice, qui a joint leurs demandes en annulation de ces arrêtés, les a rejetées.

Sur la jonction :

2. Les requêtes enregistrées sous les n°s 22MA02657 et 22MA02658, concernent le même jugement et présentent à juger de questions communes. Il y a lieu de statuer par un seul arrêt.

Sur les demandes d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

3. Aux termes de l'article 62 alinéa 2 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " La demande d'admission provisoire n'est assujettie à aucune règle de forme et elle peut être prononcée d'office si l'intéressé a formé une demande d'aide juridictionnelle sur laquelle il n'a pas encore été définitivement statué ". Le bureau d'aide juridictionnelle ayant statué le 3 mars 2023 sur les demandes d'aide juridictionnelle de Mme C... et de M. B..., leurs conclusions d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le refus de séjour :

4. En premier lieu, le moyen tiré de l'insuffisante motivation des décisions attaquées doit être écarté, par adoption des motifs au point 4 du jugement, qui n'appelle pas de précision en appel.

5. En deuxième lieu, il ne ressort pas de l'arrêté attaqué que le préfet se soit cru lié par l'avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et qu'il n'ait pas examiné la situation personnelle des intéressés, alors notamment qu'il s'est prononcé d'office au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé... ". Dans son avis du 31 janvier 2022, l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a estimé que l'état de santé de l'enfant des requérants, D... Tsiskaze, alors âgé de neuf ans, qui souffre d'autisme non verbal, nécessitait une prise en charge médicale, mais dont l'absence n'était pas de nature à entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Ni les certificats médicaux dont se prévalent les requérants, qui ne sont pas suffisamment circonstanciés, ni le fait que la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) ait pris le 15 juin 2021 une décision d'orientation de l'enfant en internat ou en semi-internat dans un institut médico-éducatif (IME) jusqu'au 31 juillet 2026, pour lequel l'enfant est inscrit sur une liste d'attente, ne suffisent à remettre en cause l'analyse de l'OFII selon laquelle l'absence de soins n'est pas susceptible d'entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, alors notamment que l'OFII a précisé que les troubles de l'enfant étaient dit " figés " et nécessitaient " une transition entre le secteur sanitaire pur (dont la prise en charge se veut à visée thérapeutique) vers le secteur médico-social ([...] orientation [...] vers un [...] IME) ". Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, par suite, être écarté.

7. En quatrième lieu, ainsi que l'a à bon droit jugé le tribunal, la circonstance que la décision attaquée mentionne par erreur que les intéressés ne résident pas régulièrement en France n'est pas de nature à elle seule à en justifier l'annulation, dès lors qu'ils ne remplissent pas la condition sur l'état de santé énoncée à l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile rappelée au point précédent.

8. En cinquième lieu, en refusant d'admettre au séjour les requérants, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'ils se trouvent en France seulement depuis le mois d'avril 2019 et qu'ils n'y sont pas insérés socio-professionnellement, que la prise en charge de l'enfant D... n'a pas commencé, que la scolarisation de leur second enfant mineur en lycée professionnel est récente et que si leur fils ainé est en France, il est également en situation irrégulière.

9. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du refus de séjour.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours :

10. En premier lieu les moyens tirés de l'insuffisante motivation et de l'erreur de fait de la mesure de l'éloignement doivent être écartés, pour les mêmes motifs que ceux exposés respectivement aux points 4 et 7 du présent arrêt.

11. En deuxième lieu, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la mesure d'éloignement méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales alors que rien ne fait obstacle à la poursuite de leur vie privée et familiale en France.

12. En troisième et dernier lieu, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la mesure d'éloignement doit être écarté, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8. En outre, le certificat médical établi le 7 novembre 2022 par un praticien du centre hospitalier universitaire de Lenval produit par les requérants, qui mentionne notamment que " l'état actuel de l'enfant ne permet pas de transport (par avion ou autre) sans mise en danger " n'est pas suffisamment circonstancié pour remettre en cause l'avis de l'OFII précité du 31 janvier 2022 qui a estimé que l'état de santé de l'intéressé peut lui permettre de voyager sans risque vers le pays d'origine.

13. Les requérants ne sont, par suite, pas non plus fondés à demander l'annulation de la mesure d'éloignement.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement :

14. En premier lieu, les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte et de l'insuffisante motivation de la décision attaquée doivent être écartés, par adoption des motifs respectivement aux points 3 et 4 du jugement, qui n'appellent pas de précision en appel.

15. En deuxième lieu, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la décision de renvoi dans leur pays d'origine serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaitrait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au motif que l'enfant ne pourrait y bénéficier d'un traitement adapté alors qu'ainsi qu'il a été dit au point 6, l'OFII a estimé que l'état de santé de l'enfant des requérants, D... B..., qui souffre d'autisme non verbal, nécessitait une prise en charge médicale, mais dont l'absence n'était pas de nature à entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité.

16. Les requérants ne sont par conséquent pas fondés à demander l'annulation de la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement.

17. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions en annulation des requérants doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, leurs conclusions en injonction sous astreinte.

Sur les frais de l'instance :

18. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

19. Ces dispositions font obstacle à ce que le préfet qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse aux requérants une somme à ce titre.

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu d'admettre Mme C... et M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Les requêtes n°s 22MA02657 et 22MA02658 sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., à M. E... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

Délibéré après l'audience du 17 avril 2023, où siégeaient :

- M. Alexandre Badie, président de chambre,

- M. Renaud Thielé, président assesseur,

- Mme Isabelle Gougot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 mai 2023.

N°s 22MA02657 - 22MA0265802


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA02657
Date de la décision : 10/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: Mme Isabelle GOUGOT
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : TROMBETTA;TROMBETTA;TROMBETTA

Origine de la décision
Date de l'import : 14/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-05-10;22ma02657 ?
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