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05/02/2021 | FRANCE | N°19NT01290

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 05 février 2021, 19NT01290


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler son intégration dans le nouveau corps des cadres de santé paramédicaux de la fonction publique hospitalière créé par le décret du 26 décembre 2012 ou, à titre subsidiaire, de condamner le centre hospitalier d'Orléans à lui verser la somme de 103 394 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de cette intégration.

Par un jugement n° 1700594 du 5 février 2019, le tribunal administratif d'Orléans

a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler son intégration dans le nouveau corps des cadres de santé paramédicaux de la fonction publique hospitalière créé par le décret du 26 décembre 2012 ou, à titre subsidiaire, de condamner le centre hospitalier d'Orléans à lui verser la somme de 103 394 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de cette intégration.

Par un jugement n° 1700594 du 5 février 2019, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 28 mars 2019, 25 février 2020, 27 mars 2020 et 26 mai 2020 Mme A..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 5 février 2019 ;

2°) de condamner le centre hospitalier d'Orléans à lui verser la somme de

84 109,20 euros ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier d'Orléans la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le centre hospitalier a commis une faute en lui transmettant une simulation erronée de ses droits à pension de retraite qui a vicié son consentement à intégrer le corps des cadres de santé paramédicaux de la fonction publique hospitalière ;

- contrairement à ce qui lui a été indiqué par son employeur, son intégration l'a empêchée de faire valoir ses droits à la retraite à 60 ans sans décote ; le lien de causalité entre la faute commise et son préjudice est ainsi établi ;

- la faute de son employeur lui a fait perdre 434 euros par mois au titre de sa pension de retraite ; ce préjudice, qui est actuel puisqu'elle a fait valoir ses droits à la retraite, lui ouvre droit à un capital viager de 84 109,20 euros ; le surplus de rémunération perçu par l'effet de l'option d'intégration ne peut pas être déduit de cette somme.

Par des mémoires en défense enregistrés les 9 mars et 14 mai 2020 le centre hospitalier d'Orléans, représenté par Me E..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- la loi n° 2010-75 du 5 juillet 2010 ;

- le décret n° 2012-1466 du 26 décembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

- et les observations de Me G..., représentant le centre hospitalier d'Orléans.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., née le 26 décembre 1958, cadre de santé paramédical titulaire au centre hospitalier d'Orléans, a choisi en 2013 d'intégrer le nouveau corps des cadres de santé paramédicaux de la fonction publique hospitalière créé par le décret du 26 décembre 2012. Toutefois, estimant qu'elle avait fait son choix sur la base d'une simulation erronée de ses droits à pension de retraite transmise par son employeur, elle a demandé par courrier du 22 juillet 2016 à réintégrer son ancien corps, ce qui lui a été refusé. Après avoir lié le contentieux par un courrier du 23 décembre 2016, Mme A... a saisi le tribunal administratif d'Orléans d'une demande tendant à titre principal à ce que son intégration dans le nouveau corps des cadres de santé paramédicaux soit annulée et son option révoquée et, à titre subsidiaire, à ce que le centre hospitalier d'Orléans soit condamné à lui verser la somme de 103 394 euros en réparation du préjudice financier que lui a causé cette intégration. Par un jugement du 5 février 2019, le tribunal a rejeté sa requête. Mme A... qui, dans le dernier état de ses écritures, ne conteste plus qu'il n'était pas possible de revenir sur son choix de carrière, relève appel de ce jugement en tant seulement qu'il n'a pas fait droit à sa demande indemnitaire, ramenée à la somme de

84 109,20 euros.

Sur la responsabilité du centre hospitalier :

2. Il résulte de l'instruction que Mme A... recherche la responsabilité pour faute de son employeur, le centre hospitalier d'Orléans, pour lui avoir transmis une simulation erronée de ses droits à pension qui ne lui a pas permis d'exercer son option en toute connaissance de cause. Malgré la maladresse de ses écritures, et contrairement à ce que soutient le centre hospitalier d'Orléans en défense, elle ne recherche donc pas, en tout état de cause, une responsabilité contractuelle de son employeur qui serait dépourvue de tout fondement.

3. Il résulte également de l'instruction et il n'est pas contesté que la simulation transmise à Mme A... en 2013 était erronée, dès lors qu'elle ne prenait pas en compte les nouvelles dispositions relatives au départ anticipé à la retraite des mères d'au moins trois enfants totalisant plus de quinze années de service effectif qui prévoyaient l'application d'une décote de 17,50 %. En transmettant à Mme A... cette simulation sans en vérifier la justesse, et alors même que l'erreur qu'elle comportait ne lui était pas imputable mais résultait d'une mauvaise configuration du simulateur de la caisse de retraite, le centre hospitalier d'Orléans a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de son agent. Toutefois, en s'abstenant également de procéder à cette vérification alors que les documents transmis mentionnaient des risques d'erreur, Mme A... a commis elle aussi une faute de nature à atténuer, pour moitié, la responsabilité du centre hospitalier d'Orléans.

Sur le lien de causalité :

4. Il résulte de l'instruction que Mme A... a fait le choix d'intégrer le nouveau corps des cadres de santé paramédicaux en fonction de la simulation erronée qui lui a été transmise en 2013 et qui lui permettait de croire qu'elle pourrait faire valoir ses droits à une retraite anticipée sans décote dans l'année de ses 60 ans. Le centre hospitalier d'Orléans n'est donc pas fondé à soutenir que la faute qu'il a commise en lui transmettant ce document ne serait pas en lien direct avec le choix fait par Mme A... et le préjudice financier en résultant.

Sur le préjudice :

5. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que l'indemnité à laquelle peut prétendre

Mme A... correspond à 50% des revenus de toute nature dont elle a été privée en raison de son intégration dans le nouveau corps des cadres de santé paramédicaux à compter du 29 décembre 2012. Sur la base des informations communiquées par le centre hospitalier d'Orléans et non sérieusement contestées par la requérante, celle-ci a perdu la somme de 303 euros nets par mois, soit 3 636 euros par an, au titre de la pension de retraite qui lui est versée depuis le 1er juillet 2019. Jusqu'à la date du présent arrêt, son préjudice s'élève donc à la somme de 2 878,50 euros (303 euros x 19 x 50%). Pour l'avenir et par application d'un coefficient de 25,268 issu du barème 2020 de la Gazette du Palais, correspondant à une personne âgée de 62 ans à la date du présent arrêt, son préjudice s'élève à la somme de 45 937,22 euros (3 636 euros x 25,268 x 50%). Cela représente donc un total de 48 815,72 euros. Toutefois, le centre hospitalier fait valoir à juste titre que Mme A... a bénéficié entre le 29 décembre 2012 et le 30 juin 2019 d'un avantage salarial lié au nouveau statut pour lequel elle a opté et dont le montant total s'élève à 11 827,46 euros, somme qu'il y a lieu de déduire des 48 815,72 euros mentionnés ci-dessus. Par suite, le préjudice indemnisable s'établit à la somme de 36 988,26 euros.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté les conclusions indemnitaires de sa demande.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme A..., qui n'est pas la partie perdante à l'instance, verse au centre hospitalier d'Orléans la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de ce centre hospitalier la somme de 1 500 euros à verser au même titre à Mme A....

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1700594 du tribunal administratif d'Orléans du 5 février 2019 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions indemnitaires de Mme A....

Article 2 : Le centre hospitalier d'Orléans est condamné à verser à Mme A... la somme de 36 988,26 euros.

Article 3 : Le centre hospitalier d'Orléans versera à Mme A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions présentées par le centre hospitalier d'Orléans au même titre sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... A... et au centre hospitalier d'Orléans.

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- Mme D..., présidente assesseure,

- M. C..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 février 2021.

Le rapporteur

E. C...Le président

I. PerrotLe greffier

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT01290


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT01290
Date de la décision : 05/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Eric BERTHON
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SELARL SACAZE - GONTIER

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-02-05;19nt01290 ?
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